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EAN : 9782081292406
233 pages
Flammarion (07/01/2015)
4.18/5   625 notes
Résumé :
Quand Pauline Dubuisson, étudiante en médecine, tue son ex-fiancé Félix Bailly, elle n’imagine pas qu’elle va provoquer par ricochet du destin une autre mort, celle de son père qui se suicide après avoir appris son arrestation. A 21 ans elle est jetée en prison et passe devant les Assises de Paris. Pauline est la seule femme contre laquelle le Ministère public requiert la peine de mort.
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Critiques, Analyses et Avis (192) Voir plus Ajouter une critique
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Titre évocateur...
Il aura malheureusement fallu le décès récent de cet auteur pour que je lise enfin Jean-Luc Seigle.
Quelle écriture éblouissante! A la fois poétique et abrupte, réaliste et interprétative. Un roman au clair-obscur dans lequel l'auteur de sa magnifique plume réajuste l'équilibre entre les non-dits et les « trop-dits ».
L'histoire de l'insaisissable Pauline Dubuisson, on la connaît. Ce fait divers a défrayé la chronique au début des années 1950 dans une France tourmentée et a même été adaptée au cinéma par H-G Clouzot sous le titre « La vérité » avec Brigitte Bardot.
Pour rappel: 1953. Trois coups de feu retentissent dans la nuit. Les voisins se précipitent dans l'appartement de Félix Bailly jeune étudiant et trouvent son corps sans vie, Pauline 24 ans qui vient d'assassiner son ex fiancé est découverte avec un tuyau de gaz dans la bouche. Elle sera sauvée et pourtant plus tard insultée d'être en vie à chaque tentative ratée de se donner la mort. En apprenant son arrestation le père de la jeune fille, qu'elle vénérait, se suicide.
Ce roman, écrit à la première personne, débute après la fuite de Pauline, libérée de prison, à Essaouira au Maroc sous une fausse identité suite au visionnage du film de Clouzot qui l'a remet sous les projecteurs alors qu'elle n'aspire qu'à être oubliée.
L'écrivain se glisse avec maestria dans la peau de la jeune femme mais aussi dans ses pensées, dans ses silences, ses défaillances, ses rêves et tente d'expliquer la part des ténèbres qui l'a conduite au crime.
Il faut peut-être chercher dans son histoire familiale. Elle est confrontée, très tôt à la mort prématurée de ses deux frères aînés tombés à la guerre.
Précoce et brillante élève, à 14 ans seulement, sous l'occupation, elle a le diable au corps multipliant les amants parmi lesquels des soldats allemands. Promise à des études de médecine elle entamera une relation avec le médecin chef de l'hôpital de Dunkerque beaucoup plus âgé qu'elle.
Sa mauvaise réputation et ses accointances avec les allemands la mèneront à être durement humiliée en place publique à la Libération par un groupe d'épurateurs.
Elle subira de violents traumatismes alors qu'elle n'a que 16 ans (crâne tondu, viol collectif...).
Détestée de tous, Pauline fascine autant qu'elle révulse, son procès fait grand bruit.
Affublée de tous les défauts : menteuse, monstrueuse, orgueilleuse, manipulatrice, séductrice, Narcissique, froide,vulgaire,perverse ... 
Embarrassante surtout car difficile à cerner et à soumettre.
Le problème central deviendra celui de la préméditation. Son passé de femme libérée ne lui permet aucune circonstance atténuante, tous les portraits dépeints dans les journaux seront à charge.
L'auteur réécrit son histoire et réinvente Pauline en lui donnant la parole.
Ce n'est pas une biographie journalistique fouillée (il faut lire dans ce cas « la petite femelle » de Philippe Jaenada) ou une radiographie de l'affaire c'est surtout un portrait de femme captivant infiniment beau et touchant, magnifiquement écrit.
L'écrivain n'essaie pas d'excuser mais de comprendre, en lui donnant la liberté de s'exprimer sur des cahiers dépositaires de sa vérité.
Essaouira sera l'eldorado de Pauline pour tenter de revivre, rêver, retrouver la sensation de son corps, bercée par une autre langue que celle qui l'a condamnée et calomniée.
Son futur mari Jean l'aide sans savoir à sa reconstruction.
Mais doit-elle dire la vérité à son nouveau fiancé ? Cette question l'occupe toute entière. Peut-on échapper à un pareil passé et à un destin aussi opaque?
Un superbe moment de lecture qui m'a totalement permise malgré la tristesse d'oublier le confinement et ces temps obscurs même si le sujet est sombre.
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Je vous écris dans le noir de Jean-Luc Seigle….un vrai cataclysme émotionnel que je viens de terminer avec un grand bouleversement….Un auteur que j'ai découvert en 2014, après deux premiers textes de lui, dévorés : « En vieillissant les hommes pleurent » et « le cheval Péguy »…

