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EAN : 9782912667892
176 pages
Finitude (18/03/2011)
4.53/5   18 notes
Résumé :

Comment peut-on appeler des textes courts qui " ne s'ajustent véritablement à aucun genre, car ce ne sont pas des poèmes en prose, ni les pages d'un journal intime, ni des notes destinées à un développement ultérieur " ? Julio Ramon Ribeyro décide de les appeler proses apatrides car " il leur manque un territoire littéraire qui leur soit propre ". Ces deux cents textes, parfaits exemples de son art du fragment,... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (5) Ajouter une critique
Julio Ramón Ribeyro est un observateur solitaire. Assis à la terrasse d'un café ou accoudé à son balcon parisien, il contemple le monde. Souvent ce monde l'amuse. Mais parfois ce monde le déçoit. Alors il s'en détourne et parle avec son chat.
"Proses apatrides" est un ensemble de 200 textes, très courts, écrits sur plusieurs décennies, des années 50 aux années 80. Ce sont de petits fragments de vie colorés, comme des instantanés (une conversation avec sa concierge, un voyage en métro), auxquels se mêlent des réflexions plus personnelles, plus profondes. On rit souvent et on désespère parfois en lisant ces "Proses apatrides". Dès le début, les textes se teintent de mélancolie, un "desengaño" qui va s'accentuer tout au long du recueil. Les derniers fragments, écrits alors que Julio Ramón Ribeyro est malade et vieillissant sont bouleversants. Au fil de ma lecture, j'ai pensé à Cioran, à Montaigne, à La Bruyère et ses fameux caractères, à Paul de Roux et à d'autres encore. Mais en refermant ces "Proses apatrides", je me suis dit que je venais de lire un livre qui ne ressemble à aucun autre. Comment mettre une étiquette sur une oeuvre qui est à la fois manuel de philosophie, journal et recueil de poésie? 
"...ce que j'ai écrit a été une tentative pour ordonner la vie et me l'expliquer, tentative vaine qui a abouti à l'élaboration d'un inventaire d'énigmes." écrira-t-il dans le fragment 199.
Chronique douce-amère et désenchantée d'une vie qui nous échappe, ces "Proses apatrides" peuvent nous conduire en de sombres contrées intérieures. L'antidote se trouve au fragment 200:
"La seule manière de continuer à vivre est de maintenir tendue la corde de notre esprit, l'arc bandé, en visant le futur." 
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A la fois réflexion philosophique et littéraire, d'une impeccable facture, ces textes courts de Julio Ramon Ribeyro sont éblouissants, élaborés autour d'une structure à la fois harmonieuse et solide, d'une forme aussi percutante que sobre, interrogeant le sens de la vie et celui de la création.
Ici, pas de fiction. L'auteur intériorise son observation du réel et joue habilement de la psychologie individuelle, peuplant ses textes de personnages ou d'objets aussi dégradés que leur environnement, où l'idéalisme s'absente au profit de la frustration, dans un scepticisme ou un fatalisme souvent teinté d'humour noir.

Le langage pur, sincère, ni ostentatoire ni faussement érudit, est inouï d'élégance et de fulgurance.
Entre livre de sagesse, interrogation d'esthète et cadeau surprise, Julio Ramon Ribeyro fait d'une pensée parcellaire un livre total.
Aucun genre littéraire ne peut s'emparer de ces singulières Proses apatrides. Proses fragmentaires fugaces, ironiques, mélancoliques, méditatives, cinglantes : les réunir est pour l'auteur le meilleur moyen de les extraire de leur solitude comme de la sienne.
Lien : https://tandisquemoiquatrenu..
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Ce livre est l'un des plus beaux que j'ai pu lire cette année. Il rassemble 200 textes courts qui sont autant des réflexions sur la littérature, sur la vie de tous les jours, sur les relations homme-femme... Il ne s'agit ni d'un roman ni de nouvelles. Ces proses sont "apatrides" car elles ne relèvent pas d'un genre particulier.

