C'est un fait, l'exponentielle fait peur. Qu'on ne s'y trompe pas : dans cette affirmation, c'est bien de l'objet mathématique qu'il est question, et non seulement de La peur exponentielle son ombre portée qu'est son sens ordinaire, vague, de grande vitesse. Pourquoi s'encombrer de technique?
objectera-t-on. L'entomologie nous enseigne que les fourmis ne sont pas des insectes sans qu'il soit pertinent pour autant de distinguer sur cette base la peur des premières de celle des seconds. Ne faudrait-il pas, de même,s'en tenir au ressenti courant sur le sens de l' exponentielle pour en étudier le caractère anxiogène ? Oui, la peur de la croissance, la peur de la rapidité, existent aussi hors de tout référent mathématique. C'est pourtant dans son sens savant que nous allons envisager l'exponentielle,car notre but est ici d'étudier une peur qui présente la remarquable spécificité de s'appuyer sur des discours épris de rationalité. C'est à une peur scientifiquement construite et valorisée que nous avons affaire, cas unique
par l'ampleur et la variété de ses déclinaisons.
L'une des caractéristiques de la notion d' exponentielle est sa grande richesse, qui se dévoile même lorsqu'on s'en tient à des considérations très simples. Il est souhaitable qu'à la bien triste peur qui lui est attachée succède au plus vite un intérêt plus joyeux, lot naturel des merveilles de la science.