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EAN : 9782081288492
192 pages
Ombres Noires (12/04/2013)
3.58/5   26 notes
Résumé :
Dans un monde arabe en ébullition, Utopia est un cri d’alarme sur les clivages sociaux et la disparition des couches moyennes en Égypte.

Le Caire, 2023. À l’abri de hauts murs barbelés, la jeunesse oisive de la colonie d’Utopia s’ennuie. Seule la « Chasse » procure le grand frisson et a valeur de rite initiatique. Le but: s’introduire dans les bidonvilles du Caire, tuer un pauvre et ramener un trophée. Un jeune homme et sa petite amie ont décidé de go... >Voir plus
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Un cri ! « On est deux peuples. Deux peuples, deux peuples ! »

Un monde riche où les gens vivent ‘en-dedans' « Utopia ». Des nabab vivant reclus, ayant tout ce dont ils peuvent rêver, les Maîtres du monde protégés par des mercenaires américains retraités (j'adore)

Un monde pauvre où les gens vivent ‘en-dessous' « les Autres ». Des miséreux qui meurent de faim, de froid, de maladies, vivant en clans, parfois comme des animaux, dont certains espèrent encore un ‘Autre Ailleurs'.

Entre les deux, le néant, il n'y a plus de classe moyenne pour absorber les déraillement entre le haut et le bas comme le constate l'auteur, estimant que la classe moyenne est un élément de survie des sociétés.

Mais le néant est aussi ‘en-dedans' et ‘en-dessous' : « Plus l'individu est ignorant, moins son cortex cérébral commande son comportement. » Reste donc des êtres, sans âme, sans repères, sans cravates et sans préservatifs.

Ceux d'Utopia valent-ils mieux que les Autres ? Ils le croient. Ils se mentent. Ils se droguent dans des flammes vertes pour oublier leur ennui. Les Autres leur servent de gibier, deviennent leur proie. Comment encore ressentir le frisson quand on ne sait plus quoi faire de son temps, de ses mains, de son argent ? On tue. On tue pour tuer le temps. Quelle différence peut-il y avoir entre un jour et un autre, à Utopia ? Aucune, alors on part en chasse : les filles -mais elles ne frissonnent plus, habituées aux curetages- il reste les Autres. On s'invente un safari avec une prise de trophée, afin de vivre les images sanglantes vues sur une affiche de cinéma ‘Platoon', des balles de fusils qui plongeraient dans la gorge du pourchassé duquel on arracherait un bras pour montrer aux copains... Mais un jour, la proie devient chasseur.

« Et nous, les fils de chien, nous, le peuple
A nous le plus beau et son chemin difficile
A nous les coups de botte et les coups de talon
Et le droit de mourir à la guerre. »

Livre très intéressant de SF sur la décomposition d'une société futuriste en Égypte « la personnalité égyptienne a été sérieusement chahutée au cours des cent dernières années. Elle ressemble à une femme, très longtemps maltraitée par son mari, qui serait devenue sauvage et vicieuse. ». Roman très bien construit. Les personnages bousculent les idées reçues, leurs valeurs (ou non-valeurs) démontent les vôtres « Ils n'ont aucune conscience de leur déchéance. » Je serai morte si rapidement dans cet univers sans foi ni loi, pourri en-dedans et en-dessous, trucidée d'en-haut jusqu'en bas par les idées d'Utopia.

« Quand on pense qu'autrefois les gens lisaient pour développer leur conscience ! » dira un personnage. Alors j'ai pensé à Utopia de Thomas More. Ahmed Khaled Towfik a certainement dû le lire.

Livre écrit en 2009 contenant des citations du poète égyptien Abderrahman El-Abnoudi, découvert à l'occasion de cette lecture.

