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Mettez-vous à ma place, à moi, le vrai Maigret ! Juste cinq minutes ! Cela fait des années qu'un certain Sim s'emploie à me décrire et à me faire vivre des aventures sans que je n'aie mon mot à dire !
Il me fait porter un chapeau-melon que le vrai Maigret ne porte qu'en de très rares occasions : enterrements, cérémonies officielles, …
Et alors, au cinéma, vous avez vu qui m'interprète ? Parfois, c'est un petit type presque aussi large que haut, à d'autres moments un gars plus élancé…
Et puis, qu'a-t-il fait de mes inspecteurs ? Il ne m'en a laissé que trois ? Et les autres ? En plus, il me fait descendre en permanence sur le terrain et papoter avec les gens, comme si avec mes fonctions je n'avais que ça à faire ! Aller sur le terrain ! Je vous jure ! du grand n'importe quoi !
Non ! Non ! Il est temps que je remette les pendules de ce monsieur Sim, devenu Simenon, son vrai nom, depuis que la notoriété l'a rattrapé. Mes mémoires vont faire toute la lumière ! Un peu de vérité vraie ne saurait faire de tort…

Critique :

J'ai passé un excellent moment avec ce Maigret qui se sent dépossédé de sa personnalité par ce qu'en a fait cet écrivain avec la bénédiction des instances supérieures… Pour une fois qu'un auteur met en vedette des policiers et non des gredins, ses supérieurs ont autorisé un jeune homme qui signe ses romans populaires « Sim » à suivre le grand Maigret, à prendre racine dans son bureau. Il suit presque vingt-quatre heures sur vingt-quatre Maigret pour s'inspirer au mieux du personnage. Quand enfin, il publie ses romans visant une littérature de qualité, monsieur Sim signe de son vrai nom : Simenon !
Simenon devient l'ami de Maigret et de son épouse prétendant, dans ses ouvrages rendre la vérité plus vraie car plus vivante que les faits réels qui, rapportés tels quels, sont le plus souvent, bien barbants. Les deux hommes discutent régulièrement faisant valoir leurs points de vue respectifs. La botte de Jarnac assénée à Maigret lui vient de sa propre épouse qui estime le Maigret de Simenon bien plus intéressant que celui que son mari cherche à réhabiliter dans ses mémoires.
J'ai pris beaucoup de plaisir à cette pseudo-confrontation inventée par Simenon, rendant son héros encore plus vrai.
J'apprécie le rythme des enquêtes de Maigret qui n'a pas besoin de centaines de pages pour installer toute une ambiance. Inutile de recourir aux experts en expertitude pour résoudre les énigmes. Il suffit à Maigret d'observer, d'écouter et de parler à ses protagonistes pour que la lumière se fasse.
Un ami me disait il y a quelques temps : « Tu ne trouves pas que les Maigret, c'est dépassé ? »
« Peut-être », ai-je répondu n'en ayant plus lu aucun depuis quatre décennies. M'ennuyant en lisant quelques grosses briques qui n'en finissent pas de me faire bâiller, j'ai fait des fouilles dans ma bibliothèque, me demandant si j'en avais gardé quelques-uns, et j'ai fini par ressusciter des livres de Simenon et, tant qu'à faire, d'Agatha Christie, dont, soit dit en passant, je déteste que « Dix petits nègres » soit devenu « Ils étaient dix », alors que les « Dix petits nègres » reposent sur une comptine. Marre d'un politiquement correct qui n'a rien de correct. Ce serait plus intelligent d'ajouter une petite note pour expliquer le contexte. Parti comme cela, il faudrait retirer tous les domestiques au service de ces lords car leurs conditions d'existence n'étaient guère enviables au regard de nos standards actuels ! Comment accepter que des domestiques restent sept jours sur sept au service de leurs « maîtres » et travaillent des seize ou dix-huit heures par jour ?
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Etrange livre... Jules Maigret se souvient... Comment le pauvre a dû finalement, en désespoir de cause, "entrer dans la police"... (alors qu'il aurait dû "faire docteur" !)... comment il a travaillé d'abord - comme stagiaire - "sur la voie publique"... puis dans les gares (Ambiance glaciaire à la Gare du Nord !)... puis aux "Garnis"... puis à la "Brigade Spéciale" (promotion à plus haut risque létal...)... Sa rencontre avec le jeune journaliste Simenon (une vraie tête-à-claques !)... Mia surtout comment il a rencontré la future Louise Maigret (qui n'a rien d'une Louise de Rênal, comme on sait !)... et comment sa belle-famille regrettait que Louise n'ait pas rencontré un ingénieur des Ponts & Chaussées... Aussi, ce qu'était ce Paris des voitures de police tirées par les chevaux, aux sabots résonnant très fort dans les rues pavées arpentées par l'alors si jeune (et fluet) Maigret...