La citation choisie en exergue de Jankelevitch dit l'essentiel de ce roman extraordinaire , inspiré d'un fait divers survenu en 1961, en France
« Car la vie de quelqu'un, même la plus humble, est un déroulement inédit et original d'une suite d'expériences unique en son genre. le témoin ne peut donc juger qu'à la condition de rester témoin jusqu'au bout. Qui sait si la dernière minute ne viendra pas d'un seul coup dévaluer une vie apparemment honorable ou réhabiliter au contraire une vie exécrable. » [ p.10, »La mort »]

Il s'agit de Pauline Dubuisson, étudiante en médecine, tuant son ex-fiancé Félix Bailly, "elle est jetée en prison au lieu d'obtenir son diplôme de médecin. Elle passe trois ans plus tard, en 1953, devant les Assises de Paris. Pauline devient la seule femme contre laquelle le Ministère public, c'est-à-dire la société française, requiert la peine de mort pour un crime passionnel sans que cela n'émeuve personne à l'époque, pas même Simone de Beauvoir, qui pourtant aurait trouvé un bel exemple de vie de femme saccagée par les hommes. (avant-propos, p. 11)
Jean-Luc Seigle s'est immergé, identifié dans ce destin féminin fort noir et injuste, en choisissant de raconter le parcours violent de cette femme à la première personne…
« je crois qu'on ne peut mourir que d'être désaimée. Et ça, ce n'est pas mourir d'amour, c'est même l'inverse » (p.38)

Ce texte m'a bouleversée… après deux autres coups de coeur précédents, du même écrivain. En dépit de la variété des thématiques le style est toujours aussi fluide et poétique…. Les mots de Jean-Luc Seigle touchent directement au coeur… Et au fil du roman, on se demande comment un tel acharnement s'est fait à l'encontre d'une seule jeune femme, sacrifiée sur l'autel de la famille, par un père , avec qui Pauline entretenait une relation fusionnelle, et qui lui manifestait une vénération absolue .

Ce qui m'intrigue toujours infiniment c'est la difficulté plus grande de parler des textes qui nous ont chaviré, tant les mots qui nous viennent paraissent fades en comparaison de l'intensité des émotions ressentis à la lecture de ces textes qui ne nous laissent pas indemnes ?!!

C'est le cas présent avec cet écrit de Jean-Luc Seigle. En sus du talent de cet écrivain : poésie, justesse et musique des mots, une dimension bien plus grande se dégage de ses textes (du moins des trois que j'ai dévorés), celle d'une exigence de comprendre, de défendre les mal-aimés, les mal- compris, les oubliés (dont faisait partie , Charles Péguy…).

La beauté des univers de Jean-Luc Seigle s'accompagne d'une compassion incomparable et communicative…Inutile de dire que je m'active pour dénicher les deux autres ouvrages plus anciens et épuisés qu'il me reste à découvrir : « La Nuit dépeuplée » (2001) et « le sacre de l'enfant mort » (2004)

Je ne suis pas très satisfaite de cette chronique … je la trouve , au vu du ressenti incroyable de cette lecture, bien trop pâlotte !!! Je me résigne toutefois à la déposer, en espérant l'améliorer ultérieurement….

Un très bel écrit qui rétablit , ou tente de rendre un minimum de compassion et de justice à une très jeune femme, dont le début de sa vie de femme fut brisée, massacrée par un système, ou du moins une période de l'histoire peu reluisante… où les « Père et Mère La morale »… se levaient avec beaucoup d'intansigeance et de zèle…sans avoir l'idée basique de regarder et « de balayer » devant leur porte !

