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EAN : 9782847344240
295 pages
Tallandier (22/03/2007)
3.98/5   20 notes
Résumé :

"L'essentiel n'est pas de vivre longtemps, mais de vivre pleinement. " De l'Andalousie à Rome, Lucius Annaeus Seneca a mené l'existence accomplie d'un intellectuel au pouvoir.

Il fut philosophe et banquier, sénateur et homme de lettres, sage et conseiller du prince. C'était là chose non seulement possible mais - il le pensait - très agréable. Sénèque a vécu la succession des prospérités et des disgrâces en maître du stoïcisme, philosophie... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (2) Ajouter une critique
Biographie, analyse des oeuvres de Sénèque et du stoicisme en général.
Les écrits de Sénèque sont contextualisés par rapport à la situation politique (précepteur de Néron dans lequel il met beaucoup d'espoir puis éloignement à défaut d'opposition frontale qu'il ne peut pratiquer). Sénèque écrivait des pensées inscrites dans son époque et parfois, nous comprenons autre chose.
Contextualiser, c'est bien, comparer à des situations contemporaines, ce que fait Paul Veyne est parfois hasardeux et donne parfois une impression de confusion, de hors sujet à son essai. Voilà pour le point négatif.
Sénèque était immensément riche (mais ne pouvait pas ne pas l'être dans le contexte de l'époque), un écrivain, philosophe, mondain, homme politique en vue. Son style frappe par la concision, la clarté.
La philosophie était perçue comme une discipline de vie autant qu'un système d'idées si bien qu'un philosophe n'était pas obligé d'écrire.
Le stoicisme est né 300 ans avant Sénèque. Il consiste à atteindre le bonheur c'est-à-dire selon la vision des Anciens la sagesse, la sécurité intérieure. Comment l'atteindre ? En vivant dans la morale commune, en harmonie avec la Nature ( providentielle et comprenant le monde extérieur et la nature humaine), en s'imposant une ascèse, une discipline de vie quotidienne, en faisant appel à la raison pour effacer les affects parasites. Vertu et bonheur sont corrélés.
La guérison mentale est le but de la vie, le temps est précieux, il ne faut pas le dépenser inutilement mais le consacrer à la philosophie, conduite de vie.
Les "indifférents" sont des avantages naturels (santé, argent) préférables mais neutres. Bref les Stoïciens n'étaient pas des rigolos. Nous ne sommes pas purs esprits.
L'honnêteté et le bonheur sont inséparables. IL faut sans cesse progresser vers une transformation du Moi.

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Citations et extraits (7) Voir plus Ajouter une citation
LETTRE LXXV.
Écrire simplement et comme on pense. Affections et maladies de l’âme. Trois classes d’aspirants à la sagesse.

Tu te plains du style trop peu apprêté de mes lettres. Mais qui donc parle avec apprêt, s’il ne veut être un insipide parleur ? Comme dans ma conversation avec toi, soit assis, soit en promenade, il n’y aurait ni travail ni gêne, ainsi je veux que soient mes lettres69 : qu’elles n’aient rien de recherché, de factice. S’il était possible, je voudrais te montrer à nu ce que j’ai dans l’âme plutôt que te le dire. La discussion la plus vive ne me ferait ni frapper du pied, ni agiter les bras, ni renforcer ma voix ; je laisserais cela aux orateurs et me contenterais de te transmettre mes pensées sans vain ornement comme sans platitude. Il n’est qu’un point dont je sois jaloux de te convaincre, c’est que je pense toutes les choses que je dis, et que non-seulement je les pense, mais que je suis passionné pour elles. Autre est le baiser qu’on donne à une maîtresse, autre celui qu’on donne à un fils ; et toutefois ce baiser si chaste et si pur manifeste assez la tendresse d’un père. Aux dieux ne plaise que je condamne à la sécheresse et à la maigreur nos entretiens sur ces grands sujets ; la philosophie ne divorce point avec l’imagination ; mais il ne faut pas dépenser trop de travail en paroles. Il faut avoir pour but essentiel de parler comme on sent, de sentir comme on parle, de faire concorder son langage avec sa conduite. Il a rempli ses engagements celui qui, à le voir et à l’entendre, est toujours le même. Avant de juger quel il est, ce qu’il vaut, voyons s’il est un.

