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EAN : 9782265099302
448 pages
Fleuve Editions (12/11/2015)
4.01/5   83 notes
Résumé :
Trois histoires s’entremêlent dans ce thriller où le héros, le commissaire Ludovic Mistral, va devoir lutter sur plusieurs fronts : des meurtres d’albinos inexplicables, un réseau de prostitution international et un tueur insaisissable.
Alors que des cadavres découpés sont retrouvés dans des squats de La Goutte d’or, Mistral et son équipe enquêtent sur un domaine qui les laisse perplexes et sceptiques. En effet, à l’exception d’Ingrid Sainte-Rose, flic d’orig... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (45) Voir plus Ajouter une critique
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Au premier roman de l'auteur, j'ai mis 3 étoiles, au deuxième 4 et donc logiquement je mets le maximum pour son troisième roman.
Jean Marc Souvira est officier au 36 quai des orfevres, il connait donc bien la musique des sérénades criminelles. Mais c'était justement son problème: trop technique, trop réaliste et pas assez romanesque pour faire un trés bon polar.

Les sirènes noires lui permettent d'intégrer les grands du polar francais.
Tout d'abord, son héros, le commandant Mistral a pris du coffre, sa personnalité s'est complexifié et sa vie personnelle deteint sur son boulot ( comme chacun d'entre nous). Ses équipiers sont beaucoup plus que des faire valoir, notamment l'officier Dalmatte.

Mais surtout son style est plus abouti: il mêle 4 enquêtes differentes- qui se rejoindront ou pas- avec une dextérité remarquable. La conséquence en est que les procédures judiciaires n'altèrent pas un rythme soutenu et un suspens haletant tout en étant d'un réalisme étouffant . En effet, ces "affaires" nous parlent de traites des blanches , qui en fait sont noires puisque des jeunes filles nigériannes viennent faire le trottoir en France, mais il nous parle aussi d'albinos , noires mais un peu moins que noires mais beaucoup plus que blanches qui, dans la culture africaine ont un statut très particulier.

Si vous aimez les vrais polars réalistes , lisez ce roman de toute urgence.
Je ne sais pas s'il ya des sirènes noires mais il y a un nouveau roi du polar noir blanc.

Mais ce n'est que mon humble avis
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Trois jeunes filles nigérianes participent à une étrange cérémonie ayant pour vocation de les protéger, mais aussi de les rendre folles si jamais elles se parjurent. Encouragées par leur mère, cette cérémonie marque leur départ du pays pour devenir « coiffeuse » ou « esthéticienne » à Paris, en France. A Paris, justement, le commissaire Ludovic Mistral, dont le couple bat de l'aile, et son équipe, travaillent d'arrache-pied sur des meurtres très étranges et pour lesquels les indices sont très minces : des troncs de corps humain, sans tête ni membre, impossible à identifier. Pendant ce temps-là, un homme ayant fui lors d'une perquisition à son appartement parcourt les parkings pour trouver les endroits où il ne sera pas filmé. Il savoure d'avance son crime.

