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France Bhattacharya (Traducteur)
EAN : 9782843044410
111 pages
Zulma (19/02/2009)
3.91/5   59 notes
Résumé :
Bhupati consacre sa vie au journal anglophone qu'il a fondé. Il en délaisse sa femme, la belle et jeune Chârulatâ, et confie à son cousin Amal, étudiant qu'il héberge, le soin de la distraire... À sa parution, au tout début du XXe siècle, Chârulatâ scandalise la bonne société bengalie. Aujourd'hui, on admire la critique des mœurs, la très subtile tension érotique et, plus singulièrement, les rapports ici clandestins entre séduction et littérature. Ironie et poésie d... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (24) Voir plus Ajouter une critique
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Joli roman, d'un style dépouillé, tout en subtilités et en finesse. À travers l'histoire de Bhupati et de sa jeune femme chârulatâ, c'est toute la difficulté des relations de couple qui est explorée, mais dans un pays précis, l'Inde, et dans une famille d'une classe sociale aisée, ce qui implique de nombreuses conséquences spécifiques à cet environnement.

Bhupati, qui pourrait très bien se permettre de ne pas travailler, se voue corps et âme à la direction d'un journal politique, délaissant sa femme, qui traîne son désoeuvrement dans le gynécée de leur maison - vu leur rang social, la plupart des tâches ménagères incombent aux domestiques, et chârulatâ, en tant que femme indienne riche, n'a jamais été préparée à imaginer des projets personnels, et encore moins professionnels. Cela, Tagore ne le dit pas expressément, pas plus qu'il n'insiste sur le fait que le mariage a été arrangé, le lecteur indien ayant déjà toutes les données en mains, un peu comme Edith Wharton ne précise pas ce qui se fait ou ce qui ne se fait pas dans la bonne société de Chez les heureux du monde.

chârulatâ, donc, s'étiole, jusqu'à ce que l'installation d'un cousin de Bhupati, Amal, à peu près du même âge qu'elle, et avec qui elle va pouvoir partager plusieurs centres d'intérêt, dont, essentiellement, la littérature, ainsi qu'inventer des plans plus ou moins réalisables. chârulatâ devient une sorte de muse pour Amal, qui écrit de plus en plus, de mieux en mieux, jusqu'à être publié et devenir connu. Or, tant qu'Amal écrit juste pour elle et lui, leur relation reste privilégiée et comble le grand vide qui habitait jusque-là la jeune femme. Elle se sent trahie parce qu'Amal ne porte pas le même intérêt qu'elle à leurs activités littéraires, autrement dit, à leur relation. Et puisqu'Amal, qui aime assez se faire dorloter et aduler, commence également à lire ses textes à une belle-soeur qui vit avec eux, pourtant peu férue de littérature, chârulatâ va se comporter de façon mesquine et laisser libre cours à toute sa jalousie et à un sentiment de possessivité à l'égard d'Amal qui le fera fuir, la première proposition de mariage arrangé servant de prétexte.

En perdant Amal et leurs échanges littéraires, elle perd tout ce qui faisait l'intérêt de sa vie et bascule dans un état de profonde tristesse, s'étiole à nouveau et encore plus profondément, sans bien comprendre ce qui lui arrive. Et sans voir que son mari, Bhupati, s'est fait flouer et a perdu son journal, et erre lui aussi maintenant sans but, cherchant à revenir vers elle. C'est là que se trouve le coeur de l'histoire, celle de chârulatâ et Bhupati. Ils ne se connaissent pas, ils n'ont jamais vraiment vécu ensemble, ils sont incapables de se trouver et de remplir ensemble le vide qui les ronge. Tagore décline subtilement leurs maladresses, leurs incompréhensions, leurs manques et leurs chagrins, chagrins qu'ils sont incapables de partager. C'est un drame psychologique, celui de chârulatâ, surtout, mais aussi celui de Bhupati. C'est le drame d'un couple dans son intimité, sur la solitude à deux et sur l'impossibilité de communiquer. C'est aussi un constat amer sur le mariage en Inde et la condition des femmes, qui n'ont alors guère d'échappatoire à la vie que la société leur impose, quand bien même elles sont de classe sociale aisée.

