« IL EST MOINS CINQ »
Nouvelles étonnantes du cinéma
On apprend aux dernières nouvelles que Vadim (ou
alors Distel, ou quelque autre) aurait divorcé d’avec
Minou Sagan, ou peut-être Françoise Drouet, ou peut-
être même n’aurait pas divorcé, ou même qu’il se serait
marié ; avec Sarah Bernhardt ou Marilyn Monroe. Ou
même qu’il aurait dit quelque chose à un autre. Ou alors
qu’il part en vacances. Enfin, qu’il aurait fait quelque
chose de célèbre.
La France respire.
Et c’est ainsi qu’Allah est grand.
P.54
VIE POÉTIQUE DES HORNBOSTELS
Extrait 3
Mais d’autres disent aussi qu’on appelle hornbostels
de grands oiseaux des hautes altitudes que l’homme n’a
jamais pu observer parce qu’ils vivent derrière les nuages.
Ce sont des voiliers extraordinaires, comme l’albatros et
le martinet. Quand le ciel est bleu, ils tournent lentement
à de vertigineuses altitudes au-dessus de l’iceberg et des
déserts glacés. Ils ont, pour saluer le soleil, un cri aigu qui
rappelle le buccin. Mais à peine aperçoivent-ils l’homme
(qu’ils voient plus vite que l’homme ne les remarque, et
c’est pourquoi l’homme ne les voit et ne pourra les voir
jamais), ils poussent le « hoquet de Pygmée » et dispa-
raissent d’un grand coup d’aile.
Une fois l’an, ils rient dans leur barbe.
Et c’est ainsi qu’Allah est grand.
p.122-123
LES KANGOUROUS SONT ARRIVÉS
Extrait 2
Il y fraternisait avec l’ornithorynque, ce canard en forme
de rat, paisible habitant des eaux calmes, qui a le carac-
tère extrêmement doux, une queue de lapin, l’esprit
rêveur et l’os qui correspond à la poche marsupiale.
(Les Anglais, mis en sa présence, refusèrent le droit
d’exister à ce mulot qui pond des œufs de poule, et
que les savants appellent l’ornithorynque paradoxal.
Ils affirmèrent qu’il n’était pas possible et en conclu-
rent qu’il n’était pas.
p.131-132
VIE POÉTIQUE DES HORNBOSTELS
Extrait 2
Frédérique assurait que par son caractère il se rappro-
che beaucoup de l’homme du Wurtemberg, et par ses
habitudes du médecin du Yorkshire et du père de famille
chinois. Dans sa jeunesse, l’espièglerie domine. Il n’est
rien de plus gracieux que les petits hornbostels lorsqu’ils
s’ébrouent aux pieds de leur mère et se roulent dans
l’herbe, comme les enfants des Auvergnats, le poil
lustré, l’œil noir, le geste lourd et vif. En vieillissant ils
prennent de l’âge. Leurs mœurs sont douces, chastes et
pacifiques. Le soir ils se groupent par familles, au bord
de lacs, devant leurs terriers respectifs, et regardent les
étoiles se lever au fond des eaux.
Telles sont les mœurs du hornbostel. Si belles qu’on
m’a demandé s’il est imaginaire. On ne pourra décider
de la chose que le jour où on en trouvera un. Qu’on me
prouve qu’il n’existe pas et nous reparlerons de l’affaire.
Je ne vois pas bien la portée de la question.
p.122
LES KANGOUROUS SONT ARRIVÉS
Extrait 3
Le kangourou est inexplicable. On dit que l’homme
est un loup pour l’homme. L’homme est pour l’homme
un kangourou. Telle est la vérité de la chose.
Et c’est ainsi qu’Allah est grand.
p.134
Emmanuelle Bayamack-Tam et son invité, Frédéric Boyer.
À l'occasion d'une grande journée dominicale qui célèbre à La Criée les 40 ans des éditions P.O.L, Oh les beaux jours ! a convié l'un des grands noms de ce catalogue, Emmanuelle Bayamack-Tam, qui publie aussi des romans noirs sous le nom de Rebecca Lighieri, et dont l'oeuvre, dense et d'une folle liberté, échappe à toute tentative de classification.
Récemment couronnée par le prix Médicis pour La Treizième Heure, l'écrivaine reviendra sur les thèmes récurrents de ses romans : la métamorphose, qui parcourt son oeuvre, mais aussi le rapport au corps – notamment lorsqu'il se transforme à l'adolescence –, la famille et le nécessaire requestionnement du rôle qu'on lui alloue dans nos sociétés, la religion et l'appartenance à une communauté, la question du genre et des identités multiples…
L'entretien explorera également le style Bayamack-Tam, sa capacité à mêler les voix en explorant les genres littéraires (poésie, récit, chanson…) jusqu'à les renouveler, son art singulier et assumé de laisser infuser dans ses romans toutes les lectures qui l'ont «enfantée» en littérature. La conversation portera également sur une pièce de théâtre en cours d'écriture, dont nous sommes allés filmer les répétitions, et sur son goût pour le cinéma, en particulier pour les films de Pedro Almodóvar. Il sera aussi question du roman graphique qu'elle a écrit avec Jean-Marc Pontier, et bien sûr de Marseille, ville de ses origines présente dans nombre de ses romans, avec une interview exclusive d'une patronne de bar bien connue des Marseillais…
À ses côtés, pour évoquer la richesse de son travail et sa double identité littéraire, son éditeur, Frédéric Boyer, apportera un éclairage sur cette oeuvre sans pareille.
À lire (bibliographie sélective)
— Emmanuelle Bayamack-Tam, « La Treizième Heure », P.O.L., 2022 (prix Médicis 2022).
— Emmanuelle Bayamack-Tam, « Arcadie », P.O.L, 2018 (prix du Livre Inter 2019).
— Emmanuelle Bayamack-Tam, « Je viens », P.O.L, 2015.
— Emmanuelle Bayamack-Tam, « Si tout n'a pas péri avec mon innocence », P.O.L, 2013 (Prix Alexandre-Vialatte).
— Emmanuelle Bayamack-Tam, « Une fille du feu », P.O.L, 2008.
— Rebecca Lighieri, « Il est des hommes qui se perdront toujours », P.O.L, 2020.
— Rebecca Lighieri, « Les Garçons de l'été », P.O.L, 2017.
— Rebecca Lighieri, « Husbands », P.O.L, 2013.
— Rebecca Lihieri et Jean-Marc Pontier, « Que dire ? », Les Enfants Rouges, 2019.
Un grand entretien animé par Chloë Cambreling et enregistré en public le 28 mai 2023 au théâtre de la Criée, à Marseille, lors de la 7e édition du festival Oh les beaux jours !
Podcasts & replay sur http://ohlesbeauxjours.fr
#OhLesBeauxJours #OLBJ2023
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