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EAN : 9782356410702
Audiolib (07/10/2009)
  Existe en édition audio
3.88/5   3241 notes
Résumé :
Voilà un coin de campagne où l'on a de drôles de façons... La foire aux vieux, par exemple. Curieuse institution ! On sait bien aussi que tous les enfants peuvent voler comme des oiseaux dès qu'ils étendent leurs bras - mais est-ce une raison suffisante pour les enfermer derrière des murs de plus en plus hauts, de plus en plus clos ? Le psychiatre Jacquemort se le demande - puis ne se le demande plus, car il a trop à faire avec la honte des autres, qui s'écoule dans... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (101) Voir plus Ajouter une critique
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sur 3241 notes
« L'arrache coeur », le dernier roman de Boris Vian dont le flop en librairie provoqua son abandon de la carrière d'écrivain n'en est pas moins mon préféré. Une auto analyse ? Peut-être…une tentative de vengeance vis-à-vis d'une mère castratrice ? Peut-être…
Reste un village bien étrange et un psychanalyste, Jacquemort, arrivé là comme par hasard. Il débarque opportunément chez Angel et Clémentine qu'il aidera à accoucher de trois garçons : Noël, Joël et Citroën. Lorsque l'enfant paraît… vous connaissez la suite ; alors trois, enfantés dans la douleur… Clémentine développera un syndrome de rejet à l'encontre d'Angel.
Un village bien étrange disais-je : il y a bien le curé, comme dans tous les villages, mais on met les enfants en cage pour ne pas qu'ils volent après consommation de limaces bleues, on leur met des fers aux pieds, on organise une foire aux vieux… et puis Jacquemard, arrivé « vide d'émotions » au village, entend bien se remplir de celles des autres…
Il y a également le ruisseau… rouge ; le ruisseau dans lequel la Gloïre repêche le fruit de la honte des villageois qui le payent pour ça…

« L'arrache-coeur », un grand roman dans la lignée de « L'écume des jours » ; mais tellement plus noir, tout en restant poétique, onirique… Bref, du grand Boris Vian.



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Jacquemort est un psychiatre né de la veille. Vide, il cherche des gens à analyser, pour se remplir de leurs histoires. Il arrive dans un petit village dans lequel Clémentine est sur le point d'accoucher. En compagnie de Cul Blanc, la bonne, il la délivre de ses "trumeaux", des jumeaux, Noël et Joël, et de Citroën, à part. Il délivre également leur père, Angel, enfermé dans le bureau depuis deux mois par Clémentine qui, souffrant trop, ne voulait plus le voir.
Sur invitation d'Angel et Clémentine, Jacquemort reste un peu dans ce village si spécial, dans lequel se déroule la foire aux vieux, où les apprentis sont maltraités jusqu'à en mourir, et où le prêtre se bat sur un ring avec le Diable, son Sacristain. Et puis il y a la Gloïre, qui parcourt le ruisseau rouge et visqueux, repêchant entre ses dents toute la honte du village.

L'arrache-coeur ! Quel ouvrage fantastique nous livre Boris Vian avec ce livre, l'un de mes préférés de cet auteur ! Tout se déroule dans un village dans lequel la honte est annihilée, dévorée, digérée par la Gloïre. le temps s'y étire comme nulle part ailleurs ("octembre, déçars"), mâcher des limaces donne des pouvoirs magiques (les bleues permettent de voler), on montre l'amour que l'on porte à ses enfant en leur réservant le meilleur et en se réservant le pire, en anticipant toutes les catastrophes improbables, on vend ses vieux, on tue les enfants, et on casse la figure à tous ceux qui prononcent le terme de honte. Vian explore l'amour maternel de Clémentine, paroxystique, délirant et paranoïaque, les liens enfants-parents, le désir comme idéal de vie. Peut-on être femme et mère ? Jusqu'où aller pour protéger nos chères têtes blondes ? Vian en profite également pour nous livrer une critique acerbe de la psychanalyse, tout comme dans L'herbe rouge, si mes souvenirs sont exacts ; il n'y a qu'à voir le sens que donne Cul Blanc à ce terme ! Il critique de façon assez violente également la religion.
L'arrache-coeur allie un imaginaire extraordinaire à une écriture à la limite du surréalisme. Ou inversement. Un morceau de choix dans l'oeuvre de Bison Ravi !
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J'avais beaucoup aimé l'Ecume des Jours, puis l'Automne à Pékin, mais j'ai adoré l'Arrache-Coeur, que j'ai lu et relu pendant des années.
Dans ce roman flotte une atmosphère cauchemardesque, avec ses pauvres créatures, sa logique absurde et son merveilleux:
Un psychanalyste "vide", un homme - La Gloïre - qui doit digérer les hontes du village entier, des enfants qui volent dans le ciel, des limaces bleues magiques. Mais, surtout, cette mère tout d'abord "indigne " qui vit mal sa grossesse, s'occupe à peine de ses bébés -des trumeaux - avant de devenir une mère étouffante, obsédée par la santé de ses enfants pour qui elle prémâche de la viande crue avariée pour se racheter. Cette image m'avait fortement marquée adolescente mais vu de mon regard de maman, elle me touche différemment, et je me dis une fois encore que Boris Vian avait le génie d'évoquer des sentiments ou bien des comportements - la dépression post-natale ici - dans une écriture symbolique, onirique extrêmement émouvante et vraie.

