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EAN : 9782070416806
228 pages
Gallimard (14/10/2002)
3.83/5   3141 notes
Résumé :
Dans la Chine de Mao, savoir lire, c'est déjà faire partie des intellectuels. Et on ne badine pas avec les intellectuels : on les envoie se rééduquer dans les campagnes, travailler dans des rizières ou dans des mines. C'est ce qui est arrivé au narrateur et à son ami Luo, si jeunes et déjà marqués du sceau infamant d'"ennemis du peuple". Pour ne pas sombrer, ils ont heureusement encore quelques histoires, quelques films à se raconter, mais cela fait bien peu. Jusqu'... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (304) Voir plus Ajouter une critique
3,83

sur 3141 notes
Parce qu'ils portent la double faute d'avoir étudié au collège et d'avoir des parents ''ennemis du peuple'', le narrateur et son ami Luo sont envoyés en rééducation dans un village de montagne. Entre les rizières et la mine, les conditions de vie sont difficiles mais les deux adolescents ont su endormir la méfiance des villageois grâce à leur talent de musicien, pour le narrateur, et de conteur pour Luo. Et puis, la campagne recèle aussi quelques trésors cachés. Par exemple, la fille du tailleur, la jolie Petite Tailleuse ou encore la valise pleine de livres que le Binoclard, un autre rééduqué, cache quelque part dans sa masure.

Balzac, Tolstoï, Dumas et bien d'autres tentations, toute cette littérature subversive, interdite, qui titille l'imagination, et les sens, de deux adolescents perdus à la campagne, sans trop d'espoir de rentrer chez eux. Et pourtant, qu'ils sont libres ! Les livres pour apprendre, comprendre, ressentir, pour s'évader loin de la montagne, de la Chine, du communisme, de la révolution culturelle, pour découvrir l'individualisme, et pourquoi pas l'égoïsme, le plaisir, l'amour, la sensualité, la liberté. Et si le contexte est rude, le travail épuisant, parfois dangereux, la menace d'une dénonciation toujours possible, Luo et son ami sont suffisamment optimistes, délurés, culottés, amoureux de la vie, pour donner au roman un souffle vital irrésistible.
Dai SIJIE prouve, s'il en était besoin, que la littérature est le plus grand vecteur de connaissances, d'évasion et de liberté. Cette ode aux classiques occidentaux est une petite merveille, une lecture joyeuse et optimiste où l'amour des livres brille à chaque page de la lueur de l'espoir. Un bijou !
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Lors de la Révolution Culturelle de Mao Zedong, deux lycéens que leurs parents bourgeois rendent « ennemis du peuple » sont envoyés en rééducation dans un village pauvre et isolé des montagnes du Sichuan. Ils survivent au dénuement et aux éprouvantes conditions de travail des rizières et des mines de charbon en se racontant des histoires, jusqu'au jour où, de manière inespérée, ils tombent sur un roman De Balzac miraculeusement soustrait aux autodafés. Cette lecture interdite va changer leur vie, et surtout celle de la fille du tailleur dont ils sont tous deux amoureux.


En partie autobiographique, ce livre est saisissant à maints égards, à commencer par la découverte d'un village arriéré tout droit sorti d'un autre siècle, où un simple réveil-matin fait figure d'objet si extraordinaire que sa sonnerie matinale en devient presque sacrée, où il est si compliqué de se procurer les choses les plus usuelles que le tailleur ambulant est attendu comme le Messie, et où, de manière générale, hygiène, conditions de vie et niveau d'instruction font dresser les cheveux sur la tête.


Mais l'épicentre de la révolte des deux garçons est la sensation d'étouffement provoquée par l'interdiction et la destruction des livres. Pour plaire à la fille du tailleur, et malgré les interdits, ils n'auront de cesse de lui faire découvrir la magie des histoires, puis celle des livres, ouvrant ainsi la porte à un champ de possibles totalement inexistants jusqu'alors pour la jeune femme.


Hommage aux classiques de la littérature occidentale, ce roman met parfaitement en lumière le formidable pouvoir des livres, irremplaçables vecteurs de connaissances, d'émancipation et de liberté. Coup de coeur.

