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Citations sur Bartleby et Compagnie (22)

De ce croisement entre le Célibataire de Kafka et le copiste de Melville naît un être hybride que je suis en train d'imaginer, que j'appellerai Scapolo (célibataire en italien) et qui n'est pas sans parenté avec cet animal singulier - "mi chaton, mi agneau" - que Kafka avait reçu en héritage.
Sait-on aussi à quoi s'en tenir à l'égard de Scapolo ? Eh bien je dirais qu'un souffle de froideur émane de l'intérieur de son être, d'où on le voit passer la tête par le côté le plus triste de son double visage. Ce souffle de froideur lui vient d'un désordre inné, incurable, de l'âme. Un souffle qui le met à la merci d'une pulsion négative extrême, laquelle le conduit à toujours prononcer un NON retentissant que l'on dirait dessiné en majuscules dans l'air tranquille d'un quelconque dimanche après-midi de pluie.
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La littérature, quelque passion que nous mettions à le nier, permet de sauver de l'oubli tout ce sur quoi le regard contemporain, de plus en plus immoral, prétend glisser dans l'indifférence absolue.
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La présence du Keats visionnaire de la dissolution du moi (alors que ce n'était pas encore un lieu commun) est presque palpable dans les pages centrales de La mort de Virgile, où le héros moribond, persuadé d'avoir échappé à l'informe, voit l'informe fondre de nouveau sur lui, non comme l'indistinct des origines du troupeau, mais tout immédiat, presque tangible, même, comme le chaos d'une individualisation, une dissolution que ni l'attention, ni la rigidité ne sauraient restituer à l'unité : "Le chaos démoniaque de chaque voix isolée, de toute connaissance et de toute chose, ce chaos l'assaillait maintenant, il en était la proie. Oh, chacun est sous la menace des voix indomptables et de leurs tentacules, du ramage des voix, des voix branchues qui l'emmêlent dans leur emmêlement, qui croissent subitement chacune dans une direction différente puis s'emmêlent à nouveau, démoniaques dans leur individualisation, voix d'une seconde, voix de mille ans, voix qui s'entrelacent à la trame du monde, à la trame des âges, incompréhensibles et impénétrables dans leur rugissante mutité."
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Kafka parvient toujours à me surprendre. Aujourd'hui, en ce premier dimanche d'août, dimanche humide et silencieux, Kafka a encore réussi à m'inquiéter et en a impérieusement appelé à mon attention par ce texte, où il laisse entendre que de se marier comporte une condamnation au mutisme, à aller grossir les effectifs des Négatifs et, plus impressionnant encore, un risque de devenir chien.
Il m'a fallu interrompre il y a quelques instants mon journal en raison d'une forte migraine, un mal de Teste, comme dirait Valéry. L'irruption de cette douleur est très probablement due à 'l'exercice d'attention' auquel vient de me contraindre Kafka avec sa théorie inattendue de l'art négatif.
Il n'est pas inutile de rappeler ici, en effet, ce que suggérait Valéry, à savoir que le mal de Teste a, en quelque manière fort complexe, partie liée avec la faculté intellectuelle de l'attention. Il y a là une notable intuition.
Peut-être cet exercice d'attention m'a-t-il conduit à évoquer une figure de chien, peut-être a-t-il quelque chose à voir avec mon mal de Teste. Maintenant qu'il est passé, je pense à ma douleur vaincue, et je trouve extrêmement agréable cette sensation que nous éprouvons à la disparition du mal, parce que nous assistons là à une reprise de la représentation du jour où pour la première fois nous nous sommes sentis vivants, nous avons eu cette conscience d'être humain, né pour mourir mais vivant en cet instant. (p.148)
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Nous avons tous un livre en nous, peut-être un grand livre, mais qui n'émerge que rarement du tumulte de notre vie intérieure.
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Tout demeure et tout change, et les choses de toujours redeviennent mortelles dans leur nouveauté, qui passe extrêmement vite.
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C'est encore écrire que d'écrire que l'on arrive pas à écrire.
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Chamfort alla si loin dans la voie du Refus que, le jour où il se crut condamné par la Révolution française, il tira un coup de pistolet qui lui brisa le nez et lui creva l’œil droit. Toujours en vie, il revint à la charge, saisit un couteau, s’égorgea et se poignarda. Baignant dans son sang, il remua encore son arme dans sa poitrine et, après s’être tailladé mollets et poignets, s’effondra dans une véritable mare.
Mais, tout cela n’est rien à côté de la sauvage désintégration de son esprit.
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Julio Ramon Ribeyro - écrivain péruvien d'une discrétion toute walsérienne, toujours à écrire sur la pointe des peids pour ne pas se heurter à sa propre pudeur ou pour éviter de se heurter, qui sait, à Vargas Llosa - a longtemps nourri ce soupçon, bientôt devenu conviction, que beaucoup de livres, même inexistants, relèvent bel et bien de l'histoire du Refus. Ces livres fantômes, ces textes invisibles seraient ceux qui un beau jour viennent frapper à votre porte et qui, alors qu'on s'apprête à les recevoir, s'évanouissent sous le prétexte le plus futile; a peine ouvre-t-on la porte qu'ils ne sont déjà plus là. Partis. C'était sûrement un grand livre, ce grand livre qu'on portait en soi, celui qu'on était réellement destiné à écrire, le livre, le livre qu'on ne pourra plus jamais écrire ni lire. Mais ce livre existe, que personne n'en doute, est comme en suspension dans l'histoire des Arts Négatifs.
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Alors, inévitablement, je me trouve comique. Parce qu’il y a quelque chose de comique à prendre conscience de sa propre solitude en s’adressant à quelqu’un par des voies qui vous empêchent précisément d’être seul.
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