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EAN : 9781093606034
184 pages
L'Ogre (06/03/2015)
3.45/5   11 notes
Résumé :

Ma Fille folie, qui a fait scandale à sa sortie en Italie, déprogrammé pour ses propos censément pornographiques, est un roman étrange et drôle. Sans dénouer ce qui des propos et constatations de Maddalenina relève du délire ou de la réalité, il propose à la fois une lecture du corps féminin dénué de tout fantasme – un corps malade, dur et sec en opposition totale avec celui sain, tendre et généreux de la Mère –, empêtré dans un fantasme de maternité –, et u... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (5) Ajouter une critique
Maddalenina vient d'avoir cinquante ans et elle vit seule. Ses proches, sa raison, et même son ombre, semblent l'avoir abandonnée depuis longtemps. Sa pension d'invalidité et les «nabrons» qu'elle brode et troque chez les commerçants du village sont ses seuls revenus. Tous les habitants, oscillant entre indifférence et méchanceté, l'évitent ou la repoussent car elle est folle et malodorante. Seules une horloge à coucou, abritant un oiseau empaillé et bruyant, et Maria Carta la guérisseuse, une vieille femme silencieuse, lui tiennent lieu de compagnie. Compagnie peu loquace puisque Maria Carta écoute les soliloques de Maddalenina sans mot dire, absorbée dans des pensées intérieures qui leur font écho.

«Je pourrais me détendre et me décider à croire que je suis en train de rêver Maddalenina, l'idiote que personne ne veut dans ses pattes, d'abord parce qu'elle a perdu ses boulons un mois avant de naître, et ensuite parce qu'elle nous déconcerte avec ses odeurs de réglisse dans la bouche et d'excréments en bas du dos.»

Mais Maddalenina est en général d'une humeur divine et, au registre de ses nombreuses incongruités, elle décide d'avoir un enfant à tout juste cinquante ans, avec l'aide d'un cierge et de trois hommes du village qu'elle s'est choisi comme maris, avec une absence totale d'expérience et de discernement ; trois hommes que Maria Carta décrira ainsi : «un homme qui a perdu ses attributs par accident», «un gamin qui n'a encore jamais vu son membre dressé», et «un vieil homosexuel qui, à part son rejet des femmes, conserve, j'imagine, le contenu de son caleçon dans une bonne dose de naphtaline».
Miracle ! Malgré l'incongruité de ses hommes, le ventre de Maddalenina s'arrondit inexplicablement.

«Maddalenina se réveilla d'une humeur divine, compta ses dents avec sa langue et constata avec un soupir qu'elle n'en avait perdu aucune cette dernière nuit encore. Elle s'assit à table pour le petit-déjeuner et se prépara à tomber amoureuse. Elle saupoudra de sucre deux tranches de pain, pour commencer à apprendre à faire la gueuse juste ce qu'il faut, caractéristique relevée chez toutes les femmes qui avaient réussi à amener un homme dans leur lit. Elle comprit avoir tout à apprendre en la matière et elle ne disposait pas de beaucoup de temps. Elle était dans sa dernière année utile pour se reproduire, ensuite son sang fertile allait pourrir, comme c'était arrivé à sa mère, qui, cinquante années exactement après sa naissance, recueillit dans un sachet de lin ce qu'elle devina être sa dernière coagulation rabougrie, et l'enterra sous un quelconque figuier sauvage ; cracha sur la terre et, à Maddalenina qui était là, dit. Ne viens jamais prier là-dessus.»

Avec Savina Dolores Massa, et Laurent Lombard pour la traduction française aux enthousiasmantes éditions de l'Ogre (Mars 2015), le miracle est dans l'écriture : le trivial et la folie se métamorphosent ici en un récit poétique et théâtral joyeusement macabre, satire burlesque et poignante, à la manière d'un Ascanio Celestini (La brebis galeuse, 2010), d'un milieu borné qui secrète son propre pourrissement, subtilement doublé tout au long du récit par le jeu des personnages, d'une réflexion sur la création littéraire, la posture de lecteur, de personnage et d'écrivain.
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Pas forcément convaincu avant de démarrer la lecture, j'ai pourtant longtemps cru que ce livre allait figurer dans mon panthéon, dans mes livres à emporter sur une île déserte, allait être l'un des plus touchants de ma vie.

