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EAN : 9782343025797
180 pages
Editions L'Harmattan (23/01/2014)
4.2/5   10 notes
Résumé :
Livres de Frithjof Schuon en français :
https://archive.org/details/FrithjofSchuon-FR-francais

Cet ouvrage est le premier maître-livre du grand métaphysicien traditionaliste, Frithjof Schuon. Voici un livre qui permet de rendre compte d'une façon convaincante à la fois de l'unité et de la diversité des grandes religions de l'humanité, sans tomber dans le syncrétisme ou un unanimisme niveleur et relativiste.
Que lire après De l'unité transcendante des religionsVoir plus
Citations et extraits (8) Voir plus Ajouter une citation
Cette idée de « panthéisme » mérite que nous nous y arrêtions quelque peu : en réalité, le panthéisme consiste à admettre une continuité entre l’Infini et le fini, continuité qui ne peut être conçue que si l’on admet préalablement une identité substantielle entre le Principe ontologique — qui est en cause pour tout théisme — et l’ordre manifesté, conception qui présuppose une idée substantielle, donc fausse de l’Être, ou que l’on confonde l’identité essentielle de la manifestation et de l’Être avec une identité substantielle. C’est en cela et en rien d’autre que consiste le panthéisme ; mais il semble que certaines intelligences soient irrémédiablement réfractaires à une vérité si simple, à moins que quelque passion ou quelque intérêt ne les pousse à ne pas se dessaisir d’un instrument de polémique aussi commode que le terme de « panthéisme », lequel permet de jeter un soupçon général sur certaines doctrines estimées gênantes, sans qu’on ait à se donner la peine de les examiner en elles-mêmes(1).

Pourtant, en affirmant sans cesse l’existence de Dieu, ceux qui croient devoir la protéger contre un panthéisme inexistant prouvent que leur conception n’est même pas proprement théiste, puisqu’elle n’atteint pas l’Être, mais s’arrête à l’Existence, et plus particulièrement à l’aspect substantiel de celle-ci ; car son aspect purement essentiel la réduirait de nouveau à l’Être. Toutefois, quand bien même l’idée de Dieu ne serait plus qu’une conception de la Substance universelle (materia prima) et que le Principe ontologique serait par là hors de cause, le reproche de panthéisme serait encore injustifié, la materia prima restant toujours transcendante et vierge par rapport à ses productions. Si Dieu est conçu comme l’Unité primordiale, c’est-à-dire comme l’Essence pure, rien ne saurait Lui être substantiellement identique ; mais en qualifiant de panthéiste la conception de l’identité essentielle, on nie du même coup la relativité des choses et on leur attribue une réalité autonome par rapport à l’Être ou à l’Existence, comme s’il pouvait y avoir deux réalités essentiellement distinctes, ou deux Unités ou Unicités. La conséquence fatale d’un tel raisonnement est le matérialisme pur et simple, car dès que la manifestation n’est plus conçue comme étant essentiellement identique au Principe, l’admission logique de ce Principe n’est plus qu’une question de crédulité, et si cette raison de sentimentalité vient à tomber, il n’y a plus aucune autre raison d’admettre autre chose que la manifestation, et plus particulièrement la manifestation sensible.

(1) Le « panthéisme » est la grande ressource detousc eux qui veulent éluder l’ésotérisme à peu de frais, et qui s’imaginent par exemple comprendre tel texte métaphysique ou initiatique parce qu’ils connaissent grammaticalement la langue dans laquelle il est écrit; en général, que dire de l’inanité des dissertations qui prétendent faire des doctrines sacrées un sujet d’études profanes, comme s’il n’existait pas des connaissances qui ne sont point accessibles à n’importe qui, et comme s’il suflisait d’avoir été à l’école pour comprendre la plus vénérable sagesse mieux que les sages eux-mêmes ne l’ont comprise? Car il est entendu, pour les « spécialistes » et les « critiques », qu’il n’y a rien qui ne soit à leur portée; une telle attitude ressemble fort à celle d’enfants qui, ayant trouvé des livres pour adultes, les jugeraient selon leur ignorance, leur caprice ou leur paresse. (pp. 54-55)
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Si Mohammed avait été un faux prophète, on ne voit pas pourquoi le Christ n’aurait pas parlé de lui comme il a parlé de l’Antéchrist ; mais si Mohammed est un vrai Prophète, les passages sur le Paraclet doivent infailliblement le concerner, — non pas exclusivement, mais « éminemment », — car il est impossible que le Christ, en parlant de l’avenir, ait passé sous silence une apparition d’une telle dimension ; c’est encore cette dimension qui exclut a priori que le Christ, dans ces prédictions, ait pu englober Mohammed dans la désignation générale des « faux prophètes », car Mohammed n’est aucunement, dans l’histoire de notre ère, un exemple parmi d’autres d’un même genre, mais au contraire une apparition unique et incomparable(1); s’il avait été l’un des faux prophètes annoncés, il aurait été suivi par d’autres, et il y aurait de nos jours une multitude de fausses religions postérieures au Christ et comparables par leur importance et leur extension à l’Islamisme. La spiritualité au sein de l’Islamisme, des origines jusqu’à nos jours, est un fait indéniable, et « c’est à leurs fruits que vous les reconnaîtrez » ; d’autre part, on se souviendra que le Prophète a porté témoignage, dans sa doctrine même, de la seconde venue du Christ, sans s’attribuer à lui-même une gloire quelconque, si ce n’est celle d’être le dernier Prophète du cycle ; et l’histoire est là pour prouver qu’il a dit vrai, aucune apparition comparable à lui ne l’ayant suivi.

