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EAN : 9782070368068
245 pages
Gallimard (08/02/1972)
3.97/5   358 notes
Résumé :
Comme tu tiens à ta pureté, mon petit gars ! Comme tu as peur de te salir les mains. Eh bien, reste pur ! A quoi cela servira-t-il et pourquoi viens-tu parmi nous ?
La pureté, c'est une idée de fakir et de moine. Vous autres, les intellectuels, les anarchistes bourgeois, vous en tirez prétexte pour ne rien faire. Ne rien faire, rester immobile, serrer les coudes contre le corps, porter des gants.
Moi j'ai les mains sales. Jusqu'aux coudes. Je les ai pl... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (57) Voir plus Ajouter une critique
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Hugo est chez Olga. Il vient de sortir de prison, pour le meurtre d'Hoederer. Deux ans plus tôt, il avait été missionné par le parti prolétaire d'Illyrie, auquel appartient également Olga, pour tuer cet homme, soupçonné de vouloir signer un accord avec les autres partis du pays. Mais aujourd'hui les choses ont changé, et Hoederer est un héros de leur cause. La raison officielle de son meurtre est la jalousie, Hugo aurait surpris sa femme Jessica en train d'embrasser l'homme politique.
Olga a pour mission de comprendre l'état d'esprit d'Hugo. S'il est prêt à endosser la fable de la jalousie comme cause de son acte, il sera sauvé. Dans le cas contraire, deux membres du parti prolétaire viendront pour tuer Hugo. Hugo a une heure devant lui, une heure pour évoquer avec Olga ce qu'il s'est passé deux ans auparavant, lorsque, jeune bourgeois cherchant une place pour le parti, il avait été envoyé comme secrétaire particulier auprès de Hoederer.

J'ai lu et relu Les mains sales des dizaines de fois. J'ai découvert cette pièce dramatique en sept tableaux à l'adolescence, à l'âge où les compromis ne sont rien d'autres que de connes promesses, où la pureté des idéaux prime sur la sagesse, où l'intolérance face à l'injustice est totale. Bien sûr, Les mains sales portent sur l'engagement politique. Mais ça n'était pas du tout ce que moi j'en avais retenu.
Peut-on endosser une cause et ses idéaux alors que notre naissance, notre sexe ou notre âge devrait nous amener à en épouser d'autres ? Comment peut-on intégrer cette cause sans toujours être montré du doigt ? Peut-on aimer quelqu'un pour ses qualités et le tuer pour ses principes ? Une cause est-elle idéologique et donc intolérante, ou politique et donc stratégique ? Comment concilie-t-on sa propre vision de la justice à celle des autres ? Voilà ce qui retient mon attention, ce que je prends, moi, de cette pièce de Sartre. On pourra me parler de l'opposition action/idée, de la politique, de "déterminisme" ou de l'existentialisme si cher à l'auteur. Pour moi, Hugo est un pur que personne ne prend au sérieux, pas même sa femme, Jessica. Hoederer, lui, c'est un pragmatique, un de ceux qui font avancer les choses, un de ceux pour qui la fin justifie les moyens, et qui a les mains sales. Chacun a son mérite, a sa place, et le monde a besoin des deux pour tourner plus rond. Mais le monde d'Illyrie de 1943 ne permet pas à de tels êtres si différents de pouvoir se côtoyer dans la paix.
Les personnages de Sartre sont beaux et justes, et les dialogues Hugo-Hoederer sont magnifiques. Je n'ai jamais lu d'autres livres de Sartre ; j'ai essayé, mais ça ne m'a pas convaincu. Mais ces Mains sales, elles, je les ai lues et relues, et je les relirais encore, des fois que j'oublie mes propres réponses aux questions qu'elles soulèvent pour moi !
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Pièce politique où la notion d'engagement, pas seulement politique d'ailleurs, est décortiquée par Sartre qui montre qu'entre l'idée et l'acte il y a un pas, quelquefois de géant. Existentialisme et engagement vont de pair pour l'auteur et il en valorise l'idée dans cette pièce conforme à ses convictions ou à leur absence. du bon Sartre.
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"A quoi ça sert de lutter pour la libération des hommes si on les méprise assez pour leur bourrer le crane? " dit Hugo, un intellectuel, "gosse de riches", membre du parti révolutionnaire d'Illyrie, "petit anarchiste indiscipliné" à Hoederer le chef communiste aux "mains sales" (car magouilleur) qu'il doit tuer (car soupçonné d'allégeance avec le Régent de la droite nationaliste).
Nous voilà deux ans en arrière car cette pièce de théâtre (drame en 7 tableaux) qui débute son tableau 1 en 1945, lors de la remise en liberté d'Hugo (emprisonné pour le meurtre de Hoederer, en fait par jalousie) après deux ans de bonne conduite; se poursuit par sa version des faits relatés à Olga (femme de tête protectrice du parti prolétarien qui doit décider s'il est "récupérable" ou bon à être éliminé). Qu'est-ce qu'une vie? s'interroge-t-on déjà.
Les 5 tableaux suivants se passent donc en 43 chez Hoederer où Hugo s'est fait engager comme secrétaire et hésite à le tuer ("un acte ça va trop vite.Il sort de toi brusquement et tu ne sais pas si c'est parce que tu l'as voulu ou parce que tu n'as pas pu le retenir").
Jean Paul Sartre (philosophe et écrivain du XX° siècle) développe dans ce drame sa théorie existentialiste soumise au culte de l'engagement car pour lui exister c'est s'engager, être dans le monde pour autrui, ainsi qu'il l'affirme dans L'existentialisme est un humanisme: "L'homme n'est rien d'autre que son projet".
Sartre qui parle à travers Hugo, comme tous les intellectuels rêve de "faire de l'action" (il a d'ailleurs toute sa vie été engagé pour des causes telles que le combat en faveur d'Israël lorsque s'est crée l'état hébreu, contre les camps soviétiques, contre les guerres d'Algérie, du Vietnam..etc) et donne sa vision d'un marxisme qui n'a de fin en soi que grâce à l'existentialisme.
Hugo "ma petite abeille" qui a tué par jalousie, (sa femme provocatrice ayant embrassé Hoederer) en refusant la protection d'Olga va réellement revendiquer son crime, s'engager et exister aux dépens de sa vie.
Un drame ardu (trop intellectualisé à mon goût), un cheminement de pensée difficile à suivre et des "mains sales" politiques dont on s'aperçoit qu'elles sont monnaie courante.Mais ça on le savait déjà pas vrai?
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"Que de bavardages, si tu ne veux pas courir de risques, il ne faut pas faire de politique !"