Longtemps. Je me réjouissais de l'avoir choisi en traduction française - alors que j'aurais pu "travailler" un peu mon italien - parce que je n'aurais pas pu apprécier toutes les nuances et les finesses, que réussit à donner Laurent Lombard en français.

Ce livre contient tout ou beaucoup de ce que j'aime dans la littérature et qui pour moi est et fait poésie. Ne me parlez pas des vers de Baudelaire, de Rimbaud, de je ne sais quel brillant versificateur. Non, pour moi la poésie, c'est ce livre, c'est un livre comme ça. Qui transcende la merditude des choses, du pathétique banal, en arc-en-ciel de mots fébriles et forts à la fois, qui m'illuminent le cerveau et mes sens. Les tient éveillés, et me donne le sourire. Malgré le choc des sujets.
Poésie ! Littérature ! C'est ça. Pour moi.

Je peux y retrouver des plaisirs et sensations comparables à ceux que j'avais ressentis avec d'autres objets littéraires étranges comme Les fruits du Congo de Vialatte, ou Septentrion de Calaferte, ou encore le Journal de prison d'Albertine Sarrazin... Des sensations de fraternité, de sororité, d'humanité qui me constituent. Littéralement. (Et littérairement aussi, donc.) (Certes, ces livres sont tous différents en diable, mais...)

Je me demandais aussi d'où pouvait provenir ces impressions communes et puissantes... Et je pensais avoir trouvé : Savina Dolores Massa (comme les auteurs précités) écrivait pour elle, à fond, dans ses tréfonds, sans AUCUN souci du lectorat. Et ce faisant, se dépliait parfaitement, sa personne, son humanité. Ses personnages se déployant pleinement, avec toutes leurs erreurs, bigarrures, émotions...

C'était ça. Ou en tous cas, le pensais-je.
Car, malheureusement.
Oui, j'en arrive au malheureusement.
La fin perd complètement ce pied-là. L'auteure semble ne pas savoir comment finir son histoire, et semble presque demander au lecteur comment faire... Voire ce qui lui plairait. Mauvaise pioche !
Il ne faut pas penser au lecteur ni écrire pour lui. (Ne pas faire comme beaucoup trop d'écrivains médiocres et d'éditeurs sans estomac !)
Du coup, cette fin est décevante. Perte de style, perte de sens (elle tente une sorte de flou énigmatique sur qui est vraiment vivant, qui est dans le rêve de qui... une sorte d'Inception ou de la Vie est un songe de Calderòn... du déjà trop vu et que je n'avais ni besoin ni même envie de retrouver ici.), perte de mon élan amoureux.

Oui. Je suis face à ce livre comme face à un amour prometteur, plein de merveilles, de vitalités, de vivant, qui se stoppe par la survenue brutale de la médiocrité. Avec comme une forte envie de pleurer.

Tout ce livre, son auteure, ses personnages, son traducteur, ses lecteurs compris, méritent une douce peluche pour se consoler. Se consoler d'un miracle avorté. (Ces mots arrivés sans recherche volontaire matchent parfaitement avec l'histoire du livre.)

Un miracle avorté.




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Maddalenina a cinquante ans. Seule, isolée et analphabète, elle décide de donner d'enfanter. Rejetée par la majorité du village, qui peut devenir le père de l'enfant et féconder Maddalenina ? Celle-ci étant malodorante ainsi qu'étrange, mot plus courant dit « folle ». La seule compagnie de cette femme est Maria Carta, une guérisseuse. Cette histoire est la quête d'une femme en désir d'enfant, roman à lire pour savoir si elle y parvient ou non et répondre à toutes les grandes questions qu'offre ce livre.

Maddalenina est une femme âgée de cinquante ans. Celle-ci vit dans sa bulle avec un entourage peu nombreux. J'avoue avoir eu du mal à m'identifier ou à m'attacher à ce personnage. Je pense que cela est presque impossible. Et c'est ce qui m'a fait défaut car outre ses agissements et pensées étranges, Maddalenina est plutôt attachante et mignonne. En effet, celle-ci est considérée comme folle et je pense que c'est pour cela que je n'ai tissé aucun lien avec elle, son étrangeté est très présente. Les autres personnages ont un rôle sans trop être envahissants. de même que pour Maddalenina, je n'ai pu m'attacher à eux.

