La Mémoire assassinée

Alors que la télévision se complaisait ordinairement dans le macabre ou le sordide, le Mallory Caine Show s’efforçait au contraire de mettre des gens heureux sous les feux de rampe. Le spectateur avait besoin d’exemples, pas d’un reflet systématique des maux qui accablaient son quotidien. La télévision-spectacle, avec son lot de difformités, de souffrances et de larmes, avait désormais vécu – c’était du moins l’opinion de Mallory, qui avait imposé son style : l’optimisme. Le public appréciait cette bouffée d’oxygène.

Tout cela est très généreux, mais notre charité ne doit pas nous cacher la réalité. Ces enfants ont assisté à l’assassinat de leurs parents. Qui sait à quelles autres horreurs elles ont été exposées durant leur courte vie ? Je ne t’apprends pas ce qu’on dit sur cette affaire : ce serait une histoire de gangs ou je ne sais quelle mafia…

Malgré sa gêne initiale face à la caméra, elle était parvenue à s’assurer les faveurs du public par sa modestie, sa gentillesse avec certains de ses invités et son audace face à d’autres.

Malgré ses trente-six ans et les deux enfants auxquels elle avait donné le jour, de nombreux hommes se retournaient toujours sur son passage.

Les hommes ne tombent pas aveuglément dans la perversion. C’est les yeux ouverts qu’ils s’abandonnent à leurs passions.
Samuel Johnson