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Critique de Syl


Remplaçant un ami sur les lieux d'un décès, le commissaire Jean-Baptiste Adamsberg de la Brigade criminelle de Paris constate en quelques minutes que la mort de la vieille dame n'est ni naturelle, ni accidentelle. C'est le mari qui après cinquante-neuf ans de mariage, n'a plus supporter la vie commune…

De retour à la brigade, on lui annonce que son ami (et ancien lieutenant) Louis Veyrenc l'attend dans le café de la même rue. Adamsberg le sollicite à nouveau pour qu'il réintègre ses fonctions (voir "Un lieu incertain"). C'est alors que son attention est attirée par une étrange femme d'une soixantaine d'années. Fleur des champs sur le bitume, d'allure campagnarde, indécise et craintive, elle semble attendre une personne. Elle piétine sur le trottoir et sa présence est curieuse, ce qui titille l'intérêt du commissaire. S'approchant d'elle, il lui demande courtoisement si elle a besoin d'aide, tout en ayant l'étrange certitude qu'elle est là pour lui.
"- Vous ne vouliez pas entrer là-dedans ? dit Adamsberg en désignant le vieux bâtiment de la Brigade criminelle. Pour parler à un policier ou quelque chose ? Parce que dans cette rue, à part eux, il n'y a pas grand-chose d'autre à faire.
– Mais si les policiers ne vous écoutent pas, ça ne sert à rien d'y aller, dit-elle en reculant de quelques pas. Ils ne vous croient pas, vous savez, les policiers.
– Car c'est bien là que vous alliez ? A la Brigade ?
La femme abaissa ses sourcils presque transparents.
– C'est la première fois que vous venez à Paris ?
– Mon Dieu oui. Il faut que je rentre ce soir, ils ne doivent pas s'apercevoir.
– Vous êtes venue voir un policier ?
– Oui. Enfin peut-être.
– Je suis policier. Je travaille là-dedans.
La femme jeta un regard à la tenue négligée d'Adamsberg et parut déçue ou sceptique.
– Vous devez bien les connaître alors ?
– Oui.
– Tous ?
– Oui.
La femme ouvrit son gros sac brun, râpé sur les flancs, et en sortit un papier qu'elle déplia avec soins.
– Monsieur le commissaire Adamsberg, lut-elle avec application. Vous le connaissez ?
– Oui. Vous venez de loin pour le voir ?
– D'Ordebec, dit-elle…"

Valentine Vendermot d'Ordebec en Normandie, vient signaler la disparition d'un homme de son village, Michel Herbier. Ce n'est pas par sollicitude, ni par inquiétude qu'elle informe la police de Paris, mais par frayeur. Si Herbier a disparu, c'est qu'il était mauvais, cruel, peut-être même un criminel. L'Armée furieuse est venue le chercher, elle l'a saisi. C'est Lina, sa fille, qui l'a vu. Et Madame Vendermot a peur pour sa fille.
Adamsberg pense aussitôt à une confrérie de chasseurs, rien de bien transcendant ! et lui propose de revenir un autre jour lorsqu'elle aura les idées plus claires et surtout, d'en parler aux autorités locales…

Le soir, quand Adamsberg rentre chez lui, il voit le lieutenant Violette Retancourt donner quelques consignes à son fils Zerk. le pigeon découvert dans la journée près de la Brigade, les pattes ligotées avec un fil en nylon, est en sursis et Zerk est chargé des soins.
L'Armée furieuse… Adamsberg repense à la femme… qu'est-ce que l'Armée furieuse ?
C'est son ami Danglard qui répondra à la question.

La légende prend ses racines au XIème siècle. Sur les chemins boisés d'Europe du Nord, le Grimweld, "dans les pays scandinaves, les Flandres, le nord de la France et l'Agleterre", la Mesnie Hellequin, l'Armée furieuse ou la Grande Chasse, passe et fait justice en saisissant les êtres violents et mauvais.
"- Cette vieille armée qui répand son fracas n'est pas intacte. Les chevaux et leurs cavaliers sont décharnés, et il leur manque des bras et des jambes. C'est une armée morte, à moitié putréfiée, hurlante et féroce, qui ne trouve pas le ciel."
Le seigneur Hellequin commande cette troupe fantomatique et embarque les âmes cruelles, désignant, quelques jours avant, la mort des damnés. Une seule personne par génération a la faculté de les voir ; c'est un passeur.
Lina, la fille de Madame Vandermot, a vu quatre silhouettes, dont trois sont identifiées, Herbier, Glayeux et Mortembot. Les gens d'Ordebec voient d'un mauvais oeil cette prédiction et les détenteurs de cet héritage maudit.

Adamsberg ne peut être indifférent à une telle histoire. Il décide de partir seul, dans le Calvados. Mais avant de se présenter au capitaine de gendarmerie Emeri, il veut s'imprégner de l'atmosphère et part arpenter le chemin De Bonneval dans la forêt d'Alance. Il y rencontrera Léo, une vielle dame de quatre-vingt-huit ans qui détient tous les secrets de la région. Son séjour ne sera pas bref car un crime et une tentative de meurtre seront commis, le capitaine Emeri sera destitué de l'enquête et Adamsberg, mandaté pour la mener, demandera à son équipe de venir le rejoindre. Les visions de Lina annoncent des jours mouvementés.

Entre-temps, Momo-mèche-courte, un jeune délinquant connu de la police, spécialisé dans la combustion des voitures, est soupçonné d'en avoir brûlé une avec, à l'intérieur, son propriétaire, un homme d'affaire important. Adamsberg partagé entre les deux investigations, confie cette dernière au lieutenant Retancourt, persuadé dès le début de l'innocence de ce petit voyou qu'il apprécie… Les voix du Seigneurs sont impénétrables !… il fera tout pour le disculper, voire même jusqu'à outrepasser ses droits.

Dernier livre de Fred Vargas, j'ai été harponnée dès les premières pages. Elle a une belle plume et une grande imagination. J'aime l'esprit fantaisiste de l'équipe d'Adamsberg, des personnages usés, chimériques, aux tempéraments extravagants et très attachants. Dans cette histoire, une série de portraits atypiques nous est présentée… chacun essaie de garder l'équilibre sur le fil d'une lame, et rien ne les effraie. Il y a les gens mauvais d'un côté, que l'Armée furieuse guette, et des gens "gentils" de l'autre, naïfs, innocents et valeureux.
L'histoire est un peu azimutée car le livre recèle trois intrigues ; les deux premières racontées précédemment et la troisième, celle du pigeon torturé… Adamsberg espère bien retrouver le coupable de cette vilénie. La légende de la Horde errante, est un support fascinant. On lit ce policier d'une traite, on est à Ordebec, on cherche les confidences, les liens occultes, on s'attend à voir derrière les arbres le seigneur Hellequin… On est de tout coeur avec Adamsberg, on le soutient… car sa vie n'est pas de tout repos et ses méninges sont un labyrinthe !
Un livre à conseiller, sans oublier "Un lieu incertain" et les autres de la série.
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