A garder en mémoire pour ce qui me concerne.
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Roman extrêmement sombre et dérangeant, qui bouscule et bouleverse. On est dans une Égypte du futur, mais un futur pas tellement lointain. Les riches très riches se sont retranchés dans les endroits les plus agréables (en bord de mer), isolés du reste du pays par de hauts murs barbelés protégés par d'anciens marines américains, et vivent dans une surabondance de biens (y compris de nouvelles drogues chimiques dont ils ne peuvent se passer) et de sexe facile, dans la paix avec les anciens ennemis (dont Israël qui est évoqué au passage) et surtout, dans un incommensurable ennui des heures et des jours qui se suivent sans surprise. Plus rien n'amuse cette jeunesse dorée et complètement désabusée ; plus rien ne les occupe plus de quelques minutes, plus rien ne les intéresse. le maquillage à la mode est devenu celui qui imite des blessures les plus sanguinolentes possibles. Dans ce monde complètement désenchanté, ultra-capitaliste mais sans plus aucune place pour le rêve ou l'espoir (de quoi ? quand on a tout…), le divertissement ultime consiste à passer (illégalement) de l'autre côté des murs, pour y kidnapper n'importe qui et le ramener dans leur paradis pour organiser une chasse à l'homme en plein désert, et revenir ensuite auprès des autres jeunes de leur clan, avec un trophée : un bras ou une main de leur victime…

C'est ce que va tenter l'un des deux personnages principaux de ce court roman, dont le nom n'est jamais cité il me semble, qui se rend vers ce monde des « Autres » avec sa petite amie du moment, appelée (bien ironiquement !) Germinal. Ces Autres vivent dans une misère et une crasse extrêmes ; depuis longtemps les services publics ont cessé de fonctionner, il n'y a plus de métro, de salaires, d'écoles, d'hôpitaux, de médicaments, rien ! Il n'y a même plus de chiens ou de rats, car leur chair est trop précieuse et le moindre animal qui parviendrait à survivre dans ce cloaque se fait bien vite attraper pour fournir un peu de nourriture à ces êtres qui n'ont plus rien, même plus vraiment d'humanité. Certains arrivent à survivre en effectuant les travaux sales que leur laissent les nantis d'Utopia, mais c'est surtout une criminalité de survie et devenue normale qui s'est développée : proxénétisme et prostitution, trafics divers et variés (et notamment cette fameuse drogue à la mode mais alors coupée), dans un climat de guerre des gangs où les armes sont faites de vieux objets communs recyclés.

C'est ainsi que, trop téméraires, le narrateur « chasseur » et Germinal se retrouvent en bien mauvaise posture, avant d'être sauvés par Gaber, l'un de ces Autres, qui va les prendre sous son aile jusqu'à les ramener dans leur monde, sans qu'on comprenne trop pourquoi. Ils ont tous deux plusieurs points communs bien au-delà de leur terrible différence d'origine : tous deux ont beaucoup lu, dans ce monde où les livres n'ont plus cours quel que soit le côté du mur ; ces lectures devenues inutiles dans leurs mondes respectifs les ont tous deux rendus cyniques ; et aussi, tous deux sont animés d'une haine infinie envers l'autre. Mais, tandis que le narrateur nanti recherche sans répit le « frisson » qu'il n'a jamais ressenti dans sa courte vie de 16 ans à peine, Gaber tient plus que tout à rester digne quoi qu'il arrive, et protéger à tout prix son plus précieux trésor, sa soeur trop jolie, malgré la saleté et la tuberculose qui la condamnent à très court terme…