Des décennies plus tard, des femmes indiennes prendront la plume pour s'emparer à leur tour du sujet.
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"Tagore avait environ 39 ans quand il écrivit ce court roman. Marié, il avait déjà plusieurs enfants. Certains de ses biographes ont vu derrière la fiction le souvenir des relations affectueuses que le jeune Rabindranath avait eues avec la femme d'un de ses frères aînés. de quelques années plus âgée que son beau-frère, elle avait été la compagne de sa jeunesse et partageait ses goûts littéraires. Elle se suicida à l'âge de 25 ans, quelques mois seulement après que la famille eut "arrangé" le mariage du poète. (p. 8 / Préface de France Bhattacharya)

Après la lecture bouleversante de "Kumudini " que j'ai achevée tout récemment, je me suis empressée de faire cet emprunt à ma médiathèque.... Lecture plus légère...qui a, toutefois, son poids de tension et d'émotion...

J'ai fini en une soirée ce texte... qui contrairement à ce que j'ai dit précédemment est "faussement léger"...Je ne suis pas complètement d'accord avec certains qualificatifs, comme sensualité ou érotisme... J'ai même du mal à rédiger un ressenti, car l'analyse psychologique de Tagore est très subtile...très fine, progressant de la légèreté, de l'amusement , de la complicité entre une jeune épouse délaissée par son journaliste de mari, qui demande à un de ses jeunes cousins de venir distraire sa femme....à un drame de l'incompréhension, de la solitude, avec le tsunami que peut être un "Chagrin d'amour"...rentré !

Une complicité naîtra, Chârulata encouragera Amal à écrire... Il réussira à être reconnu comme écrivain; elle-même se mettra à écrire, pour oublier que leur complicité littéraire, intellectuelle n'est plus "privée", confidentielle... Que leurs tête à tête diminuent, finissent par disparaître....Après tant de moments joyeux, enrichissants... le désert,
l'obscurité vont submerger Chârulata... qui tente vainement de contenir le chagrin, le manque atroce d'Amal...parti en Angleterre faire ses études et se marier... restant silencieux à son encontre, de façon incompréhensible....

"Amal allait bien. Pourtant il n'écrivait pas. Comment un tel abandon était-il possible ?
(...) Cruelle séparation, séparation définitive, séparation au-delà de toute remise en question et de tout
remède ! Châru ne parvenait plus à garder son équilibre. (p. 107)"

Un court texte que l'on commence , le coeur léger et l'esprit amusé... et l'émotion la tristesse nous "prend aux tripes", sans qu'on y prenne garde. L'art du récit de Tagore est vraiment du grand Art !!...
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Rabindranatah Tagore, prix Nobel de littérature en 1913, a publié ce court roman en 1901, il faudra attendre 2009 pour le voir traduit pour la première fois en français aux éditions Zulma.
La littérature indienne ne m'est pas familière, le nom de Tagore ne m'évoquait rien et là surprise !Ce texte écrit dans les années 19OO met en scène 3 personnages. Bhupati un riche indien anglophone absorbé par le journal anglophone qu'il a fondé, Chârulata sa belle et jeune épouse et Amal son cousin , étudiant à qui il offre l'hospitalité.
Bhupati est absent , Chârulata s'ennuie et Amal est omniprésent. Mais l'équilibre est précaire, l'amitié est-elle pérenne ou évoluera t'elle entre ses 2 êtres passionnés et complices?
Tagore a , dit-on, écrit ce roman en pensant au jeune homme qu'il a été et à la relation qu'il a eu avec l'une de ses belle-soeurs...Qu'importe ce texte est un petit bijou, l'analyse des acteurs de ce drame prisonniers de leur époque et de la société dans laquelle ils évoluent .
Une lecture découverte qui donne envie de se plonger à nouveau dans l'oeuvre de Tagore .