Les sirènes noires, c'est le nom poétiques de ces femmes qui arpentent les trottoirs de Paris ou d'ailleurs pour "rembourser" une dette qui n'en finit jamais de s'alourdir et qui n'ont aucun espoir de salut, emprisonnées par la "magie" du sorcier qui a gardé une "part d'elles" avant de partir. Dans ce livre, Jean-Marc Souvira, lui-même commissaire divisionnaire à la police criminelle, entremêle leur histoire moderne à des pratiques et croyances d'un autre temps : les rituels de magie où l'on emprisonne l'esprit, la puissance du sang et des membres des albinos, une sorte de vaudou à la sauce des téléphones portables et d'internet. Il évoque également la traque d'un tueur en série qui étouffe les jeunes femmes dans les parkings pour mieux les violer. On suit également Ludovic sur les traces de son passé, de son présent avec ses fils et sa femme, et ses questions sur l'avenir.
J'ai eu un peu de mal, au départ, à raccrocher les wagons de ces intrigues multiples portées par les voix de nombreux personnages de l'histoire. Comme dans le magicien, le premier roman de cet auteur, le début est un peu lent, et puis, sans qu'on ne s'aperçoive de rien, les liens se font et se défont, l'intrigue, voire les intrigues, accrochent et s'imbriquent pour finir par s'emballer. Les personnages comme leurs histoires viennent hanter les lecteurs : combien y a-t'il de Margaret, renommée Stella, à se vendre de force aux passants de Barbès ?
L'une des grandes forces de ce livre vient de son réalisme, celui de l'histoire, celui de ces hommes et femmes flics, qui sont assez loin des clichés habituels des romans policiers : ni Colombo, ni super héros de la gâchette, Souvira fait dans la "sobriété", sans sensationnalisme et sans "gore" autre que descriptif, voire clinique. Les personnages y compris secondaires sont, sauf exception (j'avoue avoir trouvé Sylvie aussi attachante que caricaturale...), aussi très crédibles (une mention particulière pour Dalmate, j'aime beaucoup !). le second point fort de cet auteur, que j'avais déjà remarqué dans le magicien, c'est la maitrise du rythme de l'histoire : l'auteur nous amène exactement là où il veut et seulement quand il le veut. le lecteur a beau être omniscient, puisque disposant du regard et des actions de nombreux personnages, on reste surpris par la tournure des évènements, qu'on l'avait ou pas prévue ! C'est assez déstabilisant... mais réussi !
Enfin, et de façon très personnelle, j'ai voyagé au travers de ces enquêtes dans tout un tas d'endroits que je connais bien : la rue Guisard, où habite l'un des personnages, est la rue de mon coiffeur ; le Monteverdi fait un excellent risotto (la prochaine fois, je me laisse tenter par le mille-feuilles !) ; je passe devant l'IML à chaque fois que je me rends à la gare de Lyon, direction Aix-en-Provence, dont je suis originaire ; j'ai failli aller au collège Mignet (chez Souvira, il s'agit d'un lycée...) mais finalement, je suis allée à un autre, dans lequel ma meilleure amie du moment habitait le Tholonet. Plus tard, mon lycée en étant proche, j'allais régulièrement déjeuner au barrage de Bimont... C'est franchement très plaisant de suivre tous ces évènements en connaissant les lieux !

Bref, Les sirènes noires, c'est vraiment bien ! Un grand merci aux éditions à Fleuve Editions et à Babelio pour m'avoir permis de renouer avec cet auteur que j'avais un peu perdu de vue !!!
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Avant de commencer cette critique, je souhaite faire part de toute ma compassion et de mon respect envers les victimes des attentats de vendredi à Paris, et de leurs familles.


Je remercie les Editions Fleuve Noir et Masse critique de Babelio de m'avoir donné la possibilité de lire Les Sirènes Noires de Jean-Marc Souvira et de participer le 5 novembre à une rencontre-dédicace avec le romancier,au siège des Editions Fleuve Noir à Paris.

Comme le résume Balme, directeur de la PJ, le supérieur de Ludovic Mistral : "arrivés à un certain niveau, les emmerdements de s'additionnent plus, ils se multiplient". Et c'est bien le cas pour Mistral, Chef de la brigade criminelle de la PJ. Sur son bureau, deux dossiers, deux enquêtes qu'il va devoir gérer en parallèle : le tueur des parkings, qui, invisible, agresse et tue des jeunes femmes dans les parkings, des fous qui tuent et découpent en morceaux de jeunes africains albinos ; se rajoutent la disparition d'une jeune femme Ingrid Sainte-Rose, policier à la brigade criminelle, et un "cold case"....

Jean-Marc Souvira, alors qu'il nous détaille les différentes affaires auxquelles est confronté Mistral, nous dépeint simultanément le parcours difficile de trois jeunes filles nigériannes, depuis leur village d'Afrique jusqu'aux trottoirs de Paris, ainsi que les manipulations mentales liées à la magie africaine, dont elles font l'objet. Ainsi Magaret, rebaptisée Stella, accepte sans aucune rebéllion de devenir une esclave à la solde d'une Africaine, mère maquerelle qui fait la traite des êtres humains, achetant les jeunes filles à leurs mères en Afrique, en faisant miroiter un avenir de coiffeuse en France.