Bon, là j'en ai déjà beaucoup dit, presque plus qu'un résumé, et je n'ai même pas encore vraiment commencé mon commentaire. Mais le synopsis présent sur les différentes plateformes n'est pas tout à fait explicite (et pour cause !), et dès lors il est difficile de deviner à quel point l'auteur nous décrit deux populations issues des mêmes racines, mais devenues étrangères et même haineuses l'une envers l'autre. S'il se penche au départ sur le narrateur venu d'Utopia, dans plusieurs chapitres Gaber devient à son tour narrateur à la 1re personne du singulier, ce qui accentue le profond antagonisme qui existe entre les deux. Mais, clairement, et sans jamais voiler les côtés sombres de son « vrai héros », l'auteur a pris le parti de Gaber, car lui seul semble avoir gardé une vacillante flamme d'humanité, dans ce monde partagé entre nantis trop désabusés ou pauvres ayant depuis longtemps plongé dans une certaine bestialité, mais des deux côtés tellement sans illusion, au point de ne plus ressentir aucun de ces sentiments, de ces émotions qui font d'un homme ou d'une femme, un être humain.

L'auteur expose ainsi, avec un réalisme empreint d'une certaine cruauté même, ce qui pourrait arriver dans une société où la classe moyenne (composée de ces professions que certains ont tellement tendance à considérer comme « inutiles », entre fonctionnaires, enseignants, personnel soignant, petits commerçants, etc.) aurait disparu, et où les deux extrêmes se seraient développées de façon exponentielle, entre opulence scandaleuse qui semble pourtant ne plus choquer personne, et pauvreté sans nom assortie d'une telle résignation que cette population n'a même plus la force de se révolter.
Il place son histoire en Égypte dans un futur proche, dénonçant ainsi certaines tendances sociétales qui existeraient déjà dans son pays, et notamment ce fossé divisant nantis et miséreux qui ne cesserait de s'élargir, dans la méconnaissance les uns des autres, une indifférence de la part des riches et un certain fatalisme, un renoncement de la part des « Autres ».

Mais ce qui est particulièrement glaçant dans ce livre, entre les mains de la lectrice occidentale que je suis, c'est que cette histoire terriblement dystopique pourrait arriver de la même façon, avec à peine quelques subtiles différences géographiques, dans nos pays aussi. Il suffit de gommer les quelques passages qui parlent explicitement de l'Égypte, passages relativement peu nombreux en plus, et les replacer dans un contexte européen (et je suppose qu'un contexte nord-américain marcherait tout aussi bien, si l'on peut dire), et ça devient tout à coup terriblement réaliste, de l'ordre du possible, de l'ordre de l'horrible !

L'auteur nous livre ce récit dans un plume langue proche d'une mélopée parfois, avec ses aspects répétitifs – juste assez pour qu'il en ressorte une certaine mélancolie, juste pas trop pour que ça ne soit pas lassant. Il est assez difficile de dire, pour moi qui n'y connais rien, si c'est une caractéristique propre à cet auteur en particulier, ou si c'est un artifice récurrent dans la littérature arable, mais en tout cas, ça donne une force indéniable à cette histoire. En outre, le récit est ponctué de citations ; or, si certaines sont issues d'un imaginaire groupe de rock (d'une forme de rock pas encore connue aujourd'hui, mais tellement extrême que le hard rock ou le heavy metal sembleraient « gentils » en comparaison, explique-t-on) qui s'appelle de façon bien trouvée « Orgasm », d'autres sont de vraies citations, dont la plus touchante que de nombreux commentaires ont reprise, est de cet auteur égyptien connu semble-t-il, mais illustre inconnu dans notre monde occidental (d'ailleurs il semble bien qu'il n'ait quasi as été traduit en français), Abderrahman El-Abnoudi, que Wiki présente comme Abdel Rahmane al-Abnoudi, et que je ne peux m'empêcher de citer ici tant il illustre bien tout le paradoxe de ce livre :

"On est deux peuples. Deux peuples, deux peuples !
Regarde où est le premier, regarde où est l'autre,
Et là, c'est la ligne qui passe entre eux deux.
Vous avez vendu la terre et avec elle ses outils et ses gens
Devant tout le monde vous l'avez déshabillée
On l'a vue tout entière, de la tête aux pieds
Elle est morte et son odeur a précédé son dernier souffle
Et nous, les fils de chien, nous, le peuple
A nous le plus beau et son chemin difficile
A nous les coups de botte et les coups de talon
Et le droit de mourir à la guerre."
Abderrahman El-Abnoudi, "Tristesses ordinaires" »

