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Evelyne Amon (Éditeur scientifique)
EAN : 9782210754133
198 pages
Magnard (12/07/2001)
  Existe en édition audio
4.1/5   1197 notes
Résumé :
"Le Silence de la mer", publié le 20 février 1942, fut le premier livre des Éditions de Minuit, fondées clandestinement à l'automne 1941 par Vercors (pseudonyme de Jean Bruller) et Pierre de Lescure.
Le récit met en scène une famille française qui oppose son silence à l'officier allemand qu'elle a été contrainte de loger, révélant ainsi "la vie sous-marine des sentiments cachés, des désirs et des pensées qui nient et qui luttent". Vercors invitait les França... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (95) Voir plus Ajouter une critique
4,1

sur 1197 notes
« Vercors » n'est autre que le nom de résistant et le pseudonyme de Jean Bruller, illustrateur. Il fonde en 1941, une maison d'édition clandestine avec Pierre de Lescure. Une petite maison d'édition qui deviendra grande : il s'agit rien moins que « Les Editions de Minuit »…
Les Editions de Minuit, qui publient en 1942, un premier texte de Jean Bruller/Vercors : « le silence de la mer ».

Nous sommes au bord de la mer en 1941, au début de l'occupation. Dans la maison d'un village comme il y en eut tant dans la France occupée vivent un vieil homme et sa nièce. La maison est réquisitionnée : un officier allemand, Werner von Ebrennac, occupera une chambre au grand dam des habitants du lieu.
Le vieil homme et sa nièce s'enferment alors dans un mutisme forcené, malgré les tentatives de l'officier ; un officier élégant tant dans la forme que dans le fond : il est cultivé, francophone et francophile…et plaide en faveur du retour de l'Allemagne à ses vraies valeurs ; celles de la culture...

Dans le « Chanteur du silence » , Julos Beaucarne évoque « le va-et-vient du silence dans le spectre duquel se cachent toutes les musiques »… il y a fort à penser qu'ici le silence du vieil homme et de sa nièce contient toutes les formes de réprobation et de résistance face à l'occupant. Au même titre que le blanc n'est autre qu'un mélange invisible de toutes les couleurs visibles, ce silence pourrait bien être, ici, le fruit du mélange inaudible de tous les cris de révolte …

Bref, un petit opuscule à lire et à relire quand on est convaincu que la culture partagée reste et restera le ciment de l'entente entre les peuples.
Quelques adjectifs ; un texte : court, très court, élégant, émouvant, poignant…
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Que faire pour montrer son hostilité envers quelqu'un, afficher son mépris, exprimer sa haine ?
Quelle attitude adopter ? Quels mots utiliser ?
Crier ? Hurler ? Vociférer ?
Insulter ? Invectiver ? Agonir d'injures ?
C'est bien tentant, cela peut paraître libérateur de se défouler ainsi sur une personne que l'on n'aime pas. Et pourtant...
Pourtant, ce n'est pas la meilleure solution. Ce n'est même pas une solution tout court.
Toutes ces gesticulations sont inappropriées. Car à travers elles on montre à l'autre qu'il ne nous est pas indifférent.
On lui donne une existence.
Alors, que faire ?
Se taire.
Opposer un silence total, obstiné, méprisant. Dévastateur.
Par son silence, montrer à l'autre qu'on ne le voit pas, qu'on ne l'entend pas : qu'il n'existe pas.
Par son silence, lui refuser une quelconque réalité. Le faire disparaître par la pensée.
L'autre a beau être présent physiquement, il est humainement absent.
Voilà ce qu'il faut faire.
Voilà ce que font un monsieur âgé et sa nièce, forcés d'héberger un officier allemand pendant la guerre.
À l'occupation subie de leur maison, ils opposent leur silence.
Ça a l'air simple finalement, mais ça ne l'est pas.
Cette guerre silencieuse serait facile à mener si l'ennemi était haïssable : on le déteste et on se tait, point final.
Mais l'officier est poli, cultivé, respectueux. En un mot : charmant.
Il aime la France et sa culture, il le dit et le prouve.
Peut-on séparer l'homme (l'être humain) de sa fonction (officier allemand, donc ennemi) ?
L'oncle et la nièce vont-ils tenir ? Vont-ils être tentés de parler ou réussiront-ils à conserver leur mutisme jusqu'au bout ?
Chut... silence ! Je ne vous dirai rien de plus !

