Quand je recherche, dans mes lectures, une douce nostalgie, une mélancolie empreinte de tendresse, je me tourne vers
Marie Sizun et le charme opère chaque fois.
Nous sommes en 1943, en Seine-et-Oise; la petite Marie 4-5 ans vivait à Paris avec sa mère, Véra, comédienne; son père, qu'elle n'a pas connu, est prisonnier. Pour la protéger, Véra la confie aux vieilles tantes de son mari qui vivent dans une grande maison entourée d'un parc que Marie surnomme "
la maison-guerre"; elle y restera jusqu'en octobre 1944 quand son père, libéré, viendra la chercher.
L'adulte qu'est devenue la narratrice s'adresse à l'enfant qu'elle était alors; elle convoque la maison de ces 2 années d'enfance comme un doudou rassurant, comme une madeleine de
Proust; dans cette maison, entourée de vieilles personnes, elle a été heureuse mais elle a également découvert, sans qu'on lui dise rien, les horreurs de la guerre, le rejet des juifs, la mort. Elle a pressenti les drames sans vraiment en comprendre la portée car elle n'était entourée que de silences, d'allusions, de conversations interrompues.
On retrouve, dans ce roman, les thèmes chers à
Marie Sizun:
* la maison, lieu de souvenirs mais aussi de transmission, de vies croisées, de destins liés; pour elle, les maisons ont une âme, disent une histoire
* le lien indestructible, charnel entre une mère et sa petite fille même, et surtout, si la mère est absente; l'absence est comblée, en partie, par une idéalisation rassurante
* la découverte du père, d'abord rejeté comme étant celui qui s'interpose entre l'enfant et sa mère puis adopté, aimé.
Ce qui rend ce roman poignant, c'est que la vie, les drames, les joies, les peines sont vus par les yeux d'une enfant et plus tard d'une adolescente. L'émotion jaillit du manque de la mère, de l'attente de ses lettres, de sa venue, des moments de joie et de bonheur passés ensemble mais si vite terminés.
Ce roman est le huitième pour
Marie Sizun et le 10ème pour moi; chaque fois que je referme ses livres, je suis comme apaisée par la beauté du texte, par la tendresse de son écriture malgré les évènements douloureux que subissent ses personnages.
Une auteure qui mériterait d'être mieux connue.