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EAN : 9782915018479
296 pages
Quidam (26/08/2010)
4.33/5   3 notes
Résumé :
Dans la vitrine de cette boulangerie du Salzkammergut, tu te regardes et vois un petit homme abjecte et risible qui croit pouvoir déjouer le Reich et s'évertue à être tout sauf un combattant antifasciste. Ta brigade ? Deux hommes et une femme contre l'univers - barbelés, croix gammée, talons claqués - de millions de soldats, policiers, mouchards, SS. Trois contre une machine d'extermination colossale, et le camp de concentration de Mauthausen : mille fois mille enfe... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (3) Ajouter une critique
Deuxième tome de "l'Iliade" des Républicains espagnols. Raid fou et désespéré sur Mauthausen en 1944.

Publié en 2010, toujours chez le remarquable Quidam Editeur, le deuxième tome de la trilogie de l'inclassable David M. Thomas (gallois, ouvrier et militant, écrivant en français et vivant à Limoges) poursuit ce que l'éditeur appelle fort justement "l'Iliade des Républicains espagnols".

Toujours dans cet esprit si proche du "New Italian Epic" des Wu Ming, le petit groupe fraternel et internationaliste, échappé de justesse du piège d'Almeria, en Andalousie, à la fin du tome précédent, s'est réfugié dans l'Irlande neutre lors du second conflit mondial. Inactif car profondément dégoûté par la veulerie des "démocraties" face à Franco. Pourtant, lorsqu'ils apprennent que leur camarade italien, arbitrairement interné en France au début du conflit, est désormais captif et mort en sursis dans le camp de concentration autrichien de Mauthausen, ils concçoivent un plan, éblouissant d'audace et de risque assumé, pour aller le délivrer. Un raid fou, au coeur du Reich moribond mais encore pourvu de crocs acérés, en septembre 1944, servi par un sens du récit tout en multiples subjectivités et en voix dissonantes, et par une documentation effrayante dans son détail inexorable.

Dans une tonalité nettement différente de celle du premier tome, un magnifique récit et une construction littéraire subtile pour un "roman d'aventure" pas comme les autres. Et l'on y croisera à nouveau, avec bonheur, le personnage hors normes, échappé d'une farce russe, qu'est l'ex-consul britannique qui avait déjà sauvé la mise des protagonistes en 1937...

"Solena montre aux autres comment gonfler les vessies de porc que j'ai moi-même achetées chez le boucher Dlugacz de Dorset Street, mais à leurs yeux, je suis devenu invisible, parce que bien sûr que j'y arriverai, parce qu'il n'y a pas de quoi s'en faire, parce que c'est facile, enfin. Facile pour eux qui nagent bien. Je suis seul à savoir que ces eaux sont trop fortes pour moi, que je serai pris dans le courant, asphyxié, poussé vers le fond encore et encore, et je me débattrai, mais ce sera en vain, je paniquerai comme toujours, étouffé, et serai balayé comme un fétu de paille, les poumons plombés, inondés par un fleuve autrichien, noyé.
"Non, sérieux, je leur dis, je n'y arriverai pas. Vous avez vu ce courant ?"
Solena me passe une vessie gonflée que j'enfourne machinalement dans un sac à dos en attendant une réaction. Elle me tourne le dos, s'occupe d'une autre vessie, celle qui va se charger de Marco, qui nage quand même mieux que moi. Ils se disent que je vais surmonter ma peur, qu'on ne peut pas changer de plan maintenant pour une simple histoire de trouille. Non, j'emprunterai le pont, tout seul.
"J'emprunterai le pont."
"Tu ne peux pas emprunter le pont", dit Dartmann, comme à un enfant.
"Allez, ça ira, tu verras", dit Solena, lamentable devin.
"Je crois qu'il a vraiment peur, là", dit Marco.
"Je sais ce que tu ressens", me dit Eleuterio.
"Oui ?"
"Quand j'étais au bord de la carrière de Mauthausen, dit-il, à peine avais-je vu le fond que ça m'a fait comme un immense aimant. Et tu m'as attrapé. À mon tour maintenant." "
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Combattants républicains pendant la guerre d'Espagne, on retrouve ici les protagonistes d' «Un plat de sang andalou», réfugiés à Dublin. En cette année 1944, Ieuan, le gallois polyglotte, sa femme Solena, la belle espagnole, et Dartmann, l'ancien pilote déserteur de la Luftwaffe sont désoeuvrés, malheureux de ne pas être engagés dans la lutte contre l'Allemagne nazie, même si c'est leur choix, guidé par l'inaction des démocraties européennes pendant la guerre d'Espagne.

