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EAN : 9782848051581
779 pages
Sabine Wespieser (09/01/2014)
4.03/5   102 notes
Résumé :
Derrière les barreaux de sa prison, Thanh contemple les derniers lambeaux de brume sur la paroi rocheuse qui lui tient désormais lieu d’horizon. Il a été condamné aux travaux forcés.
Parce que ce jeune homme sans histoire, excellent élève et fils modèle, a découvert très tôt son homosexualité et qu’il lui a paru insurmontable de l’avouer à ses parents, son destin a basculé. Comment il est tombé sous la coupe d’un mauvais garçon avec qui il a fui sa ville nata... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (32) Voir plus Ajouter une critique
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L'écrivaine vietnamienne Duong Thu Huong part d'un drame familial, la fugue définitive de son neveu et fait appel à l'écriture pour essayer de le comprendre. “Les collines d'eucalyptus” est ce qu'elle appelle “une hypothèse” pour expliquer la fuite d'un jeune homme, sans se retourner. Elle fera d'ailleurs d'autres hypothèses, dans d'autres livres.

Than est un jeune vietnamien, fils unique et plutôt aisé, qui grandit dans une province vietnamienne des années soixante-dix. Seulement voilà, Than est homosexuel et cette révélation le poussera à sortir de lui-même et trouver des ressources profondes, sans doute dans son éducation, pour faire face à l'imprévu et le tragique. Dans sa description des sentiments d'un jeune homme qui aime les garçons, l'écrivaine surprend par l'acuité de ses réflexions, la précision et la profondeur des émotions qu'elle retranscrit, démontrant une empathie et une connaissance rare pour qui ne peut que se mettre “à la place de”.

Roman d'apprentissage, éclosion d'un désir inconnu et réprouvé, les aventures de Than sont ponctuées de passages en italiques, réflexions intérieures et salutaires du personnage principal qui comme chacun de nous, se regarde vivre, à coté de sa vie.

L'intrigue principale est étirée par le truchement de nombre d'intrigues subalternes, notamment les souvenirs de tel ou tel personnage secondaire, toutes sortes d'histoires dans l'histoire qui ajoutent au panorama des émotions et des paysages que nous traversons tout au long de ce roman. Tous ces passages ne se valent pas et parfois ils peuvent donner le sentiment de couper un peu la narration en plein souffle, notamment l'alternance entre l'aventure passée et la situation présente du personnage principal qui n'est pas ce que je préfère dans le livre bien que la violence du système répressif soit utilement mise à nue.
D'autant que comme nombre d'écrivains du XXe siècle, Duong The Huong a elle aussi connu la prison, pour avoir dénoncé les forces politiques en place et vit désormais en Exil en France.

Un livre intéressant pour la belle cause qu'il embrasse et l'audacieux sujet qu'il se propose de mettre en lumière, l'homosexualité comme porte d'entrée non pas seulement d'une critique de la répression politique, mais aussi pour partir à la découverte du Vietnam littéraire.

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En entamant Les Collines d'Eucalyptus, je m'attendais à m'immerger longuement (près de 900 pages quand même) dans des eaux de raffinement, parfumées aux essences naturelles, dans le bruissement de milliers de branches ondulant sous une douce brise. le titre était tentant, ma curiosité vive puisque je faisais mes premiers pas dans la littérature vietnamienne.

Voilà que je me retrouve en prison, dans un univers forcément confiné, dans les hurlements des gardes, les murs en béton et les odeurs nauséabondes. Bon, ben tant pis, je vais regarder par la fenêtre, la nature doit être fort belle sur ces hauteurs. Nouvelle désillusion, un petit carré de lumière à 30 cm du sol ne montre que du rocher bien gris, bien rugueux, prolongement en miroir de la paroi intérieure.

Au secours ! Où sont les vertes collines du titre ? Qui est ce Thanh, prisonnier chétif, qui purge une peine de vingt-cinq ans dans cet enfer de violence et de famine ? Qui est cette Lan que l'on fusille à quelques mètres de sa cellule ?

