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Critique de belette2911


Ce livre, à peine était-il paru que je l'ai voulu… Sans trop tarder, je l'ai lu et me voici sur le cul ! Mon plaisir de lecture est repu.

S'il y a une chose que j'apprécie, dans un roman, c'est que l'auteur me surprenne, qu'il emprunte des sentiers auxquels je ne pensais pas, auxquels je ne m'attendaient pas.

Pari réussi tant j'ai été surprise de la tournure que le récit prendra, partant dans une direction inattendue, m'entraînant dans l'immensité enneigée de la steppe et me tordant le coeur dans tous les sens.

L'avantage de n'avoir lu qu'un résumé succint m'a permis d'en savoir le moins possible sur le roman et j'ai gardé intacte ma virginité (littéraire, bien entendu).

Déjà, l'environnement me plaisait : Ukraine, 1930, un petit village perdu au fin fond du fin fond du trou du cul du monde. Ici, on vit chichement avec les quelques maigres possessions que l'on possède. J'avoue avoir un faible pour les récits se passant en Russie où dans ses alentours.

Le côté politique très présent est un autre argument qui m'a plu… Nos villageois vivent dans la crainte que l'on vienne tout leur confisquer.

Avec ce postulat de départ, je m'attendais à un huis clos tournant autour du fait que Luka, personnage principal et auteur du récit, avait fait entrer dans le village un homme grièvement blessé qui cachait sur son traineau les cadavres de deux enfants dont un était atrocement mutilé.

Huis clos il y aura, mais l'auteur, dans un récit flamboyant, nous entraînera ensuite bien plu loin, dans une aventure où les épais manteaux sont de mises, les gants et la chapka aussi.

Accrochez-vous, vous allez vivre quelques heures angoissante de lecture qui vont vous transporter dans une époque fort sombre de par son contexte politique.

Le suspense présent dans ce livre est à couper au couteau tellement il est épais, dense, prenant.

Ici, la nature est tout sauf clémente et elle a façonné les gens à son image. Ici, il n'y a pas de faible femme, elle ont toutes endurées plus qu'il n'en faut dans leur courte vie de misère : guerre, révolution, famine, perte des proches…

Le personnage de Luka est d'un réalisme à couper le souffle, oscillant entre une humanité rare, une perception de la vie très forte, mais n'hésitant pas aussi à basculer du côté obscur de la Force.

Luka, c'est un vétéran de la guerre, tuer, ce fut son métier, il s'il doit le refaire afin de préserver sa famille, il le refera sans aucun état d'âme.

Tous les autres qui gravitent autour de lui sont aussi empreints d'une réalité rarement atteinte dans un roman. Ils sont travaillés, profonds, sans jamais être tout bon ou tout méchant.

Même les hommes bien peuvent faire le mal et a contrario, même les hommes méchants peuvent faire le bien.

Ce que tu as commis un jour parce que tu étais soldat et que tu obéissais aux ordres, c'est ce que tu me reproches aujourd'hui de commettre, moi qui suis un soldat et qui obéit aux ordres… C'est sadique mais cela décrit bien ce qui se passe depuis toujours : on reproche aux autres de faire ce que, un jour, nous leur avons fait.

Le contexte social du livre en fait un roman noir et comme je vous le disais plus haut, l'aspect politique est fort présent avec le communisme et toute la puissance de son illogisme puisque l'on prend à des pauvres gens leurs maigres biens, leurs maigres provisions pour l'hiver, pour les donner – sois-disant – à la collectivité et à ceux qui n'ont rien… Imbécilité et mauvaise foi, quand vous nous tenez.

Le roman nous parlera aussi de la chasse aux koulaks, ces paysans supposés êtres riches parce qu'ils possédaient un lopin de terre, une vache et deux poules.

Si on feuillette un peu la pages de l'Histoire, on ne peut qu'être glacé d'effroi devant la « collectivisation » des terres mise en place par Staline, de 1929 à 1933. Là, nous sommes en plein dedans et on imagine les horreurs durant la lecture.

À un moment donné, j'ai tiqué parce que l'auteur prenait un raccourci qui ne collait pas avec son talent. le diable se cache toujours dans les détails et Sherlock Holmes n'aurait pas mieux déduit que moi puisque j'avais compris. Là, l'auteur ne m'a pas surpris mais a confirmé son talent pour les fausses pistes, le coquin !

Oui, c'est un véritable coup de coeur, ce livre.

Des personnages charismatiques oscillant souvent entre leurs côtés humaniste et leur part sombre qui peut faire d'eux des assassins qui n'ont pas de remords; un récit à la fois humain et barbare, la frontière étant ténue entre les deux, elle aussi; de la fraternité côtoyant de l'égoïsme pur et dur dicté par les aléas de la vie ou de la nature; des paysages enneigés à couper le souffle; un froid glacial, mordant, piquant; de la chaleur humaine, parfois distillé par des bourreaux.

Ici, rien n'est ni tout blanc ni tout noir, mais entre gris clair et gris foncé.

C'est tout ça, ce roman… avec des larmes et du sang.

Un grand moment de lecture et un déchirement de devoir quitter ces hommes et ces femmes, souvent rudes, mais possédant un coeur.

Lien : http://thecanniballecteur.wo..
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