Blake et Mortimer, Tome 20 : La Malédiction des Trente Deniers, Deuxième Partie : La Porte d'Orphée

Rarissime je pense dans le milieu de la BD mais suite au décès du dessinateur René Sterne, c'est Antoine Aubin qui reprend donc les crayons et je dois avouer qu'il a fait du bon travail !

J'ai passé un agréable moment de lecture car le scénario est digne des grands auteurs de thrillers et les dessins sont assez fidèles à l'esprit d'E.P. Jacobs.

Si le dessin de cette deuxième partie de la malédiction des trente deniers ne souffre aucune critique, il n'en est pas de même pour le scénario!
Cette chute est beaucoup trop calquée sur celle des Aventuriers de l' Arche perdue et d' Indiana Jones et la dernière croisade.
Le lecteur était en droit d'attendre mieux d'un conteur tel que Van Hamme!

Seconde partie du diptyque "La malédiction des trente deniers", cet album est bourré d'action : nos héros favoris échappent plusieurs fois à la noyade, aux explosions, à un colonel Olrik armé (mais à cela ils y sont habitués !), ils font de la spéléologie et découvrent même une relique chrétienne. Il faut ajouter à tout cela la présence, pour une fois, de deux personnages féminins qui ne restent pas en arrière-plan mais participent à l'action.
Sinon, cela faisait très longtemps que Blake et Mortimer n'avaient pas vécu une aventure entière ensemble. Euh... cela semble équivoque comme phrase ! Ce que je veux dire c'est que dans les 12-13 précédents albums, l'aventure est seulement vécue par un des deux héros (généralement Mortimer) tandis que l'autre l'aide vers la fin de l'histoire.
Le petit point négatif est la fin qui mêle les fins des films "Indiana Jones et les aventuriers de l'Arche perdue" et "Indiana Jones et la dernière croisade".

A l'échelle de Jacobs

Vous aimez Blake et Mortimer ? Alors, allez y, achetez.
Par contre, si vous n'êtes fan que du pack "Jacobs-science fiction d'époque"...

Voyons un peu ce que l'on peut reprocher à "la malédiction des 30 deniers".

En premier lieu, il est évidemment vain de chercher à critiquer ce livre en le comparant à l'oeuvre du grand Edgar.
La donne est biaisée, quel que soit le soin apporté à la réalisation de ces prolongements.
La qualité du dessin est ici presque impeccable (Mais depuis le massacre par Bob de Moor du Professeur Sato, on a de la marge, Ted Benoit ayant sans doute été celui qui se rapprochait le plus de Jacobs dans la composition de pages). Je trouve d'ailleurs que le trait s'est d'ailleurs amélioré dans ce 2ème tome, mais compte tenu du brusque changement de dessinateurs dans des circonstances tragiques entre les 2 volumes, cela peut se comprendre.
Le scénario, juste mécanique (mais franchement, apprécierait on forcément "le piège diabolique" aujourd'hui ?) est plus problématique.
Les 30 deniers reprennent curieusement une vieille obsession de van Hamme et l'idée finale est copiée sur Indiana Jones.
Bien sûr, Indy était lui même une copie, un quasi pastiche des films de série Z et de pulps, mais quand même !
Au fond, je crois que ceux qui ne connaissent pas les originaux d'EJ, trouveront (un peu) de plaisir dans cette lecture bon enfant. Pour les autres, c'est évidemment plus dur, il faut aimer le faux Louis XV, la nouvelle Fiat 500 et plus globalement, être sensible à la nostalgie et réaliser son achat, de manière un peu mécanique, comme on le faisait avec nos vignettes Panini, en sorte d'hommage au mage de Marcinelle. Mais les fans d'EJ présentent la particularité d'aimer ce qui n'est pas parfait (sauf les schizophrènes également fans d'Hergé) : histoires parfois bancales, tentatives d'humour contrariées (le Mortimer électrifié aux cheveux dressés de "La Marque jaune" qui ont valu à EJ, des réactions courroucées des lecteurs), textes envahissants, Olrik immortel Houdini, morales finales un peu bébettes...
Alors à tous, les nostalgiques et les autres : nous avons chacun au moins une bonne raison de verser notre obole à la multinationale Van Hamme.
J'en ajoute une autre : pendant qu'il scénarise B & M, il ne commet pas de Thorgal (le Viking des étoiles !) ou autres Largo W. Et rien que pour ça...

Ce second tome est tout aussi réussi que le premier. Cela faisait longtemps que je n'avais pas pris autant de plaisir à suivre une histoire bien construite et sacrément bien dessinée.
on ne s'ennuie pas une seconde à suivre les aventures de nos deux héros à la recherche de la tombe de Judas et de ses fameux trente deniers.
Cela a un petit air d'Indiana Jones sur la fin mais ce n'est pas spécialement déplaisant de retrouver peut-être un clin d'oeil à notre héros archéologue.
Du très bon travail décidément.