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Critique de Choupaille


Voici des décennies que la NASA a conquis Mars grâce au programme Arès dont la troisième expédition occupe Acidalia Planitia. L'équipage surentraîné largué sur place a pour but de collecter quantité d'échantillons permettant une meilleure approche de l'histoire géologique de la planète rouge. L'arrivée d'une tempête inattendue abrège cependant la mission : pour Mark Watney, c'est retour sur Terre imposé. Hélas Mark est malmené par les vents martiens et perd le contact avec ses compagnons. Présumé mort, le véhicule d'ascension martienne décolle sans lui. Livré à lui même sur une planète où rien ne vit, Mark devra déployer des trésors d'ingéniosité pour se tirer de ce très mauvais pas et faire savoir au monde voisin qu'il est vivant.

Et parler de trésors d'ingéniosité, justement, c'est pas démérité. Mark Watney c'est le plus beau, c'est le plus fort : donnez-lui un couteau suisse et de l'eau gazeuse et il vous bricole vite-fait un hélicoptère last generation ; bref, Mark c'est le MacGuiver de Mars à la différence que lui est bardé de diplômes et bourré d'idées folles. Et c'est pas plus mal remarquez, parce que des idées folles, il va lui en falloir des tas pour régler la tonne de problèmes qui lui tombe dessus, à commencer par ses copains qui se font le malle sans lui - pas de bol, ça. Qu'à cela ne tienne, Mark a quand même pas mal de ressources matérielles sur place : en bons campeurs civilisés les astronautes de la NASA laissent derrière eux tout leur bardas depuis des années, rovers, habitat high-tech et carburant excédentaire compris. Avec ses mimines habiles, son sens de l'auto-dérision légendaire et ses diplômes d'ingénieur-botaniste, Mark va faire pas mal d'étincelles dans nos coeurs (évidemment) et même jusqu'à la NASA où oups, on va se rendre compte de l'immense boulette qu'on a commis ... et commencer à creuser pour ramener Robinson Crusoé vivant à la maison. Question de relations publiques, bien entendu - la mort ça fait mauvaise presse.

Sauf qu'aller sur Mars, ça se fait pas en claquant des doigts. On a beau avoir un roman de SF entre les mains, Andy Weir a le souci du détail et place son récit dans un cadre certes futuriste (je suis effectivement au regret de vous apprendre qu'on a encore envoyé personne sur Mars, désolée), mais pas tellement over-cheaté niveau technologique. Les voyages dans l'espace à la Star Wars ne sont pas encore d'actualité, la 4G porte pas dans l'espace et l'électronique en fait des siennes : la base du XXIe siècle, mais sur Mars. Ainsi donc Andy Weir ne se facilite pas la tâche et joue à fond la carte du réalisme. Ça passe par énormément de vulgarisation et de débrouille, mais avec un peu de concentration on suit Mark Watney dans ses plans fous. J'ai apprécié d'avoir affaire à de la SF en phase avec son temps - comme quoi les bonnes histoires, faut pas forcément les chercher au millénaire suivant ! La science c'est joli et ça permet beaucoup quand on sait s'en servir (« it works, bitches ! »), toutefois c'est limité par des lois universelles qu'on a pas encore appris à contourner à l'époque où Watney s'envole vers Mars - le vrai charme de Seul sur Mars, il est là.

Seulement voilà, pour moi, l'histoire de Mark c'est une bonne histoire, mais sans plus. Sauter d'un problème à sa solution avant d'en attaquer un nouveau, puis encore un, puis encore un ... après quatre cents pages, j'ai fini par trouver ça un peu longuet et répétitif - même avec Mark le rigolo aux commandes du récit relativement court. Quand c'est pas les patates martiennes qui manquent d'eau, c'est les panneaux solaires qui tombent en rade ou bien la station d'épuration portative qui fait des siennes et Dieu seul sait quoi encore. Pour un roman qui expose avec brio les grands principes de la loi de Murphy, ruez-vous sur Seul sur Mars mais faites-vous malheureusement une raison : pour la surprise, ça ne se passera pas ici puisque tout tourne (presque) toujours mal - et ça c'est à la fois la force et la faiblesse du roman. A force de constamment tomber sur une couille dans le pâté on n'attend plus vraiment de surprise ; j'aurais moi aimé avoir droit à quelques bribes de la vie de Watney avant Mars pour aérer tout ça.

Andy Weir m'a cependant à moitié entendue puisqu'entre les entrées quotidiennes du journal de bord de Watney, il est venu glisser des chapitres concernant la NASA ou l'équipage d'Arès 3. Ceux-là sont les très, très bienvenus et cassent un peu la monotonie ; ça fait du bien !

En plus d'être un roman bien exécuté, Seul sur Mars c'est aussi un film qui a eu son petit succès et que j'ai encore regardé y a pas si longtemps - là dessus je vous apprends rien. Seulement dans l'éternel débat des adaptations ciné de grands bouquins, Seul sur Mars risque de ne pas faire couler beaucoup d'encre : l'un et l'autre sont terriblement en phase, l'image et le papier restituent la même histoire à une ou deux mésaventures près et à choisir, je suis pas sûre de me tourner vers le roman : pour une histoire pareille, je trouve personnellement que le format ciné passe carrément mieux, sans doute parce qu'à l'inverse de quatre cents pages de déconvenues, de blagues et de tension, on ramasse ça en deux heures bien plus efficaces. le seul véritable regret que me pose le film, c'est d'avoir influencé la ligne éditoriale du roman au point d'imposer à des milliers de lecteurs la tête de Matt Damon sur leur table de chevet - mais bon, j'imagine que certains s'en plaignent pas trop, a-ha ! Il n'empêche je conseille malgré tout cette lecture aux non-initiés de la SF, qu'ils veuillent aller plus loin par après ou juste tâter un fois du pied un peu de rouille martienne. L'aventure vaut le détour !
Lien : https://la-choupaille-lit.bl..
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