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Critique de mfrance


J'ai lu toutes les critiques "babeliotes" concernant ce chef d'oeuvre et je souhaite simplement ajouter mon grain de sel aux excellents avis que j'ai pu glaner, sans pour autant raconter le roman, ce qui a déjà été fait ici.
Oui, le choix de Sophie exige du lecteur son attention totale. Par son écriture si dense, par sa construction si élaborée, par la noirceur de son propos, par l'intensité de certaines scènes quasiment insoutenables...
Oui, le choix de Sophie exige du lecteur que l'on accepte les digressions de Stingo. Mais ces digressions sont partie intégrante de cet ouvrage et il est vrai que les réjouissantes aventures du jeune homme avec les fausses délurées et vierges folles qu'il rencontre (pauvre Stingo! malheureux puceau !) offrent une bouffée d'air frais à l'atmosphère insupportable de noirceur dans laquelle se débattent les trois protagonistes du "Palais rose" de Yetta.
Car oui, les diverses confrontations entre les trois personnages : Nathan/Sophie, Nathan/Stingo et Sophie/Stingo emmènent le lecteur dans un univers étouffant et de plus en plus noir au fur et à mesure de la conscience prise, en avançant dans le roman, de l'horreur du vécu de Sophie, de l'état mental de Nathan, cet homme si brillant, si intelligent, si chaleureux, mais aussi cet humain totalement désaxé et profondément malade, qui, in fine, ne peut qu'anéantir Sophie, ce dont elle est parfaitement consciente, qu'elle accepte et qu'elle désire même, peut-être !

Le choix de Sophie est un ouvrage absolument magistral qui, à travers le personnage de Sophie, nous plonge dans tout ce que l'esprit humain peut véhiculer d'espoir, de foi, de naïve croyance (due à la jeunesse de Sophie, lorsqu'elle conte ses souvenirs d'adolescente), puis de désespérance lors de sa descente en enfer, lorsqu'elle arrive dans l'abomination sur terre, Auschwitz, dirigée par cet homme, Rudolf Höss, enfin de dégoût de soi et d'un sentiment morbide d'insurmontable culpabilité pour avoir dû faire le choix horrible auquel on l'a forcée, lors de son arrivée au camp. Ce choix que l'on n'apprend qu'à la fin, tant Sophie rechigne à faire remonter au grand jour cet épouvantable épisode de sa vie !

Mais, penchons-nous un peu sur les rapports que Sophie est très brièvement amenée à entretenir avec Rudolf Höss.
Le commandant du camp s'avère être le parfait représentant de ces nazis, absolument obéissants aux ordres, totalement dénués du moindre esprit de contestation, un homme, même pas monstrueux, au sens où on peut l'entendre d'un esprit malade. Non, Rudolf Höss n'est pas malade, il est simplement complètement et indéfectiblement dévoué à une idéologie dévoyée. Il ne se pose pas de questions. Il accomplit son travail. Il obéit. Est-il taré ou simplement obéissant aux ordres d'une hiérarchie dépravée ? (A lire à ce sujet, ses mémoires ou les souvenirs romancés écrits par Robert Merle, dans "la mort est mon métier".) Ce qui rend cet homme, au demeurant correct et courtois, absolument épouvantable, c'est qu'il agit tout simplement comme un ordinateur qui applique un programme.
Et que peut bien faire Sophie, face à Rudolf Höss ? elle veut, elle essaie de sauver son fils. Son fils, ce garçon blond, aussi aryen que n'importe quel nazi de bonne souche pourrait le souhaiter, elle souhaite, pour le sauver, le faire intégrer au programme du "Lebensborn" (programme inventé par les nazis pour intégrer à la "race des élus" des enfants blonds aux yeux bleus, dignes de représenter la race des seigneurs, c'est à dire eux-mêmes et de répandre à travers le monde les vertus de la race aryenne !).
Alors Sophie tente de sauver son enfant et pour ce faire n'hésite pas à tenter de séduire Rudolf Höss.

Enfin, évoquons brièvement le rapport que Sophie entretient avec la musique qui la préserve de la folie durant la guerre à Varsovie et pendant son incarcération. Cette musique, qui occupe une si grande place lors de sa confrontation avec Rudolf Höss, lorsqu'elle perçoit brièvement quelques notes de la Création de Haydn. Ces notes, pour elles sublimes, lui donnent le courage d'entreprendre sa démarche désespérée auprès du Commandant.
La musique, oui, la musique, seule alternative à la folie. La musique ? elle est née dedans. Elle joue d'un instrument.
Et c'est encore la musique qui la soutient ensuite, après Auschwitz, dans le long parcours de sa réadaptation à la vie. Et ce que Nathan lui offre, entre autres choses importantes, c'est l'accès à la musique, Bach, Mozart et Vivaldi, qu'elle écoute avidement, du matin au soir dans la chambre du Palais Rose....

Bon, je vais m'arrêter là ! Je n'avais pas l'intention d'écrire un aussi long billet et il y a encore tant et tant de choses à dire... une seule encore, une seule, lisez ce livre exceptionnel !

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