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Myriam Bellehigue (Traducteur)
EAN : 9782742796267
318 pages
Actes Sud (06/04/2011)
3.64/5   48 notes
Résumé :
En 1907, séduit par la tranquillité des hauts plateaux où fut édifiée la petite ville de Songarh, Amulya décide de quitter la touffeur de Calcutta et d’établir sa fabrique de plantes médicinales en lisère de forêts mystérieuses où rôdent des léopards. Ancien centre de pèlerinage bouddhique, Songarh est devenue un centre minier aux mains des colons britanniques, et la femme d’Amulya, isolée parmi les populations tribales et les Anglais qui côtoient les Indiens sans j... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (15) Voir plus Ajouter une critique
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Peut-être éprouve-vous parfois les mêmes sentiments : lorsque la rencontre avec un écrivain a été fabuleuse lors de la première lecture, j'ai toujours beaucoup d'appréhension pour la suivante. Bien sûr, elle peut être dans le même registre et susciter des émotions tout aussi bouleversantes que la première, mais elle peut aussi s'avérer moins vibrante...

J'avais particulièrement apprécié la lecture de "Toutes ces vies jamais vécues" et très envie de "replonger" dans l'écriture poétique d'Anuradha Roy, mais comme vous l'avez deviné, je le craignais aussi.
"Un atlas de l'impossible" m'aura autant emporté que le livre précédent, j'ai retrouvé l'écriture riche au point de susciter beaucoup d'images et la poésie qui m'avaient envoutée, les thèmes qui me sont chers comme les difficultés des relations sociales, un récit qui enseigne, une présence permanente de la nature, des descriptions de botanique et la présence de chiens, "personnages secondaires" mais attachants et qui habitent encore les pensées, une fois le livre terminé.

Un récit en trois parties pour trois générations, à travers aussi l'évocation de trois lieux de vie : trois maisons mais aussi trois jardins pour une famille touchée par les deuils, habitée par les absences, guettée par une forme de folie.
Un récit qui chemine autour d'un personnage qui nous guide dans les méandres des vies et nous laisse seul maître de nos émotions en ce fait qu'il est orphelin, sans religion et sans caste donc sans à-priori, sans déterminisme aucun dans ce pays qui vit sous un joug britannique et dont le Nord s'embrase pour finalement aboutir à un tracé nouveau des frontières et au plus grand exode de population que le monde ait connu en terme de nombre de personnes déplacées. du début du siècle à la partition, la cohabitation de ces hommes et femmes de Cultures différentes, parfois ennemis, parfois liés malgré les différences de culte ou de rang social pour nous parler de leurs existences mais aussi des balbutiements d'un pays qui se morcelle, tout en vivant un chaos intérieur.
Des vies comme autant de barques ballottées dans le courant des événements. Et si comme l'eau stagnante du « fleuve » qui décide un jour d'envahir les berges qu'on imaginait émergées à jamais, les affrontements, les divergences, les tueries, les cruautés s'ils paraissent éloignés, sont pourtant si proches à travers la religion des uns, les coutumes d'un autre que le souffle de l'intolérance devient palpable.
C'est aussi le roman des regrets, de la sagesse qu'amènent les années, du désir de revenir vers une certaine forme de protection que procure le regard candide de l'enfant.

C'est un livre dans lequel on apprend, l'Histoire du pays se distille au gré des événements dans la famille, au gré des rencontres, on découvre cette flore luxuriante toujours décrite avec beaucoup de détails, toujours ces couleurs chatoyantes, les mots du texte nous impriment les nuances sur la rétine, c'est un livre dans lequel on s'émeut : deuil et absence sont lourds à porter , la fuite pour que le chagrin n'écrase pas les êtres devient seule solution. La misère d'un pays qui côtoie des richesses que seuls un petit nombre détient, les rapports sociaux difficiles entre les ethnies et ceux issus de différents rangs sociaux.

Et puis, c'est un livre pour s'évader, pour rêver, puisque c'est bien le propre de la lecture de nous faire voyager, en pensées et d'un continent à l'autre. La luxuriance de la végétation, le chatoiement des couleurs, les parfums des fleurs parviennent jusqu'au lecteur quand ce n'est pas les plats de la cuisine indienne que ce dernier entraperçoit devant lui, tout en respirant les fumets qui l'invitent à partager les mets épicés et savoureux.
C'est un roman de perceptions au-delà de la vies des personnages, un roman qui sait appeler les sens pour faire avec les mots, une atmosphère qui dit l'âme d'un pays , l'âme d'une Culture à travers son Histoire.

Il en reste de magnifiques descriptions en tête, l'impression d'en avoir appris un peu plus, le désir d'ouvrir un autre livre pour retrouver cette atmosphère si particulière de cette Culture riche et fascinante. On quitte des personnages attachants, persuadés, que ceux que nous rencontrerons, dans le prochain roman lu de cette écrivaine, nous procureront d'aussi intenses émotions.

(Août 2021)
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“ - Un véritable atlas … dit-il en suivant du doigt les grandes lignes. Des rivières de désir, des montagnes d'ambition!