(1) « SI la grandeur du dessein, la petitesse des moyens, l’immensité du résultat sont les trois mesures du génie de l’homme, qui osera comparer humainement un grand homme de l’histoire moderne à Mahomet ? Les plus fameux n’ont remué que des armes, des lois, des empires ; ils n’ont fondé, quand ils ont fondé quelque chose, que des puissances matérielles, écroulées souvent avant eux. Celui-là a remué des armées, des législations, des empires, des peuples, des dynasties, des millions d’hommes sur un tiers du globe habité ; mais il a remué, de plus, des idées, des croyances, des Unies. Il a fondé sur un livre, dont chaque lettre est devenue loi, une nationalité spirituelle qui englobe des peuples de toutes les langues et de toutes les races, et il a imprimé, pour caractère indélébile de cette nationalité musulmane, la haine des faux dieux et la passion du Dieu un et immatériel. » (Lamartine, Histoire de la Turquie).

« La conquête arabe qui se déclenche à la fois sur l’Europe et sur l’Asie est sans précédents ; on ne peut comparer la rapidité de ses succès qu’à celle avec laquelle se constituèrent les empires mongols d’un Attila, ou plus tard, d’un Gengis Khan ou d’un Tamerlan. Mais ceux-ci furent aussi éphémères que la conquête de l’Islam fut durable. Cette religion a encore ses fidèles aujourd’hui presque partout où elle s’est imposée sous les premiers khalifes. C’est un véritable miracle que sa diffusion foudroyante comparée à la lente progression du Christianisme. » (H. Pirenne, Mahomet et Charlemagne).

« La force ne fut pour rien dans la propagation du Coran, car les Arabes laissèrent toujours les vaincus libres de conserver leur religion. Si les peuples chrétiens se convertirent à la religion de leurs vainqueurs, ce fut parce que les nouveaux conquérants se montrèrent plus équitables pour eux que ne l’avaient été leurs anciens maîtres et parce que leur religion était d’une plus grande simplicité que celle qu’on leur avait enseignée jusqu’alors... Loin de s’être Imposé par la force, le Coran ne s’est répandu que par la persuasion... Seule, la persuasion pouvait amener les peuples qui ont vaincu plus tard les Arabes, comme les Turcs et les Mongols, à l’adopter. Dans l’Inde, où les Arabes n’ont fait, en réalité, que passer, le Coran s’est tellement répandu qu’il compte aujourd’hui (1884) plus de cinquante millions d’adeptes. Leur nombre s’élève chaque jour... La diffusion du Coran en Chine n’a pas été moins considérable. Bien que les Arabes n’aient jamais conquis la moindre parcelle du Céleste Empire, les Musulmans y forment aujourd’hui une population de plus de vingt millions. » (G. Le Don, la Civilisation des Arabes). (pp. 124-125)
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Le monothéisme comportait, avec le Judaïsme et le Christianisme, deux grandes expressions antagonistes, que l’Islam, quoique nécessairement antagoniste lui-même par rapport à ces deux formes, — et cela en raison de son point de vue également religieux, — récapitula en quelque sorte, tout en harmonisant cet antagonisme judéo-chrélien dans une synthèse qui marqua le terme d’épanouissement et de réalisation intégrale du monothéisme; cela se trouve déjà confirmé par le simple fait que l’Islam est le troisième aspect de ce courant traditionnel, c’est-à-dire qu’il représente le nombre 3, qui est celui de l’harmonie, alors que le nombre 2 est celui de l’alternative et ne se suffit donc pas à lui-même, devant ou bien se réduire à l’unité par l’absorption de l’un de ses termes par l’autre, ou bien recréer cette unité par la production d’une unité nouvelle; ces deux modes de réalisation de l’unité sont précisément le fait de l’Islam qui, lui, présente la solution de l’antagonisme judéo-chrétien dont d’une part il est issu dans un certain sens et qu’il annule d’autre part par réduction au monothéisme pur d’Abraham. On peut comparer l’Islam, dans cet ordre d’idées, à un Judaïsme n’ayant pas rejeté le Christianisme, ou à un Christianisme n’ayant pas renié le Judaïsme; mais, si son attitude peut être caractérisée ainsi en tant qu’il a été la production du Judaïsme et du Christianisme, il se place en dehors de cette dualité en tant qu’il s’identifie à l’origine de celle-ci, en rejetant, d’une part, le « développement » judaïque et, d’autre part, la « transgression » chrétienne, et en rendant l’importance centrale qu’avaient acquise le peuple juif d’abord et le Christ ensuite, à l’affirmation fondamentale du monothéisme, à savoir l’Unité de Dieu.

