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EAN : 9782851979001
99 pages
L'Herne (25/05/2009)
3.5/5   12 notes
Résumé :
... la crainte du désordre et l'amour du bien-être [portent] insensiblement les peuples démocratiques à augmenter les attributions du gouvernement central, seul pouvoir qui leur paraisse de lui-même assez fort, assez intelligent, assez stable pour les protéger contre l'anarchie.

J'ai à peine besoin d'ajouter que toutes les circonstances particulières qui tendent à rendre l'état d'une société démocratique troublé et précaire augmentent cet instinct gén... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (2) Ajouter une critique
Ce petit ouvrage est en réalité un tronçon, la quatrième partie pour être précise, du chef-d'oeuvre d'Alexis de Tocqueville, de la Démocratie En Amérique.
Le titre original de cette partie est " de l'influence qu'exercent les idées et les sentiments démocratiques sur la société politique " mais que l'éditeur a modifié pour être un peu plus accrocheur sous la version " le despotisme démocratique ".
On peut considérer que cette modification n'est pas fondamentalement scandaleuse car elle reprend bien l'esprit général de cette partie.
Quand est-il ? D'abord, il n'est certainement pas inutile de resituer Alexis de Tocqueville d'un point de vue historique. Né en 1805, ses parents ont connu le tournant de la Révolution Française et lui assiste, sur les ruines de l'empire napoléonien à l'édification d'un mode nouveau de gouvernance.
Il s'est rendu en mission aux États-Unis, jeune nation démocratique d'une vingtaine d'États à l'époque, localisée dans l'est de l'Amérique du Nord.
Pour la première et certainement la seule fois dans l'histoire mondiale, un observateur et un théoricien comme il l'était a eu l'occasion d'utiliser conjointement les deux seules méthodes d'investigation scientifiques possibles et que je résume comme tel : l'expérience et la méthode comparative.
La France est le lieu de l'expérience (avant la révolution vs. après) et les États-Unis permettent d'établir une comparaison entre une démocratie avérée et les nombreuses monarchies en voie de démocratisation que comptaient l'Europe en ce temps-là.
Ce qui m'apparaît vraiment très intéressant aujourd'hui dans l'analyse de Tocqueville, ce n'est pas tant ces observations, ses déductions et ses prévisions justes concernant la démocratie, mais surtout sa connaissance profonde du type social disparu de nos jours qu'était la société aristocratique de l'Ancien Régime.
On nous a toujours présenté la démocratie, en temps démocratiques, comme le meilleur système qui soit, tout comme on nous aurait probablement présenté le système aristocratique, en temps d'aristocratie, comme le plus abouti et désirable de tous.
La connaissance et l'expérience des deux systèmes permet à l'auteur d'avoir un certain recul et de bien mesurer les avantages, les vices et les dérives possibles pour chacun des deux systèmes.
Selon lui, le système démocratique renforce l'égalité entre les différents citoyens mais rogne les libertés individuelles, et réciproquement bien sûr.
Ceci concourant, toujours selon lui et en système démocratique, à un nivellement moyen de faible qualité et à une hégémonie de l'État qui s'immisce jusque dans les plus intimes décisions et faits de la vie quotidienne de l'individu, l'infantilisant, en quelque sorte.
N'ayant plus de référant concret et humain à qui s'adresser en cas de problème (en système aristocratique, l'homme du peuple s'adressait au noble et le noble aux gens du peuple dont il avait la responsabilité), le citoyen se tourne alors vers deux pouvoirs hypertrophiés en systèmes démocratiques, à savoir les tribunaux et la presse.
Je ne vais pas passer en revue tous les éléments si bien et intelligemment développés par Alexis de Tocqueville mais je me cantonnerai à dire que ce petit ouvrage remet beaucoup de dépôts en suspension, il agite bien le crâne et nous fait nous replonger et repenser à des choses qu'on croyait naturelles et qui ne le sont peut-être pas tant que cela.
Un essai social, politique et historique de très grande qualité que je ne saurais que trop vous conseiller tellement il joue un rôle de ferments actif dans les chairs un peu molles et apathiques de nos cerveaux endormis.
En outre, ce n'est bien évidemment que mon avis, celui d'une citoyenne abominablement égale au flot de ses concitoyens et pas libre pour deux sous d'avoir une idée neuve, c'est-à-dire, pas grand-chose.
