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Didier Pemerle (Autre)
EAN : 9782266015943
Pocket (09/09/1998)
3.37/5   57 notes
Résumé :
Des enfants « différents » reçoivent un enseignement « différent », apprennent un langage « différent » sous la direction du linguiste Chris Sole.
Quelque part en Amazonie, les Xemahoa conservent le secret d'un langage sacré, le langage « enchâssé » qu'ils ne perçoivent et comprennent que sous l'emprise d'une drogue spéciale.
Dans le désert du Nevada, Russes et Américains accueillent les premiers extra-terrestres, les Sp'thra. Portés par... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (10) Voir plus Ajouter une critique
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Une lecture agréable et assez prenante, mais je reste déçu au final.

Sur le plan de l'écriture, pas grand-chose à redire. le style est propre, du début à la fin. du moins pour ce que le passage de la traduction laisse en percevoir. Si j'avais un seul reproche : la surabondance des figures de comparaison, de personnification et autres métaphores. Ian Watson est-il un maître de l'analogie ? Peut-être. Un mordu ? Sans doute. Un extrait sera plus parlant : « Sur son passage, les mottes de terre tordaient en sourires de gargouilles leur visage de nains contrefaits. le bleu du ciel à travers les branches décharnées était le vitrail d'une cathédrale, l'éventail de plumes d'un paon qu'on aurait déployé pour courtiser le néant ». Et c'est comme ça tout le roman ! Au-delà de la prouesse et du talent purement littéraire, cette accumulation a fini par peser sur ma lecture, la rendant un peu plus lourde et plus difficile qu'elle n'aurait dû l'être.

Côté scénario et personnages, pas de réel problème, là non plus. Comme on l'apprend dans le quatrième de couverture, nous suivons deux trames – parfois trois – en même temps, et l'action s'enchaîne naturellement. Les personnages, sans être marquants, sont relativement crédibles.

C'est sur le contenu et le thème annoncé que je suis resté sur ma faim. Ayant quelques connaissances en linguistique et en Traitement du Langage Naturel (une spécialité de l'IA), j'étais assez curieux du tour qu'allait prendre l'histoire ! Malheureusement, les développements m'ont paru un peu trop légers. Peut-être est-ce dû à l'idée maîtresse du roman, l'enchâssement, qui se trouve être un concept relativement classique et basique, bien que puissant, dans la théorie des langages. J'aurais aimé davantage d'illustrations concrètes : en dehors de l'exemple des comptines ou celui des poupées russes, peu de choses. le narrateur-spécialiste décrit bien quelques liens en rapport avec la structuration de la mémoire (temporalité et spatialité), mais à ce niveau cela reste un peu abstrait pour un lecteur lambda à mon avis. Il aurait été utile de décrire quelques expériences concrètes. D'autant que l'univers – avec son laboratoire de recherche – s'y prêtait particulièrement. le développement le plus poussé apparait lors de la dernière envolée, mais son revêtement spirituel et métaphysique m'a déplu.

Alors, plutôt que d'exploiter en profondeur cette notion d'enchâssement du langage, on comprend assez vite que l'auteur a préféré une approche plus indirecte, créant plusieurs trames concomitantes qui, toutes, explorent à leur façon ce concept. Pourquoi pas après tout. Cette approche a le mérite d'apporter dynamisme, suspense et questionnements en s'appuyant sur des mécanismes scénaristiques éprouvés. C'est bien fait d'ailleurs. Seulement, alors, j'aurais souhaité que les trames se rejoignent davantage à la fin, que les unes soient des clés pour les autres en quelque sorte. Peut-être est-ce le cas… Je laisse les futurs lecteurs se forger leur propre opinion !

Autre aspect qui m'a interpellé : le message. Si, au cours de la narration, on perçoit peu à peu des idées que développe l'auteur, toutes finissent par perdre en valeur, au fur et à mesure que les personnages qui les portent sont discrédités par sa plume. Et cela se produit jusqu'à la toute fin, c'est assez amusant ! Rétrospectivement, ce roman m'apparait comme un rouleau – une vague déferlante pour rester dans l'univers – de critiques n'épargnant rien ni personne ! Pour le coup, c'est très bien fait (par exemple le point de vue sur/de plusieurs personnages évolue). Mais que reste-t-il alors comme message clair en dehors de l'intérêt en soi de la notion d'enchâssement ?

Enfin, j'ai relevé quelques défauts de moindre importance : situations ou comportements parfois peu crédibles ; femmes peu mises en avant (et quand elles le sont, le résultat n'est pas particulièrement valorisant à leur endroit) ; quelques personnages parfois trop détaillés alors qu'ils sont délaissés par la suite.


Note sur l'édition (Le Bélial) : elle incorpore une préface de l'auteur et une postface très intéressantes, une vraie valeur ajoutée ! Apparemment cette édition bénéficie également d'une nouvelle traduction, qu'on peut supposer meilleure. L'illustration de couverture est certes jolie, mais son évocation un peu trompeuse...
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Paru en 1973 (c'est d'ailleurs le seul ouvrage vraiment réputé de cet auteur), l'enchâssement est une véritable réussite, le genre d'ouvrage d'une densité et d'une complexité comme on n'en rencontre plus aujourd'hui. Il fait partie de ses ouvrages qui paraissaient dans les années 1970 et qui boulversaient à chaque fois les schémas classiques de la SF, comportant une idée toutes les 2 pages...

