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Critique de nadejda


Ces mémoires entraînent dans une longue méditation sur la peinture ce qu'elle devrait être, ce qu'elle représente pour Balthus : lumière et prière.
La lumière avant toute chose et l'espérance à chaque touche du pinceau, "apprivoiser le mystère" dans la lenteur du temps, le silence. Il prend le temps qu'il faut pour achever un tableau. Il sait en le contemplant quand il doit s'arrêter mais cela peut prendre parfois des années.
"Chaque matin, je regarde l'état de la lumière. Je ne peins que dans la lumière naturelle, jamais dans la lumière électrique, seulement celle qui change avec les mouvements du ciel, ondoie, moire et organise le tableau." p 45

"J'ai souvent pensé que la plus grande qualité, la plus belle vertu, était de se taire, de faire silence. je n'ai jamais interprété mes tableaux, cherché à comprendre ce qu'ils pouvaient signifier. Et d'ailleurs doivent-ils forcément signifier quelque chose ? C'est pourquoi j'ai si rarement évoqué ma vie, trouvant inutile de la raconter. Plutôt que de m'exprimer, c'est d'exprimer le monde par la peinture qui m'a toujours occupé." p 53
Et c'est ce qui fait tout l'intérêt de ces mémoires. Balthus ne raconte pas sa vie. Il parle de ses amis, Giacometti, Picasso, de sa mère Baladine, dernière muse de Rilke, mais sur le ton de la confidence, en douceur et avec réserve. Il nous dit aussi ce qu'il rejette dans la peinture moderne, sa séparation d'avec la nature, son oubli de ceux qui ont précédé, les anciens qui lui ont tout appris comme Piero della Francesca ou Poussin.
Il aime aussi la musique, plus particulièrement son cher Mozart :
p 156 "Écouter Mozart comme on prie aussi parce que son chant a su capter les vibrations secrètes du monde. En peinture, la même grâce doit habiter l'artiste. La même quête d'harmonie."
Les écrivains, Albert Camus, Maurice Blanchot, Henri Michaux ou Artaud, des cinéastes comme Fellini, "Tous les deux nous voulions traverser, franchir, et on revient toujours à ce mot, atteindre." p 144
La liste est longue de tous ceux qu'il a admiré et aimé.
Ces "mémoires" sont d'une grande richesse car elle font revisiter tout l'art du XXème siècle à travers le regard d'un homme qui s'efforce d'être sincère et s'incline humblement devant le mystère et l'exigence auxquels il a subordonné sa vie : la peinture
Et nous dit-il , en s'inscrivant dans la lignée des maîtres siennois dont il respecte les méthodes, "Le temps vaincu : n'est-ce pas peut-être la meilleure définition de l'art ?"
C'est une belle leçon de vie, secrète et intense, que nous offre là cet homme dont j'ai plaisir à prononcer et écrire son beau nom : Balthazar Klossowski de Rola
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