Impossible de résumer ce recueil de 17 nouvelles assez différentes, encore que presque toutes teintées de fantastique et d'absurde. Même les noms de lieux sont inventés et parodiques, comme Brasculet-les-Oublies en Loire et Garonne, Value-les-Clouds, Terrats-les-Flots ou Gabiaule-les-Ponts. Il y a des spirites, mais aussi des chefs de bureau comme celui du «Ministère de la consignation internationale et des voies d'accès» et des professions nouvelles comme il sied au fantastique: orienteur de rêves, peintre de l'âme plutôt que du corps, restaurateur de mémoire ou essayeur d'humeur nouvelle en laboratoires, mais il y a aussi des professions plus classiques comme celle de ce croque-mort "dont la fortune et l'embonpoint étaient fonction des cercueils qu'il avait vendus". Il y a aussi au Moyen-Âge un bandit qui est soumis au "jugement de Dieu" et qui, plongé dans l'huile bouillante ne ressent rien et en sort indemne.
Munissez-vous d'un dictionnaire pour trouver le sens de drageoir, hypocras, languier, hanap, happelopin, et bien d'autres termes.
Henri Troyat a aussi l'imagination débordante pour trouver des expressions insolites.
«Ferdinand
Pastre (qui vient de mourir et est devenu fantôme) n'osait pas aborder un fantôme inconnu et lui demander les formalités à accomplir pour être pris en charge par les autorités compétentes» et apprend qu'il y a des fantômes très demandés par les spirites dans les tables tournantes et d'autres qui sont oubliés. Ainsi, «Napoléon et
Victor Hugo n'ont pas une soirée de libre... certaines de ces vedettes ont eu l'idée de se faire doubler parce qu'elles ne peuvent être partout en même temps».
Une « dame noire » descend depuis dix ans dans «un hôtel infâme, dont le personnel est poli comme trente-six chiens, dont la cuisine vous vitriole l'estomac et dont les clients ont l'air de crétins cliniques ou de bagnards». On saura pourquoi.
La langue est recherchée et bien tournée.