Pour le genre, c'est un mix entre ethnologique-fiction, étude du langage, métaphysique, politique et rencontres du troisième type... Ici, trois histoires se déroulent en parallèle - pour bien sûr se retrouver sur la fin.

L'enchâssement (ou langage enchâssé) est, pour ceux que ça intéresse, un langage inventé par l'auteur français Raymond Roussel dans son ouvrage "premières impressions d'Afrique", ouvrage entièrement écrit de façon enchâssée (Ian Watson nous donne un exemple de phrase enchâssée :
- phrase normale : le chien a mordu le chat qui a chassé le rat qui a mangé le riz
- phrase enchâssée : ((((le chien le chat le rat le riz )a mordu ) qui a chassé ) qui a mangé )

Le but de ce langage est d'arriver à capter plus facilement la réalité, notamment en ce qui concerne le temps (un autre exemple donné par Watson est celui-ci : "je suis en train de parler". Cette phrase, nous explique-t-il, est grammaticalement correcte mais fausse car le temps de la prononcer, l'action soit-disant présente que l'on cherche à décrire est déjà passée ; le langage enchâssé doit permettre de lutter contre cela).

Un roman d'une richesse incroyable, le genre de roman dont les auteurs actuels devraient selon moins plus souvent s'inspirer... un véritable réussite.
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Résumé : Ma lecture de L'Enchâssement a été un peu particulière. Au final j'ai passé un bon moment de lecture, emporté principalement par le travail effectué sur le langage ainsi que toutes les idées qu'il soulève. Proposant des notions vraiment riches sur l'important de celui-ci dans la compréhension de l'univers, ces contraintes, mais aussi sa capacité de nous élever, de nous améliorer. Il nous fait aussi réfléchir sur la notion de science, l'utilisation des drogues ou bien encore sur la capacité humaine à s'entredéchirer. Sauf que voilà autant les axes de réflexion et les idées développées, même si parfois ne sont pas parfaites où on un peu vieilli, sont captivantes, j'ai trouvé l'intrigue un peu faible. Comme si elle n'était là que pour offrir un cadre aux concepts présentés. Pour autant l'idée de départ est intéressante, même si classique, mais voilà entre les coïncidences trop faciles, les passages traités trop rapidement et parfois le manque de densité je me suis senti légèrement frustré. de même les personnages présentés m'ont paru un peu distant et froid, ce qui est dommage pour un roman traitant du langage et donc d'une certaine façon de l'échange, du contact et certains dialogues m'ont paru mal amenés. Après l'intrigue possède aussi de très bons passages, comme certaines manipulations ou certains aspects mystiques. Au final une bonne lecture, pas obligatoirement la claque annoncée par le statut du livre, mais un récit intelligent bien porté par une plume simple et efficace.