La première phrase d'un roman est importante à mes yeux. Elle permet au lecteur de se donner une impression hâtive sur sa lecture. Quant à moi, ce premier jugement était positif. En effet, le début du roman m'a emballé. J'ai trouvé cela remarquablement intéressant et a attisé ma curiosité. Suite à mon enthousiasme, j'ai trouvé quelques longueurs lors de cette lecture. Certains passages étaient dynamiques, déconcertants, d'autres plus lents. Je suis donc mitigée quant au rythme de la lecture. En ce qui concerne l'atmosphère, j'ai été propulsé dans le sentiment d'inconnu. Je me suis retrouvée dans un monde qui n'est pas le mien, accompagnée de Maddalenina. Il ne s'agit pas d'une mauvaise expérience mais de quelque chose à vivre. Je me suis sentie dépaysée lors de cette lecture et cela ne fait pas de mal d'affronter l'inconnu.

Je ne suis pas déçue de cette lecture ni convaincue. Je savais où je m'aventurais. Un roman tel que celui-ci fait du bien de temps en temps. le lecteur s'éclipse du monde où il vit pour rejoindre Maddalenina, ce personnage que je qualifierai d'anormal comme la plupart des gens de son village. Certes, je ne ressors pas de ce roman satisfaite mais je pense qu'un voyage dans l'ailleurs, là où tout peut nous attendre, est parfois essentiel. Savina Dolores Massa nous offre un récit tantôt drôle tantôt surprenant mêlé au burlesque. le désir d'enfanter est très présent et c'est un point que j'ai apprécié mais autant d'un point de vue personnel que celui d'un futur lecteur, la suite est improbable et invraisemblable. Il s'agit de l'humour de l'auteure envers certaines « traditions et thèmes » de la vie quotidienne telles que l'amour et la religion. Rien de ce roman n'est prévisible, attention aux surprises. Pour conclure, je suis mitigée, partagée entre le surplus d'étrangeté et la soif d'imprévus. Cependant, les premières phrases du roman m'ont fait bonnes impressions, élément essentiel pour garder le lecteur en haleine, et une fin d'histoire à laquelle je ne m'attendais absolument pas. Ce roman possède ses qualités et ses défauts mais le voyage reste à tenter.
Lien : https://lademoiselleauxcerfs..
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« Ma Fille Folie » de Savina Dolores Massa traduit par Laurent Lombard (2015, Editions de l'Ogre, 200 p.)

