Un livre précieux : une anthologie de la littérature contemporaine, un peu à la façon de Lagarde et Michard, avec une courte introduction situant l'auteur et son oeuvre, précédant un extrait ne dépassant pas une page. Une seule tentative avait été réalisée jusqu'à maintenant par la revue : « Lire » ,en dehors de la parodie critique de Jourde et Naulleau. Il s'agit là d'un document sans parti pris que l'on doit à un auteur dont la légitimité tient à ses qualités de professeur de littérature et de critique.
Tempus fugit. Rien ne se démode plus vite que l'écrit, surtout dans une période où abondent les récits personnels qui n'ont pas grand-chose à voir avec la littérature. Les choix étaient donc difficiles, avec une date fixant le début du « contemporain » à 1980.Le filtre est très large (plus d'une centaine),laissant apparaitre de nombreux auteurs dont ce sera probablement la seule recension dans un ouvrage de critique littéraire ,et on regrette de ne pas voir apparaitre, par exemple
Christian Bobin et
Jérôme Garcin.On ne s'étonne pas de ne pas retrouver beaucoup de lauréats de prix littéraires,(ce qui pourrait donner lieu à une réflexion intéressante…),et d'y avoir cherché en vain ,quelques best sellers ,A mélie Nothomb, par exemple (oubli ou jugement perspicace sur la volatilité d'une certaine littérature prétentieuse ?) .Toute anthologie tient obligatoirement compte de la personnalité de l'auteur ,et on peut parler peut-être d' «autologie» comme on a parlé d'autofiction ,mais on ne serait en faire reproche à l'auteur dont le choix est très éclectique et incitatif à découvrir des auteurs restés pour nous dans l'ombre que le soleil des médias fait plus menaçante pour la « vraie » littérature que peu de revues engagées sont prêtes à défendre actuellement. On peut regretter que théâtre et poésie soient exclus de la littérature, mais le titre de l'ouvrage précis : romans et récits, dont acte.
La seule réserve tient au classement en trois groupes des auteurs analysés, dont l'énoncé du regroupement est lui-même un peu confus :inflexion des oeuvres modernes pour les avant-gardistes déjà classiques, mais beaucoup sont dans la continuité d'un style qui définit justement la littérature, invention de formes et enjeux contemporains, dont l'invention n'apparait pas toujours, et enfin le troisième groupe des « meilleurs espoirs, intitulé :innovations et variations. Il reste à écrire un ouvrage dégageant en surplomb les grands courants de cette époque, mais est-ce déjà possible ?ou de faire part, pourquoi pas des coups de coeur, mais il faut reconnaitre que là beaucoup s'y sont déjà employés, reste à savoir ceux dont nous partageons les élans du coeur.
Au total, un excellent document de travail et d'enseignement, qui aurait plus été servi par un index que par un classement, et une réserve de bonnes adresses pour ceux qui aiment voyager en littérature.