Retrouvez la chronique complète sur mon blog.
Lien : http://www.blog-o-livre.com/..
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Trois trames initiales: tout d'abord Chris Sole, chercheur au centre Haddon, qui mène des expériences sur le langage avec des orphelins pakistanais coupés de tout. Ensuite, Pierre Darriand qui étudie sur le terrain, au Brésil, le langage d'une tribu Xemahoa, notamment son caractère enchâssé lorsqu'il est "porté" par le sorcier du village sous l'influence d'une drogue particulière. Et enfin, l'arrivée sur Terre des Sp'thra, extra-terrestres eux-mêmes avides de langues nouvelles pour mener à bien leur quête millénaire.
Au bout du compte tout cela va plus ou moins se recouper, se regrouper et donner l'une des plus célèbres, et rares, fiction-linguistique.
Un roman particulier, ancré dans son époque, comme le souligne l'auteur dans sa préface, mais qui n'a rien perdu de sa force quant à cette réflexion portée sur le langage et la difficile compréhension entre les êtres (au sein d'un couple, entre chercheurs, suivant les idées politiques...), les civilisations (terrestres ou extra-terrestres, bloc est ou bloc ouest, indigène ou chercheur...)...
Les personnages principaux vont être bousculés dans leurs convictions et le développement de l'intrigue réserve des surprises guère réjouissantes.
Et Ian Watson reste toujours très clair, notamment en exposant au mieux les idées et théories qu'il exploite.
Ce livre est aussi un bel hommage à cet auteur à part de la littérature française qu'était Raymond Roussel.
Un grand merci à Babelio pour cette lecture proposée dans le cadre d'une opération Masse critique et à cet éditeur, le Bélial', qui oeuvre de si belle manière pour la SF, pour l'envoi du roman et pour une magnifique édition, parfaite en tous points: couverture de qualité, traduction revue, préface inédite, bibliographie complète et postface éclairante.
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Toutes les préoccupations de ce roman tournent autour du langage et de la communication. Elles sont véhiculées par trois fils conducteurs.
Etude, d'abord, (dé)formation et éducation d'enfants coupés du monde et de la réalité dans un hôpital assez spécial. On essaie de leur inculquer la préhension d'un autre niveau de langage, quitte à les sacrifier en les rendant fous ou inaptes à la vie normale.
Observation, ensuite, d'une tribu d'indiens vivant en Amazonie — les Xemahoa — qui, sous l'effet d'une drogue — le maka-i — , parvient à parier et à comprendre une langue dans la langue ; une langue enchâssée.
Relations, enfin, entre les hommes et les Sp'thra, extra-terrestres qui se disent Changeurs de Signes. Ce peuple de linguistes s'est lancée dans une quête que les terriens trouvent absurde — ils veulent annihiler l'Amour Veuf qu'ils portent aux Diseurs de Change. Ils prétendent chercher à échapper à la Cette-Réalité, c'est-à-dire à se libérer de l'univers dans lequel ils sont « enchâssés », afin d'atteindre l'Autre-Réalité. Quelques cerveaux humains pourraient les satisfaire. C'est alors qu'on leur parle des Xemahoa.
En échange d'une unité cervicale xemahoa, les Sp'thra sont prêts à révéler leurs techniques de voyage interstellaire. Mais la politique — l'affreuse politique terre à terre et bornée — va s'immiscer dans ces négociations vitales, mutilant la communication entre les deux races.
L'enchâssement étonne par son pessimisme. Watson serait-il un écrivain profondément pessimiste ? Peut-être pas... Mais tout de même, la porte qu'il laisse entrouverte est à peine bonne pour les souris.
Pour lui, semble-t-il, les hommes parlent une langue de sourds, Ils ne savent pas écouter. Par contre, ils savent s'écouter. Cette démarche aveugle conduit à un isolement inévitable que l'auteur, dans un registre différent, a déjà mis en scène dans L'Ambassade de l'Espace (Calman-Lévy).
Quel avenir pour l'homme ? Brrr... Je n'ose y penser. Il semble prisonnier pour l'éternité de la Cette-Réalité.
Certes, ce roman laisse apparaître une grande complexité. Mais il constitue également une grande réussite.
A lire, donc, mais surtout à relire.

Éric SANVOISIN
Première parution : 1/1/1986
dans Fiction 370
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Citations et extraits (8) Voir plus Ajouter une citation
La linguistique (...) englobe l'idée selon laquelle une langue influencera la pensée et les idées de ses locuteurs. Ainsi, quelqu'un parlant navajo verra le monde autrement qu'une personne dont le bantou serait la langue maternelle.
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Pour le bruxo comme pour les Xemahoa, la connaissance n'est pas une chose abstraite, mais plutôt codée en terme d'oiseaux et de bêtes, de roches et de plantes en termes de forêts, avec les nuages et les étoiles qui la surplombent, dans les termes mêmes de la réalité donnée, concrète. C’est pourquoi la description globale de cette connaissance n'est pas une opération abstraite ,mais une mainmise sur la réalité factuelle qui les entoure. Cette appréhension de la réalité revient à contrôler, par là, à manipuler. C’est du moins ce qu'il espère.
Il va bientôt entreprendre une gigantesque narration enchâssée de tous les mythes de la tribu ainsi codés en cet instant précis de leur histoire, de leur conscience. Jour après jour, au cours de la danse droguée, il accumule les éléments de la signification totale qui doit prendre en charge sa narration, c'est-à-dire qu’il garde présent à l'esprit tout ce qui a été énoncé les jours précédents, qu’il le garde dans le présent éternel de son esprit inspiré par la drogue, malgré la tension terrible qu’en subissent son corps et son cerveau.
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Et c’est à ce moment que s’évanouit le flegme de l’étranger. Il sembla en proie à un changement étrange. Comme un médium entrant en transe, il énonça, avec une sorte de lyrisme :
- La Leur-Réalité, la Notre-Réalité, la Votre-Réalité, tous ces concepts mentaux, fondés sur l’environnement au sein duquel s’est déroulée l’évolution, présentent tous de légères différences mais sont tous partie intégrante de la Cette-Réalité, ou totalité exhaustive de l’univers présent…
L’emphase avait propulsé sa voix dans les aigus.
- Mais il existe assurément en dehors d’elle une Autre-Réalité et c’est elle que nous voulons saisir !
Ses paupières clignaient rapidement et sa langue, plus reptilienne qu’autre chose en cet instant, passait et repassait sur ses lèvres.
- Il y a tant de façons d’envisager la cette-Réalité, et de tant de points de vue. Ce sont ces points de vue qui sont l’objet de notre négoce. En un autre temps, vous auriez sans doute appelé cela la traite des réalités…
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Est frère celui qui se conduit en frère.
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L'univers lui-même est en proie au cannibalisme; l'existence elle-même est une forme d'exploitation.
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Video de Ian Watson (1) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Ian Watson
L'interview de l'auteur de science fiction Ian Watson (L'Enchâssement, le Bélial' ), pendant l'Eurocon qui s'est tenue du 19 au 23 juillet 2018 à Amiens.
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