Tout l'art du romancier va consister à rattacher progressivement les différentes enquêtes les unes aux autres, mais aussi à souligner comment les policiers vont, pour pouvoir progresser dans leurs enquêtes, devoir accepter d'emprunter des "chemins de traverse" : de s'adapter au milieu dans lequel ils enquêtent, de comprendre son fonctionnement, de jongler entre procédure judiciaire classique et pure intuition.

Renonçant provisoirement à ses certitudes cartésiennes, Mistral va découvrir le poids de la magie et des sorciers qui, en région parisienne, jouent un rôle dans la communauté africaine.Afin de comprendre les meurtres des albinos africains, Ludovic Mistral doit demander l'aide d'un de ses amis, Hervé le Carme, universitaire spécialiste de l'Afrique.Hervé le Carme et Ludovic Mistral ont fait connaissance lors d'un drame : l'assassinat de la femme d'Hervé le Carme, assassinat jamais élucidé. Depuis l'universitaire a sombré dans une profonde dépression, sur fond d'alcool.

L'ancien séminariste Dalmate, va, quant à lui, faire progresser son enquête sur les milieux de la prostitution africaine en ayant recours aux précieuses informations fournies par une vieille prostituée française, Sylvie, dont le rôle n'est pas des moindres.

Bien sûr, Mistral et son équipe vont résoudre les différentes énigmes - Mistral au terme d'une grande remise en question, sur son entourage et ses certitudes.

J'ai retrouvé avec plaisir les ambiances des deux autres romans de Jean-Marc Souvira, le Magicien et le vent t'emportera. Ludovic Mistral est un policier attachant, qui jongle entre sa vie familiale, sa femme et ses deux fils, et la résolution d'enquêtes difficiles. Les relations d'estime avec ses collaborateurs, Dalmate et Calderone sont bien décrites. La description des enquêtes, leur enchevêtrement m'a vraiment intéressée. J'ai beaucoup aimé également la description du monde de la prostitution africaine, de la manipulation mentale qui a été faite par Jean-Marc Souvira. On ne peut que s'apitoyer sur le sort des prostituées africaines, Sirènes Noires, comme les nomme Sylvie, sirènes que nous avons tous vues dans les rues de Paris.

Je dirais en conclusion que les Sirènes Noires est un très bon roman policier, qui met un accent particulier sur la psychologie. Un roman qui précise, complète le Magicien, et Et le vent t'emportera, les précédents romans de Jean-Marc Souvira. le personnage de Ludovic Mistral prend de l'épaisseur, son fonctionnement, son équipe font sens. Paradoxalement, on a hâte de le retrouver face à de nouvelles enquêtes, mais aussi face à ses problèmes et ses démons, et de voir comment il va réagir, en homme juste, humain, dans un monde qu'il tente de comprendre.

J'ai pris un grand plaisir à participer à la rencontre-dédicace. Jean-Marc Souvira, policier, nous a parlé avec passion de l'office central pour la repression de la Traite des Etres humains qu'il a dirigé. Avec simplicité, et professionnalisme, il nous a expliqué tous les ressorts du proxénétisme africain et a répondu avec gentillesse et humour aux questions de Pierre Krause - toujours aussi habile et souriant - et de son auditoire, sur son expérience de policier, mais aussi sur son écriture et ses romans. Un moment d'émotion partagé par les lecteurs et lectrices.

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Les sirènes noires est le dernier livre de Jean Marc Souvira. Il sort aujourd'hui, 12 novembre 2015.

Je remercie les éditions Fleuve (et Fleuve Noir) ainsi que Babelio pour cet envoi et la très intéressante rencontre avec l'auteur jeudi passée.

J'avais entendu parler de cet auteur mais je n'avais jamais eu l'occasion encore de le lire. Cette remarque est désormais du passé et j'ai depuis acheté (et fait dédicacé par Jean Marc Souvira) les deux premières enquêtes de Frédéric Mistral, son alter égo flic, tellement j'ai été conquis et enthousiasmé par ce 3ème opus. C'est sans contestation un nouveau coup de coeur.

Très réalistes, les sirènes noires se dévorent tellement le rythme est haletant et le contenu est passionnant. Intrigues, personnages, action, écriture, style, adrénaline, vous l'avez déjà compris j'ai tout apprécié dans ce polar.

