le temps des Carbec :
Ces messieurs de Saint Malo Tome II /
Bernard Simiot
On retrouve dans cette suite la famille Carbec en la personne de Marie-Leone, née le Coz de la Ranceraie, épouse de
Jean-Marie, fils de Mathieu Carbec.
Jean Marie, cap-hornier respecté et admiré vient de mourir subitement, emporté par les fièvres dans la fleur de l'âge. Aventurier et homme d'affaires,
Jean-Marie avait aussi pêché la morue à Terre-Neuve, fait la course aux Anglais et au Hollandais pour sauver Saint –Malo, et aussi vendu de la toile à Cadix. Les affaires de
Jean-Marie ont été florissantes et Marie-Leone va devoir les gérer au mieux et faire face aux difficultés consécutives à la mort de son mari avec quatre enfants encore en bas âge. Et ce premier soir de veuve elle a décidé de coucher dans le grand lit à baldaquin qui a bercé leur amour. Pour elle,
Jean-Marie c'était la terre et le ciel, l'eau et le soleil.
Jean-Marie avait déjà tout prévu pour ses quatre enfants et l'avait annoncé au cours d'un discours :
Jean-Pierre l'aîné sera armateur comme son père, Jean-François sera dans les gardes marines, le petit Jean-Luc sera au Parlement, et la jolie
Marie Thérèse avec la dot conséquente qu'elle apportera trouvera un beau marquis à épouser. Marie-Leone peut compter sur l'aide de Solène la servante dévouée et inconsolable. Quant à Paramé, alias Rose le Moal, la vielle nourrice du capitaine Carbec, elle est prostrée dans son coin comme hors du temps. Et puis il y a aussi l'inénarrable Clacla ex poissonnière devenue riche une fois appelée comtesse de Morzic, dame de la Couesnière, après avoir épousé en roisième noce le comte du même nom, vite disparu du reste. Elle avait épousé en seconde noce Mathieu Carbec le père de
Jean-Marie. Elle avait initié
Jean-Marie aux choses du sexe et « elle en gardait une mémoire attendrie parce que destinée à n'avoir jamais d'enfant elle avait connu alors la révélation des jeunes corps maladroits et lisses qu'on tient dans des bras maternels au moment des gros orages de la chair. »
L'histoire commence en 1715, l'année de la mort du Roi Soleil. On sent à nouveau à travers les embruns qui balaient les remparts malouins ce parfum d'aventure et de sensualité qui avait illuminé le tome I et l'auteur nous livre avec talent une chronique de la société malouine des gens de mer et de terre le tout dans un style somptueux, riche et plaisant, telle une grande et magnifique fresque historique des années qui ont suivi la mort de Louis XIV dans la Bretagne des marins aventuriers pratiquant le commerce interlope avec le Pérou et bien sûr la course aux Anglais et aux Hollandais quand cela restait possible. Saint Malo a été de tout temps le fief des corsaires.
Au cours de ces années, on fait connaissance d'innombrables personnages historiques comme M. Dupleix gouverneur de Pondichéry, et bien d'autres qui s'illustrèrent durant la régence qui suivit la mort de Louis XIV, sous la gouvernance du Duc d'Orléans, le jeune roi Louis XV n'étant âgé que de 5 ans. Aux finances, on retrouve JohnLaw l'inventeur du billet de banque et créateur de la Compagnie des Indes, puis le Cardinal Fleury, un fin politique. Arrivé trop vite au terme des 660 pages de ce roman puissant, on se sent quelque peu orphelin de tous ces personnages magnifiques et sympathiques, aventuriers de tout poil, comploteurs, négriers, séducteurs, banquiers, diplomates, capitaines et …les femmes toutes plus charmantes les unes que les autres. Et puis pour qui a visité Saint Malo, ses remparts et la vieille ville, ce roman parle particulièrement.