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(01/01/1900)
4/5   1 notes
Résumé :
Ce premier volume du Théâtre complet d’Italo Svevo rassemble les trois premières de ses comédies de jeunesse que Svevo n’a pas jetées au feu. Ils constituent un triptyque consécutif à la mort précoce d’Elio Schmitz, le jeune frère et confident de Svevo. En élaborant ces trois ouvrages sur la base du Journal qu’Elio lui a laissé, Svevo accomplit à sa façon le deuil de ce frère aimé et se libère, ou se déprend, d’une certaine image du père, d’une certaine ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
Encore une petite pièce insoupçonnée et insoupçonnable d'Italo Svevo et qui présente de l'intérêt. J'avais toujours cru que cet auteur était venu à l'écriture sur le tard, en dilettante, et qu'on lui devait essentiellement un seul roman, La Conscience de Zeno.

Or, il n'en est rien, car certes son oeuvre la plus célèbre arrive dans les années 1920 alors qu'il a passé la soixantaine, mais il écrivait depuis bien longtemps, et pas seulement des romans. D'ailleurs, quand on y réfléchit, quel auteur pourrait subitement se révéler à soixante ans s'il n'a pas été auteur depuis toujours ? le mythe d'Hokusai, en littérature, j'y crois peu.

Voici donc une petite pièce en deux actes d'un jeune homme italien d'origine allemande, qui choisit comme nom de plume Italo Svevo, littéralement, " Italien souabe " et qui nous livre dès 1886 une réflexion pénétrante sur l'eugénisme et sur la science appliquée aux affaires humaines.

C'est une critique très vive des théories génétiques et héréditaires, ne l'oublions pas, — dès 1886 ! —, c'est-à-dire à une époque où elles étaient à peine naissantes et encore séduisantes pour le plus grand nombre. Connaissant l'identité juive de Svevo, on ne peut qu'applaudir ce formidable talent de visionnaire et d'anticipation face à des méthodes sélectives de l'humain qui prendront leur plein essor sous le Nazisme allemand.

L'auteur nous offre également matière à réflexions sur la science elle-même et sur ceux qui la font et qui s'y adonnent. Selon lui, il y a autant de " croyance " dans la science et autant d'irrationalité que dans n'importe quelle foi ou conviction politique. Qu'avons-nous à craindre quand la science devient une religion et qu'elle nous dicte nos choix sociaux ?

Ici, le décor est minimaliste : une jeune fille à marier, un jeune homme intéressé par la précédente, un tuteur, une mère et une éminence scientifique. le jeune homme, vous l'avez reconnu, c'est évidemment Alberto, un représentant de la noblesse (à cette époque, cela voulait encore dire un peu quelque chose, socialement parlant).

Alberto a rencontré Anna et en est de suite devenu dingue. Il est par ailleurs scientifique en dilettante et particulièrement au fait des théories de l'hérédité. Il a déjà éconduit une demoiselle parce qu'il avait appris que sa mère avait eu un amant autrefois. Il fait donc sa petite enquête réglementaire sur les antécédents familiaux d'Anna.

Il s'avère que par chance, celle-ci est la pupille de Lorenzo, un bon ami à lui. Il peut donc sans crainte s'en référer à lui pour savoir à quoi s'en tenir à propos d'Anna et de son aptitude à faire une épouse convenable selon ses critères scientifiques.

Je ne souhaite pas vous en dire plus mais je tiens à préciser que je décèle beaucoup de malice et de profondeur dans cette pièce, a priori, anodine. Comment l'on peut faire des entorses à ses convictions lorsque nos intérêts semblent contradictoires, comment l'on peut interpréter telle ou telle information selon le cadre conceptuel dans lequel on essaie de les faire entrer absolument, même si elles n'y rentreront jamais, même à coups de maillet, etc., etc. Tout ce qui est et reste plus que jamais d'actualité dans notre façon de percevoir le monde.