Le livre nous conte le quotidien des flics du 36, quai des orfèvres. Frédéric Mistral a 4 enquêtes à mener de front, toutes distinctes en apparence : jeunes filles africaines à qui on promet la belle vie à Paris et qui sont prises au piège d'un réseau de prostitution (les fameuses sirènes noires), violeur psychopathe et meurtrier, assassinats sordides et démembrement de pauvres victimes albinos, assassinat d'une prostituée de luxe. C'est clairement basé sur du vécu, c'est violent même si c'est romancé. C'est ce qui donne tout l'intérêt pour moi de ce polar si différent de l'habituel.

Certes on peut regretter qu'une enquête n'ait pas de suite et se demander pourquoi l'auteur en a parlé si ce n'est pour perturber son lecteur. Mais cela permet d'avoir une vision très pragmatique du difficile travail d'un commissaire de police et de son équipe aujourd'hui. A l'heure où les séries TV (françaises ou américaines d'ailleurs) falsifient les choses, les sirènes noires permettent de bien remettre les faits dans leur contexte.

L'écriture est sèche, directe, ciselée, sans superflu ni élément perturbateur. La vérité, rien que la vérité. Les faits, rien que les faits. Elle n'est pour autant pas dénuée d'émotions, ni d'empathie (on déteste certains, on se prend d'affection pour d'autres, on souffre…). Elle s'adapte aux personnages (du dialecte africain au parler « d'jeuns »). Elle exprime parfaitement les états d'esprits des différents personnages.

Les faits sont rapportés de manière brute, ce qui exacerbe la dureté et le caractère si réaliste de ce livre. C'est fort, dur, limite supportable souvent. On est réellement en immersion dans l'enquête, au côté des commissaires et autres policiers.

« Des mecs et des gonzesses partout. Les filles hurlaient, hyper agressives, les mecs roulaient des mécaniques, prêts pour la baston. Il a fallu en sécher deux ou trois pour calmer un peu le jeu. T'imagine ? Un début de bagarre générale éclairée à la lampe torche ! La pire, c'était la mère maquerelle, Justina. Elle hurlait dans leur dialecte et ça électrisait tout le monde. J'ai dû l'attacher pour qu'elle se calme. Bien entendu les autres familles africaines nous sont tombées dessus. La BAC est venue en renfort, j'avais prévu le coup, et tout s'est calmé. »

Le style est très descriptif, très évocateur et précis. On n'a aucun mal à imaginer la scène, se représenter chaque détail, à frissonner, à détester ou à compatir. L'auteur accorde une importance particulière à décrire avec soin l'environnement et les faits. Il ne laisse ni flou, ni ambiguïté, ni n'autorise d'autres interprétations au lecteur. Peu de surprise dans ce polar.

« Il s'isola et, fidèle à son habitude, ferma les yeux pour s'extraire de la nef des fous dans laquelle il naviguait. Il parla longtemps avec son épouse. Les yeux fermés, il devinait son parfum. Un parfum qui n'existait pas dans le commerce, qu'elle n'avait conçu que pour elle, en parlant avec son mari, si sensible aux odeurs. Mistral ouvrit les yeux, raccrocha la communication et mit quelques secondes à se replonger dans l'univers hallucinant de la maison du sorcier. »

La plume est sans concession. On se retrouve happé par les journées et les nuits de Mistral, captivé par le déroulement des enquêtes et ce souhait de savoir. C'est addictif et un pur concentré d'adrénaline. Il est impossible de lâcher le livre.

L'auteur connait son métier et ça se voit (mention spéciale sur les analyses ADN par exemple), ça se lit et se ressent en tournant les pages. Quel bonheur !

L'écrivain s'autorise même quelques piques sur le métier « de la vraie vie de l'auteur » comme l'atteste la citation suivante. C'est subtilement écrit et criant de vérité.

« La discrétion, on s'en fout ! Tout le monde parle à tout le monde. le secret de l'instruction ? Vaste fumisterie, les journaux en sont remplis, et le public en raffole. Les flics sont toujours pointés du doigt et les premiers à morfler, alors que ça bavasse dans tous les coins. Et pour l'instant, il n'y a pas de juge d'instruction, donc pas de violation du secret de l'instruction. le procureur ? le secret de l'enquête ? J'en fais mon affaire. »

Vous l'aurez je pense compris, il ne faut absolument pas passer à côté de ce livre. Il se lit comme on regarderait un épisode d'une série ou un documentaire sur le 36. Il se déguste sans modération et je vous le conseille très vivement. En ce qui me concerne, je vais plonger dans les deux premières enquêtes de Mistral.