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Un ensemble d'observations et d'analyses de la société américaine et de son système politique constituant le dernier chapitre de«De la démocratie en Amérique», paru en 1840.

Mettant à jour les ressorts de la jeune démocratie, l'originalité de la démarche consiste à y repérer moins la naissance d'un nouveau monde que l'avenir des sociétés démocratiques, y compris celles de l'Europe.
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Citations et extraits (24) Voir plus Ajouter une citation
Je pense donc que l’espèce d’oppression, dont les peuples démocratiques sont me­na­cés ne ressemblera à rien de ce qui l’a précédée dans le monde. [...] Je cherche en vain moi-même une expression qui reproduise exactement l’idée que je m’en forme et la renferme ; les anciens mots de despotisme et de tyrannie ne conviennent point. La chose est nou­velle, il faut donc tâcher de la définir, puisque je ne peux la nommer.
Je veux imaginer sous quels traits nouveaux le despotisme pourrait se produire dans le monde : je vois une foule innombrable d’hommes semblables et égaux qui tournent sans repos sur eux-mêmes pour se procurer de petits et vulgaires plaisirs, dont ils emplissent leur âme. Chacun d’eux, retiré à l’écart, est comme étranger à la destinée de tous les autres : ses enfants et ses amis particuliers forment pour lui toute l’espèce humaine ; quant au demeurant de ses concitoyens, il est à côté d’eux, mais il ne les voit pas ; il les touche et ne les sent point ; il n’existe qu’en lui-même et pour lui seul, et, s’il lui reste encore une famille, on peut dire du moins qu’il n’a plus de patrie.
Au-dessus de ceux-là s’élève un pouvoir immense et tutélaire, qui se charge seul d’assurer leur jouissance et de veiller sur leur sort. il est absolu, détaillé, régulier, pré­voyant et doux. Il ressemblerait à la puissance paternelle si, comme elle, il avait pour objet de préparer les hommes à l’âge viril ; mais il ne cherche, au contraire, qu’à les fixer irrévocablement dans l’enfance ; il aime que les citoyens se réjouissent, pourvu qu’ils ne songent qu’à se réjouir. Il travaille volontiers à leur bonheur ; mais il veut en être l’unique agent et le seul arbitre ; il pourvoit à leur sécurité, prévoit et assure leurs besoins, facilite leurs plaisirs, conduit leurs principales affaires, dirige leur industrie, règle leurs successions, divise leurs héritages, que ne peut-il leur ôter entièrement le trouble de penser et la peine de vivre ?
C’est ainsi que tous les jours il rend moins utile et plus rare l’emploi du libre arbitre ; qu’il renferme l’action de la volonté dans un plus petit espace, et dérobe peu à peu à chaque citoyen jusqu’à l’usage de lui-même. L’égalité a préparé les hommes à tou­tes ces choses : elle les a disposés à les souffrir et souvent même à les regarder comme un bienfait.
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D’un côté, les plus fermes dynasties sont ébranlées ou détruites ; de toutes parts les peuples échappent violemment à l’empire de leurs lois ; ils détruisent ou limitent l’autorité de leurs seigneurs ou de leurs princes ; toutes les nations qui ne sont point en révolution paraissent du moins inquiètes et frémissantes ; un même esprit de révolte les anime. Et, de l’autre, dans ce même temps d’anarchie et chez ces mêmes peuples si indociles, le pouvoir social accroît sans cesse ses prérogatives ; il devient plus centra­lisé, plus entreprenant, plus absolu, plus étendu. Les citoyens tombent à chaque instant sous le contrôle de l’administration publique ; ils sont entraînés insensiblement, et comme à leur insu, à lui sacrifier tous les jours quelques nouvelles parties de leur indépendance individuelle, et ces mêmes hommes qui de temps à autre renversent un trône et foulent aux pieds des rois, se plient de plus en plus, sans résistance, aux moindres volontés d’un commis. [...]
Mais, quand on vient enfin à considérer de plus près l’état du monde, on voit que ces deux révolutions sont intimement liées l’une à l’autre, qu’elles partent de la même source, et qu’après avoir eu un cours divers, elles conduisent enfin les hommes au même lieu. [...]
Il faut bien prendre garde de confondre le fait même de l’égalité avec la révolution qui achève de l’introduire dans l’état social et dans les lois ; c’est là que se trouve la raison de presque tous les phénomènes qui nous étonnent.