Je redécouvre avec bonheur cette pièce de Sartre, qui jadis m'avait été imposée au cours de français et qui avait suscité de vifs débats. Et il est intéressant de voir comment le temps a modifié mon point de vue …

Dans un pays envahi par les nazis, à la veille de leur chute et de l'invasion par l'armée rouge, deux hommes s'opposent : Hugo, un jeune intellectuel issu de la bourgeoisie, et Hoederer, l'un des chefs du parti révolutionnaire communiste.

C'est le combat entre l'idéaliste qui veut rester pur sans concession et le réaliste qui s'adapte aux circonstances avec le risque de se pervertir, de se perdre. C'est le combat entre l'homme d'idées, l'intellectuel, convaincu de la justesse de ses opinions bien arrêtées et loin de l'homme ordinaire, de la vie quotidienne, et de l'homme d'action, l'homme politique, qui connait la misère des hommes, leur souffrance et leurs angoisses, … Hugo hésite à tuer Hoederer, Hoederer est prêt à protéger (et donc à aimer) Hugo : ces personnages sont complexes, ambigus et non sans paradoxe. Ce qui en fait des hommes de chair qui ne nous laissent pas indifférents.

C'est aussi un livre sur le crime politique et sur l'action politique : les idées peuvent-elles justifier le meurtre d'un homme ? Peut-on tuer de sang froid un homme qu'on a côtoyé ? Qu'est-ce qu'une action politique ? Faut-il chercher l'efficacité en politique ? La fin justifie-t-elle les moyens ? Quel est le rôle des idées dans la politique ?

Je découvre aussi un Sartre misogyne, laissant peu de place aux femmes dans sa pièce, telles la fiancée qui apparait idiote et superficielle ou l'amie terroriste, froide, butée et prête à tout pour défendre des idées toutes fabriquées par les hommes, incapable – selon Sartre - de penser par elle-même.