Ainsi donc, lisez-le, ce livre terrible, en plus il se lit vite et facilement car la langue même est très accessible. Mais laissez ensuite votre coeur se reposer, et digérer ces scènes devenues banales dans un certain monde, et pourtant d'une horreur sans nom… qui n'est pas si loin de nous !
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Merci à Masse Critique pour nous permettre de découvrir de nouveaux univers.

Ainsi que la quatrième de couverture le raconte, l'action se passe en Egypte, avec une classe pauvre majoritaire et une classe riche, oisive, retranchée dans des cités paradisiaques et fortifiées. Elles sont protégées par des mercenaires, armés et équipés de matériel militaire.

La jeunesse est pourrie par l'inactivité, la satiété, l'absence d'effort à fournir pour obtenir tout ce qu'elle veut. La suite est classique, addictions diverses, y compris aux risques inutiles et à la violence.

Cela me rapelle des scènes de "Guerre et Paix" de Tolstoi, quand la jeunesse noble joue à la roulette russe, ou boit à la régalade une bouteille d'alcool tout en étant en équilibre sur l'encadrement d'une fenêtre.

L'auteur campe un portrait saississant d'un monde en dérive, sans plus de classe moyenne. Dans l'Egypte de 2013, celle-ci craint pour son avenir, se trouve face à une papérisation croissante, une radicalisation croissante de la société.

Au travers de ce roman d'anticipation, l'auteur brosse le portrait d'une Egypte pas très éloignée de la réalité.
l'attitude face aux femmes est très symptomatique. Dans le roman, elles sont toutes partagées, toutes prostituées. Dans la réalité, comment ne pas évoquer les viols de manifestantes, le harcellement mis en évidence par ce journaliste http://www.slateafrique.com/204263/egypte-homme-deguise-femme-experimenter-harcelement-sexuel

Tout pourrait laisser présager d'un grand roman. Cependant, le livre est trop court, il ne va pas assez en profondeur. On aimerait par exemple avoir plus d'epaisseur dans le caractère de la jeune fille riche. L'intrigue est limitée et manque de souffle, ne permettant pas de donner du relief aux personnages.

C'est un cri, un cri d'alarme et de douleur, un cri d'angoisse par rapport au délitement de la société vécu par l'auteur. Pour cela, il mérite le respect. Mais l'ouvrage échoue à devenir un grand bouquin.

Un auteur à suivre.
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En Égypte, en 2023, les classes moyennes ont définitivement disparu. D'un côté, installés dans des villes ultra-sécurisées protégées par des soldats américains vivent les plus riches. de l'autre, partout ailleurs dans le pays, vivent les plus pauvres. Deux mondes qui ne se croisent plus, si ce n'est lorsque la plèbe vient servir les dominants. C'est dans une de ces colonies, Utopia, que vit le fils de 16 ans d'un chef d'industrie pharmaceutique. Blasé par la profusion de ce qui lui est offert, drogue, sexe, consommation à outrance, le jeune homme n'a plus qu'une frontière qui s'ouvre devant lui, sorte de voyage initiatique que font régulièrement les jeunes d'Utopia : aller chez les Autres, en tuer un et ramener en trophée un de ses membres comme preuve. Parti avec sa petite amie du moment, il va néanmoins vite être démasqué et, de chasseur, devenir la proie. Il devra dès lors s'en remettre à Gaber, adolescent pauvre animé d'un esprit de revanche de classe bien particulier.