Paru en 1942, le silence de la mer est la première production des Éditions de Minuit, maison fondée en pleine guerre par Jean Bruller (véritable nom de Vercors ) et Pierre de Lescure.
C'est un texte court mais puissant. Une lecture très forte.
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Dans ma précipitation à vouloir lire ce livre, je me suis trompée en le commandant et me suis retrouvée avec : "Le silence de la mer" suivi de "La marche à l'étoile", alors que mon choix initial ne portait que sur "Le silence de la mer". Naturellement, j'ai lu les deux mais ma note de 4.5/5 ne concerne que la première partie du livre ayant été moins sensibilisée par la seconde.

"Le silence de la mer" est le titre d'une nouvelle parmi les sept que contient le livre éponyme. Dans ces récits, il n'est pas question d'armement, d'engins, de stratégie, de batailles, de défaites ou de victoires. Dans ces récits, la guerre a des visages, les visages des petites gens qui souffrent et subissent. Des visages et des noms que la grande Histoire ne retiendra pas. Et des petites gens dans lesquels on se reconnaît, une douleur que l'on ressent, un désespoir que l'on éprouve.

Ces récits magnifiquement écrits montrent la réalité de la guerre dans toute son absurdité et son horreur. Abomination qu'aucune médaille, commémoration ou poignée de mains entre ennemis réconciliés n'amoindrira jamais ni ne pourra justifier.

Mention spéciale pour la nouvelle intitulée "Ce jour-là" qui m'a bouleversée au plus haut point.
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Que dire après une telle lecture, après la lecture d'un texte écrit par ce résistant ? Pas grand chose...
Cette lecture amène au silence, à la réflexion, à l'introspection. le silence est une résistance, une non-coopération. le monologue de l'Allemand est une réflexion, un cheminement personnel.
Parfois dans le silence de l'autre, on trouve certaines réponses.
Un texte sur la tolérance, sur le respect, sur l'amour, sur l'acceptation, sur l'abandon ; bref un texte sur des silences qui en disent long.
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Dans une demeure sur le bord de mer, un vieil homme et sa nièce doivent subir l'occupation allemande en la présence de Werner von Ebrennac. « Cela était naturellement nécessaire. J'eusse évité si cela était possible. Je pense que mon ordonnance fera tout pour votre tranquillité. » (p. 22) Devant l'intrus, l'homme et la jeune fille observent un silence farouche. Mais l'Allemand est un être poli, cultivé, amoureux de la France. Il comprend que ses hôtes ne peuvent résister à l'invasion qu'en se taisant. « Je suis heureux d'avoir trouvé ici un vieil homme digne. Et une demoiselle silencieuse. Il faudra vaincre ce silence. Il faudra vaincre le silence de la France. Cela me plaît. » (p. 32) Alors, l'officier parle chaque soir et déclare son amour pour le pays occupé, sans s'offusquer du silence qui pèse chaque jour un peu plus.

De son côté, le vieil homme ne veut pas offenser l'officier allemand, mais lui et sa nièce se doivent de rester fidèles à un idéal de liberté face à celui qui incarne l'ennemi. Et c'est d'autant plus difficile de poursuivre ce silence quand l'ennemi se révèle humain, humaniste et généreux. Finalement, les seuls mots qui seront prononcés seront dits trop tard pour tous.

Superbe récit sur l'amitié entre les peuples, au-delà des guerres et des idéologies délétères. Je me rappelle avoir vu un téléfilm adapté de cette histoire. Impossible de me souvenir des acteurs, mais j'avais aimé ce récit et je m'étais promis de le lire. C'est chose faite et c'est un plaisir infini. de cet auteur, je vous conseille aussi Les animaux dénaturés, ou comment le chainon manquant entre l'homme et le singe peut poser de grands problèmes.

