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EAN : 9782070534746
144 pages
Gallimard (15/06/1999)
3.7/5   10 notes
Résumé :
Peintre, graveur, décorateur, Pierre Bonnard a travaillé sans relâche à simplifier la forme et à exalter la couleur, car, disait-il, « la couleur agit ». Attentif à tous les mouvements contemporains - fauvisme, cubisme, surréalisme -, Bonnard a pourtant suivi un chemin solitaire, entre l'observation de la nature et une réflexion obstinée sur le métier de peintre. Rarement un artiste aura su joindre et concilier dans son oeuvre un tel sentiment de la vie, une telle i... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (3) Ajouter une critique
Je ne sais pas exactement pourquoi la sauce n'a pas pris avec cet opus de la collection Découvertes Gallimard sur le peintre Bonnard. Sans doute me suis-je mal organisée : j'aurais dû lire cet ouvrage, puis aller voir l'exposition qui se déroule en ce moment au musée d'Orsay. Au lieu de ça, j'ai d'abord écouté une conférence en ligne des deux commissaires d'exposition, puis j'ai enchaîné sur l'expo. Ce n'est qu'ensuite que j'ai lu "Bonnard : la couleur agit". Mauvais timing, sans doute, puisque j'avais alors, de fait, déjà pas mal d'informations en tête et que j'avais aussi commencé à me livrer à mes propres réflexions sur le sujet.

Il y a quelques points chez Bonnard, qui pour ainsi dire sautent aux yeux lorsqu'on regarde ses tableaux : sa passion pour la nature et les jardins, son utilisation de la couleur et de la lumière, le jeu entre intérieur et extérieur (et cela, Antoine Terrasse le traite), mais aussi la déconstruction de la perspective - et pas seulement lors de sa période nabi - qui l'a amené à utiliser des aplats de couleurs qu'on pourrait dire "en étagements" : là, je trouve que le sujet est abordé un peu trop légèrement, étant donné qu'il est totalement inhérent à l'ensemble du travail de Bonnard. de même, le thème de la mélancolie qui revient sans cesse dans l'oeuvre, et qui n'est pas seulement le fait d'un artiste vieillissant, n'est guère exploitée . L'évolution de Bonnard, de la peinture nabi à des formes plus traditionnelles, n'est pas ou peu expliquée ; du reste, l'analyse de la période nabi se révèle vraiment très superficielle. Enfin, pas de regard un tant soit peu critique sur ce qu'on a appelé "le retour à l'ordre", et qui a concerné Bonnard mais aussi bien d'autres, dont Picasso. Bonnard était devenu, dans les années vingt, un peintre très à la mode, adulé des bourgeois : cela aurait peut-être valu qu'on y passe un peu de temps, comme dans l'ouvrage consacré à Vuillard dans la même collection. Je note d'ailleurs qu'il n'est pas précisé, dans la présentation qu'on nous fait d'Antoine Terrasse, l'auteur, que celui-ci était le petit-neveu du peintre (même s'il s'agit d'un historien de l'art reconnu). Or, c'est parfois un problème lorsqu'un membre de la famille se lance dans l'analyse de l'oeuvre d'un ancêtre : il se peut qu'il éprouve des difficultés à se détacher d'un sentiment d'admiration sans bornes pour le génie de la famille. Je l'ai observé dans les cas de Camille Claudel et Paul Delvaux.

A l'inverse de ce que j'ai pointé plus haut, Antoine Terrasse reste très discret sur la vie privée de Bonnard. Je sais bien que j'ai plutôt tendance à me plaindre, en général, du trop-plein de détails matériels et les faits secondaires m'importent en général assez peu. Mais, ici, nous sommes face à un homme qui a eu essentiellement deux femmes dans sa vie, qui a vu une de ses deux maîtresse se suicider par noyade lorsqu'il a choisi d'épouser l'autre, et dont l'épouse, donc, s'est révélée atteinte de maladie mentale : toutes choses qui ont eu beaucoup d'incidences sur sa vie ; entre autres exemples, Marthe ne supportait pas la société et vivait plus ou moins cloîtrée, et le groupe des Nabis la détestaient plus ou moins. Ce ne sont pas de vulgaires détails. On avait aussi prescrit à Marthe des bains réguliers. Or, lorsque l'on ces songe à ces bains médicaux liés à un état pour le moins dépressif de la patiente (Marthe), ainsi qu'au suicide par noyade de Renée (la maîtresse éconduite), il me semble que tous les tableaux de Bonnard représentant une femme prenant un bain (et dont la tête est cachée, donc non identifiable) peuvent susciter bien des réflexions. Il est curieux qu'Antoine Terrasse ne se soit pas penché sur le sujet.