Ces pensées ont souvent été mûries pendant plusieurs décennies et nous sont livrées dans une langue délicieuse. Ribeyro en évoquant des instants fugaces parvient à toucher l'essentiel. Les grands auteurs arrivent à vous donner des "nouvelles de vous-même". Ils arrivent à mettre en mot des pensées ou des préoccupations que vous pouviez avoir de façon imprécises et ils les évoquent en faisant voler en éclat la prison des mots.

Une découverte!
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J'aime les pensées fulgurantes, elliptiques, syncopées, celles qui avancent par brusques embardées et secrètes épiphanies. Composé de fragments, d'aphorismes et de brefs récits, Proses apatrides, du péruvien Julio Ramon Ribeyro,(1929-1994), est un livre d'une poésie impérieuse et singulière. L'auteur alterne réflexions sur les mystérieux messages de son chat ou le triste aspect de “ces plantes en pot rachitiques qui semblent avoir eu des coiffeurs pour jardiniers”, anecdotes savoureuses et portraits cinglants… Au fil des pages affleure pourtant la mélodie des regrets, des routes manquées, de la vie qui file entre les doigts. Chez ce moraliste subtil, la légèreté est la politesse de la mélancolie. Un autoportrait en creux d'une rare élégance.
Lien : http://horstemps.blog.lemond..
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Ce sont 200 paragraphes fragmentaires , assez courts , écrits sur une période de 30 ans, de une acuité, d'une profondeur, d'une sensibilité presque douloureuses et très mélancoliques. Il se dégage une tristesse, une ironie vectrice d'intelligence, un pessimisme existentiel qui laissent le coeur lacéré et l'âme à vif. On pourrait dire que ces textes fragmentaires répandent 200 éclats d'un miroir que l'on aurait brisé. Julio Ramón Ribeyro se proclamait un hédoniste raté. le titre de ce livre figure aujourd'hui sur l' épitaphe de sa tombe.
Lien : http://pasiondelalectura.wor..
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Citations et extraits (16) Voir plus Ajouter une citation
Nous vivons dans un monde ambigu, les mots ne veulent rien dire, les idées sont des chèques sans provision, les valeurs sont dépourvues de valeur, les personnes sont impénétrables, les faits un fatras de contradictions, la vérité une chimère et la réalité un phénomène si diffus qu’il est difficile de la distinguer du rêve, de la fantaisie ou de l’hallucination. Le doute, qui est la marque de l’intelligence, est également la tare la plus abominable de mon caractère. Il m’a fait voir et ne pas voir, agir et ne pas agir, a empêché en moi la formation de convictions durables, a tué jusqu’à la passion et m’a finalement donné du monde l’image d’un tourbillon où se noient les fantômes des jours, sans rien laisser d’autre que des bribes d’événements fous et des gesticulations sans cause ni finalité.
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Que de livres, mon Dieu, et combien nous manque le temps et parfois l'envie de les lire ! Ma propre bibliothèque, où autrefois pas un livre n'entrait sans avoir au préalable été lu et digéré, s'encombre peu à peu de livres parasites, qui souvent y arrivent sans qu'on sache comment, et qui, par un phénomène d'aimantation et d'agglutination, contribuent à élever la montagne de l'illisible -- et, au milieu de ces livres, perdus, ceux que j'ai moi-même écrits. Je ne dis pas dans cent ans, mais dans dix ans, dans vingt ans, que restera-t-il le tout cela? Peut-être seulement les auteurs qui viennent de très loin, la douzaine de classiques qui traversent les siècles, bien souvent sans être beaucoup lus, mais vaillants et vigoureux, par une sorte d’impulsion élémentaire ou de droit acquis. Les livres de Camus, de Gide, qui voilà à peine deux décennies étaient lus avec tant de passion, quel intérêt ont-ils à présent, alors même qu'ils furent écrits avec tant d'amour et d'efforts? Pourquoi dans cent ans continuera-t-on à lire Quevedo et pas Jean-Paul Sartre? Pourquoi François Villon et pas Carlos Fuentes? Que faut-il donc mettre dans une œuvre pour durer? On dirait que la gloire littéraire est une loterie et la survie artistique une énigme. Et malgré cela on continue à écrire, à publier, à lire, à gloser. Entrer dans une librairie est effrayant et paralysant pour n'importe quel écrivain, c'est comme l'antichambre de l'oubli: dans ses niches de bois, déjà les livres s’apprêtent à sombrer dans un sommeil définitif, souvent même sans avoir vécu. Quel est cet empereur chinois qui détruisit l'alphabet et toute trace d'écriture? N'est-ce pas Erostrate qui incendia la bibliothèque d'Alexandrie? Ce qui pourrait peut-être nous redonner le goût de la lecture, ce serait de détruire tout ce qui a été écrit et de repartir, allégrement à zéro.