C'est ainsi que peu à peu l'histoire va se dérouler. Thanh est le fils unique de parents professeurs, aimé et choyé dans un milieu privilégié. Adolescent, il ressent des pulsions homosexuelles et une première tentative le marque cruellement. Apprentissage des différences, des codes sociétaux, des commérages de village, des traditions ancestrales immuables.

Thanh pratique la vie. Il se lie avec Phu Vuong, fils de l'ogre-poète du village, enfant maltraité devenu ado manipulateur, oisif et intéressé. Ne voulant pas soumettre ses parents à l'opprobre public à la découverte de ses penchants, Thanh choisit de fuir à Dalat, au Vietnam du Sud, avec son jeune amant. Il se débrouille pour trouver de petits boulots tandis que Phu Vuong, désoeuvré et paresseux, devient de plus en plus odieux. Séparation, nouvelle rencontre, nouveau boulot, tissage de relations sociales. Insouciance et émerveillement ont définitivement quitté la place.

Thanh reverra Phu Vuong à Saïgon, le tuera et se retrouvera au bagne.

Duong Thu Huong est revenue du communisme dont elle a vécu les dérives. Exilée en France, ses livres sont interdits au Vietnam. Elle fait particulièrement bien ressortir les tentacules des strates communistes à travers la hiérarchie des gardiens de prison.

Elle peint un portrait de son pays, fin des années 80, avec finesse et, apparemment, sans concession. le long vagabondage de son héros jusqu'à Saïgon lui donne l'occasion de digresser sur les facettes psychologiques de ses personnages, ce qui enlève parfois un intérêt pour l'histoire.

Néanmoins, les sensations, les bruits, les odeurs sont aussi présents que la solitude, l'acceptation et la rédemption.

Première lecture intéressante qui traduit parfaitement les impasses d'un peuple de tradition, brimé, envahi, meurtri par une très longue guerre et qui cherche néanmoins à s'ouvrir sur l'Occident.

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Les Collines d'Eucalyptus peut également faire office de couteau suisse.
Outre le plaisir procuré à sa lecture, il permet également de se muscler rapidement les avant-bras.
Pavé de près de 900 pages qu'on attaque fébrilement, il se révèle finalement d'un abord ultra plaisant, mixant les émotions au gré des nombreux chapitres évoquant la vie tumultueuse de notre jeune héros, Thanh, bien loin d'être un long Mékong tranquille.

Certaines trajectoires sont gravées dans le marbre dès la naissance.
Gamin issu des classes bourgeoises et affichant de réelles prédispositions pour les études, ce petit canaillou n'aura pourtant de cesse de se torturer les méninges quant à la tournure des évènements futurs qu'il pressent funeste.
Confronté très rapidement à son homosexualité, il prendra rapidement le taureau par les cornes en optant...pour la fuite plutôt que le déshonneur familial.
Alors totalement sous la coupe de son compagnon manipulateur, Thanh entrevoit lucidement la solitude et la tristesse journalière dont il va devoir rapidement se draper, loin de ses proches et de sa terre natale.

C'est long mais c'est beau.
Duong Thu Huong, écrivain au souffle puissant et épique non dénué d'une certaine poésie, relate ici la destinée d'un homme qui se sera construit à la force des poignets, n'y voyez aucune malice, faisant fi des terribles aléas rencontrés au gré de ses nombreuses pérégrinations et traçant son sillon, peut-être pas le plus droit qui soit, mais suffisamment profond pour pouvoir y semer les quelques graines d'espoir nécessaires à sa survie.
Raillé, maltraité, répudié, ce jeune homosexuel aura su trouver une force vitale, impérieuse, le poussant toujours un peu plus à s'affirmer et s'accepter en ce Vietnam pétri de préjugés et souvent prompt à condamner la différence.