Macphillemy, qui leur permit de fuir l'Espagne grâce à un bateau dérobé aux Anglais, est maintenant devenu délégué irlandais à la Croix Rouge. Il leur apprend qu'il a vu Marco, l'italien qui combattait avec eux face aux troupes franquistes, dans l'enfer du camp de Mauthausen. le roman s'ouvre de fait sur les mots de Marco, déporté, en une forme d'hommage à Primo Levi.

«Aux grands maux, les grands remèdes.» Ne rien faire n'est plus une option. Ils conçoivent donc un plan fou pour libérer Marco.

Cette suite d'«Un plat de sang andalou», avec une narration extrêmement différente, nécessite néanmoins la lecture préalable du premier roman (ce qui est honnêtement, plus une joie qu'un problème), pour connaître l'épaisseur et le passé espagnol des personnages du groupe. David M. Thomas réussit à unir ici la rigueur historique des Wu-Ming, des personnages magnifiques portés par des valeurs d'engagement, d'amitié, et d'entraide qui rappellent ceux de Fréderic Fajardie, et un style et un sens du dialogue vivants, virevoltants, portés par la culture internationale de l'auteur.

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Dartmann l'allemand, Solena l'espagnole et Ieuan l'irlandais, tous trois rescapés des brigades internationales espagnoles, apprennent que le 4ème de la bande, Marco, l'italien, lui aussi ancien combattant contre le franquisme, a été interné au camp de concentration de Mauthausen. Ils décident d'aller le chercher et de le ramener. C'est une aventure impossible, et elle parait pourtant vraie grâce à la narration précise et directe de david Thomas, nourrie de beaucoup de dialogues et de violence sans fard. le récit est haletant, passionnant, mais parfois les descriptions interviennent pour nous rappeler qu'au-delà de l'intrigue, il s'agit bien de combattre l'idéologie nazie.
A lire.
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Citations et extraits (1) Ajouter une citation
"Depuis l’âge de seize ans, Solena, je me bats contre le nazisme. J’ai quarante-deux ans, et je suis internationaliste, mais ça ne veut pas dire que je n’aime pas mon pays. Tout ca pour découvrir maintenant qu’il est devenu synonyme du nadir absolu de l’humanité, un pays et un peuple à tout jamais maudits. On dira dorénavant qu’aucun Allemand ne naît innocent. Le Mal qu’on voit ici est inexpiable. L’Allemagne sera à tout jamais la patrie de Cain, tu te rends compte ? C’est inexpiable."
"Pour tout te dire Dartmann, répond Solena, non, je ne me rends pas compte. Je ne suis pas allemande. Mais là tu pleures, Dartmann, et c’est la terre entière qui pleure avec toi, et pour ma part, je raconterai jusqu'à mon dernier souffle les Allemands qui sont venus en Espagne, qui ont laissé leur peau à la Casa de Campo, sur tous les champs de bataille espagnols. Je dirai à qui voudra m’écouter que j’ai eu la chance de rencontrer un Allemand droit et juste et noble, qui était venu dans mon pays pour nous aider, qu’il y en avait des milliers comme lui en Espagne. Ce n’est pas tous les Allemands qui porteront la marque de Caïn. Voilà. C’est tout ce que j’ai à dire."
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Video de David M. Thomas (1) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de David M. Thomas
Gallois né en Angleterre le 5 octobre1959, David M. Thomas est fils d'ouvrier. Il a été partie prenante de la grande grève des mineurs britanniques dans les années 80. Historien romancier, Il écrit en français et vit à Limoges.
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