(Chap 1)
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Qu'il est facile de confondre culture et érudition! En vérité, la culture ne dépend pas de l'accumulation de connaissances, même dans des domaines variés, mais de l'agencement de ces connaissances dans notre mémoire et de leur présence dans notre comportement. Les connaissances d'un homme cultivé peuvent ne pas être très nombreuses, mais elles sont toujours cohérentes, en harmonie, et surtout, en relation les unes avec les autres. Chez l'homme érudit, les connaissances semblent emmagasinées dans des espaces cloisonnés. Chez l'homme cultivé, elles sont réparties conformément à un ordre intérieur qui rend possible leur échange et leur fructification. Ses lectures, ses expériences sont en fermentation et engendrent continuellement de nouvelles richesses, tel un compte à intérêt. L'érudit, comme l'avare, conserve son patrimoine dans un bas de laine où il n'y a de place que pour la rouille et la répétition. Dans le premier cas, la connaissance engendre la connaissance. Dans le second la connaissance s'ajoute à la connaissance. Un homme qui connaît sur le bout des doigts tout le théâtre de Beaumarchais est un érudit, mais cultivé est l'homme qui, n'ayant lu que le Mariage de Figaro, a conscience du rapport qui existe entre cette œuvre et la Révolution Française ou entre son auteur et les intellectuels de notre époque. C'est précisément pourquoi tel membre d'une tribu primitive qui possède le monde en dix notions de base est plus cultivé que le spécialiste d'art sacré byzantin incapable de faire cuire un œuf.
(Chap 21)
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Tombée du jour, la maison solitaire, je suis sorti dans le jardin. La treille exsangue sur la tonnelle. Les pousses grimpant le long du mur. Les dahlias bordant la pelouse. Les vieux cyprès, mal entretenus, inégaux, avec des toiles d'araignée entre les branches. Le magnolia solitaire. L'ombre des eucalyptus, dans leur feuillage chante une tourterelle. Une étoile, deux, dans le ciel encore clair. Les cloches du Parc, au loin. Sur le gazon, des traces jaunes laissées par d'anciennes allées et venues. Légère brise automnale. Paix, plénitude. Et toi qui n'es pas là, toi qui n'es plus là!
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Observation banale qui m'a laissé bouche bée au point d'imaginer qu'elle doit contenir une escroquerie impardonnable. Je suis parti du principe que j'ai deux parents, quatre grands-parents, huit arrière-grands-parents, seize arrière-arrière-grands-parents. Pourquoi ne pas continuer? Papier et crayon en main, j'ai fait le calcul. En 1780, j'avais 64 ancêtres (en comptant 30 ans par génération), en 1480, j'en avais 65 536, en 1240, j'en avais 16713216, en 1060, j'en avais 1069645824. Et je n'ai pas continué parce que je touchais déjà à l'absurde, à la plus grande mystification de l'histoire: tout simplement parce qu'en 1060, la population mondiale n'atteignait pas deux milliards d'habitants. Quelle explication à tout cela? L'inceste et la polygamie peuvent en partie réduire ces chiffres, mais pas au point d'annuler leur inacceptable énormité. Mystère. Paradoxe: chaque habitant du globe descend de tous les habitants du globe ayant vécu dans le passé (cône inversé), mais d'un habitant du globe et de son conjoint ayant vécu dans le passé descendent tous les habitants actuels (cône normal).
