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Anne Damour (Traducteur)
EAN : 9782246414421
552 pages
Grasset (05/05/2004)
4/5   20 notes
Résumé :
La Chine à petite vapeur, c'est la Chine de 1986, celle de Deng Xiaoping, premier successeur de Mao, avec ses étudiants pétillants de Coca-Cola, ses chirurgiens experts en rafistolage, ses taxis amateurs de Beethoven et ses moines tibétains. Du désert de Gobi aux glaces de la frontière sibérienne, des côtes méditerranéennes au Tibet, Paul Theroux la sillonne en train. En wagon de nuit pour Pékin, en rapide pour Canton, en express pour Shanghaï, en omnibus pour Langx... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (5) Ajouter une critique
Paul THEROUX
La Chine à la petite vapeur.
Ed. Les Cahiers rouges de Grasset
550 pages

L'auteur américain, ce que son nom n'indique pas, Paul Theroux est un spécialiste ès voyages en train.
Il a déjà visité de cette façon l'Amérique du Sud, l'Inde, tout le bassin méditerranéen.
Il arrive à Pékin au printemps 1988.
Depuis son dernier séjour en Chine il y a 8 ans, il note tout de suite de nombreux changements. Des slogans de propagande à la gloire de Mao et de la Révolution culturelle ont été couverts par des panneaux de publicité commerciale vantant des Toyota et des montres.
Pékin, en pleine transformation, est devenue un gigantesque terrain de construction d' immeubles d'habitations, d' hôtels, de bureaux, de ponts, de tunnels.
Des écoles de langues et de tourisme ont été ouvertes.
Les gens, correctement habillés, portent des vêtements de couleur.

« ,,,au cours de l'hiver 1980, c'était un pays morne, exsangue, un océan de costumes bleus sans forme et de slogans sans queue ni tête imprimés sur des bannières rouges. Si vous suggériez : ces pauvres gens devraient porter autre chose que des pantoufles de feutre dans la neige et la glace, on vous rétorquait qu'ils avaient beaucoup de chance de ne plus marcher pieds nus. »

Les touristes viennent voir la Grande Muraille, la Cité interdite et le Palais d'été. Paul Theroux, lui, est venu pour voir l'envers du décor. Les voyages en train lui semblent en être un bon moyen : on rencontre plein de gens, on a le temps pour parler de tout, sans contraintes. Paul Théroux parle un peu le mandarin, les Chinois très souvent parlent un peu d'anglais, surtout les jeunes, qui aiment d'ailleurs se nommer à l'anglaise John ou Sam.

Le livre est ainsi en grande partie tissé de conversations et de rencontres. Son auteur a pris 40 trains, sillonnant la Chine d'un bout à l'autre pendant plus d'un an. Certains voyages de 36 heures de train, non chauffé en hiver, avec des toilettes rudimentaires, sans eau chaude, souvent sans eau du tout, même pas pour se préparer un thé, certainement pas pour se laver, et avec une nourriture à laquelle il consacre de nombreux et amers chapitres.

« ...l'état de délabrement du train fut qu'il n'y avait plus d'eau une heure après le départ.(...) Sans eau chaude, ce long voyage – trente heures – promettait d'être insupportable.(...) Il n'y avait rien à manger. (…) Les passagers s'étaient amassés dans le wagon-restaurant, mais on n'y servait rien. (…) La lumière était inexistante. »

C'est vrai que ça peut donner des cauchemars, d'ailleurs il ne s'en cache pas : la nuit il fait systématiquement des cauchemars terrifiants, qu'ils nous décrit avec force détails.

On dit de livres de voyage, qu'en les lisant, on apprend plus sur la personnalité de l'auteur que sur le pays qu'il décrit. Ceci est certainement vrai pour le livre de Paul Théroux.