Comment Maigret a "épaissi" (physiologiquement et professionnellement), aussi !

Grâce à son narrateur ( ' ttention, c'est Jules Maigret qui raconte...), Simenon décrit son propre pesonnage comme un sacré c... horripilant, pas mal frimeur et imbu de lui-même (mais que Mme Maigret tolère et finalement aime bien...), sorte de gandin parasitant la vie du pauvre commissaire, et truffant volontiers ses "récits" d'inexactitudes ! C'est que Jules Maigret aime plutôt l'exactitude (L'a raison !!!). Savoureux jeu de miroirs. J'aime cette (rare) modestie simenonienne...

Pas mal de nostalgie.... Franchement, c'est attachant ! Plein de sève, de "petits détails vrais", d'humour...

Ecrit en 1 à 2 semaines en 1950 (mention finale : "Meung-sur-Loire, le 27 septembre 1950").

Point de méchant criminel (en général, toujours "plein aux as") à traquer, pour cette fois-ci... Juste de jolies tranches de vie d'un obscur fonctionnaire du 36 Quai des Orfèvres, à déguster, page après page...
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Le modèle du commissaire Maigret se livre : il n'est autre que Maigret lui-même, le vrai. Car l'auteur, un certain Sim, ne s'est pas contenté de l'épier, poursuivre, déformer, caricaturer : il lui a aussi volé son patronyme.

Donc Maigret, enfin retraité, prend la plume pour régler son compte à l'outrecuidant (devenu depuis un ami) : il a à coeur de rectifier les erreurs, corriger les inexactitudes, remettre en perspective.... Il y va de son identité même qu'un plagiaire lui a volée, un plagiaire de vie...

Et finalement, l'image qui se dessine.... mais laissons parler madame Maigret : "En somme, je ne vois pas tellement de différence (...) entre ce que tu racontes de toi et ce que Simenon en a dit."

Tant il est vrai que les inexactitudes rendent la vie plus vraisemblable.
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Maigret a bien raison : ses "Mémoires" n'en sont pas. Sorti pour les vingt ans de la création du personnage, le livre pose surtout, sous la forme d'un aimable règlement de comptes entre la créature et son créateur, l'éternelle question de la symbiose entre les deux. Qui est Simenon ? Qui est Maigret ? Maigret est-il Simenon et Simenon est-il Maigret ? Disons-le tout de suite, tous deux s'entendent comme larrons en foire pour faire croire au lecteur d'abord de bonne foi, puis de plus en plus suspicieux, que jamais leurs entités respectives ne se sont mêlées, mieux, qu'elles n'en ont jamais eu ni la pensée, ni la volonté. Rien n'est plus faux. Evidemment.

Le commissaire ouvre le récit en rappelant sa première rencontre, dans le bureau de Xavier Guichard, avec le jeune Georges Sim, lequel se définissait déjà non comme journaliste mais comme romancier et promettait, avec une candeur d'enfant de choeur liégeois, de ne jamais évoquer dans ses récits les affaires en cours. Promesse qu'il a tenue tout en la bafouant avec sérénité, ainsi que nous le fait clairement comprendre Maigret : désormais édité sous le nom de plume de Georges Simenon, le romancier entreprend de mélanger avec enthousiasme les dates, les affaires, les inspecteurs( avec leurs noms, leur âge et leur statut de célibataire ou d'homme marié), affuble distraitement du patronyme de "Torrence" un inspecteur qui trouve la mort dès le premier Maigret,"Pietr-le-Letton", tout ça pour s'apercevoir, plusieurs volumes plus tard, qu'il ne s'agissait en rien de Torrence (on admirera au passage l'habileté du rattrapage et le machiavélisme débonnaire de l'écrivain qui affirme à son commissaire, avec une innocence désarmante, que, de toutes façons, il ne se relit jamais), flanque Maigret à la retraite sans même lui demander son avis, simplement parce qu'il "aime bien l'ambiance de Meung-sur-Loire" et que "cela le changera - lui, Simenon - du Quai des Orfèvres", puis ressort son commissaire du placard pour le relancer dans la vie professionnelle sans autre forme de procès et, par la force des choses et avec le même naturel qu'il avait mis à en faire un retraité de l'Etat, en le rajeunissant au passage.

