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Critique de Pomponette


Après avoir publié Par-delà le rejet et l'oubli, Vincent Silveira nous délivre dans ce petit conte philosophique d'une cinquantaine de pages un message d'amour et de générosité. Le monde actuel est en pleine ébullition et menace la paix. Une bouffée délirante de populisme secoue les élections dans différents pays. Le président des Etats-Unis Donald Trump impose à tous une frilosité politique et oeuvre déjà à isoler son pays du reste du Monde. D'autres nations comme l'Autriche ou la France voient leurs extrêmes (droite, en l'occurrence) se hisser au rang des candidats sérieux en vue des élections. Le discours se veut empathique vis-à-vis du simple mortel qui vote mais qui ne cadre pas avec leur cadre de vie. Ces prédicateurs sont riches, puissants, vaniteux et imbus de leur rang.

Le personnage central du conte se réveille un beau jour dans une peau neuve. Avec l'impression étrange d'avoir régénéré son esprit, de ne plus errer dans le monde fallacieux des racistes et fascistes de tous poils. Il se savait xénophobe, réticent à accueillir l'autre, le migrant, l'étranger. Il avait vécu comme cela toute sa vie, sans remords ni questionnements. Et puis, il y avait eu cette petite voix, lucide et ensorcelante, sorte de Jiminy Cricket, échappé d'un conte de Walt Disney qui ne s'était pas gênée pour le traiter de " petit fasciste ordinaire, sans envergure, un xénophobe étroit, un raciste de pacotille, ... un égaré manipulé, crédule, un empoté, un enfoiré."

Les expressions ne manquent pas dans ce récit pour réduire ce groupe raciste à une troupe de "moutons galeux qui, comme moi, bêlaient au son vénéneux des sirènes doucereuses". A mesure qu'il s'éloigne de ce monde ostracisé, infecté par la haine et le ressentiment et qui recherche dans l'autre le responsable de ses propres malheurs, l'homme du conte réalise que son cerveau se régénère, libérant plus d'oxygène. Désormais délivré des futilités de la vie, l'individu qu'il est, se construit. L'animalité qui était en lui s'efface progressivement à mesure qu'il devient un être éduqué et policé. La lecture devient plus qu'un passe-temps, une nourriture humaine et salvatrice.

Le survivant d'un monde réfractaire au "vrai changement", désintoxiqué par les nuisances xénophobes se grandit au contact de textes et livres anciens, enfouis dans les décombres de quelques bibliothèques abandonnées. La poussière qui les recouvre les protège de regards trop complaisants. Ils conservent une grâce, une virginité sans pareil. Plus le livre est rare, plus il est beau, plus il parle au lecteur chanceux, comme une confidence chuchotée, un secret avoué du bout des lèvres, sorte de sanctuaire peu violé d'émotions et de révélations qui conserverait toute sa richesse.

Le personnage en a déniché quelques-uns. Des textes sublimes, trois contes qui dénoncent toute la barbarie et la bêtise de communicants qui s'enrichissent aux dépens d'un peuple qui ne réfléchit pas, par paresse ou par conviction. On y retrouve toute la truculence chère à Vincent Silveira. Le style est toujours aussi fluide et agréable, le questionnement habilement mené. C'est conclure que "ces moutons bêlants" participent de la destruction de l'humain, de la raréfaction de la générosité. Les mains ne se tendent plus. Les sourires se font rictus de détestation. Les démagogues les trompent au point que la haine devient leur prison.

Les autodafés évoqués dans le conte " le Poète immolé " qui nous rappelle le film Fahrenheit 451 de François Truffaut, inspiré du roman de Ray Bradbury trahissent la peur des orateurs de voir les électeurs acquérir une conscience éclairée grâce à la lecture. Le conte dédié à Don Quichotte est un hommage au grand-père espagnol du personnage qui a fui Franco et la guerre en Espagne. L'occasion de souligner la monstruosité de régimes dictatoriaux qui assassinent la liberté en muselant la culture.

Les termes sont forts car l'auteur parle de "rédemption" pour le fasciste repenti et nomme "égarés" ceux qui suivent aveuglément cette nouvelle race de barbares qui se servent de mots qui isolent, de phrases méprisantes et accusatrices. Les bouc-émissaires sont au coeur de leurs plaidoiries, et il n'y a guère que la culture et l'érudition qui en viendra à bout.

Or, c'est malicieusement que Vincent Silveira qui voit la nécessité pour chaque auteur de courir le bitume pour faire partager les idées de respect et d'empathie évoque en le nommant son dernier ouvrage : Par-delà le rejet et l'oubli qui évoquait déjà ces idées de paix et de Révolution Sociale. Un conte philosophique qui devrait être lu comme une oeuvre de salut public. Sans prétention mais doté d'une grande force évocatrice.


Lien : https://www.snes.edu/La-meta..
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