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EAN : 9782864321293
100 pages
Verdier (01/04/1991)
4/5   1 notes
Résumé :
Peu de temps avant sa mort, Sartre faisait paraître dans Le Nouvel Observateur une série d'entretiens avec Benny Lévy («L'espoir maintenant») qui scandalisèrent tant par leur contenu que par leur ton.
Dix ans plus tard, le moment vint de les donner vraiment à lire. Benny Lévy en proposa alors un nouvel usage.

Dans ce texte «ascétique», grâce à un exceptionnel mouvement de dépouillement, Sartre tente de repenser le commencement : ne faudrait-il ... >Voir plus
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[Incipit.]

L'Espoir maintenant
Entretiens de 1980

1. Au-delà de l'échec

Benny Lévy. - Depuis quelque temps, tu t'interroges sur l'espoir et la désespérance. Ce sont des thèmes que tu n'abordais guère dans tes écrits.

Jean-Paul Sartre. - En tout cas, pas de la même manière. Car j'ai toujours pensé que chacun vit avec de l'espoir, c'est-à-dire croit que quelque chose qu'il a entrepris, ou qui le concerne, ou qui concerne le groupe social auquel il appartient est en train de se réaliser, se réalisera et lui sera favorable à lui comme aux gens qui constituent sa communauté. Je pense que l'espoir fait partie de l'homme; l'action humaine est transcendante, c'est-à-dire qu'elle vise toujours un objet futur à partir du présent où nous la concevons et où nous tentons de la réaliser; elle met sa fin, sa réalisation dans l'avenir; et, dans la manière d'agir, il y a l'espoir, c'est-à-dire le fait même de poser une fin comme devant être réalisée.

B. L. - Tu as certes dit que l'action humaine vise une fin dans l'avenir, mais tu as ajouté, immédiatement après, que cette action était vaine. L'espoir est nécessairement déçu. Entre le garçon de café, un conducteur de peuple - Hitler ou Staline -, un poivrot parisien, le militant révolutionnaire marxiste et Jean-Paul Sartre, entre tous ces gens il y avait, semble-t-il, ceci de commun : que si tous se donnaient bien des fins, tous, tant qu'ils étaient, échouaient.

J.-P. S. - Je n'ai pas exactement dit cela, tu exagères. J'ai dit qu'ils n'atteignaient jamais, en effet, exactement ce qu'ils avaient cherché, qu'il y avait toujours un échec...

B. L. - Tu as affirmé que l'action humaine projette une fin dans l'avenir, mais tu as aussi dit que ce mouvement de la transcendance aboutissait à un échec. Tu nous as décrit, dans "L'Etre et le Néant", une existence qui projetait des fins en pure perte quoique avec un parfait esprit de sérieux. L'homme se donnait des fins, oui, mais au fond, la seule fin qu'il désirait, c'était d'être Dieu, ce que tu appelais être cause de soi. D'où, bien sûr, l'échec.

J.-P. S. - Eh bien, je n'ai pas tout à fait perdu cette idée de l'échec, encore qu'elle soit en contradiction avec l'idée même d'espoir. Il ne faut pas oublier que je ne parlais pas d'espoir au temps de "L'Être et le Néant". Et c'est plus tard que m'est venue peu à peu l'idée de la valeur de l'espoir. Je n'ai jamais envisagé l'espoir comme une illusion lyrique. J'ai toujours considéré, même quand je n'en parlais pas, que c'était une manière de saisir la fin que je me proposais, comme pouvant être réalisée.

B. L. - Tu ne parlais peut-être pas d'espoir, mais tu parlais de désespoir.

J.-P. S. - Oui, je parlais de désespoir, mais, comme je l'ai bien souvent dit, ce n'était pas le contraire de l'espoir. Le désespoir, c'était la croyance que mes fins fondamentales ne pouvaient pas être atteintes et qu'en conséquence il y avait dans la réalité humaine un ratage essentiel. Et, finalement, au temps de "L'Être et le Néant", je ne voyais dans le désespoir qu'une vue lucide de ce qu'était la condition humaine.

B. L. - Tu m'as dit un jour : «J'ai parlé de désespoir, mais c'est de la blague, j'en ai parlé parce qu'on en parlait, parce que c'était la mode : on lisait Kierkegaard.»

J.-P. S. - C'est exact, je n'ai jamais été désespéré pour ma part, ni n'ai envisagé de près ou de loin, le désespoir comme une qualité qui pouvait m'appartenir. Par conséquent, c'était en effet Kierkegaard qui m'influençait beaucoup là-dessus.

B. L. - C'est curieux, puisque tu n'aimes pas vraiment Kierkegaard.
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