Les deux premiers chapitres j'étais clairement septique ! C'est ça les écrivains de SF supers célèbres? C'est surtout que j'avais pas compris où l'on allait car j'ai l'habitude de ne pas lire la quatrième de couverture. Et puis soudain ,tout s'éclaire et je me dis ,mais quelle bonne idée cette intrigue !Une société mi fasciste mi-nazie d'une planète lointaine ,observée par des historiens de la terre ,qui eux maîtrisent la technologie et ont du recul sur les sociétés. Mais c'est formidable !! D'autant plus lorsque l'un de ces observateurs commence à vouloir changer les choses dans cette société qui bannie la culture et l'intelligence , qui pourchasse les intellectuels et met le peuple au pas. Va-t-il prendre le risque d'intervenir ? C'est clair que je voudrais le faire ! Il est difficile pour Roumata d'être comme un Dieu sur cette planète grâce à son avance technologique et de ne rien faire . Et j'ai beaucoup aimé voir son évolution ,mais aussi la description de cette société dictatorialeScien
Ce livre est pour moi une très bonne surprise ,de par son originalité et son sujet notamment ! Il a été adapté au cinéma en 2014 , en noir et blanc , et je suis curieuse de le voir du coup . Amateur de Sf ,ce livre est un classique qui doit passer entre vos mains !
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Un livre de SF politique courageux, à une époque et dans un pays, ou il fallait en avoir...du courage et le reste aussi...Ainsi que l'intelligence de le formuler, de l'éditer aussi. Ce qui m'a étonné le plus...c'est que la censure n'ai pas sévit. Il est vrai que l'on voit plus aisément la poutre dans l'oeil du voisin, et que d'y voir une critique des systèmes totalitaires passés et ennemis d'hier à du faire passer la pilule...
Le culte orthodoxe n'ayant pas repris son essor, alors, la parole en était encore plus libre..
Serait il toujours possible aujourd'hui 'hui d'écrire ce livre...pas sur !
Cependant un film récent et russe s'en inspire, je serai curieuse de voir si les propos sont rendus dans leurs "jus" premier. Mais juste pour satisfaire ma curiosité, de cinéphile, l'impact en terme d'entrées.
Parce qu'hélas je pense qu'il faut être russe pour apprécier le scénario. Comme le film "Les Visiteurs du soir" qui évoquait, sous couvert moyenâgeux, la résistance à l'oppresseur, il faut connaître l'histoire de France et du film, pour en reconnaître et apprécier toutes les subtilités. Ce roman et le film évoquent une période et l'histoire propre à la Russie d'hier et d'aujourd'hui.
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La cité dormait ou faisait semblant. Les habitants se rendaient-ils compte que chose d’effroyable se préparait cette nuit ? Ou bien pensaient-ils, comme le gentilhomme de grand esprit, qu’on allait fêter la Saint-Mika ? Deux cent mille homme et femmes, deux cent mille forgerons, armuriers, bouchers, merciers, joailliers, bourgeoises, prostituées, moines, changeurs, soldats, vagabonds, lettrés rescapés se retrouvaient dans leur lits étouffants qui sentaient la punaise, dormaient, s’aimaient, supputaient leur bénéfices, pleuraient, grinçaient des dents de colère ou d’humiliation… Deux cent mille personnes. Il y avait en elles quelque chose de commun pour un envoyé de la Terre ; presque tous sans exception n’étaient pas encore des hommes au sens actuel du mot, mais de la matière brute, gueuse, que seuls des siècles d’Histoire sanglante transformeraient en hommes fiers et libres. Ils étaient passifs, cupides et invraisemblablement, fantastiques égoïstes. Psychologiquement, ils étaient presque tous des esclaves : esclaves d’une foi, de leurs semblables, de leurs passions mesquines, esclaves de leur cupidité, et si par la volonté du destin, quelqu’un d’entre eux naissait ou devenait un maître, il ne savait que faire de sa liberté, s’empressait de se faire l’esclave de sa richesse, de choses superflues, d’amis débauchés, esclave de ses esclaves. L’énorme majorité d’entre eux n’était en rien coupable. Ils étaient trop passifs, trop ignorants. L’esclavage prenait sa source dans leur passivité et leur ignorance, et celles-ci à leur tour engendraient l’esclavage. S’ils avaient tous été semblables, tout espoir aurait été vain, le courage aurait manqué pour se mettre à la tâche. Mais tous étaient des hommes, porteurs d’une étincelle de raison, et tantôt ici, tantôt là, s’allumaient en eux les petites lueurs d’un avenir incroyablement éloigné mais proche. S’allumaient envers et contre tout. En dépit de leur apparente inutilité. En dépit de l’oppression. Bien que personne ne se souciât de ces hommes. Bien que dans le meilleur des cas ils pussent compter sur une pitié méprisante et étonnée…
