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Charles Appuhn (Traducteur)
EAN : 9782080700506
380 pages
Flammarion (25/04/1997)
3.97/5   86 notes
Résumé :
Son excommunication violente de la communauté juive d'Amsterdam confronta Baruch Spinoza, dés l'âge de vingt-quatre ans, à la nature politique du religieux. Les analyses du Traité théologico-politique, publié en 1665, envisagent les religions en général, en particulier celles qui déchirent alors l'Europe, comme des instances proprement politiques gouvernant les esprits en cultivant en eux l'imagination superstitieuse... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (7) Voir plus Ajouter une critique
Avec le Traité des autorités théologique et politique, Spinoza explore l'Histoire, un pied dans l'antiquité lorsqu'il analyse les Ecritures, et un pied dans les années 1660 lorsqu'il réagit au contexte politique des Pays-Bas.
C'est le bon tempo pour exprimer ses revendications car le contexte de relative tolérance religieuse le permet et d'autre part Spinoza a acquis suffisamment de connaissance et de recul sur les religions juive et chrétienne pour former des idées claires et distinctes. Mais le temps n'est pas encore venu pour livrer sa synthèse spirituelle que constitue l'Ethique.
Dans un subtil mélange de douceur et de détermination Spinoza révèle les enseignements très simples des Ecritures, la justice et l'amour de son prochain pour le dire en deux mots, et en même temps il critique franchement les débordements d'imagination des prophètes produisant des récits qu'ils voudraient faire passer pour des révélations divines plutôt qu'admettre qu'ils les ont conçus pour frapper l'opinion publique.
« Aime ton prochain, mais déteste ton ennemi » (Matth., ch. v, vers 43). C'est ainsi qu'on peut résumer comment Dieu est apparu aux hébreux comme un prince qui a mis la main sur un territoire et sa population. « Plus tard, lorsqu'ils eurent perdu leur organisation d'Etat national et eurent été conduits en captivité à Babylone, Jérémie leur recommanda de veiller à la prospérité, désormais, de cette ville où ils étaient retenus prisonniers. Enfin lorsque le Christ les vit dispersés sur toute la terre, il les pressa de pratiquer le devoir de charité à l'égard de tous les humains. Tous les moments de l'histoire des hébreux illustrent donc bien l'accord, toujours nécessaire, de la religion avec l'intérêt public » (citation Spinoza ch. XIX).
Le droit divin des Ecritures apparait donc simplement comme une version ancienne du droit positif. Peu importe d'ailleurs que l'amour de son prochain soit perçu comme une révélation divine ou bien perçu à la lumière naturelle (le bon sens). Si donc les Ecritures peuvent « servir à répandre des opinions salutaires » alors on ne peut les réduire à des « poèmes dramatiques » ou des « chroniques ordinaires ». Fondamentalement la liberté d'opinion est un « droit individuel inaliénable », en revanche la puissance souveraine ne doit pas laisser se développer un droit « divin » dépendant « de doctrines purement spéculatives ».
Ici la puissance souveraine ne peut être que celle d'un Etat démocratique. En conclusion « il n'y a pas de lumière supérieure à la nature, il n'y a pas d'autorité extérieure aux hommes » (ch. VII de l'interprétation de l'Ecriture)
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Nouvelle traduction et édition du Traité théologico-politique. La liberté de penser et de s'exprimer, l'indépendance de la sphère privée par rapport à la religion comme par rapport à l'Etat, la souveraineté des sujets libres, Spinoza a beaucoup à nous dire de notre société et des crises de conscience qui la traversent.