5/5

Lien : http://alombredunoyer.com/20..
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Je découvre cet auteur avec ce récit, la quatrième de couverture m'ayant donné très envie, les personnages enquêtent ici sur plusieurs meurtres sur fonds de meurtres rituels.

Il est question de beaucoup de sujets comme la prostitution car nous suivons de jeunes femmes nigérianes qui pensent se rendre en Europe pour une vie meilleure et devenir coiffeuse en région parisienne. La vérité est bien différente et elles vont le découvrir rapidement lors de leur périple pour rejoindre l'Europe.

Il est également question de sorcellerie/magie noire, de victimes dont on récoltent le sang et des albinos qui selon certaines coutumes auraient plus de pouvoir pour pratiquer certains rituels.

Le trafic d'être humain est également évoqué dans ce récit, j'ai aimé suivre le récit qui est mené tambour battant.

Cependant je n'ai pas plus que cela accroché aux enquêteurs et cela est dommage, j'ai donc peiné un peu plus à la moitié du récit mais j'ai tout de même dévoré ce récit.

Je pense d'ailleurs avoir dans ma bibliothèque le Magicien du même auteur que je lirai avec plaisir.
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Citations et extraits (34) Voir plus Ajouter une citation
- Tu as lu la presse ?
L'ancien professeur tenait sa tasse à deux mains, comme agrippé à une bouée. Il opina.
- Si tu as lu, tu sais presque tout. Sauf une chose. Lors de l'autopsie, j'ai appris que les corps étaient particuliers. C'étaient ceux de deux....
.... albinos.
- Tu t'en doutais ?
- Non, jusqu'à ce que j'apprenne par la radio qu'il s'agissait d'un couple d'Africains découpés en morceaux. Alors là, je me suis dit...
Le Carme reprenait progressivement vie. La passion de l'Afrique ne l'avait jamais quitté.
- A ma connaissance, il n'y a jamais eu de telles pratiques en France. En Afrique ce processus est très connu, surtout en Tanzanie et au Burundi où les albinos sont plus ou moins massacrés, surtout à l'approche d'élection.
- Hervé, tu mesures ce que tu racontes ?
- Ludovic, tu ne comprendras jamais rien au monde qui t'entoure ! Il faut que tu mesures bien que, dans certains pays d'Afrique, lorsqu'un être blanc naît de deux parents noirs, c'est forcément surnaturel ! Et là, la magie s'en mêle, elle est très puissante, et rien ne l'arrête. Les organes des albinos, utilisés pour des rituels de sorcellerie ou dans la confection de philtres, sont vendus aux sorciers ou aux guérisseurs.
Ludovic hocha la tête et interrompit le professeur.
- Le médecin légiste qui a pratiqué les autopsies m'en a parlé. Albinisme et meurtres rituels, je découvre la chose sans y croire.
Le Carme poursuivait le développement de ses réflexions sans répondre directement à l'interruption de Mistral.
- Ces pauvres albinos sont victimes de superstitions ancestrales qui malheureusement attribuent des vertus magiques à leur corps...

