Amazing Spider-man: Skin Deep

Ce tome fait suite à Sins past (épisodes 509 à 514). Il contient les épisodes 515 à 518, initialement parus en 2005, écrits par Joe Michael Straczynski (en abrégé JMS), dessinés par Mike Deodato et encrés par Joe Pimentel, avec des dessins de Mark Brooks encrés par Jaime Mendoza pour les séquences se déroulant dans le passé.

Peter Parker gare sa belle voiture de sport juste en face du lycée où il enseigne. Il est en retard pour la réunion pédagogique, mais en avance pour ses cours, sauf qu'il doit remplacer au pied levé le professeur donnant un cours de "Citoyenneté réparatrice" en sciences sociales. En regardant par la fenêtre de la salle de cours, il a la surprise d'apercevoir sur le trottoir Charles Weiderman, un ancien camarade de classe. Parker s'en souvient bien, car lorsque Weiderman avait intégré sa classe, il était devenu le souffre-douleur à la place de Peter, étant encore plus introverti et studieux que Peter. Weiderman est venu demander l'aide de Parker : il souhaite que ce dernier lui écrive une lettre de recommandation à l'attention de Tony Stark pour obtenir une subvention de sa part, afin de financer ses recherches sur un matériau révolutionnaire à base de vibranium permettant de créer une seconde peau à l'épreuve des balles. Suite à un concours de circonstances, Weiderman va devoir tester lui-même son invention.

Au cours de plusieurs histoires précédentes, Straczynski a affiché sa volonté de rendre hommage à sa manière aux aventures les plus célèbres de Spider-Man, qu'il s'agisse de l'épisode 33 de février 1966 (Spider-Man coincé sous des poutrelles d'acier enchevêtrées) ou de la mort de Gwen Stacy. Ici, Spider-Man se fait la réflexion que la situation de Weiderman ressemble fortement à celle de Mark Raxton (demi-frère de Liz Allan Osborn), transformé en Molten Man dans l'épisode 28 de la série "Amazing Spider-Man", paru en septembre 1965. Toutefois le personnage de Weiderman diffère de celui de Raxton, au point que ce rapprochement n'est que superficiel ; il s'agit donc bien d'n hommage plutôt que d'une relecture, d'une interprétation ou d'une décalque. En particulier Weiderman a souffert de harcèlement caractérisé de la part de ses camarades de classe.

Avec le personnage de Weiderman, JMS développe une autre facette de la personnalité de Peter Parker : celle de souffre-douleur, avant qu'il ne soit piqué par une araignée radioactive. le tout premier épisode (Amazing Fantasy 15) établissait que le caractère studieux de Parker le mettait au ban de la vie sociale de sa classe, et faisait de lui la cible toute désignée de tous les quolibets de ses camarades (un geek dans toute sa splendeur et sa misère). JMS a l'idée de dépeindre la réaction de Peter alors que le comportement d'un nouvel élève attire sur lui toutes les mesquineries et méchancetés dont il était auparavant la cible. Avec cette situation, JMS s'attache à montrer la réaction de Peter dans ses petites lâchetés ordinaires, et ses élans de fraternité. Il aborde à nouveau la question de la nature de l'héroïsme, cette fois-ci sous une forme très prosaïque. Si l'intention est louable et pertinente, la réalisation manque singulièrement de nuance. JMS met le paquet pour rendre les persécuteurs franchement odieux, sans aucune qualité rédemptrice, tout d'un seul tenant. La comparaison entre Parker et Weiderman s'établit également à gros traits : Parker est d'une fibre morale solide et respectable, alors que Weiderman est geignard et pleutre. le lecteur déchante à la découverte de ces portraits brossés sans faire dans le détail. Il reste une intrigue qui s'inspire fortement des mésaventures de Mark Raxton, et qui tombe parfois dans la redite (en particulier la mise en danger de Mary Jane et tante May, similaire pour ne pas dire identique à leur situation dans le tome précédent). Au final, le lecteur ne retient que le développement de la relation entre Peter Parker et Tony Stark qui prendre une autre dimension dans les épisodes suivants. Et d'ailleurs depuis quand Peter Parker dispose-t-il de son permis de conduire ?

Mike Deoadato continue d'utiliser son style réaliste, aux ombres accentuées pour mettre en images ces aventures. Spider-Man est magnifique dans ses acrobaties exigeant une grande souplesse (proche d'une capacité de contorsionniste), quoi qu'un peu trop musculeux (le lecteur regrette un peu la silhouette plus filiforme dessinée par John Romita junior, plus proche de la vision de Steve Ditko). Il réalise des arrières plans relativement substantiels, donnant une bonne vision des environnements dans lesquels se déroule chaque scène. Il est toujours aussi habile dans sa représentation des relations entre Peter et Mary Jane, avec 2 séquences d'une intimité troublante (MJ en sous-vêtements coquins pour les besoins de la pièce de théâtre, ou en train de finir de s'habiller alors que Peter avale un bol de céréales). À nouveau l'encrage de Joe Pimentel semble avoir été réalisé à la truelle, gommant la finesse et la sophistication des crayonnés de Deodato, rendant indistincts les contours des aplats de noir.

Les séquences dans le passé sont dessinées par Mark Brooks dans un style moins méticuleux, avec des ombres portées quasiment inexistantes. Il reste dans un registre plutôt réaliste, avec des visages plus juvéniles pour rendre compte de l'âge des protagonistes, mais des expressions systématiquement surjouées, voire marquées d'une forme niaiserie qui donne un air bêta à Peter et Charles, sans raison valable.

Après "Sins past", un tome où Straczynski jouait à fond dans le mélodrame exacerbé, "Skin deep" propose d'examiner le courage de Peter Parker dans le cadre du harcèlement au lycée, et de raconter une nouvelle version du Molten Man. Par rapport aux tomes précédents, la narration de Straczynski apparaît pataude et dénuée de nuances, à l'exception des relations entre Mary Jane et Peter. Mike Deodato réalise un bon travail de mise en image, quelque peu tiré vers le bas par un encrage manquant de finesse, et par des scènes du passé dessinées avec une approche trop exagérée. Straczynski continue de raconter les aventures de Spider-Man dans New Avengers (épisodes 519 à 524).