Je mentionne aussi ce livre en relation avec la parution récente de la "Correspndance Freud-Spinoza", par Michel Juffé (nrf Gallimard)
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Spinoza est précursseur de l'exégète par ce traité. de manière rigoureuse, il applique une méthode qui sera par la suite reprise : l'Ecrtirure doit être interprétée par l'Ecriture, le sens est tiré à partir de l'étude des mots et de la sémiologie. Par là, il s'agit d'effectuer une critique interne du texte. Il évoque aussi la critique externe, à savoir, la prise en compte des opinions de l'auteur, du contexte d'écriture. Partant de là, il applique cette méthode pour l'Ancien Testament et pour le Nouveau Testament. Il montrera la corrélation entre la Loi de Moise, et l'Etat, politiquement constitué.
Outre, la méthode véhiculée par ce traité, Spinoza interroge l'Ecriture. Ce n'est pas une connaissance de Dieu qu'apporte l'Ecriture, mais plutôt une inclinaison à l'obéissance, des principes suivants : la Charité et la Justice. A Dieu n'est rapporté que des attributs, il s'ensuit qu'on ne connait de Dieu que ces attributs et non pas l'essence-même de ce dernier. Spinoza redonne aussi les droits à la philosophie, à la pensée. L'Ecriture, en effet, n'interdit pas ces droits. L'auteur veut démontrer que le droit de penser et de dire ce que l'on pense est nécessaire, et ce même pour l'Etat. On l'aura compris, Spinoza pose la méthode moderne, et au delà, son écrit est un écho sur l'agora de la démocratie, qui sera entendu au siècle des Lumières.
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D'abord paru sous le couvert de l'anonymat en 1670, le Traité théologico-politique fut rapidement attribué à Spinoza et immédiatement qualifié d'oeuvre impie par les autorités politiques et religieuses de son temps. C'est que, bien qu'il se défende de l'accusation d'athéisme portée à son encontre, le philosophe ne ménage pas l'Église, il remet en question de nombreux dogmes religieux et dénonce la thèse d'un auteur unique et inspiré par Dieu — en la personne de Moïse — pour les cinq livres de l'Ancien Testament constituant la Torah des Juifs. Bousculant les bien-pensants de son temps, il défend avec ardeur la liberté de s'exprimer et l'exercice de la raison dans l'analyse des fondements théologiques et politiques de la société. Ainsi, ce traité de philosophie pratique a-t-il jeté les bases de nos démocraties modernes fondées sur la séparation des pouvoirs temporel et spirituel. Ses analyses, subversives et iconoclastes à bien des égards, ont contribué à la lecture critique des Saintes Écritures et ont inspiré de nombreux penseurs après lui. Aujour­d'hui encore, la radicalité de son propos et la réjouissante liberté de ton dont il use ne peuvent qu'enchanter le lecteur moderne et l'inciter à retourner aux sources de ce texte philosophique et politique majeur de l'Occident.
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Une analyse critique des textes bibliques avec tout le respect, la simplicité et la tolérance d'un croyant qui utilise sa raison.
Mon Dieu ce que ce texte est moderne et d'une actualité criante!

Écrit au cours du XVIIè siècle, 130 ans avant la Révolution Française, voici un ouvrage qui remet les livres sacrés à leur place : des textes écrits par des hommes pour les hommes de leur temps.

L'auteur s'attache à gratter les argumentations et artifices temporels afin de ne conserver que le message originel de Dieu. Par ailleurs, son analyse de la société des Hébreux lui permet d'entrevoir la meilleure façon de concilier religion et pouvoir, religion et paix sociale.

