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EAN : 9782757821060
128 pages
Points (07/10/2010)
3.59/5   62 notes
Résumé :

Salé, près de Rabat. Milieu des années 80. Un adolescent pauvre court à perdre haleine. Vers son rêve, devenir metteur en scène de cinéma, vers sa star égyptienne : Souad Hosni - ailleurs, loin de son quartier, qu'il aime et déteste à la fois, qui veut le fixer dans une identité-cliché, dans la honte à jamais: le garçon efféminé. Un futur fou. Alors, il court... C'est sa seule... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (8) Voir plus Ajouter une critique
Le ton change de façon perceptible dès le début, comparé à celui de "L'armée du salut", du même auteur". Plus saccadé -je dirais même haletant-, il semble exprimer chez l'auteur une sorte de mal-être. C'est comme si, après avoir abordé dans "L'armée du salut" ses souvenirs d'enfant avec recul et aussi une sorte de sérénité, il avait soudain réalisé que son passé recelait une grande part d'ombre qu'il acceptait enfin d'exhumer.

La scène qui ouvre ce roman est d'ailleurs particulièrement violente. Abdellah, alors âgé de treize ans, considéré comme la "pute" du quartier d'Hay Salam parce qu'il est efféminé et connu pour avoir pratiqué des attouchements avec d'autres garçons, est séquestré par un caïd et ses acolytes qui veulent abuser de lui. Il échappe au viol mais tente aussitôt de retourner de son plein gré sur les lieux de son agression, car il éprouve pour le caïd en question une attirance ambiguë. Sur le chemin qui mène à la maison où il a été séquestré, il pose sa main sur un poteau électrique en fer à haute tension, et perd connaissance.
Il revient à lui dans le salon familial, et est à partir de ce jour considéré comme un miraculé...

Des années plus tard, alors qu'il se souvient de cette épisode qu'il avait jusque-là occulté de sa mémoire, Abdellah, lui, prétend qu'il "venait de rencontrer la mort", qu'il était "parti, puis revenu", "mort dans un autre monde dont il n'avait plus de souvenir".
A compter de ce moment, c'est comme si sa vie était devenu frénésie.

"Pour moi, c'était le début de la course. Je me détachais des autres et je commençais à courir. Pour mon rêve ? Pour sauver ma peau ? Mon âme ?"

Le récit se compose ensuite d'épisodes de sa vie que l'on devine importants, de rencontres émouvantes, de relations amoureuses, qui l'ont fait souffrir, humilié, qui l'ont parfois enrichi. Il y évoque notamment sa passion pour le cinéma, l'image de sa mère, à laquelle il pense souvent, ses premiers pas dans l'écriture...

On ressent avec force le besoin de restructuration d'Abdellah, dans ce récit qui se résume finalement à une quête, d'amour, de reconnaissance, d'identité.
Il émet la volonté de se détacher de ses particularités individuelles, qu'elles soient sexuelles, religieuses, ou raciales, pour se mettre à l'écoute de lui-même dans sa dimension universelle d'homme, afin de pouvoir ensuite se rapproprier ses différences.
La plume se met au service de ses émotions, de cette poursuite de lui-même, jusqu'à en être indissociable. C'est comme si Abdellah Taïa nous faisait respirer avec lui, ressentir ses doutes, sa folie, son vertige.

"L'armée du salut" est un récit fort et émouvant, mais "Une mélancolie arabe" possède à mon sens une puissance d'évocation encore plus troublante.

Lien : https://bookin-ingannmic.blo..
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J'ai refermé ce petit bouquin autobiographique et j'ai pensé à mon père.
A cette façon qu'il avait de me nous raconter l'Egypte, à son air dépité lorsqu'il me parlait de la condition de l'homme homosexuel là-bas.
À sa tristesse.
À sa mélancolie.

Ici, Taïa nous raconte son enfance de petit garçon efféminé qui préférait déjà les hommes, et ce viol qu'il a failli subir parce qu'un cul de petit garçon c'est aguicheur.
Il nous raconte son arrivée à Paris et le gris de la ville, la passion violente avec un algérien et la naissance de son écriture.
Il nous raconte le cinéma, ses rêves, puis enfin, il nous raconte le Caire.

L'écriture est belle, la palette des sentiments amoureux riche.
La mélancolie est douce amer mais elle lui semble inévitable et nécessaire pour avancer.

Ce fut une belle entrée en matière dans l'univers d'Abdellah Taïa.