Il ne m'a jamais été aussi frappant , à la lecture d'une histoire, de constater que les criminels ne sont pas toujours ceux que l'on croit, et que les « bien-pensants » , « les trop-bien-pensants » font des dégâts et agissent avec une cruauté , parfois indescriptibles et innommables… Une immense reconnaissance à l'auteur pour cette lecture qui m'a laissée à la fois émerveillée, et totalement bouleversée …Les deux ne sont pas incompatibles…Vous verrez ?!!

Soazic Boucard- Tous droits réservés- 21 janvier 2015
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« Je vous écris dans le noir. de l'obscurité dans laquelle mon crime m'avait jetée, bien sûr, mais aussi de celle qui terrorise les enfants, remplie de monstres et de fantômes. C'était la lettre d'une enfant qui demande pardon pour ses bêtises et pour le mal qu'elle a fait sans le vouloir. Je me demande si on écrit autrement dans le noir, dans cette opacité qui ne révèle ce qu'elle cache qu'au fur et à mesure de l'écriture, comme l'oeil finit par s'habituer à l'obscurité et à redessiner les contours des obstacles qui pourraient nous faire trébucher. »

1950. Pauline Dubuisson a tué son ancien fiancé, elle a 23 ans et a déjà connu l'opprobre en étant tondue à la Libération ( à même pas 17 ans ). C'est la seule femme contre laquelle l'Etat a requis la peine de mort. Elle ira finalement en prison et sera libérée pour bonne conduite en 1960 avant de s'exiler au Maroc.

Le matériau romanesque est exceptionnel tant il est une densité remarquable. Jean-Luc Seigle échappe brillamment aux poncifs et à la routine biographiques. Il ne cherche pas à reconstituer un fait divers mais à raconter la vérité d'une femme détruite en quête de reconstruction, sans jugement ni apitoiement, évitant toute réduction moralisante. Il ose même surmonter le handicap d'être un homme en faisant le choix d'écrire à la première personne.

Et c'est avec une empathie impressionnante qu'il réhabilite Pauline, victime même pas expiatoire d'une société de l'après-guerre profondément misogyne qui s'en est pris aux corps des femmes. Il imagine le contenu des carnets, que Pauline avait écrit à Essaouira, comme une réappropriation par la parole d'un corps de femme hypersexualisé, exhibé, puni, violé, questionné, autodétruit sous le joug de la loi virile. Les mots de Pauline sont bouleversants, résonnant de silences, de rêves, de violences subies, travaillant avec finesse sa psychologie sans jamais verser dans le sensationnalisme, y compris dans une scène choc à la limite de l'insoutenable mais décrite avec une juste dignité et une saine pudeur.

L'auteur emporte totalement l'adhésion tant sa partition est composée avec justesse et générosité, infusée d'un humanisme authentique, servi par une écriture très inspirée, sensible au plus près de Pauline. On ne peut qu'être touchée par le destin tragique de cette femme grandie entre l'effacement d'une mère fidèle et la vénération portée à un père, héros de Verdun, manipulateur et « malsain » , elle qui était une excellente élève étudiante en médecine avec deux ans d'avance, infirmière pendant la Deuxième guerre mondiale, si mal aimée, si désaimée. Cette femme aux plusieurs morts, deux fois condamnés factuellement à mort, tuée par Clouzot dans son film La Vérité inspirée de sa vie ( film terriblement misogyne qui ne voit dans le meurtre commis que la preuve d'un narcissisme féminin à son apogée sous les traits de Bardot ), aux plusieurs tentatives de suicide face à l'incapacité de la société de pardonner alors qu'elle espère jusqu'au bout une possible rédemption et une réelle émancipation.

Superbe et terrible.

A noter que dans l'édition J'ai lu, ce roman est très pertinemment accompagné d'un bref texte : Iphigénie ou les effets de la chasse, lui aussi très beau.
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En ce jeudi après midi, la pluie et le vent se déchainaient dehors et j'étais bien à l'abri, au chaud dans mon petit nid, en train de lire « Je vous écris dans le noir ».

Je ne pensais pas combien cette lecture, allait me tanspercer, m'ôter une part de naïveté, le temps allait se suspendre. Pourtant dans une étrange synchronicité les éléments extérieurs qui s'animaient ont traversé ma fenêtre, les mots de Jean Luc Seigle m'ont inondé d'émotions, de frissons, d'effroi, de compassion, de larmes pour Pauline Dubuisson.