Bien sûr, le style XVIIè n'est pas des plus faciles à lire, mais dans notre société où s'opposent la religion et le droit, voici une réflexion passionnante et qui enrichira ceux qui s'interrogent à ce sujet.
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Citations et extraits (87) Voir plus Ajouter une citation
Par droit naturel et institution de la nature, nous n’entendons pas autre chose que les lois de la nature de chaque individu, selon lesquelles nous concevons que chacun d’eux est déterminé naturellement à exister et à agir d’une manière déterminée. Ainsi, par exemple, les poissons sont naturellement faits pour nager ; les plus grands d’entre eux sont faits pour manger les petits ; et conséquemment, en vertu du droit naturel, tous les poissons jouissent de l’eau et les plus grands mangent les petits. Car il est certain que la nature, considérée d’un point de vue général, a un droit souverain sur tout ce qui est en sa puissance, c’est-à-dire que le droit de la nature s’étend jusqu’où s’étend sa puissance. La puissance de la nature, c’est, en effet, la puissance même de Dieu, qui possède un droit souverain sur toutes choses ; mais comme la puissance universelle de toute la nature n’est autre chose que la puissance de tous les individus réunis, il en résulte que chaque individu a un droit sur tout ce qu’il peut embrasser, ou, en d’autres termes, que le droit de chacun s’étend jusqu’où s’étend sa puissance. Et comme c’est une loi générale de la nature que chaque chose s’efforce de se conserver en son état autant qu’il est en elle, et cela en ne tenant compte que d’elle-même et en n’ayant égard qu’à sa propre conservation, il s’ensuit que chaque individu a le droit absolu de se conserver, c’est-à-dire de vivre et d’agir selon qu’il y est déterminé par sa nature. Et ici nous ne reconnaissons aucune différence entre les hommes et les autres individus de la nature, ni entre les hommes doués de raison et ceux qui en sont privés, ni entre les extravagants, les fous et les gens sensés. Car tout ce qu’un être fait d’après les lois de sa nature, il le fait à bon droit, puisqu’il agit comme il est déterminé à agir par sa nature, et qu’il ne peut agir autrement. C’est pourquoi, tant que les hommes ne sont censés vivre que sous l’empire de la nature, celui qui ne connaît pas encore la raison, ou qui n’a pas encore contracté l’habitude de la vertu, qui vit d’après les seules lois de son appétit, a aussi bon droit que celui qui règle sa vie sur les lois de la raison ; en d’autres termes, de même que le sage a le droit absolu de faire tout ce que la raison lui dicte ou le droit de vivre d’après les lois de la raison, de même aussi l’ignorant et l’insensé ont droit de faire tout ce que l’appétit leur conseille, ou le droit de vivre d’après les lois de l’appétit. C’est aussi ce qui résulte de l’enseignement de Paul, qui ne reconnaît aucun péché avant la loi, c’est-à-dire pour tout le temps où les hommes sont censés vivre sous l’empire de la nature. (Rom., chap. VII, vers. 7.)
CHAPITRE XVI.
DU FONDEMENT DE L’ÉTAT ;
DU DROIT NATUREL ET CIVIL DE CHACUN,
ET DU DROIT DU SOUVERAIN.
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Voyons donc ce que sont ces mystères contenus dans l'Ecriture, et dont ses interprètes soutiennent qu'ils sont les seuls capable de déceler : nous ne découvrirons que quelques inventions d'Aristote, de Platon ou d'autres penseurs profanes; et encore le premier venu des simples d'esprit aurait-il moins de peine à les forger en rêve, que le plus grand érudit n'en a à les trouver dans l'Ecriture.