Dans ce récit dystopique à deux voix, Ahmed Khaled Towfik oppose deux personnages en négatif l'un de l'autre qui n'ont en commun que l'ennui mortel qu'ils éprouvent. L'un parce qu'il a tout, l'autre parce qu'il n'a rien.
« C'est curieux de voir à quel point les besoins humains se sont rétrécis. Au début, il y avait encore des appartements avec des téléphones, des frigos, des télévisions, des salles de bains. du coup, les gens se plaignaient toujours de la vie de chien qu'ils menaient, obligés de regarder des émissions débiles et de composer avec les coupures d'eau, de téléphone ou d'électricité. Une fois que vous avez perdu tout ça, il n'y a plus de motif de se plaindre. Un genre particulier de karma, en somme. Quand il n'y a pas d'électricité, il n'y a pas de coupures de courant. »
Résignés à l'ennui causé par l'abondance pour les uns, par l'ennui causé par l'absence de biens pour les autres, leurs derniers refuges sont les drogues, le sexe et surtout la violence. Si cette dernière est un moyen de domination d'un côté, de survie de l'autre, elle est aussi avant tout l'expression d'un retour à l'état de bêtes. Mais, engagé dans cette sorte de chasse aux Hilotes, le riche héritier que l'on connaîtra pendant un moment sous le nom d'Alaa, se trouve confronté à un Gaber qui refuse cette part animale et entend bien jouir d'un libre arbitre qui semble avoir déserté la très grande majorité de la population. Un refus tellement ancré en lui que, lorsqu'il montrera quelque velléité à laisser s'exprimer sa bestialité, il en sera finalement incapable. Si Gaber entend bien sauver Alaa et Germinal, il n'en demeure pas moins que, loin de devenir des alliés, les deux jeunes hommes s'opposent de plus en plus, le fossé de la condition sociale se doublant d'un gouffre moral.

Court et maîtrisé, quoi que peut-être parfois un peu didactique, le récit de Towfik se révèle accrocheur et surprenant, maintenant tout du long une forte tension. Par ailleurs, s'il a été écrit en 2009, avant le « Printemps arabe », il n'en demeure pas moins que c'est aussi à la lumière de ces événements qu'on le lit aujourd'hui et que cette dystopie apparaît alors par bien des aspects plutôt visionnaires. En particulier dans cette conclusion qui nous montre comment le dominant et le dominé participent chacun, par leurs choix ou par leurs errances à une explosion sociale inattendue. Voilà en tout cas un roman original et subtil qui gagne à être connu.

Lien : http://www.encoredunoir.com/..
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Si vous avez l'âme d'une fleur bleue, je vous conseilles d'aller lire un Oui-Oui (chez les Pingouins, le meilleur à mon sens), c'est mieux, mais surtout pas Utopia !

Utopia, c'est le futur, nous sommes en Égypte, en 2023, et, suite à une division des classes, les très riches vivent retranchés dans une partie de la ville, protégée par de hauts murs et des anciens marines Américains.

Sécurité de haut vol pour les très riches tandis que le reste de la populace, les pauvres, vivent dans des taudis, ce sont les Autres.

La classe moyenne ?? Y'en a plus, ma bonne dame ! Disparue, aux oubliettes, et ce n'est pas tout à fait de la SF, ce petit roman, puisque chez nous aussi la classe moyenne recule tandis que la classe aisée avance. Une qui avance, une autre qui recule, comment veux-tu, comment veux-tu… qu'on s'en sorte !

Dans ce court roman qui t'en fout plein la gueule, deux récits s'alternent : celui d'un des gamins riches et oisif qui a décidé de pimenter sa vie en allant kidnapper un Autre pour ramener un trophée, tel un scalp chez les Indiens, et celle de Gaber, un lettré, universitaire, qui vit dans les bidonvilles et dans la misère la plus totale.

Deux hommes que tout oppose mais que tout réuni, comme si le riche était la part sombre et obscure du pauvre. Tout deux aiment lire, les filles, la drogue et tout deux s'ennuient de la vie. L'un parce qu'il a tout, l'autre parce qu'il n'a rien. Tout le monde prend de la drogue, les riches pour sortir de leur ennui, les pauvres pour oublier leur misère.