Simenon, de son côté, quand Maigret lui laisse la parole, explique qu'il faut toujours simplifier et qu'aucun lecteur ne croirait la vérité "toute crue." S'il a pris le véritable nom du commissaire, c'est parce que celui-ci était déjà dans sa tête et qu'il y était entré avec ce nom, voilà. Or, quand ce genre de choses lui arrivent, un écrivain n'y peut plus rien : il doit obéir. "A qui ?" est tenté de grogner Maigret. Mais Simenon, si génial qu'il est, n'a pas la réponse : c'est ainsi, pour lui comme pour tant de ses confrères en écriture. S'il n'obéissait pas, il lui deviendrait impossible d'écrire.

"Les Mémoires de Maigret", que l'on peut considérer comme une oeuvre mineure dans la geste maigretienne, n'en reste pas moins tout à la fois un formidable hommage à la Police et aux policiers, depuis l'agent en pèlerine qui existait encore à l'époque jusqu'au "Patron" suprême, dans son bureau du 36, et une tentative de réflexion et d'explication sur l'écriture. L'hommage, lui, est pratiquement complet. A se demander si Simenon n'a pas rêvé un jour de se faire policier ! ... ;o) La tentative, elle, reste une tentative car, si approfondie que puisse être la réflexion d'un écrivain, quel que soit son talent, voire son génie, sur la force qui le pousse, elle ne saurait jamais prétendre à l'exhaustivité. Il y a un mystère dans l'écriture, pas seulement dans le "style" que l'on se crée ou dans l'univers qu'on imagine, mais aussi dans l'interpénétration qui s'effectue entre le créateur et ses créatures. Si Balzac est Rastignac, il est aussi Vautrin comme il est Mme de Mortsauf ou le Père Goriot. Et, avec tout ça, il est aussi et avant tout ... Balzac. de même pour Simenon, qui est Maigret mais aussi l'impossible Valentine Besson, la douce Mme Maigret, le charretier meurtrier de "La Providence" ou Pietr-le-Letton et même Maria, ce "fauve" à qui il fait placer des fleurs dans sa chambre d'accouchée bien qu'elle ait pris son plaisir à torturer et à tuer.

Ce mystère-là, Maigret lui-même ne saurait le résoudre. Simenon encore moins. C'est une force qui va, qui rêve, qui s'impose, qui vous tourmente, qui vous fait la tête alors que vous êtes innocent de tout crime envers elle, qui vous submerge et qui va jusqu'à faire semblant, parfois, comme ça, pour rire ou, qui sait ? par pur sadisme, de vous abandonner. Voilà : elle a disparu. Vous êtes soulagé, n'est-ce pas ? ... Non. Justement. Vous n'êtes plus vous-même. Vous êtes un écrivain : vous êtes cette force et cette force, c'est vous. Si elle disparaît, vous disparaissez.

"Les Mémoires de Maigret" sont donc, selon nous, à lire surtout sous cet angle double : la réflexion sur la vocation de policier - et sur celle d'écrivain. Dans les deux cas, pour les vrais, pour les enragés, deux sacerdoces. On entre dans la Police comme on entrerait dans les ordres ... ou comme on entre en écriture. Simenon en avait certainement conscience mais, auteur à succès, qui écrivait sans se relire et que La Pléiade attendit longtemps, peut-être trouvait-il un peu ridicule de l'exposer aussi nettement. Il se contente donc de nous le laisser entendre dans ce récit bourré d'anecdotes et plein d'humour. A lire tranquillement, mais n'oubliez pas : il n'y a ici aucune intrigue policière, rien que deux questions non résolues à ce jour : pourquoi l'écrivain écrit-il et pourquoi diable ses personnages finissent-ils, un jour ou l'autre, par lui réclamer de prendre la parole tout seuls, comme des grands ? (Si vous trouvez la solution, vous nous prévenez, hein ? on compte sur vous !) ;o)
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Pas vraiment une enquête de Simenon, mais un roman avec un effet miroir brillant du reflet de Simenon et de Maigret, du vrai reflété par le faux ou l'inverse, enfin peu importe : entre réalité et fiction.

Zoom sur la fonction de policier et de ses ‘fréquentations' par la force des choses dans tout Paris.

Mémoires étranges et intéressantes.
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Dans une mise en abyme quasi schizophrène, Jules Maigret rédige ses mémoires et règle ses comptes avec son « biographe », Georges Simenon, à l'occasion de leurs vingt années de collaboration.

Une façon de donner plus de corps et de vécu au commissaire au travers de son enfance, sa carrière, sa rencontre avec Louise qui deviendra Madame Maigret, et sa relation compliquée avec Simenon.