- (...) C'est bien ce que dit aussi votre main, cher Monsieur. Votre main n'est rien d'autre qu'un atlas de désirs inassouvis …

Il tapota ma ligne de vie et répéta:
- Rien d'autre que de l'impossible … “

L'Inde est un pays de contrastes qui m'a toujours attiré. Je lis énormément de livres qui s'y déroulent et qui concernent tous ses habitants. Voici que je dégote ce merveilleux roman d'une auteure que je n'ai jamais lu …. J'adore ! Une grande saga familiale qui se déroule pendant trois générations … de la période de colonisation à l'indépendance de l'Inde.

Tout commence par le départ de Calcutta, du patriarche Amulya et de sa femme Kananbala, pour cette petite ville de Songarh aux porte de la jungle … mariages de leur fils, une orpheline et un orphelin, système de castes, l'amour, entrecoupé de moments de l'Histoire, etc.

Beau, triste, joyeux, un excellent roman (une vraie brique) de 448 pages à savourer !
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Avec Un atlas de l'impossible, un nom de plus est à ajouter à la longue liste des écrivains indiens contemporains, conteurs hors-pair de leur pays, dont l'histoire et la géographie sont équivalentes à celle d'un continent. Anuradha Roy a signé un premier roman superbe, tissé de toutes les contradictions indiennes, ses odeurs, sa beauté et sa laideur, sa richesse et sa pauvreté, ses religions, ses castes ... le livre est une saga familiale, qui débute en 1907 et s'achève durant les années 50, explorant l'espace-temps en trois grands chapitres où une nuée de personnages apparaît puis disparait, certains, au fil des pages, passant de l'arrière-plan à l'avant-scène, grandissant au rythme d'un pays secoué par sa propre histoire. Un atlas de l'impossible, moins ambitieux que beaucoup de romans-fleuves indiens, s'attache surtout à l'intime, avec des portraits d'hommes et de femmes inoubliables, et surtout à l'esprit des lieux, deux maisons y jouant le premier rôle, alors que leur munificence devient délabrement, à mesure que les souvenirs remontent à la surface, comme charriés par une nouvelle mousson. La dernière partie du livre est purement romantique, une histoire d'amour sublimée par l'absence et les regrets. Les amants séparés se retrouveront-ils dans la demeure où une femme est morte, bien des années plus tôt, au cours d'une inondation ? C'est le dernier rebondissement de ce livre magique, un tapis volant qui déroule, dans un style soyeux et élégant, un demi-siècle d'histoire(s).
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"Il scruta longuement ma paume et je la regardai en même temps que lui, comme pour la première fois. Elle était parcourue de grandes lignes désordonnées qui formaient des croix ou dessinaient de grandes lignes transversales qui la coupaient en deux. Je sais que certaines paumes sont pratiquement dépourvues de plis ; ce n' était pas du tout le cas de la mienne. J'attendis le verdict.
-Un véritable atlas... dit-il en suivant du doigt les grandes lignes. Des rivières de désir, des montagnes d'ambition !
-Je voulais...enfin, j'espérais que...
-Je voulais, j'espérais..., répéta l'astrologue en m'imitant. C'est bien ce que dit aussi votre main, cher Monsieur. Votre main n'est rien d'autre qu'un atlas de désirs inassouvis...
Il tapota ma ligne de vie et répéta :
-Rien d'autre que de l'impossible..."
Il est amusant de se dire que l'histoire de l'Inde tient au creux d'une main. Et pourtant, à travers cette belle histoire d'une famille sur plusieurs générations, c'est bien toute l'histoire de l'Inde qui est décrite par petites touches en quelques 313 pages, depuis le départ des anglais jusqu'à sa partition. Anudharadha Roy a le don de nous plonger dans une Inde moderne et vivante, avec le poids de ses traditions, ses parfums, sa nourriture, dans un lent mouvement qui est celui de la vie même et qui invite à la patience et à la contemplation. La psychologie indienne est finement exprimée dans chacun des personnages, loin des clichés, nous les rendant très proches et par là-même très humains. Un beau voyage à conseiller à qui veut se dépayser sans tomber dans la niaiserie ou dans l'ennui.
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1907.L'Inde bourgeoise qui s'agite, soupire,s'ennuie,s'affronte,s'aime dans et autour de la maison d'Amulya, chef d'entreprise d'une usine de plantes médicinale, et l'Inde des domestiques, que cette famille côtoie, soulignent le fossé des différences de castes difficile à franchir.
Anuradha Roy, journaliste à présent éditeur qui a effectué ses études à Calcutta connait ce pays sur le bout des doigts et ...de la langue puisqu'elle émaille son récit de mots venus d'ailleurs empreints d'exotisme.
Un atlas de l'impossible, premier roman de l'auteur, est une saga qui se déroule sur un demi siècle.Trois générations se succèdent, trois couples et un enfant Mukunda, un bâtard, aux mystérieuses origines, placé au départ dans un orphelinat missionaire par Amulya, puis repris comme domestique, "à la place ambigüe" par la famille, "un écorché vif" dont le destin de rejeté émerge vraiment dans l'amour qu'il porte à Bakul (petite fille d'Amulya,plus préoccuppé par sa réussite que par son épouse Kananbala qui s'ennuie,déparle, déprime; et fille de Nirmal, archéologue, qui passe son temps à fouiller les ruines, sans lier de véritable relation avec elle, et de Shanti morte en couches).
