La grande aventure du journal Tintin

Dans une vieille véranda à l'odeur toute particulière, sous ses tôles translucides jaunies par le temps, à côté d'un vieux fauteuil en rotin, était posée une malle en bois cerclée de ferrures.
Elle débordait de vieux numéros du journal de Tintin, de Pilote et de l'Intrépide-Hurrah.
Un peu plus loin, dans une salle à manger très sombre où personne n'avait plus mangé depuis longtemps, une vénérable pendule rythmait le temps.
Quelques vieux pistolets d'abordage accrochés au mur, une vieille maquette sous globe, un vieux poste de radio qui avait autrefois crachotté les chroniques de Geneviève Tabouis et de Frédéric Pottecher, tout rappelait, ici et là, la valeur du temps.
A l'étage, sur une planche fixée en haut des murs, une alignée de vieux livres semble parcourir toutes les chambres.
De loin en loin, y revenaient les aventures de Brigitte.
De la vieille cave sans véritable lumière, dont les enfants avaient un peu peur de soulever la trappe, au grenier où tous les fantômes de la famille avaient déposé un mystérieux bric à brac caché sous d'interminables draps blancs, du haut en bas de cette vieille maison, tout le bois craquait d'avoir trop vécu.
Et l'été, venant d'on ne sait où, réapparaissant saison après saison, une petite tortue traversait flegmatiquement la maison d'un jardin à l'autre ...
Cet album est comme une vieille malle à trésor, celle de la maison des vacances de mon enfance, celle de mes souvenirs, de mon imagination ou de la votre.
De 7 à 77 ans, ces 7 à 777 pages célèbrent un anniversaire.
Je ne suis pas forcément un admirateur forcené d'Hergé, d'Anquetil ou de Goscinny, depuis toujours je leur ai préféré Greg, Godard, Poulidor, Berck et Mitteï, Aidans, Liliane et Fred Funcken.
Mais à tous, la bande-dessinée doit tant.
Car si aujourd'hui de nouveaux auteurs peuvent y donner la pleine mesure de leur imagination et de leur talent, n'est-ce pas parce qu'ils peuvent poser leur palette sur la table à dessins de leurs anciens ?
Le festival d'Angoulême ne serait pas vraiment lui-même sans Alfred le pingouin !
Et se retourner parfois pour voir dans le passé ce qui y a été réussi n'a jamais empêché de voir loin vers l'avenir.
L'album est splendide.
Il craque de toutes les coutures de ses 777 pages d'aventures de Strapontin, de Tounga, de Flamme d'Argent, de Rataplan, de Ric Hochet, de Martin Milan, d'Olivier Rameau ...
Bref !
Ils sont venus, Ils sont tous là ... les héros qui ont fait le journal de Tintin !
Il ne me manque plus maintenant que de retrouver la vieille malle cerclée de fer ...

Petit, je suis passé de Vaillant/Pif/Pif gadget, à Tintin auquel j'étais abonné.

Autant dire, que le journal Tintin m'a accompagné et que la nostalgie a joué un grand rôle dans l'achat de ce pavé de 777 pages (le journal des 7 à 77 ans...astuce !).
Il est, compte tenu de son poids (3,5 kg), assez malaisé à lire, mais on a rien sans rien.

Il s'agit d'une espèce de compilation d'histoires complètes ou pas, parues dans le journal Tintin depuis son origine, jusqu'à la fin des années 80.
C'est une suite de rétrospectives de 2 années à chaque fois, entre : 1946 et 1988. Comme le précise l'éditeur, c'est un best-of du magazine, mais aussi d'histoires parues dans les numéros spéciaux "Super Tintin" et "Tintin sélection". Soyons clairs, personne n'apprendra rien et il s'agit davantage d'un objet promotionnel (il a fallu passer sous les fourches caudines de Nick Rodwell et quand on se souvient que le journal Tintin est mort quand la Fondation Hergé a interdit au Lombard d'éditer un journal avec ce nom...), que d'une anthologie avec inédits, qu'on aurait pu aussi espérer.

La qualité est très variable. Comme par exemple, les premières pages du " Secret de l'Espadon" (1947), "Alix l'Intrépide" (1948), "Lieutenant Burton" (1967) ou "Le Capitan" (1969).
Elle est sans doute conforme à la qualité d'origine. Était-il possible de faire mieux ? le choix d'un (beau) papier glacé était il le plus pertinent ? Je laisse ces questions aux spécialistes.

On a quand même malgré tout, pour un prix qui n'est pas très élevé compte tenu du volume, une gigantesque madeleine de Proust et c'est avec un plaisir toujours aussi fort que j'ai retrouvé "mes" Chick Bill", "Ric Hochet", "Bernard Prince", "Luc Orient", Bruno Brazil", "Jugurtha", Buddy Longway", "Chlorophylle" ou "Olivier Rameau". On peut quand même se demander pourquoi des passages aussi importants que celui de l'immense Will Eisner et son Spirit, ou encore l'"Angel Face" de la série Blueberry ne sont pas repris dans cette compilation.

Seule véritable réserve, le choix d'avoir retenu un peu trop souvent, en regard des planches d'origine, les planches revisitées en 1981 dans le journal, par d'autres dessinateurs.
Par exemple "Le secret de l'Espadon" (1947) revisité par Dany, "Corentin Feldoe" (1947) par Turk, "Hassan & Kaddour" (1948) par Godard, "Bob et Bobette" (1948), par Franz, "Monsieur Lambique (1949), par Ferry, "Alix l'intrépide par Dupa, "La Grande menace" (1953), par Ernst...

Sinon, c'est un régal, à déguster à petites doses.

Un pavé de 777 pages pour fêter l'anniversaire du journal des jeunes de 7 à 77 ans, il fallait oser le faire, mais c'est surtout un beau coup commercial ! Mais je ne boude pas mon plaisir car la présentation est de qualité.
J'ai suivi avec plaisir cette grande aventure, en retrouvant l'émotion de mon enfance et assistant à la "naissance" de plusieurs héros de BD, comme Taka Takata et son sens de l'absurde japonais ou Clifton et son flegme. Certains de ces héros sont un peu devenus des "amis".
Mais j'ai aussi retrouvé peu à peu dans cette lecture ce qui m'avait fait arrêter la lecture de "Tintin", des BD d'un nouveau style qui ne me plaisaient pas beaucoup.
Un petit regret pour terminer : j'aurais bien aimé retrouver un extrait de "Jugurtha" aux alentours des années 1970...

ANTHOLOGIE D'ANTHOLOGIE (LE JEUDI OU LES DIMANCHES DE LA VIE)...

Le jeudi, jour béni....Jour de repos, d'illustré et de l'émission pour les gamins où mes potes montaient pour goûter et regarder la télé......Toute la naïveté de l'enfance heureuse, turbulente et joueuse....celle des cours d'écoles de mi-mai à fin juin où ça sentait l'écurie, la remise des prix et les grasses matinées...Tout ça en une journée de rêve...L'illustré c'était Tintin de 1959 à 1964...Un moment de bonheur pur sucre où les aventures succédaient à l'histoire complète...On retrouve cela aujourd'hui et surtout une palanquée de scénaristes/dessinateurs francophones hors normes...Le plaisir est dans la lecture de ce pavé étonnant de fraîcheur, pétant de couleurs et inventif à l'extrême....

Magnifique pour les tintinophiles et on apprend encore des secrets bien gardés par Herge... Les couvertures sont splendides, je me suis régale, même si j'étais plus albums que le quotidien tintin