L'écriture en dialogue permet les formules chocs, expéditives voire brutales. Comme des vérités trop évidentes et qui forcent le débat. Telles « c'est vrai, tu as des idées toi. Cela te passera », ou le magnifique « méfiez-vous des enfants sages », ou encore « c'est si commode de donner, ça tient à distance. Et puis on a l'air inoffensif quand on mange » et « La politique est une science, tu peux démontrer que tu es dans le vrai et que les autres se trompent. »

Autant de petites phrases qui – comme des slogans publicitaires ou … politiques - résonneront encore longtemps dans mon esprit et nourriront mes réflexions.
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Hugo, un jeune idéaliste, issu du milieu bourgeois, membre du Parti Prolétaire d'Illyrie s'est fait engager chez Hoederer un chef communiste qu'il à le sombre dessein de tuer pour la raison qu'il a « les mains sales ».
« Les mains sales », une pièce de théâtre en sept tableaux qui fut donnée pour la première fois au Théâtre Antoine le deux avril 1948.

Un texte qu'à juste titre on a comparé à celui de « Les Justes » de Camus ; une pièce qui traite de l'engagement politique et de ses excès, en même temps que de la valeur que l'on peut donner à la vie et à sa vie…

Un texte fort, qui, quand on le lit à quinze ans comme ce fut mon cas, ne manque pas d'interroger, à l'âge des questionnements existentiels plus ou moins conscientisés. Néanmoins ma pièce préférée de Jean-Paul Sartre.
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Citations et extraits (38) Voir plus Ajouter une citation
Ce sont les enfants sages, Madame, qui font les révolutionnaires les plus terribles. Ils ne disent rien, ils ne se cachent pas sous la table, ils ne mangent qu'un bonbon à la fois, mais plus tard ils le font payer cher à la société. Méfiez-vous des enfants sages !
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Un acte ça va trop vite. Il sort de toi brusquement et tu ne sais pas si c'est parce que tu l'as voulu ou parce que tu n'as pas pu le retenir.
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Je préfère les gens qui ont peur de la mort des autres : c'est la preuve qu'ils savent vivre.
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HOEDERER : Tu es jolie, c'est un fait. Ça ne sert à rien de le regretter. Seulement, les choses étant ce qu'elles sont, je ne vois que deux solutions. La première, si tu as le cœur assez large, c'est de faire notre bonheur à tous.
JESSICA : J'ai le cœur tout petit.
HOEDERER : Je m'en doutais. D'ailleurs, ils s'arrangeraient pour se battre tout de même. Reste la seconde solution : quand ton mari s'en va, tu t'enfermes et tu n'ouvres à personne – pas même à moi.
JESSICA : Oui. Eh bien, si vous permettez, je choisirai la troisième.
HOEDERER : Comme tu voudras. (Il se penche vers elle et respire profondément.) Tu sens bon. Ne mets pas ce parfum quand tu iras les voir.
JESSICA : Je n'ai pas mis de parfum.
HOEDERER : Tant pis.
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OLGA: Regarde-moi et réponds-moi sincèrement, car ce que je vais te demander a beaucoup d'importance. As-tu l'orgueil de ton acte? Est-ce que tu le revendiques? Le referais-tu, s'il était à refaire?
HUGO: Est-ce que je l'ai seulement fait? Ce n'est pas moi qui ai tué, c'est le hasard. Si j'avais ouvert la porte deux minutes plus tôt ou deux minutes plus tard, je ne les aurais pas surpris dans les bras l'un de l'autre, je n'aurais pas tiré. (Un temps.) Je venais pour lui dire que j'acceptais son aide.
OLGA: Oui.
HUGO: Le hasard a tiré trois coups de feu, comme dans les mauvais romans policiers. Avec le hasard tu peux commencer les «si»: «si j'étais resté un peu plus longtemps devant les châtaigniers, si j'avais poussé jusqu'au bout du jardin, si j'étais rentré dans le pavillon...» Mais moi. Moi, là-dedans, qu'est-ce que je deviens? C'est un assassinat sans assassin. (Un temps.) Souvent, dans la prison, je me demandais: qu'est-ce qu'Olga me dirait, si elle était ici? Qu'est-ce qu'elle voudrait que je pense?
OLGA, sèchement: Et alors?
HUGO: Oh! Je sais très bien ce que tu m'aurais dit. Tu m'aurais dit: «Sois modeste, Hugo. Tes raisons, tes motifs, on s'en moque. Nous t'avions demandé de tuer cet homme et tu l'as tué. C'est le résultat qui compte.» Je... je ne suis pas modeste, Olga. Je n'arrivais pas à séparer le meurtre de ses motifs.
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