(Citation dans le «Traité des autorités théologique et politique » chapitre XIII - Thème : l'Ecriture, par ses enseignements, tous extrêmement simples, ne cherche à obtenir des hommes que l'obéissance...)
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Je reviens au sentiment de Maimonide, afin de l’examiner de plus près. Il suppose, en premier lieu, que les prophètes sont d’accord entre eux sur toutes choses, et que ce sont même de grands philosophes et de grands théologiens, puisque leurs opinions, suivant lui, sont toujours fondées sur la vérité des choses ; or, nous avons prouvé le contraire au chapitre II. Il suppose, en second lieu, que l’Écriture ne fournit point à qui veut l’interpréter les lumières nécessaires, par la raison qu’elle ne démontre rien, ne donne jamais de définitions, ne remonte pas enfin aux premières causes, d’où il suit que ce n’est point en elle qu’il faut chercher la vérité des choses, et en conséquence que ce n’est point elle qui peut nous éclairer sur son propre sens. Mais cette seconde prétention est aussi fausse que la première, et nous avons également montré dans notre deuxième chapitre, tant par la raison que par des exemples, que le sens de l’Écriture ne doit être cherché que dans l’Écriture elle-même, lors même qu’elle ne parle que de choses accessibles à la lumière naturelle. Maimonide suppose enfin qu’il nous est permis d’interpréter l’Écriture selon nos préjugés, de la torturer à notre gré, d’en rejeter le sens littéral, quoique très-clair et très-explicite, pour y substituer un autre sens. Mais outre que cette licence est tout ce qu’il y a de plus contraire aux principes que nous avons établis dans le chapitre déjà cité et dans les suivants, qui ne voit qu’elle est excessive et téméraire au plus haut degré ? Accordons-lui du reste cette extrême liberté ; de quoi lui servira-t-elle ? de rien assurément ; car il sera toujours impossible d’expliquer et d’interpréter par sa méthode les passages obscurs et incompréhensibles qui composent la plus grande partie de l’Écriture, au lieu qu’il n’y a rien au monde de plus facile, en suivant notre méthode, que d’éclaircir beaucoup de ces obscurités et d’aboutir sûrement à d’exactes conséquences, ainsi que nous l’avons déjà prouvé et par la raison et par le fait. Quant aux passages qui par eux-mêmes sont intelligibles, on en connaît assez le sens par la construction du discours. Je conclus de là que la méthode de Maimonide est absolument inutile. Ajoutez qu’elle ôte au peuple toute la certitude qu’il peut tirer d’une lecture faite avec sincérité, et à tout le monde la faculté d’entendre l’Écriture par une méthode toute différente. Il faut donc absolument rejeter la méthode de Maimonide comme inutile, dangereuse et absurde.
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1° Il est très fâcheux, tant pour la religion que pour la communauté politique, d'accorder aux administrateurs spécialisés du domaine sacré un droit exécutif ou gouvernemental quelconque (…)
2° Il est très fâcheux de faire dépendre le droit divin de doctrines purement spéculatives et d’établir des lois concernant les opinions. (…) Un règne politique, par suite, devra s’appuyer sur la pire violence si les opinions, qui relèvent du droit individuel inaliénable, peuvent être traitées à la manière de crimes (...)
3° Il est très nécessaire, dans l’intérêt tant de la communauté publique que de la religion, de reconnaître aux détenteurs de la puissance souveraine le droit de distinguer la valeur des actions. Car ce droit n’a pu être jadis conféré, même aux prophètes divins, sans grand préjudice pour la communauté publique et la religion (...)

(Citation dans le « Traité des autorités théologique et politique » chapitre XIII - Thème : Chapitre XVIII De l’organisation de la république des Hébreux et de son histoire sont tirés quelques enseignements politiques)
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Puisque l’Ecriture raconte que Dieu l’a interdit à Adam et que néanmoins Adam en a mangé (le fruit de l’arbre), on devra dire nécessairement que Dieu a révélé à Adam le mal qui serait pour lui la conséquence nécessaire de cette action, mais non la nécessité de la conséquence de ce mal. Par là il arriva qu’Adam a perçu cette révélation non comme une vérité éternelle et nécessaire, mais comme une loi, c’est-à-dire comme une règle instituant qu’un certain profit ou un certain dommage sera la conséquence d’une certaine action, non par une nécessité inhérente à la nature même de l’action, mais en vertu du bon plaisir et du commandement absolu d’un prince. Ainsi, pour Adam seul et seulement par suite de son défaut de connaissance, cette révélation devint une loi et Dieu de posa en législateur et en prince. Pour cette même cause et par suite d’un défaut de connaissance, le Décalogue fut une loi pour les seuls Hébreux.
(…)
Ce que nous disons d’Adam et des Israélites, on doit le dire aussi de tous les prophètes qui ont écrit des lois au nom de Dieu, mais n’ont pas perçu les décrets de Dieu adéquatement, comme des vérités éternelles.

(Citation dans le «Traité des autorités théologique et politique » chapitre IV de la loi divine)
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