Ils ne savaient pas que l’avenir était avec eux, que l’avenir, sans eux, était impossible. Ils ne savaient pas que dans ce monde de fantômes terrifiants, ils étaient l’unique réalité du social. Détruisez cette vitamine, la société se gangrène, c’est le début d’un scorbut social, les muscles faiblissent, la vue baisse, les dents tombent. Aucun État ne peut se développer sans culture, quand l’État n’est plus capable de pratiquer l’autocritique, il commence à encourager des tendances erronées, développer chez ses citoyens l’instinct de consommation et la présomption, pour finir, quand même, victime de voisins plus intelligents. Il est possible de persécuter longtemps les hommes de savoir, d’interdire les sciences, de détruire l’art, laisser le chemin libre à tout ce que détestent tellement les despotes et les ignorants obtus. Les hommes gris qui sont au pouvoir ont beau mépriser la science, ils ne peuvent rien contre l’objectivité historique, ils peuvent freiner mais non arrêter le mouvement. Craignant le savoir, ils finissent toujours par l’encourager dans l’espoir de se maintenir. Tôt ou tard, ils sont contraints d’autoriser les universités, les sociétés scientifique, de créer des centres de recherche, des observatoires, des laboratoires, de former des cadres, hommes de pensée et de savoir qui échappent à leur contrôle, qui ont une mentalité totalement différente, des besoins totalement différents. Ces hommes ne peuvent vivre, et encore moins travailler, dans une atmosphère de basse cupidité, d’autosatisfaction béate, de besoins strictement physiologiques. Il leur faut une autre atmosphère, de savoir universel, de tension créatrice, ils ont besoin d’écrivains, d’artistes, de musiciens. Les hommes gris sont obligés de céder sur ce point aussi. Ceux qui s’entêteront serons éliminés par des rivaux plus rusés, mais ceux qui cèdent, inévitablement et paradoxalement, creusent leur propre tombe. Car l’élévation du niveau culturel des peuples, dans tous les domaines, depuis les progrès des sciences naturelles jusqu’à l’amour de la musique, est mortelle pour les égoïstes incultes et les fanatiques… Puis vient une époque de gigantesques ébranlements sociaux, qu’accompagne un développement inouï de la science, et en corollaire, un très vaste phénomène d’intellectualisation de la société ; alors, la grisaille livre un dernier combat, dont la cruauté ramène l'Humanité au Moyen Age, elle subit une défaite, et dans une société, libre de toute oppression de classe, disparaît pour toujours en tant que force réelle.
pp. 140-141
Il y aura toujours des rois, plus ou moins cruels, des barons, plus ou moins barbares, et il y aura toujours un peuple ignorant,admirant ses oppresseurs et haïssant ses libérateurs Et cela parce qu' un esclave comprend bien mieux son maître, si cruel soit-il que son libérateur, car chaque esclave s'imagine très bien à la place de son maître, mais bien peu à la place d'un libérateur désintéressé.
- Quelle idée ! s’étonna Roumata. Tu veux tous nous faire moines ? »
Le père Kin pressa ses mains l’une contre l’autre et fit un mouvement en avant.
« Laissez-moi vous expliquer, don Roumata », dit-il avec chaleur, après avoir passé la langue sur ses lèvres. « L’important est ailleurs. L’essentiel est dans les grandes lois d’un nouvel État : elles sont simples et elles sont au nombre de trois : une foi aveugle dans l’infaillibilité des lois, une soumission absolue à icelles, et également, la surveillance sans relâche de chacun par tous et vice versa.
Car l’élévation du niveau culturel du peuple, dans tous les domaines, depuis les progrès des sciences naturelles jusqu’à l’amour de la musique, est mortelle pour les égoïstes incultes et fanatiques… Puis vient une époque de gigantesques ébranlements sociaux, qu’accompagne un développement inouï de la science, et en corollaire, un très vaste phénomène d’intellectualisation de la société ; alors, la grisaille livre un dernier combat, dont la cruauté ramène l’humanité au Moyen Âge, elle subit une défaite, et disparaît pour toujours en tant que force réelle.
Car l'élévation du niveau culturel du peuple, dans tous les domaines, depuis les progrès des sciences naturelles jusqu'à l'amour de la musique est mortelle pour les égoïstes incultes et les fanatiques...
Du début des années 60 jusqu'au années 80, les frères Strougatski — Arcadi et Boris — ont façonné le Cycle du Midi, un ensemble de romans et nouvelles prenant place dans un XXIIe siècle radieux et questionnant les marges de cette utopie. Traduits en France de façon éparse au fil du temps, les récits ont été rassemblés au sein d'une intégrale coordonnée par Vitkoriya et Patrice Lajoye, publiée chez les éditions Mnémos fin février : un beau projet, inédit sous cette forme et méritant qu'on s'y attarde le temps d'une discussion en compagnie de Patrice Lajoye. Ce sera également l'occasion de parler de leur structure éditoriale, Lingva, et de ses projets, notamment en matière de SF ukrainienne.
https://mnemos.com/livres/le-cycle-du-midi/
https://www.lingva.fr/
Animation : Erwann Perchoc
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