Nos discours doivent tendre non à plaire, mais à être utiles. Si pourtant l’éloquence nous vient sans qu’on la cherche trop, si elle s’offre d’elle-même, ou coûte peu, qu’on l’admette, et qu’elle serve d’accompagnement à nos belles doctrines, de telle sorte qu’elle fasse ressortir les choses plutôt qu’elle-même. Il est des arts qui parlent exclusivement à l’esprit : celui-ci est l’affaire de l’âme. Le malade ne cherche pas un médecin qui parle bien, mais qui guérisse : si le hasard veut néanmoins que ce même homme qui sait guérir, discoure avec grâce sur le traitement à suivre, le malade en sera bien aise, mais ne s’estimera pas plus heureux pour lui avoir trouvé ce second talent, aussi peu nécessaire à un médecin qu’une belle figure à un pilote. Pourquoi me vouloir chatouiller et charmer l’oreille ? Il s’agit d’autre chose. C’est le fer, c’est le feu, c’est la diète qu’il me faut. Voilà pourquoi tu es mandé : tu as à soigner un mal invétéré, grave, épidémique. Tu n’as pas moins à faire qu’un Hippocrate en temps de peste. Et c’est à peser des mots que tu t’amuses ! Trop heureux si tu pouvais suffire aux choses70 ! Quand amasseras-tu les trésors de la science ? Quand te l’appliqueras-tu assez intimement pour qu’elle ne puisse t’échapper ? Quand la mettras-tu à l’épreuve ? Il n’en est pas de celle-ci comme des autres qu’il suffit de confier à sa mémoire : c’est à l’œuvre qu’il faut l’essayer. Ici l’homme heureux n’est pas l’homme qui sait, mais qui pratique.

« Mais quoi ? N’y a-t-il pas des degrés intermédiaires ? Hors de la sagesse, n’y a-t-il plus que précipices ? » Non pas, à mon avis : les hommes qui sont en progrès sont encore au nombre des insensés, mais séparés d’eux par un vaste intervalle ; et parmi ces premiers même on trouve de grandes différences. Ils se divisent, selon quelques-uns, en trois classes. La première comprend ceux qui n’ont pas encore la sagesse, mais qui déjà ont pris pied dans son voisinage. Toutefois, si près qu’on soit du but, on est en deçà. « Quels sont ces hommes, demandes-tu ? » Ceux qui ont déjà dépouillé et passions et vices, qui ont appris à quoi ils doivent s’attacher, mais dont la confiance n’est pas allée jusqu’à l’épreuve et qui n’ont point usé de leur trésor. Néanmoins la situation qu’ils ont fui, ils n’y peuvent plus retomber ; ils en sont à ce point où l’on ne glisse plus en arrière ; mais ce n’est pas encore à leurs yeux chose bien claire, et, comme je me rappelle l’avoir écrit dans une de mes lettres[1], ils ne savent pas qu’ils savent. Ils jouissent déjà d’un état meilleur, ils n’y ont pas foi encore. Ces hommes en progrès sont désignés par quelques-uns comme ayant échappé aux maladies de l’âme, mais non tout à fait à ses affections, et comme foulant encore une pente glissante, vu que personne n’est en dehors des tentations de la méchanceté, s’il ne s’est entièrement débarrassé d’elle, et que nul ne s’en est débarrassé s’il ne s’est, au lieu d’elle, revêtu de la sagesse.

Quelle différence y a-t-il entre les maladies de l’âme et ses affections ? Je l’ai souvent énoncé : je veux te le rappeler encore. Ces maladies sont les vices invétérés, endurcis, comme la cupidité, l’ambition excessive : une fois maîtres de l’âme, ils la tiennent enserrée et deviennent ses éternels vautours. Pour les définir brièvement, ces maladies sont les faux préjugés où l’on s’obstine, comme de croire vivement désirable ce qui ne l’est que faiblement ; ou, si tu l’aimes mieux, c’est convoiter trop fort des choses faiblement désirables ou qui ne le sont pas du tout ; ou c’est priser trop haut ce qui a peu ou point de prix. Les affections sont des mouvements de l’âme répréhensibles, soudains et impétueux, qui, répétés et négligés, font les maladies ; de même qu’un catarrhe simple, qui n’a point passé à l’état chronique, produit la toux ; et la toux continue et invétérée, la phtisie. Ainsi les âmes qui ont fait le plus de progrès sont hors des maladies, mais ressentent encore des affections, si près qu’elles soient d’être parfaites.

À la deuxième classe appartiennent ceux qui se sont délivrés et des plus dangereuses maladies et même des affections, mais qui à cet égard ne possèdent point la pleine sécurité : ils peuvent éprouver des rechutes. La troisième classe a laissé derrière elle des vices graves et nombreux, mais non pas tous les vices ; libre de l’avarice, elle reste sujette à la colère, l’aiguillon de la chair ne la tourmente plus, mais l’ambition ne l’a pas quittée ; elle ne convoite plus, mais elle craint encore ; ces craintes mêmes lui laissent assez de fermeté pour certaines choses, bien qu’elle faiblisse pour d’autres ; elle méprise la mort, et la douleur l’épouvante.