Lien : https://leslecturesdecanneti..
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La France fut un temps le refuge principal des dissidents chinois. La plupart étaient des intellectuels, écrivains, cinéastes ou philosophes chassés par la dictature communiste et trouvant là une opportunité unique de continuer leur oeuvre. C'était le cas de Dai Sijie qui s'inspirant de sa propre histoire situa ce roman pendant la révolution culturelle. Comme l'auteur l'avait été lui-même dans sa jeunesse, deux fils de médecins considérés comme des ennemis du peuple étaient envoyés en camp de rééducation dans un village reculé de la campagne chinoise. L'entreprise d'abrutissement par le travail battait alors son plein sur tout le territoire et les enfants d'anciens notables connaissaient le sort bien peu envieux des esclaves de la terre. le labeur étant le maitre mot, il restait peu de distraction à ces jeunes gens habitués aux lumières de la ville. Heureusement leur culture cinématographique et leurs talents de conteur allaient leur permettre de retenir l'attention des villageois car dans ces régions reculées peu d'habitants avait eu l'occasion d'aller dans une salle obscure. Chaque soir pour tromper leur ennui et pour garder un semblant de lien avec la civilisation, il se lançait dans la description d'un long métrage devant une foule ébahie. Et puis un jour leur vie aux camps va changer grâce à la rencontre dans le village voisin de la fille du tailleur qui va former avec eux un trio inséparable. Elle va changer surtout par l'intermédiaire d'un livre De Balzac trouvé chez un camarade qui deviendra pour eux une vraie source d'enrichissement et d'évasion. Les deux jeunes érudits vont profiter de cet ouvrage pour ouvrir la petite tailleuse à la culture et au plaisir de la lecture au point que se rendant compte de sa condition, elle finira par partir vers d'autres horizons laissant derrière elle les deux amis et leur avenir incertain. Outre l'immersion dans l'univers concentrationnaire chinois du temps de Mao, ce livre exposait à quel point l'écriture pouvait être une arme contre l'obscurantisme et un facteur d'émancipation. A lire pour tous les lecteurs sensibles à ce message...
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Sur ma lancée... après la lecture captivante de trois textes de Xinran, dont "Chinoises", j'ai eu envie de relire un récit personnel d'un auteur chinois, ayant vécu avec son meilleur ami, respectivement âgés de 17 et 18 ans, la "rééducation" au fin fond des campagnes chinoises. Là, il s'agissait d'un village très pauvre, isolé dans les montagnes...Les adolescents, en question, sont les enfants de cadres, l'un médecin, l'autre , dentiste...

"Deux mots sur la rééducation : dans la Chine rouge, à la fin de l'année 68, le Grand Timonier de la Révolution, le président Mao, lança un jour une campagne qui allait changer profondément le pays : les universités furent fermées, et les "jeunes intellectuels", c'est-à-dire les lycéens qui avaient fini leurs études secondaires, furent envoyés à la campagne pour être "rééduqués par les paysans pauvres" (...)
La vraie raison qui poussa Mao Zedong à prendre cette décision restait obscure (...)
Notre conclusion fut la suivante: Mao haïssait les intellectuels." (p. 13-14)

Les livres détruits, brûlés, interdiction de s'instruire...La grande ironie de "La Révolution culturelle" !!...Les seuls livres tolérés : le petit livre rouge de Mao, et les ouvrages purement scientifiques !

Un texte qui apprend de multiples détails, usages du quotidien chinois, hors des villes, dans des campagnes ignorantes du monde extérieur et de ce qui se peut se passer dans le pays même... Des mondes, univers
parallèles difficilement rejoignables...sauf dans cet épisode narré par l'auteur, où les deux jeunes gens ... pour tenter de persuader un troisième camarade
(qui possède une valise de livres interdits, cachés) de leur prêter un ou deux livres, vont récolter d'un vieux meunier isolé, des vieilles chansons traditionnelles ...[ pour rendre service à ce camarade récalcitrant... qui veut tenter , par le biais de sa mère, poétesse,
de les faire publier...]