Pour toutes ces raisons, il me semble que "Bonnard : la couleur agit" constitue certes un livre qui aide à entrer dans l'univers de Bonnard, mais qui se donne trop de limites (même pour un Découvertes Gallimard) et ne se révèle donc pas suffisant pour une approche élémentaire de son oeuvre et de sa vie.
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Dans la même collection (dont je ne vante plus les mérites) que Vuillard : le temps détourné", voici "Bonnard : la couleur agit. Si je parle volontiers des deux peintres, c'est que ces deux là sont de grands amis et le resteront toujours. Bonnard est né en 1867, il est licencié en droit et commence tout juste sa carrière juridique lorsqu'il se laisse happer par la peinture qu'il pratique depuis sa prime jeunesse. C'est la vie d'artiste qui l'intéresse avant tout. Il rencontre Vuillard, Sérusier, Denis et bien d'autres à L'Académie Julian et formeront le noyau initial des Nabis. Pour mieux les connaître voir l'ouvrage éponyme du même Antoine Terrasse co-écrit avec Claire Frèches-Thoiry.

S'agissant de Vuillard, Guy Cogeval dresse le portrait contrasté d'un peintre inventeur à ses débuts d'une nouvelle formulation plastique qui aurait pu le mener à l'abstraction mais qui, évoluant ensuite vers une facture plus classique au tournant des années 1910-1920, devient le portraitiste surdoué, mais convenu, de son temps. Antoine Terrasse propose, au contraire, pour Bonnard, une compréhension de l'oeuvre inscrite dans la continuité d'une recherche picturale personnelle où composition et couleur restent primordiales. Ajoutons que la renommée de Bonnard, ce qui n'est pas le cas de son ami, dépasse largement la période Nabie.

L'auteur montre ici comment, dans toute la peinture de l'artiste, une évolution sensible est perceptible. de ses réalisations de jeunesse de la période Nabie d'influence nettement japonisante (La partie de croquet ; Les femmes au jardin ; le corsage à carreaux, les trois de 1892), jusqu'à la magie colorée des oeuvres de la maturité, d'une composition de plus en plus élaborée où tout se règle, in fine, par la couleur (Cabinet de toilette de 1933, L'avant midi commencé en 1940 et achevé en 1946 ou L'atelier au mimosa achevé en 1946). Une interprétation qui se vérifie bien sûr par le support de la reproduction dans cet ouvrage, petit mais précis.

Chez Bonnard, pas de hiérarchie sclérosante de sa vision des arts. Comme son ami Vuillard, il s'adonne à la gravure et à la peinture. Il s'intéresse en même temps aux arts décoratifs et pratique très tôt la photographie qui tient un rôle important pour lui.

Bonnard et Vuillard partagent le même goût pour le milieu du théâtre. Bonnard réalise les décors d'Ubu Roi de Jarry en 1896, au Théâtre de l'Oeuvre. Ils fréquentent ensemble le milieu de la Revue Blanche et Bonnard pratique également la lithographie. Comme illustrateur de livres, il donne 109 lithographies à Ambroise Vollard pour orner l'album Parallèlement de Verlaine (paru en septembre 1900) ainsi que Daphnis et Chloé, qui restent parmi les plus beaux livres d'artistes jamais réalisés.

Décorateur, il le sera aussi pour Misia, célèbre égérie du groupe Nabi : quatre immenses panneaux pour son appartement du quai Voltaire. Sa peinture se fait l'écho de ses voyages et déplacements successifs, des endroits où il vit et séjourne : Paris bien sûr, mais aussi le Dauphiné, berceau familial, la Normandie, Arcachon, La baule et à compter de 1909, le midi où il achètera la maison du Cannet. Il représente des scènes intimistes Petite fille au chat de 1899, L'effet de glace de 1909 ou des natures mortes avec un souci très neuf du cadrage.