C'est parfois long, certes, mais jamais barbant.
Duong Thu Huong manie la plume avec une grâce et une précision digne des plus illustres calligraphes qui officièrent sous la dynastie des Jin orientaux. Ce qui ne nous rajeunit pas.
Intelligence du propos, style flamboyant, profonde humanité, autant de facettes que le lecteur se fera un plaisir de découvrir en soupesant ce diamant brut d'un fort beau gabarit, ma foi, et qui suscite au final moult émotions diverses exceptée celle d'avoir enfiler des perles.

Alors, t'as ton Thanh ?
Si non, dépêche-toi vite de le commander, la rentrée approche...

4,356/5
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Je pensais que c'était mon premier livre vietnamien, en fait grâce aux stats et à la carte des lectures, j'ai pu voir que c'était le second. Autant le premier m'avait moyennement plu, autant j'ai aimé celui-ci, qui mêle douceur et horreur, quiétude et malheur, qui sait aussi bien nous décrire la nature que nous raconter les hommes, qui nous emmène d'une enfance choyée à un bagne aux conditions de vie épouvantables.

On fait la connaissance de Thanh alors qu'il fixe ce qu'il aimerait n'être qu'un théâtre magnifique, cette nature que l'autrice nous conte si bien, mais qui est d'abord la vue qu'il a de la petite fenêtre du bloc des forçats, au bagne. Il est condamné à 25 ans, 25 ans qui vont être longs, étant donné les conditions inhumaines de cette captivité.

Pourquoi est-il enfermé ? On le découvrira peu à peu à travers le récit de sa vie, qui va venir s'intercaler dans les épisodes se passant au bagne. La plupart des récits mettent en scène Thanh, d'autres des personnages qu'il a rencontrés dans sa vie, ou au bagne. Cet aspect non linéaire m'a un peu freinée au départ, surtout cet épisode sur une condamnée à mort, qui retardait d'autant la découverte de la suite de la vie de Thanh, après le récit de son enfance, une enfance heureuse, protégée, dans un foyer aimant et plutôt aisé, qui ne laissait rien prévoir des malheurs qui allaient s'abattre sur lui :
« Une catastrophe secrète, muette, réservée à lui seul. Pour la première fois de sa vie, il découvrit la vérité sur lui-même. Sans doute était-elle déjà là, enfouie comme un minerai sous la montagne, comme un cadavre dans la terre profonde, attendant le moment de se révéler au jour. La fatalité avait sonné son heure. »

Je ne vous en dirai pas plus sur ce qui va arriver à cet adolescent, vous laissant le découvrir vous-même, ayant apprécié de ne pas en connaitre grand-chose avant de me plonger dans ce pavé. Sachez que son cheminement, ses états d'âme, ses sentiments sont décrits avec beaucoup de finesse. Pour mieux nous aider à le comprendre, l'autrice utilise des passages en italique, qui sont les réflexions de Thanh sur lui-même, sa vie, ceux qui l'entourent. Ce procédé ne devient jamais envahissant, mais permet de se glisser dans l'intimité de ce garçon.

Au travers des aventures de Thanh, l'autrice nous fait découvrir le Vietnam communiste avec toutes les absurdités de ce régime, la corruption, les passe-droits, la disparition de toute culture différente, la rareté des livres non approuvés par le régime.

Elle est aussi une merveilleuse conteuse, une écriture qui nous relate aussi bien les moments heureux que ceux tragiques, qui mêle harmonieusement la description de la nature toujours présente aux tribulations des personnages. Elle fait vivre dans ce livre tout un pays, paysages, odeurs, traditions et malheureusement pour ce pays, le communisme.