Je compare avec « Les Chemins de poussière rouge » de Ma Jian, récemment lu et commenté. Ma Jian avait un énorme avantage : il était chez lui en Chine, et voyageant surtout à pied, il était partout aux premières loges. Pas de barrière de langue, pas de méfiance des gens devant un étranger, un Américain. Il voit la même crasse, la vermine, le manque de confort le plus rudimentaire. Mais en même temps, il montre que ce n'est pas cela qui compte en Chine, ce n'est pas cela qu'il faut voir et retenir, en fait, ce ne sont que des détails. L'important est ailleurs.

En 1985 le gouvernement a mis en place un programme de « Civilisation spirituelle » comportant deux volets : « Les Cinq propos » et « Les Quatre beautés ». Tous les dogmes lancés par les gouvernements chinois vont toujours par groupes. « Les Cinq propos » c'est la politesse, le comportement social, la moralité, l'attention aux rapports sociaux et l'attention à l'hygiène.
Cela sonne bien mieux comme programme d'action que l'ancien « A bas les Quatre Vieux » (brûler les églises et les monastères) ou les huit « Anti » révolutionnaires (brûler les livres, persécuter les intellectuels, ridiculiser les professeurs).

Monsieur Theroux a écrit un livre qui veut nous montrer la Chine. Mais il n'y arrive pas. Forcément, car cela n'est pas possible, quand pour décrire un pays, on s'appuie sur les conversations (sans bien maîtriser la langue) avec des gens rencontrés au fil des hasards dans des villes ou dans des trains.

Rien d'étonnant, que l'auteur, qui m'est d'ailleurs très sympathique, décrit dans son volume de 550 pages, avant tout ses souffrances et de très mauvaises conditions de voyage qu'il doit endurer.

« Les trains chinois peuvent être épouvantables. En douze mois de voyage – presque quarante trains – je n'en ai jamais vu un seul avec des toilettes qui ne soient pas repoussantes. Les haut-parleurs vous cassent les oreilles dix-huit heures par jour ... »

Il consacre beaucoup de place à des descriptions horrifiées des toilettes (dans les trains, dans des hôtels) et de la crasse omniprésente (les gens, la nourriture, les trains, les hôtels). Les gens sont déplaisants, ils sont sales, ils crachent partout (les descriptions explicites suivent).
Évidemment, on compatit, mais ….est-ce que cela vaut la peine d'y consacrer tant de place. On a tellement l'impression que ce voyage est pour lui une forme de torture (chinoise...), que l'on a envie de lui dire : »arrête, rentre chez toi, ce que tu écris ne vaut certainement pas tant de souffrances ».

On a pu s'attendre au moins à de belles descriptions des paysages vus par les fenêtres de trains, faute de mieux, pour équilibrer le texte. Mais elles sont quasiment absentes dans le livre.
En arrivant au Tibet, il constate : 

»Plus tard dans la journée, le paysage devint pierreux. Plus noir et rocailleux – mais toujours aussi désertique – et la symétrie des tortillons rocheux lui donnait l'apparence d'une immensité de crottes de chien .»
ou une autre description d'un paysage tibétain :
« C'est une vue plus qu'émouvante, c'est un pur enchantement : la lumière, l'air, l'espace, les plaines et les pics. »

En ce qui concerne la description des paysages, le Tibet mérite mieux.

La Chine ce n'est pas un pays. La Chine c'est un univers. Et l'on voit que cet univers le dépasse, et comme un pianiste débutant qui arrivera à jouer une sonatine mais ne saura pas interpréter une sonate, on comprend qu'il s'est attelé à une tâche bien au-dessus de ses moyens.


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Je me souviens quand j'ai lu ce livre. Assis dans mon fauteuil, dans les minutes qui suivaient, j'entendais les essieux du wagon : ta ga dac, ta ga dac,
les paysages défilaient par ma fenêtre, et j'entendais Paul Théroux discuter avec tous ces gens, de tous les milieux (sociaux) avec une aisance absolue.
Cet homme aime les Chinois, aime la Chine et aime les trains.
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"C'est l'un des paradoxes du chemin de fer : les passagers peuvent voir les habitants dans leur maison, alors que ces derniers ne voient jamais les voyageurs."

"Il est vrai que n'importe quel récit de voyage en dit plus sur son auteur que sur le pays qu'il décrit."