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Citations et extraits (74) Voir plus Ajouter une citation
Il y a un très joli conte pour enfants, que j'ai lu, que vous avez lu, que tout le monde a lu. Je ne sais si le titre est le même dans les deux pays. Chez moi il s'appelle: Das Tier und die Schöne, la Belle et la Bête. Pauvre Belle ! La Bête la tient à merci, impuissante et prisonnière, elle lui impose à toute heure du jour son implacable et pesante présence... La Belle est fière, digne, elle s'est faite dure... Mais la Bête vaut mieux qu'elle ne semble. Oh! elle n'est pas très dégrossie ! Elle est maladroite, brutale, elle paraît bien rustre auprès de la Belle si fine !... Mais elle a du coeur, oui, elle a une âme qui aspire à s'élever. Si la Belle voulait !... La Belle met longtemps à vouloir. Pourtant, peu à peu, elle découvre au fond des yeux du geôlier haï une lueur, un reflet où peuvent se lire la prière et l'amour. Elle sent moins la patte pesante, moins les chaînes de sa prison... Elle cesse de haïr, cette constance la touche, elle tend la main... Aussitôt la Bête se transforme, le sortilège qui la maintenait dans ce pelage barbare est dissipé : c'est maintenant un chevalier très beau et très pur, délicat et cultivé, que chaque baiser de la Belle pare de qualités toujours plus rayonnantes... Leur union détermine un bonheur sublime. Leurs enfants, qui additionnent et mêlent les dons de leurs parents, sont les plus beaux que la terre ait portés...
N'aimiez-vous pas ce conte ? Moi je l'aimai toujours. Je le relisais sans cesse. Il me faisait pleurer. J'aimais surtout la Bête, parce que je comprenais sa peine. Encore aujourd'hui, je suis ému quand j'en parle.
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Il était devant les rayons de la bibliothèque. Ses doigts suivaient les reliures d'une caresse légère.
-... Balzac, Barrès, Baudelaire, Beaumarchais, Boileau, Buffon... Chateaubriand, Corneille, Descartes, Fénelon, Flaubert... La Fontaine, France, Gautier, Hugo... Quel appel ! dit-il avec un rire léger et hochant la tête. Et je n'en suis qu'à la lettre H ! Ni Molière, ni Rabelais, ni Racine, ni Pascal, ni Stendhal, ni Voltaire, ni Montaigne, ni tous les autres !...
Il continuait de glisser lentement le long des livres, et de temps en temps il laissait échapper un imperceptible "Ha !", quand, je suppose, il lisait un nom auquel il ne pensait pas.
- Les Anglais, reprit-il, on pense aussitôt : Shakespeare. Les Italiens : Dante. L'Espagne : Cervantès. Et nous, tout de suite: Goethe. Après, il faut chercher. Mais si on dit: et la France ? Alors, qui surgit à l'instant ? Molière ? Racine ? Hugo? Voltaire ? Et quel autre ? Ils se pressent, ils sont comme une foule à l'entrée d'un théâtre, on ne sait pas qui faire entrer d'abord.
Il se retourna et dit gravement :
-Mais pour la musique, alors c'est chez nous: Bach, Haendel, Beethoven, Wagner, Mozart... Quel nom vient le premier ?
"Et nous sommes en guerre ! " dit-il lentement en remuant la tête.
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Mais moi qui étais assis dans mon fauteuil profond et avais le visage à hauteur de sa main gauche, je voyais cette main, mes yeux furent saisis par cette main et y demeurèrent comme enchaînés, à cause du spectacle pathétique qu'elle me donnait et qui démentait pathétiquement toute l'attitude de l'homme...
J'appris ce jour-là qu'une main peut, pour qui sait l'observer, refléter les émotions aussi bien qu'un visage, − aussi bien et mieux qu'un visage car elle échappe davantage au contrôle de la volonté. Et les doigts de cette main-là se tendaient et se pliaient, se pressaient et s'accrochaient, se livraient à la plus intense mimique tandis que le visage et tout le corps demeuraient immobiles et compassés.
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Et surtout Nuremberg. Pour un Allemand, c'est la ville qui dilate son cœur, parce qu'il retrouve là les fantômes chers à son cœur, le souvenir dans chaque pierre de ceux qui firent la noblesse de la vieille Allemagne. Je crois que les Français doivent éprouver la même chose, devant la cathédrale de Chartres. Ils doivent aussi sentir tout contre eux la présence des ancêtres, − la grâce de leur âme, la grandeur de leur foi, et leur gentillesse. Le destin m'a conduit sur Chartres. Oh ! vraiment quand elle apparaît, par-dessus les blés mûrs, toute bleue de lointain et transparente, immatérielle, c'est une grande émotion ! J'imaginais les sentiments de ceux qui venaient jadis à elle, à pied, à cheval ou sur des chariots...
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Il était parti quand, le lendemain, je descendis prendre ma tasse de lait matinale. Ma nièce avait préparé le déjeuner comme chaque jour. Elle me servit en silence. Nous bûmes en silence. Dehors luisait au travers de la brume un pâle soleil. Il me sembla qu’il faisait très froid.
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VERCORS / LE SILENCE DE LA MER / LA P'TITE LIBRAIRIE
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