Bien sûr, je ne parle pas de l'inventivité folle de Vian du point de vue lexical, ce qui est, en fait, la toute première chose qui m'a fait partir quand j'ai commencé ce livre! A quand, un nouveau Boris Vian dans notre littérature actuelle?
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L'arrache-coeur est le dernier roman de Vian, le plus sombre, le plus noir, celui où il jette tout son dégoût et sa hargne. Il règle ses somptes avec sa mère qui l'a trop couvé et montre jusqu'où l'amour maternel peut mener. le monde qui environne ce petit havre de paix qui se révelera aussi celui de l'horreur, ce monde est triste, glauque, avec la foire aux vieux et les apprentis qui sont battus. C'est tout de même un univers fascinant et révélateur de ce que vivait Vian qui écrivait aussi pour lui et pour s'analyser. Ce n'est pas le roman le plus facile à lire, il ne faut pas être dépressif (ou parent!), mais c''est un de mes préféré car il est unique, il crée une véritable histoire et il est bien écrit. Vian avait un projet de roman vers sa mort, celui-ci fut pourtant le dernier, qui lui fera tourner le dos à sa carrière de romancier.
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Remonter le temps ... Retrouver mes années printemps et ... VIAN !
Flash back : yeux écarquillés et bouche amusée, je virevolte en Absurdie, le coeur tambour battant.

Face à face troublant avec tout un tas de (re) : (re)lecture, (re)découverte, (re)trouvaille ... (re)coup de coeur ?!
Allez ! J'entrouvre la porte. L'accueil est chaleureux : Raymond Queneau, amical et loyal dans son avant-propos.
Ça y est ! J'entre de nouveau dans l'antre :
« 𝐋𝐞 𝐬𝐞𝐧𝐭𝐢𝐞𝐫 𝐥𝐨𝐧𝐠𝐞𝐚𝐢𝐭 𝐥𝐚 𝐟𝐚𝐥𝐚𝐢𝐬𝐞. 𝐈𝐥 𝐞𝐭𝐚𝐢𝐭 𝐛𝐨𝐫𝐝𝐞 𝐝𝐞 𝐜𝐚𝐥𝐚𝐦𝐢𝐧𝐞𝐬 𝐞𝐧 𝐟𝐥𝐞𝐮𝐫𝐬 𝐞𝐭 𝐝𝐞 𝐛𝐫𝐨𝐮𝐢𝐥𝐥𝐨𝐮𝐬𝐞𝐬 𝐮𝐧 𝐩𝐞𝐮 𝐩𝐚𝐬𝐬𝐞𝐞𝐬 𝐝𝐨𝐧𝐭 𝐥𝐞𝐬 𝐩𝐞𝐭𝐚𝐥𝐞𝐬 𝐧𝐨𝐢𝐫𝐜𝐢𝐞𝐬 𝐣𝐨𝐧𝐜𝐡𝐚𝐢𝐞𝐧𝐭 𝐥𝐞 𝐬𝐨𝐥. »
Je me délecte déjà des parfums de ces fleurs vianesques !