Jalouse je suis. Paul Theroux adore voyager en train, ses livres le prouvent, et cette fois le voici de retour en Chine, où il s'était rendu en 1980. Nous sommes en 1986, et en voyage avec un groupe franco-anglo-saxon, il part de Londres, rejoint Moscou, hop dans le Transsibérien, à travers Sibérie, Mongolie, puis arrivée en Chine, jusqu'à Pékin, où il quittera ses compagnons de voyage, heureux que son identité n'ait pas été dévoilée, car il veut garder l'anonymat.
"Avez-vous lu le livre de Paul Theroux, sur les voyages en train? demanda Bob.
Non. (Elle se tourna vers moi.) Et vous?
Écrasant mon nez contre la fenêtre, je dis:
-Regardez ces bouleaux!..."

"Les jours se suivent et se ressemblent sur le Transsibérien : c'est rassurant. En soi, le trajet n'a rien d'intéressant, ce qui explique pourquoi il est si plaisant d'être passager et si frustrant d'écrire sur le sujet. Il n'y a rien à raconter."

Paul Theroux comprend un peu le chinois, si j'ai bien suivi, il peut - et préfère- se débrouiller seul, mais hélas parfois on lui impose un accompagnateur; la Chine sort de la Révolution culturelle et les langues ne se délient pas totalement. Il saisit toutes les occasions d'engager conversation avec les gens, souvent en anglais, leur demandant leurs impressions sur ce qui a (aurait) changé en Chine. Il promène un regard fort intéressé, et va parcourir toute la Chine en express, rapide, omnibus, souffrant de la chaleur, du froid, gardant un ton assez distancié et ma foi souvent pince sans rire et souvent j'ai dû faire un effort pour me souvenir qu'il n'est pas anglais!

"-Le gouvernement a nié qu'il y ait des problèmes.
- Alors il doit y en avoir, dis-je. Ne croyez une chose en Chine que lorsqu'elle a été officiellement démentie."

Bien sûr trente ans et plus se sont écoulés, mais l'on sentait déjà à l'époque que la Chine pouvait se diriger vers ce chemin de capitalisme à la chinoise et d'économie non planifiée. de démocratie, heu non. La dernière et longue partie du voyage le conduit au Tibet, et l'on sent bien où le porte sa sympathie.

"La raison principale pour laquelle le Tibet reste si peu développé et si anti-chinois - et si totalement démodé et plaisant - c'est qu'il est l'une des seules merveilles de la Chine qui ne soit pas desservie par le chemin de fer. La chaîne du Kulun garantit que le train n'atteindra jamais Lhassa. C'est probablement mieux ainsi.Je croyais aimer les chemins de fer jusqu'au jour où j'ai vu Lhassa; j'ai alors réalisé que je préférais la nature vierge."

Hélas Monsieur Theroux, pourtant vous connaissez bien les Chinois, ce n'est pas une montagne qui va leur résister! Voir sur google ce qui existe maintenant (et les projets!)

http://www.tibetanreview.net/china-planning-more-railway-lines-in-tibet/
Mon avis sur cette lecture? Pas objectif puisque j'aime la Chine ET les voyages en train. Avec Paul Theroux je trouve cela parfait, je l'envie juste d'être allé dans vraiment tous les coins ou presque de cet immense pays, d'avoir rencontré plein de gens (dont les propos étaient souvent à décoder, mais lui sait le faire!), et cela pendant un bon paquet de mois.

"Pour rien au monde je n'aurais manqué ce voyage en train.
- C'est un train abominable , dit M. Fu. Il marche à la vapeur. Il traverse le désert et il est terriblement lent.
Musique divine à mes oreilles."

En plein hiver, dans le nord aux températures vraiment négatives, dans un hôtel pas chauffé.
"Il fait très froid ici, dis-je au gérant, M. Cong.
- Il va faire plus chaud.
- Quand?
- Dans trois ou quatre mois.
- je veux dire, dans l'hôtel, dis-je
- Oui, dans l'hôtel. Et dans tout Langxiang."