Un exercice amusant – mais un peu lassant – sans meurtre ni enquête. Une occasion aussi pour l'auteur d'excuser les incohérences ou les erreurs chronologiques qui parsèment forcément une aussi longue série
Lien : https://www.noid.ch/les-memo..
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Je m'attendais à y trouver une enquête...et j'y ai découvert une espèce de dialogue entre Maigret et Simenon! Fort interessant et qui décrit les origines, la jeunesse et le début de carrière de Maigret .C'est biensur finement écrit et j'ai pris plaisir à découvrir la vie parisienne des années 30 et les conditions de travail de la police à ce moment là! Une belle description qui rend le fameux commissaire encore plus iconique que ce qu 'il était déjà!
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Maigret raconte sa vie dans un livre, où, comme il l'écrit dès le premier chapitre « je ne suis pas fâché de l'occasion qui se présente de m'expliquer enfin sur mes accointances avec le nommé Simenon ». Les relations et les échanges entre le créateur et son personnage fétiche (j'ai du mal à dure « héros » pour Maigret) font que Les mémoires de Maigret n'est pas un roman comme les autres dans la série des enquêtes du commissaire. D'ailleurs, d'enquête, il n'y en a pas vraiment, si ce n'est à travers quelques bribes d'anecdotes. C'est toutefois un livre intéressant (bien qu'un peu complaisant) qui vaut surtout pour des précisions – ou des rappels - sur les origines familiales de Maigret (Cf. L'affaire Saint Fiacre), ses débuts de dans la police (déjà évoqués dans La première enquête de Maigret), sa rencontre avec Louise, le boulevard Richard Lenoir…

Mais les divers postes occupés par Maigret lui permettent également d'évoquer Paris, dont il connaît « ses rues, ses grands magasins, ses gares, ses apaches, ses prostituées, ses garnis miteux renfermant un univers cosmopolite ». Et aussi de parler de la méthode Maigret, plutôt la non-méthode, fondée sur l'imprégnation dans le milieu, le lien entre le policier et celui qu'il traque, la compréhension des autres en fait.

Pas le plus passionnant des Maigret sans doute, mais un livre récréatif et finalement utile à ceux qui souhaitent faire le point sur le commissaire et les personnes qui l'entourent. Je suis toutefois assez surpris que les éditeurs de Simenon dans la bibliothèque de la Pléiade l'aient fait figurer dans leur sélection.
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Une mise en abîme géniale. Maigret prend la plume. Ce n'est pas un livre de Simenon, non, c'est un livre de Maigret. Plus précisément Maigret nous livre ici ses mémoires. C'est de bonne guerre que diable. Combien Simenon en a écrit de livres de mémoires lui ? et combien de livres prenant Maigret pour héro ? Et à son corps défendant encore ! Alors maintenant qu'il est retraité Maigret va tout nous dire. Comment il a fait la rencontre de Sim, les imperfections et les petites incohérences de ses livres. Il faut bien qu'il rétablisse la vérité, lui Maigret. Sur sa vie, sur celle de policier, et sur son amitié avec ce Simenon.

Pour qui a dévorer quelques Maigret cette lecture est unique. Pour les autres et bien mieux vaut commencer par d'autres titres et puis venir à celui-ci un peu plus tard. Avec les références, avec les codes. Mais surtout y venir. Parceque là Simenon régale. J'ai dit Simenon ? Je voulais dire Maigret bien sûr.
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Quand l'auteur laisse les rênes à sa créature...

Dans cette fiction autobiographique, Jules Maigret, ce "raccommodeur de destinées" passe à table et corrige quelques à-peu-près et approximations de son démiurge Georges Simenon. En 8 courts chapitres, l'homme à la pipe revient sur son enfance, sa vocation, ses premières rencontres avec Madame Maigret, sa carrière et son amitié avec l'auteur. Ce qui surprend le plus dans cet ouroboros littéraire, c'est la légèreté du style, son humour retenu et ses embarras d'amateur. En se glissant dans le pardessus de son illustre commissaire, Simenon sourit soudain et cette feinte désinvolture lui sied.

Cet exercice de style se dévore allégrement et, sous couvert d'un jeu avec son lecteur complice, Simenon distille quelques secrets de fabrication, reconnaît ses "vérités arrangées qui font plus vrai que nature", déplore l'illustration cinématographique de son personnage et, dans son portrait en jeune homme ("le petit Sim"), s'attendrit de ses ridicules juvéniles.

Un incontournable addenda à la fresque maigretienne.
Lien : http://lavieerrante.over-blo..
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