Rassurée au bras de Jacquemort : (ré)enchantée mon vieil ami !
Ici, nul besoin de distanciation sociale, pas de méchant virus ... mais l'atmosphère est pesante et les moeurs étranges : foire aux vieux, jeunes apprentis plus que maltraités ... et ce, sans aucun scrupule : la Gloïre dans sa barque macabre récupère toute la honte des villageois, les soulageant du fardeau.
Chemin faisant, nous arrivons chez Angel et Clémentine, à temps. Jacquemort le psychiatre dans la peau de l'obstétricien , arrivent alors trois jolis « salopiauds » : des « trumeaux » !
Dans cet univers obscur, ils sont lumières, mais sont-ils conscients de la menace, de cette mère ô combien paranoïaque ?! J'aurais tant aimé lire cette suite qui n'a jamais vu le jour ...

Je pourrais vous parler de ce roman des heures durant. Chaque phrase est un régal, il se savoure lentement et surtout l'esprit libre pour laisser place à la richesse de la langue, à cette imagination sans borne. L'écriture est Poésie. L'artiste en est le génie.
Enfant chéri du mouvement Surréaliste, Vian excelle encore dans son dernier roman.

Merci mon cher Boris Vian, mes émotions sont restées intactes !
Et je vous imagine, là-haut, volant gaiement entourées de vos p'tites « maliettes » ...
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Citations et extraits (139) Voir plus Ajouter une citation
A quoi bon soulever des montagnes quand il est si simple de passer par dessus?

C'est drôle comme les gens qui se croient instruits éprouvent le besoin de faire chier le monde.

C'est les jeunes qui se souviennent. Les vieux, ils oublient tout.

Ce qui m'intéresse, ce n'est pas le bonheur de tous les hommes c'est celui de chacun.

Dire des idioties, de nos jours où tout le monde réfléchit profondément, c'est le seul moyen de prouver qu'on a une pensée libre et indépendante.

Du temps que les femmes ne votaient pas, on faisait la guerre pour elles. Maintenant qu'elles votent, on la fait pour le pétrole. Est-ce un progrès?

Il est évident que le poète écritSous le coup de l'inspiration
Mais il y a des gens à qui les coups ne font rien.

Il vaut mieux être déçu que d'espérer dans le vague.

Je me demande si je ne suis pas en train de jouer avec les mots. Et si les mots étaient faits pour ça?

Je ne veux pas gagner ma vie, je l'ai.

L'homme est une prison où l'âme reste libre.

Le génie est une longue patience, c'est une réflexion de génie pas doué.

Le malheur avec un type intelligent, c'est qu'il n'est jamais assez intelligent pour ne pas se dire qu'il est le plus intelligent.

Le propre du militaire est le sale du civil.

Le ridicule ne tue nulle part mais, aux U.S.A., il enrichit drôlement.

Le travail est l'opium du peuple... Je ne veux pas mourir drogué!

Les gens sans imagination ont besoin que les autres mènent une vie régulière.

Les oiseaux sont responsables de trois au moins des grandes malédictions qui pèsent sur l’homme. Ils lui ont donné le désir de grimper aux arbres, celui de voler, celui de chanter…

Les prophètes ont toujours tort d'avoir raison.

L’absurdité des batailles qui sont des batailles de mots mais qui tuent des hommes de chair.

N’importe quoi, sauf la vérité. Il n’y a que ça qui ne se vend pas.

On commence à avoir des malheurs quand on a cessé de ne penser qu'à soi.