Lien : http://enlisantenvoyageant.b..
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Après avoir traversé la Chine à pied avec Ma Jian sur les chemins de poussière rouge, voici de quoi la parcourir de nouveau en train avec Paul Theroux et son roman : la Chine à petite vapeur.
Cet américain globe-trotter a livré de nombreux récits de ses voyages et son parcours en train dans la Chine de Deng Xiaoping (il y a près de vingt ans) est d'une belle écriture.
Le récit de ses rencontres pittoresques dans les gares, les wagons ou les villes est pimenté d'un humour très caustique et on ne s'y ennuie pas un instant.
Paul Theroux est parti de Londres pour gagner Pékin par le transmongolien : c'est donc tout naturellement ce livre qui nous aura accompagnés tout au long de notre voyage en Asie.
Theroux devra finir son voyage en voiture pour gagner Lhassa au Tibet (on est en 1986) et il aura ces mots prémonitoires alors que, vingt ans plus tard, la Chine vient tout juste d'inaugurer le train Qinghai-Tibet (le dernier tronçon Golmud-Lhassa vient d'ouvrir en juillet 2006), le train le plus haut du monde : Mais la raison principale pour laquelle le Tibet reste si peu développé et si anti-chinois - et si totalement démodé et plaisant - c'est qu'il est l'une des seules merveilles de la Chine qui ne soit pas desservie par le chemin de fer. La chaîne du Kunlun garantit que le train n'atteindra jamais Lhassa.
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Récit de voyage en Chine en 1984, intéressant géographiquement et historiquement. L'auteur parcourt en train ce pays immense et varié dans toutes les directions et y fait des rencontres qui l'aident à se forger une opinion.Seul avec ses accompagnateurs mandatés et souvent malades, l'auteur était d'ailleurs déjà venu dans ce pays alors fermé.
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Citations et extraits (5) Ajouter une citation
Il ne suffit pas aux chinois d'avoir levé l'interdiction de la publicité commerciale ; ils ne se contentent pas de coller des affiches ou de dresser des enseignes; ils préfèrent le contact direct - prendre le touriste par le bouton de sa veste, importuner le péquenot qui débarque de son lointain Gansu, hurler dans les porte-voix, agiter des drapeaux sous votre nez.
... Dans la plupart des autres pays , un bosquet, une prairie ou même un désert définit un paysage; si bien que vous associez immédiatement le pommier avec le Canada, le chêne avec l'Angleterre, le bouleau avec l'Union Soviétique et le désert et la jungle avec l'Afrique. Mais rien de tel ne nous vient à l'esprit en Chine, où la caractéristique la plus commune et la plus manifeste d'un site est un être humain - habituellement une foule d'êtres humains. Chaque fois que je comtemplais un paysage, il y avait un être humain qui me rendait mon regard.
... Les chinois, dans leur innocence, viennent regarder les étrangers comme on va au spectacle.
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Il est bien connu que les trains les plus délabrés vous emmènent dans des endroits magiques.
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Le yack est un bel animal à longue toison, qui ressemble à une vache se rendant à l'opéra.
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Un récit de voyageur en dit plus sur son auteur que sur le pays qu'il décrit.
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Un paysan doit rester longtemps sur une colline la bouche ouverte avant qu'un canard rôti y tombe.
Proverbe chinois.
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Video de Paul Theroux (2) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Paul Theroux
Au sommaire de la Critique cette semaine, deux séries :
"Les Shtisel : une famille à Jérusalem" créée et écrite par Ori Elon et Yehonatan Indursky, dont la saison 3 est récemment sortie et est disponible sur Netflix "The Mosquito Coast", développée par Neil Cross et Tom Bissell sur la base du livre du même nom de Paul Theroux, qui est visible depuis le 30 avril sur Apple TV .
Pour en parler aux côtés de Lucile Commeaux : Laurent Nunez, écrivain et éditeur, et Sarah Ilher Meyer, critique d'art et commissaire d'exposition.
Dans la catégorie : Géographie de la ChineVoir plus
>Géographie générale>Géographie de l' Asie>Géographie de la Chine (76)
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