Il est à noter que l'autrice a elle-même subi les foudres du régime communiste et s'est exilée en France.
Ce roman est inspiré de sa propre histoire. Un de ses neveux a disparu sans laisser de traces. Elle imagine ici ce qu'aurait pu être les raisons de cette disparition.
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Le roman Les collines d'eucalyptus s'ouvre sur Tranh, chétif, qui regarde à travers les barreaux de sa prison au Vietnam. Les pages qui suivent donnent un aperçu des dures (et parfois inhumaines) conditions dans lesquelles se trouvent les prisonniers. Puis, on a droit à l'histoire de quelques uns d'entre eux, à ce qui les a menés dans ce trou à rats. Sur le coup, c'était un peu déstabilisant, j'avais l'impression que ça allait dans tous les sens. Puis, après une centaine de pages, peut-être un peu plus, la narration revient – enfin! – sur Tranh et elle reste concentrée sur lui jusqu'à la fin. Ce type qui semble si poli, si sage, qu'on se demande bien comment il a pu se retrouver en prison. C'est alors que commence réellement l'histoire. Sa jeunesse puis l'adolescence, où il découvre les émois de son homosexualité, dans un Vietnam de l'époque où les écarts à la norme, les «déviances» ne sont pas tolérées. Ces moments comptent parmi mes préférés. Bref, une belle histoire d'amour se dessine entre le jeune homme et Phu Vuong, le fils du poète-itinérant, un amour intense et destructeur qui le conduit vers sa perte.

Les collines d'eucalyptus est un roman agréable à lire, quoique un peu long. Il eut certes gagné à être raccourci, ne serait-ce que les parties concernant les autres prisonniers, même si elles étaient intéressantes. (Peut-être qu'elles auraient pu constituer un recueil de nouvelles?). D'autres parties auraient pu être abrégée, aller à l'essentiel, je pense à l'épisode de Dalat, à l'histoire de Tïen Lai, etc. Pour tout le reste, je suis preneur. Toutefois, ces parties, elles permettent au lecteur de voir différents portraits, de se faire une tête plutôt juste du Vietnam communiste des années 1980. Un Vietnam à mi-chemin entre traditions et travail, tristesse et espoir, résignation et résilience. Bref, un joli roman. À la fin se trouve l'épilogue, dans lequel l'auteure Thu Huong Duong explique que ce roman est une tentative d'expliquer la disparition de son neveu. Il me semble que, avoir su cette information dès le début, cela aurait eu un impact sur ma lecture. Dans tous les cas, je l'aurais entrepris différemment.
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Citations et extraits (45) Voir plus Ajouter une citation
L’admiration est rare et ne s’exprime pas ouvertement. En revanche, le mépris et la haine s’affichent et servent même de caution pour prouver que l’on est « normal », que l’on est « légitime », qu’on est du côté de la majorité, car la majorité, c’est la force.
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Le bouddhisme prône l'égalité absolue entre tous les êtres vivants : "Tous les sangs sont rouges et toutes les larmes sont salées." Personne n'a le droit de frapper ni d'humilier autrui.
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L’auberge était surprenante, située dans une rue dont chaque maison avait sa propre physionomie. Il n’y en avait pas deux semblables, pour l’aspect comme pour le matériau. C’est seulement pendant la nuit qu’elles devenaient pareilles, dans l’ombre noire et opaque. L’espace immense se transformait alors en un océan sombre et on aurait dit que la vie ne se concentrait plus que dans les lueurs des lampions qui se balançaient comme autant d’yeux rouges.
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S'ils pouvaient ensuite y faire carrière, leurs vies de transformeraient comme par un coup de baguette magique. Dans tous les pays pauvres ou riches, la route de la capitale reste toujours la plus magnifiquement éclairée.
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Élancé, avec sa ramure souple et nervurée, l'eucalyptus attend avec exultation la brise pour entamer la danse. Ses frondaisons entonnent alors un chant sophistiqué, un chant à part dans le concert des arbres.
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Videos de Duong Thu Huong (7) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Duong Thu Huong
Duong Thu Huong, Les collines d'eucalyptus .Lorsque Duong Thu Huong, romancière vietnamienne, parle de son livre Les collines d'eucalyptus ( éditions Sabine Wespieser) et du destin d'un adolescent fugueur, c'est tout le Viet nam qu'elle évoque. Et l'ancienne combattante anti-colonialiste, aujourd'hui dissidente et exilée, ne mâche pas ses mots. Entretien Dominique Conil, video de Nicolas Serve.
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