"Souvent, après minuit, on éteignait la lampe à pétrole dans notre maison sur pilotis, et on s'allongeait
chacun sur son lit pour fumer dans le noir. Des titres de livres fusaient de nos bouches, il y avait dans ces noms des mondes inconnus, quelque chose de mystérieux et d'exquis dans la résonance des mots, dans l'ordre des caractères, à la manière de l'encens tibétain, dont il suffisait de prononcer le nom, " Zang Xiang", pour sentir le parfum doux et raffiné (...)
- Et maintenant, où ils sont , ces livres ?
-Partis en fumée. Ils ont été confisqués par les Gardes rouges, qui les ont brûlés en public, sans aucune pitié, juste en bas de son immeuble. "(p. 65)

Une relecture faite avec plus d'attention...et toujours autant de plaisir... J'avais également vu avec grand intérêt l'adaptation cinématographique de ce livre...

J'avais par contre totalement zappé la chute de ce récit...inattendue... montrant aussi que la liberté que donne les Livres, la lecture de la littérature peut faire s'envoler "votre amoureuse" , vers la ville et ses
propres rêves...!! Un livre touchant... et précieux témoignage d'une période terrible de l'histoire
chinoise !...

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Sous le joug de la Révolution Culturelle lancée par Mao Zedong, deux amis d'enfance sont astreints à rejoindre un hameau reculé de montagne dans la province du Sichuan. 

Luo et le narrateur comptent parmi les millions de zhiqing - jeunes instruits - envoyés à la campagne afin d'y être "rééduqués par les paysans pauvres". 

"Nous n'étions ni les premiers ni les derniers des cobayes utilisés pour cette grande expérience humaine."

Éloigné du berceau familial sans perspective de retour, les adolescents doivent apprendre à composer chaque jour avec l'extrême rudesse des conditions de vie mais aussi de travail. 

Pourvus d'une grande vivacité d'esprit, ils parviennent à endormir la méfiance des villageois en tirant profit de leur talent de conteur. 

Tous les livres étant interdits hormis ceux au service de la propagande communiste, qu'elle n'est pas leur joie de trouver fortuitement une valise remplie de tels trésors. 

"Nous la débarrassâmes de ses liens, et l'ouvrîmes silencieusement. À l'intérieur, des piles de livres s'illuminèrent sous notre torche électrique; les grands écrivains (...) nous accueillaient à bras ouverts (...). J'avais l'impression de m'évanouir dans les brumes de l'ivresse."

Cette découverte inespérée pourrait bien bouleverser leur existence ainsi que celle de la petite tailleuse chinoise dont ils sont amoureux …

*

Sensible, touchant et non dénué d'humour, ce roman d'apprentissage est un très bel hymne à la puissance de la littérature.

Source infinie de plaisir, d'évasion, de connaissance et formidable vecteur d'émancipation, elle a le pouvoir de transformer nos vies. Les personnages en feront ici l'inoubliable expérience. 

Si le récit retrace une période sombre de l'Histoire et nous offre par ailleurs une vision saisissante de la ruralité chinoise au début des années 70, il se focalise davantage sur leur parcours d'initiation placé sous l'influence des classiques occidentaux.

Pas à proprement parler autobiographique, Dai Sijie a toutefois entremêlé à la fiction des éléments issus de sa propre histoire. Lui-même aura connu cette jeunesse sacrifiée sur l'autel de l'idéologie maoïste.

Une lecture aussi brève que prenante à découvrir!

