Un petit essai sur la danse, savoureux par sa description ironique du "philosophe" non pratiquant (de la danse):
"Mais quand on n'est pas une danseur, quand on ne possède, pour traiter des prodiges que font les jambes, que les ressources d'une tête, on n'a de salut que dans quelque philosophie, - c'est à dire que l'on reprend les choses de fort loin avec l'espoir de faire évanouir les difficultés par la distance. Il est beaucoup plus simple de construire un univers que d'expliquer comment un homme tient sur ses pieds"...
"Il faut bien qu'il (le philosophe- ou si vous préférez l'esprit affligé de la manie interrogeante) compense son ignorance technique et dissimule son embarras par quelque ingéniosité d'interprétation universelle de cet dont il constate et subit le prestige".....
Commenter  J’apprécie         50
Toute époque qui a compris le corps humain, ou qui a éprouvé, du moins, le sentiment du mystère de cette organisation, de ses ressources, de ses limites, des combinaisons d'énergie et de sensibilité qu'il contient, a cultivé, vénéré la Danse.
Elle est un art fondamental, comme son universalité, son antiquité immémoriale, les usages solennels qu'on en a fait, les idées et les réflexions qu'elle a de tout temps engendrées, le suggèrent ou le prouvent.
Qu'est-ce qu'une métaphore, si ce n'est une sorte de pirouette de l'idée dont on rapproche les diverses images ou les divers noms ? Et que sont toutes ces figures dont nous usons, tous ces moyens, comme les rimes, les inversions, les antithèses, si ce ne sont des usages de toutes les possibilités du langage, qui nous détachent du monde pratique pour nous former, nous aussi, notre univers particulier, lieu privilégié de la danse spirituelle ?
J'ai voulu vous montrer comment cet art (la danse vivante), loin d'être un futile divertissement, loin d'être une spécialité qui se borne à la production de quelques spectacles, à l'amusement des yeux qui le considèrent ou des corps qui s'y livrent, est tout simplement une poésie générale de l'action des êtres vivants.
Commencer de dire des vers, c'est entrer dans une danse verbale.
"La danseuse n'a point de dehors... Rien n'existe au-delà du système qu'elle se forme par ses actes, système qui fait songer au système tout contraire et non moins fermé que nous constitue le sommeil, dont la loi tout opposée est l'abolition, l'abstention totale des actes.
La danse lui apparaît comme un somnambulisme artificiel, un groupe de sensations qui se fait une demeure en soi, dans laquelle certains thèmes musculaires se succèdent selon une succession qui lui institue son temps propre, sa durée absolument sienne, et il contemple avec une volupté et une dilection de plus en plus intellectuelles cet être qui enfante, qui émet du profond de soi-même cette belle suite de transformations de sa forme dans l'espace ; qui tantôt se transporte, mais sans aller véritablement nulle part ; tantôt se modifie sur place, s'expose sous tous les aspects ; et qui, parfois, module savamment des apparences successives, comme par phrases ménagées ; parfois se change vivement en un tourbillon qui s'accélère, pour se fixer tout à coup, cristallisée en statue, ornée d'un sourire étranger."
En grand poète, Paul Valéry fut aussi un fin observateur de son siècle. Et à la veille de la Seconde Guerre mondiale, il pressentait déjà que “l'abus de lumière, de vitesse, de stupéfiants, de merveilles comme de vacarme” deviendrait le vice de l'humanité.
#poésie #litterature #cultureprime
_____________
Retrouvez-nous sur :
Facebook : https://fr-fr.facebook.com/franceculture
Twitter : https://twitter.com/franceculture
Instagram : https://www.instagram.com/franceculture
TikTok : https://www.tiktok.com/@franceculture
Twitch : https://www.twitch.tv/franceculture
Et abonnez-vous à la newsletter Culture Prime : https://www.cultureprime.fr/
+ Lire la suite