« J’ai aussi reçu un autre coup de téléphone : d’Alfred... Vous saviez que Rémy Dorval avait été retrouvé sur la voie hier après-midi, entre Reims et Rethel ? Mort, bien entendu. »
Atterré, Jacques comprend que l’histoire qu’il allait raconter à Patrick a bien peu de chances de passer, même avec l’appui de Flora. D’ailleurs Flora continuera-t-elle à le soutenir quand elle aura appris la nouvelle ? Sentir que son désarroi lui donne l’air coupable, quoiqu’il puisse dire, ne fait qu’augmenter sa confusion et le rendre davantage suspect. Il faut dire la vérité, tout de suite ; il a les moyens de la prouver : l’enterrement de la tante Berthe, le curé, on peut aisément vérifier. Mais sous le coup de la révélation il murmure, incrédule :
« Un accident ? »
Patrick ne rit pas.
« Je ne connaissais pas Dorval, mais si j’en crois Alfred il n’était pas du genre à sauter tout seul d’un train en pleine vitesse. »
Jacques entrevoit la seule chance qu’il a de s’en sortir.
« Les deux types de la gare ?
— Peut-être... Vous les aviez repérés, non ?
— Je ne les ai jamais vus, je vous assure, c’est un malentendu. Je vous ai peut-être laissé croire... »
Mais Patrick ne lui permet pas d’achever.
« Qui êtes-vous ? »
Il ne le quitte pas des yeux et Jacques n’aperçoit pas tout de suite le petit automatique nickelé de la veille qu’il tient braqué sur lui. Il voudrait lever les mains comme on le voit dans les films, mais cela c’est justement dans les films et lui reste paralysé, les bras ballants le long du corps.
« Je m’appelle Jacques Dorival, parvient-il à articuler d’une voix ferme, mais je n’ai rien à voir dans tout cela. Je suis architecte.