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Court, concis, sans fioritures, j'adore! J'ai passé un très bon moment avec ce petit roman de Rabindranath Tagore, publié en 1901. L'auteur y dépeint un couple aisé, dont l'homme se consacre entièrement au journal qu'il a créé tandis que sa toute jeune épouse, dans la fleur de l'âge, s'ennuie dans leur grande maison. Se sentant coupable de la délaisser, Bhupati invite sa belle-soeur ainsi qu'un de ses jeunes cousins à venir s'installer chez eux pour lui tenir compagnie et la suivre dans ses études. Chârulata, notre héroïne, trouvera vite auprès du jeune Amal un compagnon à sa vive imagination et son goût pour l'écriture.
En peu de mots, Tagore dépeint les états d'âme de chaque personnage avec une délicatesse et une justesse tout simplement impressionnantes. Ca coule de source, c'est si réaliste que sans doute chacun peut s'y retrouver, c'est doux-amer et terriblement moderne tout en restant universel.
Une lecture-bonbon dont la saveur reste longtemps en bouche. Ma deuxième lecture de l'auteur, à continuer.
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Lu après "Kumudini", je dois avouer que "chârulatâ" m'a un petit peu déçue. L'écriture de Tagore est tout aussi belle et subtile, mais ce roman-ci, une nouvelle plutôt, m'a paru vraiment trop court. On aimerait en savoir plus, suivre les trois personnages principaux sur une durée plus longue...
Approfondir leurs sentiments en revanche, c'est fait, et réellement c'est dans ce domaine que Tagore excelle.
Bhupati et chârulatâ sont un couple de la bonne société bengalie. Lui dirige par passion un journal, elle s'ennuie. Comme l'a été l'auteur lui-même, encore adolescent, un jeune neveu est convié à vivre chez eux pour occuper et distraire l'épouse. Mais lorsque, coup sur coup, le journal fait faillite, et qu'Amal le neveu s'envole, Bhupati maintenant désoeuvré et malheureux, se rend compte que le coeur de sa jeune épouse est parti avec Amal. Au lieu de trouver au foyer compréhension et affection, il découvre une femme inconsolable et un "nid gâché" (le titre original).
Loin d'être un mari tyrannique comme celui de Kumudini, ici l'époux est un être sensible, peut-être le personnage le plus attachant. En effet, le neveu apparait comme un jeune fat, ne sachant pas voir l'émotion qu'il fait naître chez sa belle-soeur. Quant à chârulatâ elle-même, elle a tout de l'adolescente rêveuse qui, n'ayons pas peur des mots, se monte le bourrichon.
Par contre, ce qui m'a paru le plus réussi dans ce court roman, c'est l'écriture comme métaphore de la séduction : la complicité entre chârulatâ et Amal naît de leurs essais d'écriture ; chârulatâ refuse de montrer son cahier à son mari. Lui-même tente de reconquérir sa femme en lui présentant ses écrits (sans succès). Tout ce jeu autour des cahiers montrés, cachés, présentés comme des offrandes, révèle à lui seul la progression des sentiments, et c'est écrit avec une très, très grande subtilité.
Parfaite traduction de France Bhattacharya.
Challenge Nobel
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Citations et extraits (25) Voir plus Ajouter une citation
Quand il avait arrêté la publication de son journal Bhupati avait songé à son avenir. Il s'était promis de ne pas s'épuiser en efforts inutiles ni de se laisser aller au désespoir. Il se consacrerait à l'étude et à l'affection aux côtés de Châru, ainsi qu'aux devoirs quotidiens d'un maître de maison. Tous ces petits bonheurs familiers, si faciles à obtenir, étaient les plus beaux, susceptibles d'être toujours renouvelés en restant purs et sans tache. Grâce à ces plaisirs, il allumerait la lampe du soir dans un coin de sa vie. Un apaisement secret descendait sur lui. Les rires, les bavardages, les plaisanteries, les petites attentions quotidiennes pour se faire respectivement plaisir ne nécessitent pas beaucoup d'effort. Le bonheur qui pourtant en découle est immense.
Au moment de réaliser ce programme, il s’aperçut que les joies simples ne le sont pas.
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"Je me sens coupable de ne pas pouvoir passer tout mon temps auprès de toi, mais c'est fini. Je ne m'occuperai plus jour et nuit du journal. Tu m’auras autant que tu voudras.
- Ce n'est pas ça, répondit-elle avec impatience.
- C'est quoi, alors ?", dit-il en s'asseyant sur le lit.
Châru fut incapable de cacher son irritation.
- Laissons ça pour le moment, je te le dirai ce soir.
Bhupati resta un moment silencieux.
"Très bien, dit-il, laissons cela pour le moment."
Il se leva lentement et sortit. Rien ne fut dit de ce qu'il avait à lui dire.
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Préface de France Bhattacharya