...Silence entre les deux hommes. Le professeur perdu dans la fantasmagorie africaine, Mistral accroché au rationalisme pur et dur d'un Occidental du XXIème siècle. Le Carme se gratta la gorge, avala un peu d'eau et poursuivit.
Même les candidats aux élections, comme je te le disais, désirent s'attirer la victoire avec la magie, quelle qu'elle soit, et le sang des albinos en fait partie. C'est ainsi. Mais tout le monde se rassure en racontant qu'on peut tuer ces pauvres gens parce qu'ils ne meurent jamais. Une sorte d'absolution des meurtres. Le massacre des albinos est devenu un business.
Mistral regardait son ami qui parlait d'une voix claire et grave. Il ne put s'empêcher de l'interrompre.
- Ne me dis pas que toi, esprit éclairé, tu crois à ces pratiques !
- La question n'est pas de croire ou pas. Ca existe !....
.... Mais pour répondre plus précisément à ta question, je pense qu'un sorcier s'est installé depuis quelque temps et qu'il a des commandes venant de très loin. Le type doit avoir une grande réputation pour être en mesure de commanditer des meurtres d'albinos, ici en France ! Il a plusieurs longueurs d'avance sur toi. Sais-tu pourquoi ?
Mistral fit non de la tête.
- C'est très simple, Ludovic. Tu cherches dans ce que tu connais, dans tes références standardisées, comme tout bon flic qui se respecte. Mais tu es incapable de prendre un chemin de traverse, parce que l'irrationnel est au-dessus de ton entendement. C'est pour ça que le sorcier est tranquille...
Tu ne sais pas chercher en dehors de ton système de pensée, ce qui confirme mon analyse te concernant.
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Le policier se jeta à l'eau, conscient du ridicule dans lequel il se trouvait, discutant avec une vieille prostituée qui avait transformé le bureau d'un service de police en fumoir et s'apprêtant à lui parler de surnaturel. Dalmate s'exprima davantage pour lui que pour la femme.
- C'est là que ça devient compliqué... On rentre dans le domaine des sorciers et de la magie. Je sais, c'est fou ce que je vous raconte en ce moment, mais c'est la tournure que prend l'enquête.
- Ah bon ? Comme pour les petites Nigérianes ?
- Qu'Est-ce que vous dites ? s'exclama-t-il, étonné.
- Tiens donc, monsieur le flic balafré qui réagit enfin ! Stella m'a vaguement raconté que toutes les prostituées africaines sont tenues par un serment prononcé devant un sorcier dans leur pays, le "djudju", une sorte de cérémonie vaudoue, quoi ! Si elles parlent, elles deviennent folles, des malheurs s'abattent sur leur famille. Un tas de conneries, mais elles y croient dur comme fer ! C'est pour ça qu'elles causent jamais aux flics. Une prison mentale, si tu veux !.....
Bon, aller, et essaye de tirer d'la ma sirène noire.
- Sirène noire ?
- Ben ouais, j'les appelle comme ça, les p'tites Africaines qui tapinent, parce qu'y en a plein au fond d'la Méditerranée, quand les barcasses qui les transportent coulent à pic. Elle n'ont pas eu d'chance, enfin si on peut parler de chance quand on finit sa vie sur le trottoir !
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Dès l'instant où tu leur dis qu'ils vont être inondés de billets de banque, tout se passe bien ! Ils n'écoutent même plus la suite. Et pour que mon business continue de marcher, j'expédie de temps en temps un billet de cent dollars aux mères. Snoop, sans elles, rien n'est possible !
-Cent dollars ? Mais c'est rien, vu c'quelles te rapportent !
- C'est les mères qui m'proposent leurs enfants et qui m'les vendent ! Elles disent entre elles : "ma fille est en Europe, elle m'envoie des sous. Celle qui est à l'école Est-ce qu'elle peut faire la même chose ? Non, et en plus elle coûte de l'argent !"
- Tu l'as payée cher, la gamine ?
- Cinq cents dollars. J'ai fait une affaire. La mère voulait m'en vendre d'autres, mais j'aime pas acheter dans les mêmes familles. J'lui enverrai du cash dans un mois, c'est bien de les faire attendre. Elle remboursera au village la cérémonie du sorcier et aura l'impression d'être riche avec les trois cents restants.
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- Pourquoi le sorcier ne serait-il pas content ?
Forest ferma les yeux de stupéfaction à l'évocation du sorcier. Madjid Doucouré esquiva la question.