(Chap 63)
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Videos de Julio Ramon Ribeyro (2) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Julio Ramon Ribeyro
« […] « La poésie est parole dans le temps », Machado (1875-1939) n'a pas cessé de l'affirmer. Encore fallait-il que le temps ne se résumât pas à la pression immobile du passé sur la circonstance, ni la parole au simple ressassement de l'irrémédiable. Certes Machado […] a éprouvé une manière d'attirance étrange devant la négativité et la noirceur du destin de l'Espagne. Il ne s'y est point abandonné. Ou plutôt, avec une véhémence souvent proche du désespoir, une tendresse mêlée de répulsion et de haine, il a tenté, longuement, d'en sonder les abîmes. […] La poésie - Machado, seul de sa génération, s'en persuade - n'a plus pour tâche de répertorier pieusement les ruines ; elle se doit d'inventer le futur, cette dimension héroïque de la durée que les Espagnols ont désappris dans leur coeur, dans leur chair, dans leur langue depuis les siècles révolus de la Reconquête. […] […] Nostalgique de l'Inaltérable, à la poursuite du mouvant… Par son inachèvement même, dans son échec à s'identifier à l'Autre, la poésie d'Antonio Machado atteste, et plus fortement que certaines oeuvres mieux accomplies, la permanence et la précarité d'un chemin. Hantée par le néant, elle se refuse au constat de l'accord impossible. Prisonnière du doute et de la dispersion, elle prononce les mots d'une reconnaissance. Elle déclare la tâche indéfinie de l'homme, la même soif à partager. » (Claude Esteban.)
« […] “À combien estimez-vous ce que vous offrez en échange de notre sympathie et de nos éloges ? » Je répondrai brièvement. En valeur absolue, mon oeuvre doit en avoir bien peu, en admettant qu'elle en ait ; mais je crois - et c'est en cela que consiste sa valeur relative - avoir contribué avec elle, et en même temps que d'autres poètes de ma génération, à l'émondage de branches superflues dans l'arbre de la lyrique espagnole, et avoir travaillé avec un amour sincère pour de futurs et plus robustes printemps. » (Antonio Machado, Pour « Pages choisies », Baeza, 20 avril 1917.)
« Mystérieux, silencieux, sans cesse il allait et venait. Son regard était si profond qu'on le pouvait à peine voir. Quand il parlait, il avait un accent timide et hautain. Et l'on voyait presque toujours brûler le feu de ses pensées. Il était lumineux, profond, car il était de bonne foi. Il aurait pu être berger de mille lions et d'agneaux à la fois. Il eût gouverné les tempêtes ou porté un rayon de miel. Il chantait en des vers profonds, dont il possédait le secret, les merveilles de la vie ou de l'amour ou du plaisir. Monté sur un Pégase étrange il partit un jour en quête d'impossible. Je prie mes dieux pour Antonio, qu'ils le gardent toujours. Amen. » (Rubén Darío, Oraison pour Antonio Machado)
0:00 - Titre 0:06 - Solitudes, VI 3:52 - du chemin, XXII 4:38 - Chanson, XLI 5:39 - Humour, fantaisies, notes, LIX 7:06 - Galeries, LXXVIII 7:54 - Varia, XCV, Couplets mondains 9:38 - Champs de Castille, CXXXVI, Proverbes et chansons, XXIX 10:14 - Champs de Castille, idem, XLIII 10:29 - Prologues. Art poétique. Pour « Champs de Castille » 12:17 - Générique
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