Mais si le gamin riche (16 ans) a depuis longtemps cédé à sa part d'animalité, Gaber le pauvre la refuse, le rejette, et c'est pourquoi il va tenter de les aider (le riche est venu avec sa meuf).

Alternance de point de vue, mélange du chasseur et de la proie car le chasseur, en terrain hostile, devient vite la proie des moutons, pas de temps morts et des descriptions de deux modes de vie dont je ne voudrais ni l'un, ni l'autre. Sans oublier un récit qui est parti dans une direction à laquelle je ne m'attendais pas, et c'est tant mieux.

Un récit qui ne laisse que peu de répit au lecteur, deux hommes que tout oppose mais que tout pourrait réunir, de la drogue, de la violence (jamais gratuite), de l'humanité aussi, une leçon pour le gamin riche (la retiendra-t-il ?).

Un conte cruel, sombre, où le pessimisme règne en maître avec son fidèle serviteur, la résignation; le tout servi par une plume acide qui dénonce l'effondrement de nos sociétés actuelles par la perte du ciment : les classes moyennes.

Mon seul bémol sera que je n'ai ressenti aucune sympathie pour les personnages principaux. Même pas le pauvre !

Utopia, ça te foutra un coup de pied dans ton cul et t'en restera baba.

Lien : https://thecanniballecteur.w..
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Citations et extraits (4) Ajouter une citation
Mais vivre sans rêves est insupportable.
Enfant, je n'ai jamais vécu sans rêves. Attendre quelque chose, être privé de quelque chose, fermer les yeux le soir en espérant quelque chose, recevoir la promesse de quelque chose. Jusqu'au jour où, à 20 ans, j'ai compris cette vérité cruelle : désormais, il n'y avait plus de place pour le rêve.
Il n'y aura rien, mon ami. Ni aujourd'hui, ni demain, ni après-demain. Ta vie ne sera qu'un long — qu'attends-tu ? — long — rien — long et morne présent.
A ce moment, j'ai compris que je devrais livrer une guerre acharnée à l'enfant en moi qui chaque nuit trépigne et proteste : «Comment ? Pas de rêves ?» Chaque nuit, il m'insulte, me frappe, me mord. Chaque nuit, je le remets à sa place et lui ordonne de se taire. Pas de rêves, petit con. Il n'y aura pas de lendemain. Ils te l'ont volé, il faudra t'y faire (...)
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On est deux peuples. Deux peuples, deux peuples !
Regarde où est le premier, regarde où est l'autre,
Et là, c'est la ligne qui passe entre eux deux.
Vous avez vendu la terre et avec elle ses outils et ses gens
Devant tout le monde vous l'avez déshabillée
On l'a vue tout entière, de la tête aux pieds
Elle est morte et son odeur a précédé son dernier souffle
Et nous, les fils de chien, nous, le peuple
A nous le plus beau et son chemin difficile
A nous les coups de botte et les coups de talon
Et le droit de mourir à la guerre.

Abderrahman El-Abnoudi, "Tristesses ordinaires"
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C’est curieux de voir à quel point les besoins humains se sont rétrécis. Au début, il y avait encore des appartements avec des téléphones, des frigos, des télévisions, des salles de bains. Du coup, les gens se plaignaient toujours de la vie de chien qu’ils menaient, obligés de regarder des émissions débiles et de composer avec les coupures d’eau, de téléphone ou d’électricité. Une fois que vous avez perdu tout ça, il n’y a plus de motif de se plaindre. Un genre particulier de karma, en somme. Quand il n’y a pas d’électricité, il n’y a pas de coupures de courant.
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La lecture pour moi est une sorte de drogue à bon marché. Je ne m'en sert que pour perdre conscience. Quand on pense qu'autrefois les gens lisaient pour développer leur conscience !
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