Une réflexion sur cette dernière classe : estimons-nous bien partagés, si nous y sommes admis. Il faut une riche et heureuse nature, un grand et assidu dévouement à l’étude pour occuper le second rang : mais la troisième nuance n’est pas non plus à dédaigner. Songe et regarde combien d’iniquités t’environnent ; vois s’il est un seul attentat sans exemple ; quels progrès fait chaque jour le génie du mal ; que de méfaits politiques et privés ; tu sentiras que pour nous c’est assez faire que de ne pas être parmi les plus corrompus. « Mais j’espère, moi, pouvoir aussi m’élever plus haut. » Je le souhaiterais pour nous plutôt que je ne le promettrais. Le mal en nous a pris l’avance ; nous marchons à la vertu, empêtrés de mille vices ; j’ai honte de le dire : nous cultivons l’honnête à nos moments perdus. Mais quel magnifique salaire nous est réservé, si nous rompons nos empêchements, nos mauvaises tendances si tenaces ! Ni cupidité, ni crainte ne nous feront plus reculer ; inébranlables à toutes les alarmes, incorruptibles aux voluptés, nous n’aurons point horreur de la mort, non plus que des dieux ; nous saurons que ni la mort n’est un mal, ni les dieux ne sont méchants. Il y a autant de faiblesse dans l’être qui fait souffrir que dans celui qui71 souffre : aux êtres bons par excellence le pouvoir de nuire manque. Quel trésor nous attend si, quelque jour, de cette fange nous nous élevons à la hauteur sublime du sage, à cette tranquillité d’âme et, toute erreur bannie, à l’absolue indépendance ! « Cette indépendance, quelle est-elle ? » Ne craindre ni les hommes ni les dieux, ne vouloir rien de honteux, rien d’immodéré, exercer sans limites la royauté de soi-même. Inestimable bien que celui de s’appartenir !
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LETTRE I.
Sur l’emploi du temps.

Suis ton plan, cher Lucilius ; reprends possession de toi-même : le temps qui jusqu’ici t’était ravi, ou dérobé, ou que tu laissais perdre, recueille et ménage-le. Persuade-toi que la chose a lieu comme je te l’écris : il est des heures qu’on nous enlève par force, d’autres par surprise, d’autres coulent de nos mains. Or la plus honteuse perte est celle qui vient de négligence ; et, si tu y prends garde, la plus grande part de la vie se passe à mal faire, une grande à ne rien faire, le tout à faire autre chose que ce qu’on devrait. Montre-moi un homme qui mette au temps le moindre prix, qui sache ce que vaut un jour, qui comprenne que chaque jour il meurt en détail ! Car c’est notre erreur de ne voir la mort que devant nous : en grande partie déjà on l’a laissée derrière ; tout l’espace franchi est à elle.

Persiste donc, ami, à faire ce que tu me mandes : sois complètement maître de toutes tes heures. Tu dépendras moins de demain, si tu t’assures bien d’aujourd’hui. Tandis qu’on l’ajourne, la vie passe. Cher Lucilius, tout le reste est d’emprunt, le temps seul est notre bien. C’est la seule chose, fugitive et glissante, dont la nature nous livre la propriété ; et nous en dépossède qui veut. Mais telle est la folie humaine : le don le plus mince et le plus futile, dont la perte au moins se répare, on veut bien se croire obligé pour l’avoir obtenu ; et nul ne se juge redevable du temps qu’on lui donne, de ce seul trésor que la meilleure volonté ne peut rendre.

Tu demanderas peut-être comment je fais, moi qui t’adresse ces beaux préceptes. Je l’avouerai franchement : je fais comme un homme de grand luxe, mais qui a de l’ordre ; je tiens note de ma dépense. Je ne puis me flatter de ne rien perdre ; mais ce que je perds, et le pourquoi et le comment, je puis le dire, je puis rendre compte de ma gêne. Puis il m’arrive comme à la plupart des gens ruinés sans que ce soit leur faute : chacun les excuse, personne ne les aide. Mais quoi ! je n’estime point pauvre l’homme qui, si peu qu’il lui demeure, est content. Pourtant j’aime mieux te voir veiller sur ton bien, et le moment est bon pour commencer. Comme l’ont en effet jugé nos pères : ménager le fond du vase, c’est s’y prendre tard. Car la partie qui reste la dernière est non-seulement la moindre, mais la pire.
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Qu'était-ce qu'un philosophe ? Un homme qui vivait philosophiquement dans sa vie intérieure et son comportement, même s'il n'écrivait rien et n'enseignait pas.
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Les maladies de l'âme ont cette particularité que les patients ne se sentent pas malades ; ces déments se trouvent heureux de leur état. Si bien que découvrir qu'on est malade est le commencement de la guérison.
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Mais l'information, l'espace et le temps ne sont pas des choses ; comme l'air, cela appartient ou devrait appartenir à tout le monde : on ne fait pas payer un renseignement au passant qui demande son chemin. Donc l'intermédiaire, le revendeur et le prêteur abusent de leur pouvoir, sont des maîtres chanteurs ; seul un vice, l'avarice, peut les pousser à pareil abus.
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