En somme, une petite pièce qui commence mollement mais qui monte en intensité et en intérêt au fur et à mesure et qui nous propose une fin intéressante. Bref, encore une bonne surprise signée Italo Svevo. Mais ceci n'est que ma théorie, c'est-à-dire, pas grand-chose.
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Citations et extraits (9) Voir plus Ajouter une citation
ALBERTO : Je te la demande officiellement en mariage. Je n'ai aucun parent qui puisse le faire pour moi. Pas même un ami intime. Pardonne-moi si je ne te la demande pas selon toutes les règles de l'étiquette, mais je te la demande de tout mon cœur.
LORENZO : Moi, je n'ai rien contre. Mais laisse-moi te poser une question ! Depuis combien de temps connais-tu ma pupille ?
ALBERTO : Depuis un mois.
LORENZO : Et tu es déjà assez sûr d'elle, de toi, pour engager ta vie entière.
ALBERTO : Absolument sûr ! Ces trente jours ont été bien employés. Je ne suis pas un gamin ! Avec tout l'amour que j'ai ici (il montre son cœur) et là (il se touche le front), tout en moi reste froid, tranquille ; je pense comme j'ai toujours pensé devant tous les phénomènes de la vie. J'ai tout calculé avec autant de froideur que si la chose ne m'avait pas concerné.

Acte I, Scène 6.
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ANNA : Les savants prétendent que si les parents se conduisent mal, les enfants se conduiront mal aussi. Mais moi, comment pourrais-je faire de fausses lettres de change quand je ne sais même pas en faire de vraies ? Quand je n'en ai même jamais vu.
LORENZO : Mais Alberto ne dit pas que si un membre d'une famille se conduit mal, il en résulte nécessairement que son descendant commettra la même mauvaise action. Il aura seulement la même tendance à faire le mal. Ce sont des théories fausses, qui servent à occuper les oisifs que sont les savants. Mais eux y croient.

Acte I, Scène 8.
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LORENZO : Docteur, vous qui êtes un homme de science, que pensez-vous des théories de l'hérédité ?
REDELLA : Que devrais-je en penser ?
ALBERTO : Lorenzo aimerait trouver en toi un adversaire de ces théories.
LORENZO : Alberto m'ennuie continuellement avec ces stupidités.
REDELLA : Des stupidités, les théories de l'hérédité ? Excusez-moi, signor Lorenzo, mais il me semble que vous ne pensez pas ce que vous dites.
LORENZO : Pardon, pardon, je ne voulais pas vous offenser !
REDELLA : Je ne suis pas offensé et même, je vous demande pardon de m'être échauffé. Mais c'est tout naturel. J'apprécie beaucoup ces théories et elles ne méritent sûrement pas d'être traitées de stupidités.
LORENZO : Elles sont ingénieuses, je vous le concède.
REDELLA : Pas ingénieuses, non. Elles sont justes, monsieur. Voilà le terme approprié.
LORENZO : Oh ! justes, vous en êtes certain ?

Acte II, Scène 4.
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LORENZO : Mais toi, les parents d'Anna, tu les connais ?
ALBERTO : Est-ce que je les connais ? Je sais, en tout cas, qu'ils n'ont rien fait de mal.
LORENZO : Et comment le sais-tu ?
ALBERTO : Ouh ! la rumeur m'en aurait informé.
LORENZO : Évidemment, dans ton laboratoire de chimie, on sait tout ce qui se passe.
ALBERTO : Mais enfin, toi, tu sais quelque chose ? Je compte sur ta franchise pour ne rien me cacher. Car je dois te le dire : si après m'être marié, j'apprenais, par exemple, que la mère d'Anna a manqué à ses devoirs, je ne dormirais plus une seule nuit tranquille. Avoir à supposer en ma femme un défaut qui n'a pas encore eu l'occasion de se manifester mais qui, par nature, par fatalité, doit un jour apparaître en elle ou dans mes enfants pour me gâcher la joie d'exister, me rendrait extrêmement malheureux.

Acte I, Scène 6.
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ALBERTO : Je dis qu'il existe indubitablement des caractères héréditaires organiques mais que l'éducation et le bon exemple permettent de lutter contre n'importe quel défaut d'hérédité.
REDELLA : Et c'est là ce que tu appelles des réflexions personnelles ? C'est du simple plagiat, car c'est ainsi que l'on pensait il y a deux cents ans. Où as-tu pêché ces stupidités ?
ALBERTO : Même si tu les juges stupides, c'est vraiment moi qui les pense ; moi qui pourtant connais aussi bien que toi les dernières avancées de la science. J'y ajouterai cette autre réflexion personnelle. Vous autres, vous vous complaisez tellement dans l'idée de l'absolu — c'est moi qui vous le dis aujourd'hui — que, pour ne pas y renoncer, vous rejetteriez toute vérité reconnue qui échapperait à vos règles.

Acte II, Scène 7.
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Quel roman tire à boulets rouges sur la psychanalyse ? Mais avec un humour qui dériderait le plus sérieux des psy ?
« La conscience de Zeno » , d'Italo Svevo, c'est à lire et à relire au Livre de poche.
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