Tagore avait environ 39 ans quand il écrivit ce court roman. Marié, il avait déjà plusieurs enfants. Certains de ses biographes ont vu derrière la fiction le souvenir des relations affectueuses que le jeune Rabindranath avait eues avec la femme d'un de ses frères aînés. De quelques années plus âgée que son beau-frère, elle avait été la compagne de sa jeunesse et partageait ses goûts littéraires. Elle se suicida à l'âge de 25 ans, quelques mois seulement après que la famille eut "arrangé" le mariage du poète. (p. 8)
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Comme l'oiseau qui, le soir venu, revient au nid, Bhupati retourna auprès de Châru en abandonnant le lieu de son activité. Il décida que cela suffisait, que là était sa demeure et nulle part ailleurs. Le bateau en papier avec lequel il jouait tous les jours avait coulé, il allait rentrer chez lui. Bhupati pensait simplement que le droit que l'homme avait sur son épouse allait de soi et qu'il n'avait pas à la conquérir.
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Le désert de sa vie intérieure lui faisait peur ; elle savait que Bhupati, qui s'était retiré du monde, s'efforçait de trouver tout le bonheur de sa vie auprès d'elle et s'y essayait corps et âme. Elle se demandait combien de temps les choses en resteraient là et pour quelle raison il n'adoptait pas une autre attitude. Pourquoi ne dirigeait-il pas un autre journal ? Châru n'avait jamais l'habitude de distraire son époux, il n'avait non plus jamais rien attendu d'elle, ni ne lui avait fait part d'un seul désir. Et voilà que, soudain, il attendait d'elle tout ce dont il avait besoin dans la vie et n'y trouvait rien ailleurs.
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Videos de Rabindranath Tagore (6) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Rabindranath Tagore
Lecture de Notre besoin de consolation est impossible à rassasier de Stig Dagerman et concert autour des oeuvres de Théodore de Banville, Gérard de Nerval, Paul Eluard et Rabindranath Tagore.
« C'est l'angoisse de la séparation qui s'épand par tout le monde et donne naissance à des formes sans nombre dans le ciel infini. C'est ce chagrin de la séparation qui contemple en silence toute la nuit d'étoile en étoile et qui éveille une lyre parmi les chuchotantes feuilles dans la pluvieuse obscurité de juillet. C'est cette envahissante peine qui s'épaissit en amours et désirs, en souffrances et en joies dans les demeures humaines, et c'est toujours elle qui fond et ruisselle en chansons. »
L'Offrande lyrique, Rabindranath Tagore, traduit par André Gide.
Ces émotions douces et amères qui nous secouent ne sont-elles pas universelles ? Ne sont-elles pas l'essence même de notre existence ? Deleyaman, groupe franco-américain dans la veine céleste de Dead Can Dance, aborde ces questions vibrantes, parle d'art, d'amour, de beauté et de contemplation comme des réponses à nos contraintes existentielles.C'est une amicale collaboration artistique entre le groupe et Fanny Ardant qui a donné naissance à cette création. Au travers d'un texte lu, elle dialogue avec le groupe sur une musique créée par Deleyaman. Avec le son du doudouk, le groupe d'Aret Madilian interprétera les titres français de sa discographie
Fanny Ardant : voix Béatrice Valantin : voix, clavier Aret Madilian : piano, clavier, guitare, percussion Guillaume Leprevost : basse, guitare Artyom Minasyan : doudouk, plul, pku Madalina Obreja : violon Gérard Madilian : doudouk
Création en partenariat avec le Trianon Transatlantique de Sotteville lès Rouen – Scène conventionnée d'intérêt national art et création chanson francophone.
À écouter – Deleyaman, « Sentinel », 2020. Plus d'informations sur www.deleyaman.com À écouter : https://deleyaman.bandcamp.com/album/sentinel
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