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Critique de peloignon


Le Mur, c'est un recueil de cinq nouvelles captivantes, mais en même temps repoussantes, voir répugnantes.
Le Mur est à mon avis la meilleure nouvelle du lot. L'angoissante vanité de la vie et de la mort d'une absurde existence dénuée de sens y est montrée dans tout ce qu'elle peut comporter de visqueux, de poisseux, de désagréablement odorant et de laid. L'ironie de la transposition du sort qui semble peser de manière imminente sur un personnage à un autre par un tour de force arbitraire du destin a quelque chose de vraiment tragique et sublime.
La chambre et Érostate nous entraînent ensuite dans les tourbillons monstrueux de la déraison de l'extérieur et de l'intérieur. On y sent bien le gouffre mystérieux et angoissant que constitue la possibilité de la mort de l'esprit.
L'intimité m'a moins interpellé quelque peu. Les tourments d'une femme dont les besoins sont comblés d'une manière condamnée par une personnalité marquante de son entourage sont toutefois très bien montrés par Sartre. Si on compare avec les nouvelles qui l'entourent, le malaise y est situé dans un horizon franchement superficiel.
Enfin, étant donné le contexte de sa sortie en 1939, la dernière nouvelle, L'enfance d'un chef, où l'adolescent sort de son mal être en grande partie en embrassant l'antisémitisme, me laisse un goût particulièrement acre.
Chacun sait que Sartre contribuera activement à l'hebdomadaire collaborationniste Comoedia et qu'il s'arrangera pour coopérer avec les nazis pour faire jouer Les Mouches en 1943 et Huis Clos en 1944. Si il a tout de même montré subtilement son opposition au régime nazi, ça ne sera pas de manière à risquer de nuire à sa carrière, mais probablement plutôt pour s'assurer de ne pas trop se mouiller afin, justement, de préserver l'impunité au cas où la situation changerait. « Jamais nous n'avons été aussi libres que sous l'occupation allemande » dira Jean-Paul Sartre dans La République du silence. Cet amoralisme narcissique, cette mollesse devant l'horreur, qui ont sans doute contribué à ce qu'il soit nobelisé en 1964, m'ont toujours empêché d'estimer la personne de Sartre malgré ses indéniables qualités de dramaturge.
Bien que les sujets varient, ces variations tournent autour d'une même tonalité de l'existence : le malaise. le malaise devant la mort, puis devant la folie sous deux formes différentes, dans la vie de couple et enfin au cours de l'adolescence.
Autre élément remarquable, la variation de la sexualité du personnage principal alterne d'une nouvelle à l'autre.
Sur le plan littéraire, j'ai vraiment beaucoup apprécié ce recueil que j'ai dévoré très rapidement. C'est vraiment du très bon Sartre.
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