-J'le connais pas ce sorcier et j'veux pas croiser son chemin, j'suis pas de taille. Il est très puissant pour avoir des types qui.... découpent des gens pour lui. Il a beaucoup de pouvoirs et des clients riches qui achètent ses potions, c'est sûr.
- Il est nouveau ?
- Peut-être. Mais il y a toujours des sorciers ou des guérisseurs chez les Africains ! Chez nous, c'est eux qui nous soignent, qui nous enlèvent le mauvais œil ou qui jettent un sort à nos ennemis. C'est normal, c'est comme ça.... C'est comme le docteur chez toi.
Mistral approuva d'un signe de tête. Forest resta de marbre.
- Où je peux rencontrer un sorcier qui me raconte toutes.... ces pratiques ?
- J'sais pas. Mais c'est pas pour vous. Aucun sorcier vous parlera. J'aime pas qu'on m'pose des questions sur les sorciers. Vous n'y comprenez rien.
Sans le savoir, Doucouré renvoyait Mistral à son échange avec Le Carme, quelques heures plus tôt. Mistral sentit que l'Africain se refermait comme une huître. Il laissa le silence s'installer de nouveau. Forest, témoin privilégié de ces questions-réponses, se garda bien de dire quoi que ce soit. Mistral tenta une dernière question. Jamais, lui non plus, il n'aurait imaginé avoir une telle discussion dans le cadre d'une enquête criminelle. Après tout, pourquoi pas ? se dit-il.
- Qui travaille pour le sorcier ?....
....
Forest raconterait bien plus tard que jamais, en vingt ans de carrière, il n'avait assisté à un dialogue aussi étrange entre un policier et un informateur. Il regretterait de n'avoir pu l'enregistrer pour faire taire les incrédules. Mais ce qui le surprit le plus, c'est que ces questions, aussi dingues soient-elles, n'étonnèrent ni l'Africain ni surtout le chef de la brigade criminelle. Mistral et Ducouré, en phase, s'étaient compris. Forest émettait l'hypothèse que la bascule intellectuelle de Mistral était intervenue à ce moment-là. Les mots : "sorciers", "magie", "massacres des albinos", apparurent progressivement dans le vocabulaire de Mistral. "Même s'il s'en défendait", ajouterait Forest en souriant.
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Margaret commençait à ne plus se sentir très bien. Elle aurait voulu être ailleurs, renoncer à tout ce qui l'attendait : la richesse, les bijoux, la maison, un mari, des enfants, un travail intéressant chez les Blancs. Elle hésitait à fuir, se demandant si ses jambes pouvaient encore courir. Elle sentait les mains de la femme qui la serraient avec affection, certainement une trop grande affection, parce que Margaret ne pouvait s'extraire de cette poigne si forte. En réalité elle n'y songeait même plus. Sa mère s'était endettée auprès de la plus grande partie du village pour payer les deux cents dollars de la cérémonie. Si elle s'enfuyait, elle serait bannie et la honte retomberait sur sa famille pendant des générations. Margaret devenait prisonnière de la parole et de la dette de sa mère.
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À eux sept, ils ont lu environ 700 livres cette année. Si chacun et chacune d'eux ne devait en retenir qu'un, lequel choisiraient-ils ? Dans ce nouvel épisode, nos libraires Mathilde, Rozenn, Nolwenn, Laure, Marie, Nicolas et Annaïk vous proposent de découvrir leurs très grands coups de coeur, les livres qui les ont le plus marqués cette année. Une liste riche et variée, à retrouver ci-dessous : - Son odeur après la pluie, de Cédric Sapin-Defour (éd. Stock) : https://www.librairiedialogues.fr/livre/22014305-son-odeur-apres-la-pluie-cedric-sapin-defour-stock ; - le Médecin de Cape Town, de E. J. Levy (éd. de l'Olivier) : https://www.librairiedialogues.fr/livre/21913524-le-medecin-de-cape-town-ellen-j-levy-editions-de-l-olivier ; - Triste tigre, de Neige Sinno (éd. P.O.L) : https://www.librairiedialogues.fr/livre/22451110-triste-tigre-neige-sinno-p-o-l ; - MURmur, de Caroline Deyns (éd. Quidam) : https://www.librairiedialogues.fr/livre/22528485-murmur-caroline-deyns-quidam ; - Yellowface, de Rebecca F. Kuang (éd. William Morrow) : https://www.librairiedialogues.fr/livre/22342784-yellowface-r-f-kuang-william-morrow ; - Monica, de Daniel Clowes (éd. Delcourt) : https://www.librairiedialogues.fr/livre/23005381-one-shot-la-bibliotheque-de-daniel-clowes-mo--daniel-clowes-delcourt ; - La Porte du vent, de Jean-Marc Souvira (éd. Fleuve noir) : https://www.librairiedialogues.fr/livre/21712680-la-porte-du-vent-jean-marc-souvira-fleuve-editions.
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