Tous les anciens pouvoirs politiques de l’Europe, les plus grands aussi bien que les moindres, ont été fondés dans des siècles d’aristocratie, et ils représentaient ou défendaient plus ou moins le principe de l’inégalité et du privilège. Pour faire préva­loir dans le gouvernement les besoins et les intérêts nouveaux que suggérait l’égalité croissante, il a donc fallu aux hommes de nos jours renverser ou contraindre les anciens pouvoirs. Cela les a conduits à faire des révolutions, et a inspire a un grand nombre d’entre eux ce goût sauvage du désordre et de l’indépendance que toutes les révolutions, quel que soit leur objet, font toujours naître.
Je ne crois pas qu’il y ait une seule contrée en Europe où le développement de l’égalité n’ait point été précédé ou suivi de quelques changements violents dans l’état de la propriété et des personnes, et presque tous ces changements ont été accompa­gnés de beaucoup d’anarchie et de licence, parce qu’ils étaient faits par la portion la moins policée de la nation contre celle qui l’était le plus.
De là sont sorties les deux tendances contraires que j’ai précédemment montrées. Tant que la révolution démocratique était dans sa chaleur, les hommes occupés à détruire les anciens pouvoirs aristocratiques qui combattaient contre elle se mon­traient animés d’un grand esprit d’indépendance, et, à mesure que la victoire de l’éga­lité devenait plus complète, ils s’abandonnaient peu à peu aux instincts naturels que cette même égalité fait naître, et ils renforçaient et centralisaient le pouvoir social. Ils avaient voulu être libres pour pouvoir se faire égaux, et, à mesure que l’éga­lité s’établissait davantage à l’aide de la liberté, elle leur rendait la liberté plus difficile.
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Les hommes qui habitent les pays démocratiques n'ayant ni supérieurs, ni inférieurs, ni associés habituels et nécessaires, se replient volontiers sur eux-mêmes et se considèrent isolément. [...]
Ce n'est donc jamais qu'avec effort que ces hommes s'arrachent à leurs affaires particulières pour s'occuper des affaires communes ; leur pente naturelle est d'en abandonner le soin au seul représentant visible et permanent des intérêts collectifs, qui est l'État.
Non seulement ils n'ont pas naturellement le goût de s'occuper du public, mais souvent le temps leur manque pour le faire. La vie privée est si active dans les temps démocratiques, si agitée, si remplie de désirs, de travaux, qu'il ne reste presque plus d'énergie ni de loisir à chaque homme pour la vie politique.
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Partout l'État arrive de plus en plus à diriger par lui-même les moindres citoyens et à conduire seul chacun d'eux dans les moindres affaires. [...] Cet affaiblissement graduel de l'individu en face de la société se manifeste de mille manières. Je citerai entre autres ce qui a rapport aux testaments. [...] Quand tous les vivants sont faibles, la volonté des morts est moins respectée. On lui trace un cercle très étroit, et, si elle vient à en sortir, le souverain l'annule ou la contrôle. Au Moyen Âge, le pouvoir de tester n'avait, pour ainsi dire, point de bornes. Chez les Français de nos jours, on ne saurait distribuer son patrimoine entre ses enfants, sans que l'État intervienne. Après avoir régenté la vie entière, il veut encore en régler le dernier acte.
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L'unité, l'ubiquité, l'omnipotence du pouvoir social, l'uniformité de ses règles, forment le trait saillant qui caractérise tous les systèmes politiques enfantés de nos jours. On les retrouve au fond des plus bizarres utopies. L'esprit humain poursuit encore ces images quand il rêve. [...]
Les hommes de nos jours sont donc bien moins divisés qu'on ne l'imagine ; ils se disputent sans cesse pour savoir dans quelles mains la souveraineté sera remise ; mais ils s'entendent aisément sur les devoirs et sur les droits de la souveraineté. Tous conçoivent le gouvernement sous l'image d'un pouvoir unique, simple, providentiel et créateur.
Toutes les idées secondaires, en matière politique, sont mouvantes ; celle-là reste fixe, inaltérable, pareille à elle-même. Les publicistes et les hommes d'État l'adoptent, la foule la saisit avidement ; les gouvernés et les gouvernants s'accordent à la poursui­vre avec la même ardeur : elle vient la première ; elle semble innée.
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