Etudiante en médecine, elle tue Félix, l'amour de sa vie, dans un geste désespéré, placée face à son passé, de femme…. tondue. Pour ce crime, condamnée par la justice des hommes à perpétuité, elle est « libérée » quelques années plus tard pour bonne conduite. On aimerait que s'arrête là, sa souffrance.

Pourtant, en 1961, son histoire ressurgit dans le film «La vérité» de Clouzot qui a inspiré, ce fait divers. Elle est poussée à l'exil au Maroc pour fuir sa véritable identité et ses démons.

Elle y rencontre Jean qui veut l'épouser… et la vie lui donne à nouveau rendez-vous avec ce passé....

Que va-t-il en « devenir » ?

Ecrivain, avocat interposé, Jean Luc Seigle donne la parole à cette femme meurtrie pour qu'enfin elle puisse s'exprimer et "réhabiliter" sa mémoire dans une grande justesse, sensibilité, poésie.

Un portrait de femme traquée, terrifiant et inoubliable que nous livre cet auteur.

Pour moi, cela a été une onde de choc, que cette histoire où beauté et violence sont à leur apogée, dans un lien indissociable.

Fleur elle s'est prise un méchant coup dans le papillon !....
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Ce roman, écrit par un homme avec une justesse de ton étonnante, donne enfin la parole à une femme, Pauline Dubuisson, qui de son vivant n'a guère été entendue. Écrit à la première personne, c'est un témoignage fort et bouleversant, j'ajouterais qu'il s'agit surtout selon moi d'un authentique plaidoyer contre les jugements hâtifs, les condamnations aveugles et imbéciles.
Certes, Pauline est une criminelle. Étudiante en médecine, elle a abattu son ex-petit ami, et fut à l'origine d'un fait divers en apparence banal des années cinquante qui inspira, outre une vive polémique, un film de Clouzot, La vérité, avec Bardot pour l'incarner. le décor est planté !

Fait divers banal peut-être, mais destinée particulièrement tortueuse et difficile à porter. Il est presque incroyable de découvrir autant d'enchaînements désastreux et destructeurs dans la vie d'une seule femme. Une spirale de malheur !
Sa condamnation à perpétuité en 1953, puis sa libération six ans plus tard pour bonne conduite, ne l'ont pas libérée de ses démons et du poids très lourd de son passé. Tondue, violée à la Libération, seulement âgée alors de dix-sept ans, et n'ayant échappé à la mort qu'in extremis, coupable d'un crime, puis héroïne d'un film où elle se voit mourir. Rien de surprenant à ce qu'elle ait fait trois tentatives de suicide et se soit enfuie au Maroc pour tenter de survivre, sauver sa peau.
À Essaouira, inconnue, elle parvint à recomposer une existence, et à rencontrer l'amour. C'est la longue confession qu'elle aurait pu laisser à l'aimé que Jean-Luc Seigle a imaginé avec une empathie indéniable pour cette femme particulièrement malmenée par la vie.

Attention cependant, aucune indulgence facile ou larmoyante dans ce récit, l'auteur ne minimise pas la culpabilité de Pauline, il lui prête sa plume pour se dévoiler intimement à la lumière ou l'ombre angoissante des faits.
C'est bien cela la grande réussite du récit conjuguée à une écriture sans fioritures qui vise au plus près les émotions, la vie.
Je suis sincèrement admirative devant ce roman, témoignage qui a tant fait défaut à cette femme, et dont la lecture dérange.