J'avoue avoir été un peu déçue par ces trois générations sur trois cent pages et le manque d'images poétiques pour rêver à cet ailleurs que je ne connais pas.
Si Mukunda est le "héros", son arrivée réelle est un peu tardive.
Quant au meurtre qui se produit chez les voisins, je n'ai pas trop ressenti ses implications dans cette saga puisque le principal témoin Kananbala n'est pas crédible.
Ce roman m'est sans doute passée au dessus, à moins que je ne sois encore trop imprégnée de l'Inde des derniers jours de fastes de l'Empire Britannique où a vécu Selma, la mère de Kénizé Mourad (De la part de la princesse morte) et de l'Inde de Calcutta, décrite par Marguerite Duras dans le vice consul, écartelée entre le luxe sulfureux de l' ambassade de France et les lépreux des jardins de Shalimar.
Une rencontre qui ne s'est pas faite.
Dommage!
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Citations et extraits (7) Voir plus Ajouter une citation
Pouvait-il avouer que c'était au Rajasthan, lors d'un voyage au cœur des vieilles montagnes de la chaîne Aravalli, là où le paysage ocre cédait la place aux jaunes et aux verts flamboyants des champs de moutarde sur lesquels des bougainvillées rose fuchsia tombaient en cascade tels des jets de sang, qu'il s'était enfin senti libéré de la mort de Shanti ? Pouvait-il s'avouer à lui-m^me qu'il s'était doucement senti gagné par une sensation de plénitude, nouvelle et inattendue ? Il avait enfin retrouvé une forme de paix : devant les premiers remparts délabrés des forts rajput, les sourires des chameaux, les cris affolés des paons dans la lumière déclinante du jour, il avait pu observer et écouter le monde sans avoir à s'arracher le cœur.
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Entouré de garçons qui avaient une famille, j'ai ressenti en grandissant un sentiment de liberté : ils étaient confrontés à de très nombreux interdits ; moi pas. Je pouvais me fabriquer moi-même, à ma guise. Je n'avais pas de caste ni de religion ; c'étaient des préoccupations réservées au reste du monde. J'étais libéré du poids des origines ; je ne venais de nulle part, je n'appartenais à personne.
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Les gens ont peur des fantômes dans les vieilles demeures. Moi, je sais que seules les nouvelles habitations sont hantées par les maisons décrépités qu'elles remplacent. Les vieilles maisons ne disparaissent pas. Elles tombent en ruine et sentent le renfermé, mais elles continuent à rôder ; leurs pièces tapissées de toiles d'araignées se nichent dans les coins à angle parfait de cuisines flambant neuves et de salles de bain en marbre ; il subsiste quelque chose de leur jardin et de leurs escaliers dans les cages d'ascenseur. Si cela ne tenait qu'à moi - et ceci en dépit de ma profession - je conserverais les veilles demeures en tout point identiques au souvenir que j'aurais d'elles. Il reviendrait aux termites d'en écrire l'histoire sur les plafonds et sur les murs, leurs sillons irréguliers dessinant la carte d'une éventuelle destruction. Une fois le travail de désintégration accompli par les termites et les maisons retournées à la terre, un cycle toucherait naturellement à sa fin.
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Pendant toutes ces années, j'avais volontairement évité de penser à elle car je savais que je m'exposais à éprouver un chagrin difficile à contenir. Je ne m'autorisais jamais à me remémorer ses traits : son nez retroussé, ses cheveux en bataille, le duvet de ses joues creuses, ses yeux enfin, semblables à deux bassins d'eau douce, qui vous fixaient plus qu'ils ne vous regardaient. J'avais six ans et elle quatre quand nous nous étions rencontrés ; nous ne nous étions plus quittés par la suite.
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La spécialité d'Aangti Babu consistait à acheter de vieilles maisons: celles abandonnées précipitamment par les familles qui avaient dû fuir au moment de la partition, celles que se disputaient des héritiers en conflit , celles occupées par des locataires dont le propriétaire ne voulait plus.
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Videos de Anuradha Roy (2) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Anuradha Roy
LE FESTIVAL AUQUEL VOUS AVEZ [HÉLAS] ÉCHAPPÉ !
Cette année, Oh les beaux jours ! aurait pu prendre une couleur indienne. L'Institut français nous avait proposé d'accueillir des auteurs indiens. Et puis le confinement est arrivé, de #Marseille à #Dehli, et nos échanges n'ont pu hélas aboutir. Nous avons tout de même eu envie de vous faire découvrir la voix d'Anuradha Roy, traduite en français chez Actes Sud.
À lire : Anuradha Roy, Toutes ces vies jamais vécues, Actes Sud, 2020. Traduit de l'anglais (Inde) par Myriam Bellehigue .
http://www.ohlesbeauxjours.fr
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