C'était évidemment à lire au moment du mariage pour tous pour corser les débats : une dame d'âge raisonnable –Maddalenina- et quatre pères (dont un saint – père, Don Palmerio), et plus si on admet le cierge (a t'il été vraiment pris en compte lors des manifs de la dite association ?). Il faut reconnaître que hormis le dit Don Palmerio, les autres ne sont plus trop « opérants » (émasculé – mais par un taureau; homosexuel – quasi notoire (pas le taureau); et pré-pubère- lui non plus pas le taureau). Je point-virgulise pour bien montrer les différents détails anatomiques qui font que....Le tout dans une Italie (Sardaigne) aux moeurs rigidifiées. Maddalenina sera t'elle l'heureuse mère qu'elle a la prétention de vouloir être (et si cela se devait, ce serait une fille). le matriarcat a encore de beaux jours en semant sarde..
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Un récit très singulier autour du personnage de Maddalenina, une femme de cinquante ans, isolée, rejetée de tous (si ce n'est de la guérisseuse avec qui elle a quelques liens). le livre retrace son parcours dans son désir d'avoir un enfant. On découvre alors une femme étrange, aux pensées et discours imprévisibles souvent en marge avec la réalité. Maddalenina vit dans une forme de psychose. J'ai apprécié cette lecture qui nous plonge dans un univers surprenant, parfois dérangeant, et surtout, éminemment poétique.
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Citations et extraits (23) Voir plus Ajouter une citation
Elles répondent jamais vraiment les poupées, ma fille, pourtant on a l'impression qu'elles répondent. Elle a pas répondu à ma question parce que c'était la première que je lui posais et elle avait pas encore confiance ou il fallait qu'elle y pense bien. Elle était toute nue. Dans son ventre il y avait un grand trou tout rond pour y mettre de la terre et planter une fleur. Le trou m'a fait penser que dedans, les gens, ils sont vides. La poupée cachait même pas une bague dans son ventre. J'ai décidé que les poupées et les gens sont différents. Elle avait plus de cheveux d'un côté, peut-être que c'est un chien qui les avait mangés. Ses yeux semblaient comme les miens quand je les ouvre en grand pour y faire tenir plus de choses. C'étaient des yeux bleus que les noirs. Les yeux décident leur couleur : si on naît la nuit ils sont noires, si c'est le jour ils sont bleus. Ceux qui ont les yeux verts c'est parce qu'ils voulaient naître ni le jour ni la nuit, mais ils sont nés quand même et ils se sont retrouvés comme ça.
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Le premier avantage qu'elle apprécia passionnément en vivant seule fut de pouvoir laisser la merde accrochée à son cul sans provoquer l'inspection du nez froncé de son ennuyeuse génitrice. Maddalenina aimait ses selles depuis le jour où, dans une conversation déj en cours entre deux fenêtres, elle entendit que sa voisine du même âge, Amalia Coghe - enfant sans malformation aucune -, avait la nuit d'avant chié une bague que l'on croyait perdue à jamais. Chaque jour, après sa régulière séance aux cabinets, Maddalenina, pleine d'espoir, fouillait de ses doigts son fruit fumant, y trouvant seulement au printemps des noyaux de cerise, et en hiver des solitudes de journées constipées. Mais, espérant que quelque bague fleurisse dans le fumier entre ses fesses, elle veilla à laisser fertile, pour elle, le terrain. Elle mourrait sans bague au cul ni au doigt, Maddalenina, mais faute de le savoir, elle chia toujours dans une délectable espérance.
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Les odeurs que tu me fais sentir me font penser au raisin pourri abandonné au abeilles et aux mouches ; à de l'eau morte, à des latrines mal tenues, au coeur noir d'une pomme de terre. Mais je te pardonne si tu lui accordes, à elle, la compagnie des fleurs, si tu la fais aller dans des cours parmi des fantômes de curés et aucune peur pour lui serrer la gorge. Sa peau a déjà la couleur de la mort ; qu'est-ce qui arrive au sang, c'est lui qui devient pâle ? c'est lui qui se glace avant la conscience du cerveau  c'est lui qui délave les iris ? c'est lui qui se fait neige dans les veines, maintenant, pour Maddalenina. Moi je questionne une personne invisible ? Mais je questionne encore. on ne meurt jamais, au chaud ? Le père de Maddalenina put l'avoir pensé, mais seulement jusqu'au moment où il s'est refroidi le charbon qu'il est devenu. Tout mort doit devenir glacé, forcément. Le froid ultime qu'ils ont toujours prédit. Et puis ils nous ont menacé d'un enfer pas moins épouvantable, destin ultime si nos vies avaient fréquenté le péché.
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"Les pensées, ça ne peut pas s'entendre."
Tu restes là-haut dans ta cour à regarder ton prunier tout sec. Tu restes toujours là à regarder ce prunier tout sec.
"Il n'est pas sec."
Je reviens demain.
"Il n'est pas sec."
[...]
"Mon arbre est sec pour qui ne sait pas le voir au-delà de l'écorce."
[...]
"Le prunier existe comme moi j'existe : ce ne sont pas les feuilles et les fruits qui font une vie."
[...]
Rentre à l'intérieur, t'es toujours comme ça, assise, à rien dire, à fixer un tronc sec.
"Il n'est pas sec."
Il est sec.
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Ce jour triste je m'étais mise à marcher sans regarder les arbres des rues, le ciel qui était noir mais peut-être bleu, les maisons. Je regardais pas les gens, j'aimais les odeurs de personne, et même j'avais envie de vomir de dégoût avec l'odeur du pain du boulanger que les autres fois où j'allais toucher ma pension ça me donnait envie d'en manger. Je marchais en regardant ma main, j'avais beaucoup de tristesse pour elle parce qu'elle était offensée. Je me suis pas arrêté les jambes jusqu'à ce que je me suis presque cognée contre un mur et ma main l'a touché, sinon je pouvais me faire mal à la figure. J'ai été contente de ne plus la voir comme une main morte, parce qu'elle avait tout oublié. Il fait toujours oublier après qu'on s'est moqué de toi, sinon on comprend plus la couleur du ciel.
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