***

"Ouvre un livre, c'est lui qui t'ouvrira." (Proverbe chinois)
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critiques presse (1)
BoDoi
17 mai 2018
Ce travail sur la lumière crée de superbes décors et sublime les corps.
Lire la critique sur le site : BoDoi
Citations et extraits (145) Voir plus Ajouter une citation
Chaque fois qu'on me demande comment est la ville de Yong Jing, je réponds sans exception par une phrase de mon ami Luo : elle est si petite que si la cantine de la mairie fait du bœuf aux oignons, toute la ville en renifle l'odeur.
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P. 65
Souvent, après minuit, on éteignait la lampe à pétrole dans notre maison sur pilotis, et on s'allongeait chacun sur son lit pour fumer dans le noir. Des titres de livres fusaient de nos bouches, il y avait dans ces noms des mondes inconnus, quelque chose de mystérieux et d'exquis dans la résonance des mots, dans l'ordre des caractères, à la manière de l'encens tibétain, dont il suffisait de prononcer le nom, « Zang Xiang », pour sentir le parfum doux et raffiné, pour voir les bâtons aromatiques se mettre à transpirer, à se couvrir de véritables gouttes de sueur qui, sous le reflet des lampes, ressemblaient à des gouttes d'or liquide.
- Tu as déjà a entendu parler de la littérature occidentale? me demanda un jour Luo.
- Pas trop. Tu sais que mes parents ne s'intéressent qu'à leur boulot. En dehors de la médecine, ils ne connaissent pas grand-chose.
- C'est pareil pour les miens. Mais ma tante avait quelques bouquins étrangers traduits en chinois, avant la Révolution culturelle. Je me souviens qu'elle m'avait lu quelques passages d'un livre qui s'appelait Don Quichotte, l'histoire d'un vieux chevalier assez marrant.
- Et maintenant où ils sont, ces livres?
- Partis en fumée. Ils ont été confisqués par les Gardes rouges, qui les ont brûlés en public, sans aucune pitié, juste en bas de son immeuble.
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Deux mots sur la rééducation : dans la Chine rouge, à la fin de l'année 68, le Grand Timonier de la Révolution, le président Mao, lança un jour une campagne qui allait changer profondément le pays : les universités furent fermées, et les "jeunes intellectuels", c'est-à-dire les lycéens qui avaient fini leurs études secondaires, furent envoyés à la campagne pour être "rééduqués par les paysans pauvres". (...) La vraie raison qui poussa Mao Zedong à prendre cette décision restait obscure : voulait-il en finir avec les Gardes rouges, qui commençaient à échapper à son contrôle? Ou était-ce la fantaisie d'un grand rêveur révolutionnaire, désireux de créer une nouvelle génération? (...) Notre conclusion fut la suivante : Mao haissait les intellectuels.
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Durant tout le mois de septembre, après notre cambriolage réussi, nous fûmes tentés, envahis, conquis par le mystère du monde extérieur, surtout celui de la femme, de l'amour, du sexe, que les écrivains occidentaux nous révélaient jour après jour, page après page, livre après livre. Nonseulement le Binoclard était parti sans oser nous dénoncer mais , par chance, le chef de notre village était allé à la ville de Yong Jing, pour assister à un congrès des communistes du district. Profitant de cette vacance du pouvoir politique, et de la discrète anarchie qui régnait momentanément dans le village, nous refusâmes d'aller travailer aux champs, ce dont les villageois, ex-cultivateurs d'opium reconvertis en gardiens de nos âmes, se fichèrent complètement. Je passai ainsi mes journées, ma porte plus hermétiquement verrouillée que jamais, avec des romans occidentaux. Je laissai de côté les Balzac, passion exclusive de Luo, et tombai tour à tour amoureux, avec la frivolité et le sérieux de mes dix-neuf ans, de Flaubert, de Gogol, de Melville, et même de Romain Rolland.
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P. 74
Je décidai de copier mot a mot mes passages préférés d'Ursule. C'était la première fois de ma vie que j'avais envie de recopier un livre. Je cherchai du papier partout dans la chambre, mais ne pus trouver que quelques feuilles de papier à lettres, destinées a écrire a nos parents.

Je choisis alors de copier le texte directement sur la peau de mouton de ma veste. Celle-ci, que les villageois m'avaient offerte lors de mon arrivée, présentait un pêle-mêle de poils de mouton, tantôt longs, tantôt courts, à l'extérieur, et une peau nue à l'intérieur. Je passai un long moment à choisir le texte, à cause de la superficie limitée de ma veste, dont a peau, par endroits, était abîmée, crevassée. Je recopiai le chapitre où Ursule voyage en somnambule. J'aurais voulu être comme elle : pouvoir, endormi sur mon lit, voir ce que ma mère faisait dans notre appartement, à cinq cents kilomètres de distance, assister au dîner de mes parents, observer leurs attitudes, les détails de leur repas, la couleur de leurs assiettes, sentir l'odeur de leurs plats, les entendre converser...
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Une émission présentée par Guillaume Erner, en partenariat avec France Culture.
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