" L'histoire de Pauline, comme toutes les histoires, ne peut donc pas se raconter uniquement sur les faits, elle doit s'établir sur les silences de sa vie qui ne contiennent pas seulement son enfance et ses rêves mais les silences de son enfance et les silences de ses rêves. "
Pari réussi !
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critiques presse (2)
Lexpress
23 mars 2015
Jean-Luc Seigle démonte les idoles. Son roman est bouleversant.
Lire la critique sur le site : Lexpress
Telerama
18 février 2015
Jean-Luc Seigle sait exprimer le féminin avec une empathie troublante. On est sans cesse confondu pas sa maîtrise d'une écriture comme en pleins et déliés, comme d'époque, et qui parvient à dire le pire avec la juste distance, l'horreur avec dignité et la solitude absolue, surtout, de la fière, de l'admirable Pauline. Malgré tout.
Lire la critique sur le site : Telerama
Citations et extraits (219) Voir plus Ajouter une citation
On avait beau me traiter de « sale pute à Boches », je ne comprenais pas de quoi on m’accusait, incapable de faire le lien avec Dominik jusqu’à ce que le coiffeur arrête de me tondre et me demande de me lever. J’étais debout, couvertes de bleus, le crâne à demi tondu, le haut de ma robe descendu sur mes hanches pour exhiber les croix gammées peintes sur mes seins. Le coiffeur me demanda de soulever ma robe et d’écarter les jambes. Je me suis exécuté, et je suis resté figée dans cette position d’un french cancan sordide et sans musique, puis il a arraché ma culotte d’un coup et commencé à me tondre les poils pubiens avec sa tondeuse mal affutée. Ce que j’ai ressenti, tenant ma jupe devant mon visage, les jambes écartées, mon sexe offert à la foule, n’a pas de mot. Mon sexe n’était plus qu’une brûlure une fois la tonte terminée. Un silence m’a redonné espoir. Je me suis dit qu’ils avaient honte de ce qu’on me faisait subir, que ça allait finir et que j’allais pouvoir rentrer chez moi. Puis une femme a crié : « En voilà une jolie chatte de petite fille bien propre maintenant. » Il n’en fallut pas plus pour que les badauds soient rassurés et éclatent de rire à nouveau. Je n’avais plus aucune chance de me sortir de ce bourbier. Puis une autre femme a hurlé : « Bazarde-moi cette salope ! qu’on en finisse !
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Je pense à ces malades condamnés à mourir et auxquels on apprend qu'ils vont vivre grâce à un nouveau remède inconnu jusque-là; ils ont immanquablement du mal à envisager leur avenir sans cette mort annoncée depuis si longtemps. J'ai vu des hommes et des femmes finir par accepter l'idée de la mort quand la médecine n'a plus d'espoir à leur offrir. Cette acceptation n'a rien à voir avec une quelconque projection de soi sans vie dans la tombe, mais avec l'idée que tout ce que l'on a fait, connu, aimé, dit, ne sera plus, et que le souvenir de ces choses passées suffit à vous faire respirer encore un peu, à provoquer de longues apnées qui ont le pouvoir de prolonger la vie et de repousser la mort quelque temps.
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Je vous écris dans le noir. De l'obscurité dans laquelle mon crime m'avait jetée, bien sur, mais aussi de celle qui terrorise les enfants, remplie de monstres et de fantômes. C'était la lettre d'une enfant qui demande pardon pour ses bêtises et pour le mal qu'elle a fait sans le vouloir. Je me demande si on écrit autrement dans le noir, dans cette opacité qui ne révèle ce qu'elle cache qu'au fur et à mesure de l'écriture, comme l'œil finit par s'habituer à l'obscurité et à redessiner les contours des obstacles qui pourraient nous faire trébucher.
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L’effroi que j’ai vécu était pire que la lame glacée d’un couteau que l’on glisserait sous votre peau pour vous la faire sentir avant de vous égorger.
J’étais perdue, ligotée, bâillonnée et sans défense, blessée par les ciseaux, sale, puant l’urine. Seule. Effroyablement seule. Rien à voir avec le cauchemar, la réalité était bien trop à vif, tellement à vif que je peux encore sentir les odeurs de transpiration de ces hommes, et l’odeur du sang des bêtes entre ces murs et dans les rigoles prévues pour évacuer le sang. Je peux encore sentir la haine de ces hommes sur moi, la haine a une odeur de transpiration et de moisissure, je pouvais le sentir sur mon corps dévasté ; je peux encore sentir le goût de mon sang qui coulait à la commissure de mes lèvres, ce sang qui est devenu le goût de la terreur, parce que c’est une terreur que d’être consciente de vivre son dernier jour à seize ans et demi.
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C'est en prison que l'on apprend, pour ne pas souffrir, à tout effacer chaque jour de notre mémoire, de la même façon que les prisons elles-mêmes sont effacées du monde qui les entoure. Personne ne voit les prisons dans les villes, je ne les voyais pas quand j'étais libre, je savais que ça existait. Le monde carcéral est le seul, parmi toutes les autres administrations, qui appartient davantage au fantasme qu'à la réalité. On n'imagine pas la difficulté que cela représente que de devoir vivre à l'intérieur d'un lieu qui n'existe pour personne. Quelle importance ces histoires d'effacement ! (p.200-201)
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