Susan Sontag dresse, dans ce roman un portrait attachant de Sir William Hamilton, ambassadeur anglais à Naples, «avec ce portrait que nous avons de lui, quelque peu austère, en perruque poudrée, long manteau élégant et souliers à boucles, un profil d'oiseau, de la superbe, l'air vigilant, observateur, résolu dans son détachement.» le récit de l'amour fidèle que partagent pendant seize ans «Il Cavaliere» (surnom bien dévalorisé par les temps qui courent) et sa première épouse, Catherine, est touchant. C'est pour elle qu'il abandonne son siège à la Chambre des communes, pour lui permettre, en vain, de retrouver la santé au soleil de l'Italie. Son second mariage, avec un charmante aventurière, n'est que la régularisation d'une liaison née du souci de sortir un neveu d'embarras financiers et de le débarrasser d'une encombrante maitresse. Encombrante mais charmante. Hamilton s'en fait le Pygmalion, et finit, malgré le qu'en-dira-t-on, par l'épouser. "My fair lady" ! Son égérie connait d'ailleurs le succès, par son art singulier de prendre la pose, pour le contentement de ses admirateurs et des peintres qui se pressent pour faire son portrait, portrait que son mari s'empresse de revendre, comme le racontera, plus tard, dans ses souvenirs, Elisabeth Vigée-Lebrun. La loyauté d'Hamilton est admirable, en amour comme en amitié. Lorsque fait irruption dans la baie de Naple l'illustre Nelson avec sa flotte et auréolé de ses victoires («Pour tout dire: le héros est un petit homme mutilé, édenté, usé et trop maigre» écrit Sontag p. 227), il l'admire et l'affectionne comme son meilleur ami. Qu'il devienne l'amant de sa femme et lui fasse un enfant ne saurait troubler leurs relations. La femme et l'amant lui tiendront la main à sa mort et le pleureront sincèrement. Il y a de la modernité dans cette relation triangulaire, dont
Sartre et
Simone de Beauvoir en feront plus tard la théorie. L'un des intérêts du roman, que son titre de dévoile pas, est le portrait saisissant que fait
Susan Sontag de la passion du collectionneur qu'est essentiellement William Hamilton. Mais plus que pour ses femmes et pour ses collections, la grande passion d'Hamilton est pour le volcan qui domine la baie de Naples, ce Vésuve, qu'il contemple de sa terrasse, empanaché ou rougeoyant, qu'il admire, parcourt, explore, étudie et illustre. de ses observations minutieuses et raisonnées naitra, dans les lumières du sud de l'Italie et du XVIIIème siècle, la volcanologie. le roman de
Susan Sontag peut être drolatique, lorsqu'elle décrit les fastes et les frasques du roi de Naples, flatulent, obèse et immature. Sa fuite devant les armées françaises, et les horreurs liées à son retour font un tableau saisissant. L'auteur utilise un registre polyphonique, en faisant intervenir divers protagonistes, éclairant de leurs différents points de vue les mêmes scènes. le concert d'éloges qui a accompagné ce roman était décidément bien mérité.
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