A partir de 1910 une exigence nouvelle de composition s'invite dans ses toiles (La salle à manger à la campagne de 1913) l'esprit en reste cependant impressionniste. A contre-courant des tendances contemporaines (fauvisme, cubisme, surréalisme) et tandis que s'affirme le débat Picasso/Braque, il continue d'explorer sa propre voie, celle d'une utilisation de la couleur comme élément déterminant de la composition. Sa femme Marthe est une source d'inspiration infinie pour des études de nus innombrables à partir de leur rencontre en 1893 : Nu accroupi au tub, plusieurs Nu à la baignoire, Nu devant la glace, Nu s'habillant etc. qui ne sont pas sans rappeler Degas dont il était admirateur.

Bonnard et Matisse qui se connaissaient exposeront ensemble à la Galerie Bernheim-Jeune et entretiendront une correspondance régulière dans un "dialogue serein", poursuivi jusqu'à la mort de Bonnard en 1947.

Une synthèse claire et plaisante à lire pour découvrir les diverses facettes de l'oeuvre de Bonnard. A lire en duo avec le petit Vuillard de la même collection.
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J'ai lu cet ouvrage que l'on m'a prêté lors du
« repos » forcé d'un séjour hospitalier. Un ouvrage passionnant, richement documenté comme tous les «  Découvertes Gallimard » et qui présente toutes les facettes d'un peintre moins célèbre que Picasso , Dali, Monet, Renoir ou Cezanne et Matisse mais mais tout aussi génial.
J'avais beaucoup apprécié l'exposition rétrospective qui avait eu lieu il y'a quelques années à Paris, notamment ces nus quasi irréels et les autoportraits.
L'ouvrage nous décrit l'évolution et la démarche de ce grand peintre, qui va, après avoir participé au groupe des Nabis, influencé à la fois par Gauguin et les peintres japonais, va suivre son propre chemin, dans lequel la couleur et la composition priment sur tout le reste.
Un texte très éclairant et pédagogique.
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Citations et extraits (5) Ajouter une citation
En juin 1933, s'ouvre chez Bernheim-Jeune son exposition "d’œuvres récentes", la première depuis 1928. Parmi la trentaine de tableaux présentés figurent de nombreux chefs-d’œuvre venus d'Arcachon et surtout du Cannet. Le public aurait-il pu deviner que telles toiles aux titres brefs - "Chambre", "Matinée", "Cabinet de toilette", "Placard" ou "Intérieur blanc" montraient toutes les pièces d'une même maison ? Tout y est transposé, magnifié.
Ce sont des tableaux dont le sujet tend à disparaître au profit de la magie colorée. La pièce la plus simple est devenue une salle de palais. Le blanc, de plus en plus destiné par son voisinage à "rendre possibles des couleurs fortes dans la lumière", y tient une grande place. "Le cabinet de toilette" est traité dans une harmonie bleue à gauche, rose orangé à droite ; des rappels de couleur de part et d'autre établissent le lien entre les tons qui s'ajoutent de proche en proche.

Chapitre V, "Un tableau est un petit monde qui doit se suffire"
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Ainsi il est admiré des fous comme des sages. On ne se lasse pas de voir des Bonnard. On ne se lasse pas non plus de les discuter. Il est le régal des délicats et la curiosité des esthéticiens. Il charme, il déconcerte, il scandalise.

Chapitre "Témoignages et documents"
[Extrait d'un article de Maurice Denis sur Bonnard]
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Un jour, les mots et les théories qui étaient le fond de nos conversations : couleurs, harmonies, rapports des lignes et des tons, équilibre, ont perdu leur signification abstraite pour devenir quelque chose de très concret. Brusquement j'avais compris ce que je cherchais et comment je pourrais tenter de l'obtenir.
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Nommer un objet, c'est supprimer les trois quarts de la jouissance du poème, qui est faite du bonheur de deviner peu à peu. Le suggérer voilà le rêve, disait Mallarmé, que Bonnard admirera toute sa vie.
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En maître absolu, il absorbe toute la lumière ambiante. A son gré il la raréfie, l'éteint jusqu'aux pus exquises délicatesses de ce Crépuscule, ou le prodige assourdi de cet Intérieur. A son gré il en emplit le Paysage normand, qui rayonne, ou la fait jaillir blonde, inondante, des draps ou elle joue avec un superbe corps de femme qui s'abandonne.
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