Des conseils de lectures autour du monde arabe et/ou traitant de l'homosexualité dans le monde arabe? Je suis preneuse.
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Bien écrit cet ouvrage n'apporte cependant rien de nouveau ni sur le sujet ni quant au style. Je l'ai gardé pour la dernière page où est retranscrit le poème "Jeux cruels" de Bachar Ibn Bourd, poète du VIII e siècle, aveugle de naissance. (cf citation)
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Malheureusement mon premier abandon pour cette nouvelle année, ce n'est ni ma première ni ma dernière lecture de cet auteur que j'affectionne particulièrement mais là j'avais l'impression que je tourne en rond, une thématique redondante, du déjà vu. J'ai choisi de mettre cette lecture en attente,qui sait je pourrais la reprendre avant la fin de l'année.
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J'ai beaucoup apprécié ce tout petit roman autobiographique. Il se lit vite, est très bien écrit et très poétique malgré le sérieux du sujet traité.
Abdellah Taïa est un jeune homosexuel qui est né et a grandi au Maroc.
Il nous explique qu'il a rapidement su qu'il était homosexuel : déjà enfant dans les rues de sa ville natale du Maroc, les enfants le désignaient comme "Léïlah". Il échappe de peu à un viol collectif de la part des gamins des quartiers voisins. Une jeunesse difficile...
Aujourd'hui en France, ce jeune Marocain essaie de trouver l'équilibre, de construire un couple avec un homme qu'il aime. Mais ce n'est pas si simple (de construire un couple qui marche et d'être homosexuel, même en France) et son témoignage est très touchant.
C'est une jeune auteur dont je lierai avec plaisir les futurs ouvrages et qui a, à mon avis, un très bel avenir d'écrivain.
Lien : http://piccolanay.blogspot.d..
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Citations et extraits (7) Voir plus Ajouter une citation
(...) ville du chaos qui m'allait comme un gant. Le Caire. Al-Qahira. Un hammam de 20 millions d'habitants. Un monstre humain. Une fleur bleue, jolie, poussiéreuse. Un désert inspirant, étouffant.
(...)
Ce n'était pas parce que j'aimais sincèrement et pour toujours les hommes qu'il pouvait se permettre de me confondre avec l'autre sexe. De détruire ainsi mon identité, mon histoire.
(...)
Paris, ma ville d'adoption depuis sept ans, où je me cherchais et réinventais sans cesse
(...)
Je suis un rapide. Je n'aime pas attendre. Je crois au coup de foudre. J'ai besoin de savoir tout, tout de suite.
Comment sortir de l'amour ? De sa folie ? Comment contrôler cette machine des sentiments qui me guide à mon insu ?
(...)
Avec toi, je redevenais arabe et je dépassais en même temps cette condition.
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JEUX CRUELS

Je pleure sur ceux
qui m'ont fait goûter la saveur
de leur affection,
puis, dès qu'ils m'eurent
éveillé au désir, se sont
assoupis.

Ils m'ont engagé à me tenir
debout,
et lorsque je me fus levé,
pourtant avec courage le fardeau
que leur affection
m'avait imposé,
ils se sont empressés
de s'asseoir.

Je sortirai donc de ce monde,
et de votre amour
toujours vivant, dans cette poitrine,
sous mes côtes décharnées,
personne jamais
ne sentira la présence.

Entre la tristesse
et moi-même,
j'ai noué de longues relations,
qui ne cesseront plus jamais,
à moins que ne cesse un jour
l'éternité.

pp. 125,126

Note du contributeur: (L'auteur reproduit ici ce qu'il indique être un poème de Bashar Ibn Bourd, poète aveugle de naissance du VIII e siècle)
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Mon histoire, désormais, j'allais l'écrire seul, en silence, loin du groupe, loin du mauvais oeil. Protégé par mon père tendre et ma mère un peu sorcière. J'étais dans autre chose. Je devenais de plus en plus spécial. Bizarre même.
Pour les autres, je n'étais plus l'efféminé. J'étais le miraculé.
Pour moi, c'était le début de la course. Je me détachais des autres et je commençais à courir. Pour mon rêve ? Pour sauver ma peau ? Mon âme ?
Avec plaisir, inconscience, je courais. Je courais. Je courais.
Je courais sans rien dire. Sans but.
Je courais vers Ali qui ne m'a jamais plus parlé.
Je courais vers moi inconnu, retrouvé. Perdu.
Je courais pour rencontrer le cinéma, entrer la bouche ouverte dans sa religion et ses images.
Je courais pour fuir les djinns tout en cherchant à les revoir.
Je courais vers mes petits bonheurs quotidiens, insignifiants, superficiels.
J'ai vu. Le rêve était plus fort que la vie réelle.
J'ai continué de courir. De temps en temps mon coeur s'arrêtait de battre. Et c'est durant ces moments-là que je demandais à ma mère de m'apprendre à prier comme elle. Prier en réinventant les rituels, les dogmes. Prier libre.
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Tu as fini par me fatiguer. M’épuiser. Je n’avais plus la force, au bout d’un an et demi d’amour intense, possédé, de répéter les mêmes histoires, de subir ton autorité, d’être moins que toi dans l’amour.
Tu as réussi, avec le temps, à fixer en moi l’idée que mon amour était inférieur au tien. Tu étais un poème mystique. Je n’étais qu’une petite nouvelle de Maupassant.
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Ce livre est une beauté. Un style d'écriture très personnel, pur. Des phrases d'une belle musicalité. Des descriptions du sentiment amoureux avec toute ses palettes
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