Supprimez le conditionnel et
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"Je ne sais pas où sont Noël, Joël ni Citroën. En ce moment ils peuvent être tombés dans le puits, avoir mangé des fruits empoisonnés, avoir reçu une flèche dans l'oeil si un enfant joue sur le chemin avec une arbalète, attraper la tuberculose si un bacille de Koch se met en travers, perdre connaissance en respirant des fleurs trop parfumées, se faire piquer par un scorpion ramené par le grand-père d'un enfant du village, explorateur célèbre revenu récemment du pays des scorpions, tomber d'un arbre, courir trop vite et se casser une jambe, jouer avec l'eau et se noyer, descendre la falaise et trébucher et se rompre le cou, s'écorcher à un vieux fil de fer et contracter le tétanos ; ils vont aller au fond du jardin et retourner une pierre ; sous la pierre il y aura une petite larve jaune qui va éclore instantanément, qui va s'envoler vers le village, s'introduire dans l'étable d'un méchant taureau, le piquer près du nase ; le taureau sort de son étable, il démolit tout: le voilà qui part sur le chemin dans la direction de la maison, il est comme un fou et il laisse des touffes de poils noirs dans les virages en s'accrochant aux haies d'épine-vinette ; juste devant la maison, il se rue tête baissée contre une charette lourde tirée par un vieux cheval à moitié aveugle. Sous le choc la charrette se disloque et un fragment de métal est projeté en l'air à une hauteur prodigieuse : c'est peut-être une vis, un boulon, un écrou, un clou, une ferrure de brancard, un crocher de l'attelage, un rivet des roues, charronnées puis brisées, réparées au moyen d'éclisses de frêne taillées à la main et le morceau de fer monte en sifflant vers le ciel bleu. Il passe par -dessus la grille du jardin, mon Dieu, il retombe, il retombe et en tombant effleure l'aile d'une fourmi volante et l'arrache, et la fourmi mal dirigée, perdant sa stabilité, vague au-dessus des arbres comme une fourmi abîmée, s'abat soudain dans la direction de la pelouse, mon Dieu, il y a là Joël, Noël et Citroën, la fourmi tombe sur la joue de Citroën et, rencontrant peut-être des traces de confiture, le pique...
-Citroën ! Où es-tu ?
Clémentine s'est précipitée hors de sa chambre, et criait, hors d'elle tout en descendant l'escalier au grand galop. Dans le vestibule, elle se heurta à la bonne.
-Où sont-ils ? Où sont mes enfants ?
- Mais ils dorment, répondit l'autre, l'air étonné. C'est l'heure de leur sieste.
Eh bien oui, ce n'est pas arrivé cette fois : mais c'était parfaitement plausible."
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Le sentier longeait la falaise. Il était bordé de calamines en fleur et de brouillouses un peu passées dont les pétales noircis jonchaient le sol. Des insectes pointus avaient creusé le sol de mille petits trous; sous les pieds, c'était comme de l'éponge morte de froid.
Jacquemort avançait sans se presser et regardait les calamines dont le coeur rouge sombre battait au soleil. A chaque pulsation, un nuage de pollen s'élevait, puis retombait sur les feuilles agitées d'un lent tremblement. Distraites, des abeilles vaquaient.
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"Et maintenant, les mois sont devenus si drôle - à la campagne, le temps, plus ample, passe plus vite et sans repères."

"28 Août
29 Août
30 Août
31 Août
02 Septembre
02 Septembre
07 Mai
08 Mai
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09 Mars
24 Mars
30 Mars
16 Avril
20 Mai
13 Juillet
24 Juillet
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27 Juinet (P.128, Pauvert 1962)
27 Juinet (plus tard)
27 Juinet (encore après)
39 Juinet
39 Juinout
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55 Janvril (4 ans)
59 Janvril
73 Fevruin
98 Avroût
99 Avroût
107 Avroût
135 Avroût
135 Avroût
136 Avroût
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1er Juillembre
347 Juillembre
348 Juillembre
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07 Octembre
08 Octembre
11 Octembre
27 Octembre
28 Octembre
28 Octembre
67 Novrier
79 Decars
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12 Marillet
14 Marillet ("Et maintenant, les mois sont devenus si drôle - à la campagne, le temps, plus ample, passe plus vite et sans repères.")
15 Marillet
16 Marillet"
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Je suis vide. Je n’ai que gestes, réflexes, habitudes. Je veux me remplir. C’est pourquoi je psychanalyse les gens. Mais mon tonneau est un tonneau des Danaïdes. Je n’assimile pas. Je leur prends leurs pensées, leurs complexes, leurs hésitations, et rien ne me reste. Je n’assimile pas, ou j’assimile trop bien …, c’est la même chose. Bien sûr, je conserve des mots, des contenants, des étiquettes ; je connais les termes sous lesquels on range les passions, les émotions mais je ne les éprouve pas.
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Vidéo de Boris Vian
Lecture par Judith ChemlaDans le cadre du cycle de lectures « À voix haute », la comédienne Judith Chemla lit des textes de jeunesse de Boris Vian, dont la nouvelle Les Fourmis qui met en scène de manière grinçante le débarquement en Normandie. C'est l'occasion aussi de découvrir un Boris Vian moins connu à travers ses « ballades » et les lettres à sa mère.Lecture enregistrée le 4 mars 2024 à la BnF I Richelieu.
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