Etienne Dinet, peintre orientaliste du 19e siècle, mérite particulièrement que l'on s'attarde sur son cas. Entre les différents rejets et engouements dont il a pu être l'objet, on devine le potentiel contenu par son oeuvre et son parcours dans la réalisation d'un essai biographique qui saura attiser la curiosité.
En 1884,
Etienne Dinet découvre le sud algérien dans la région de Bou-Saâda. Quinze ans plus tard, il s'y installe définitivement. Il se convertit à l'islam et prend le prénom de Nasr-Eddine. Son amour pour l'Orient est sincère, et son oeuvre ne cessera de s'attacher à la représentation de cette terre qu'il adore et qui l'aura transformé.
Dans son essai biographique sur le peintre,
Naïma Rachdi décrit avant tout les principales phases qui ont défini la réception de l'oeuvre de Dinet auprès du public (qu'il s'agisse d'amateurs ou d'experts, en provenance de l'Orient ou de l'Occident). La démarche de Dinet et ses méthodes de travail sont survolées, et évoquées seulement lorsqu'il est question de juger ou non l'honnêteté de la démarche du peintre dans sa représentation d'un Orient idéalisé. En effet, les principales questions qui opposent les aficionados du peintre à ses détracteurs concernent le caractère fantasmé de la plupart de ses oeuvres. Ces peintures magiques, qui semblent sorties tout droit du conte des Milles et Unes nuits, sont-elles le symbole d'un Occident qui cherche à asseoir sa supériorité culturelle sur un peuple que l'on s'imagine aussi pur et innocent qu'un enfant, ou le regard rempli d'amour d'un peintre pour sa patrie de coeur ? Que penser de l'absence de la représentation des troupes coloniales dans ces peintures ? N'est-ce pas une façon de faire oublier la réalité politique de l'Orient, d'éviter de remettre en question un contexte défavorable pour l'Occident ?
Ces questions intéressantes ne trouveront pas de réponse absolue dans le livre de Rachdi, et c'est tout en sa faveur. A chacun de se forger son opinion, et de prendre en compte les différents points de vue qui ont émané sur ce sujet au cours des siècles passés.
Là où la déception se fait davantage ressentir, c'est dans la brièveté du développement des chapitres. Il semblerait que tout le monde –ou presque- aurait pu écrire le livre de Rachdi, à condition de détenir les sources nécessaires. En effet, la moitié de l'essai ne consiste en rien de plus qu'en l'extrait de nombreux passages de la biographie du peintre réalisée par sa soeur, Jeanne Dinet-Rollince. On a parfois l'impression de lire un abrégé de cette biographie. L'expérience est frustrante –il aurait mieux valu lire directement les écrits de Jeanne Dinet-Rollince.
Au milieu du livre, des illustrations de certains tableaux d'
Etienne Dinet sont rassemblées sur papier glacé. le format du livre ne les présente pas à leur avantage mais donnera un bon aperçu des oeuvres du peintre, pour ceux qui ne les connaissaient pas encore. En revanche, rien ne justifie le choix de telles peintures par rapport à telles autres. Celles qui sont présentes ne sont pas évoquées par
Naïma Rachdi et d'autres, qui font l'objet d'un ou deux paragraphes de son essai, ne sont pas représentées dans le fascicule central.
Cet essai permettra donc éventuellement à ceux qui ne connaissent pas Dinet de se faire un aperçu rapide de son oeuvre et des controverses qu'elle aura suscitées. Mais là encore, la matière sera certainement insuffisante. L'approfondissement se fera au-delà de l'essai de
Naïma Rachdi, pour ceux qui auront été séduits un minimum par la présentation qu'elle aura brossée du peintre.
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