Pour pouvoir dépasser ainsi le messianisme, il a fallu que l’Islam se place à un autre point de vue que celui-ci, et le réduise, pour se l’intégrer, à son propre point de vue, d’où l’intégration du Christ dans la lignée des Prophètes, qui va d’Adam à Mohammed. Il va sans dire que l’Islam, comme les deux religions précédentes, prit naissance par une intervention directe de la Volonté divine dont le monothéisme était issu, et que le Prophète dut refléter, selon une possibilité spéciale et le mode de réalisation correspondant, la vérité messianique essentielle et inhérente au monothéisme originel ou abrahamique.

L’Islam peut être appelé dans un certain sens la « réaction » abrahamique contre l’annexion du monothéisme par Israël d’une part et par le Messie d’autre part; et si, métaphysiquement, ces deux points de vue ne s’excluent nullement l’un l’autre, le mode religieux ne saurait les réaliser simultanément et ne peut, par définition même, les affirmer que moyennant des dogmes antagonistes qui divisent l’aspect extérieur du monothéisme intégral. (pp. 111-112)
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Le Christianisme, comme le Bouddhisme d’ailleurs, n’envisage dans la sexualité que le côté charnel, donc « substantiel » ou « quantitatif » ; l’Islam par contre, comme le Judaïsme et les traditions hindoue et chinoise, — nous ne parlons pas de certaines voies spirituelles rejetant l’amour sexuel pour des raisons de méthode, — envisagent dans la sexualité son côté « essentiel » ou « qualitatif », nous pourrions dire « cosmique », et en fait, la sanctification de la sexualité lui confère une « qualité » qui dépasse son caractère charnel et le neutralise, ou l’abolit même dans certains cas, celui des Cassandres et Sibylles de l’antiquité ou celui du Shrî Chakra tantrique, et enfin celui des grands spirituels, dont il convient de citer ici les exemples de Salomon et de Mohammed. En d’autres termes, la sexualité peut avoir un aspect de « noblesse » comme elle peut en avoir un d’« impureté » ; il y a là un sens « vertical » comme il y en a un d’« horizontal », pour parler en symbolisme géométrique ; la chair est «impure» en elle-même, avec ou sans sexualité, et celle-ci est « noble » en elle-même, dans la chair comme en dehors de la chair ; cette «noblesse » de la sexualité dérive de son Prototype divin, car « Dieu est Amour » ; en termes islamiques, on dira que « Dieu est Unité », et que l’amour, étant un mode d’union (tawhîd), est par là une conformité à la Nature divine. L’amour peut sanctifier la chair, comme la chair peut avilir l’amour ; l’Islam insiste sur la première de ces vérités, tandis que le Christianisme insistera de préférence sur la seconde, excepté, bien entendu, dans le sacrement du mariage, dans lequel il rejoint forcément, et en quelque sorte incidemment, la perspective judéo-islamique. (p. 126)
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L’Islam est un bloc spirituel, religieux et social ; l’Église est un centre, et non pas un bloc ; le Chrétien laïque est par définition un être périphérique. Le Musulman, par son caractère sacerdotal, est partout un être central dans sa tradition, et peu lui importe d’être extérieurement retranché de la communauté musulmane ; il reste toujours son propre prêtre et une unité autonome, du moins sous le rapport proprement religieux. C’est de là que dérive la conviction foncière du Musulman ; la foi du Chrétien est d’une autre nature : elle « attire » et « absorbe » l’âme plutôt qu’elle ne l’« englobe » et la « pénètre ». Le Chrétien, lorsqu’on l’envisage du point de vue musulman qui nous intéresse ici, n’est rattaché à sa tradition que par les sacrements ; il est toujours dans une situation d’exclusion relative, et conserve toujours une attitude de réceptivité. Dans son symbole suprême, la croix, les branches s’éloignent indéfiniment du centre, tout en y restant rattachées ; la ka’bah, de son côté, se reflète dans sa fraction la plus infime, qui, par sa substance et sa cohésion interne, reste identique aux autres fractions et à la ka'bah elle-même. (p. 120)
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