Herbert Georges Wells, plus qu'un précurseur, est un des pères fondateurs de plusieurs des grands thèmes de la science-fiction moderne.
Il n'est donc pas original de lui concéder ici les voyages dans le temps, les invasions extra-terrestres, les tripatouillages génétiques, les voyages dans l'espace, l'invisibilité et la gravitation universelle.
Mais l'on oublie généralement la prospective dans cette longue et passionnante liste.
Mais prospective n'est pas futurologie !
"Prédire le futur, c'est le modifier" , écrira Wells en 1916 dans "l'Europe de demain (what is coming)".
En effet, Wells distinguait soigneusement la prospective du roman utopiste ou d'anticipation.
Et, c'est bien de prospective dont il s'agit dans "
la destruction libératrice".
Car dans ce livre écrit à la veille de la première guerre mondiale,
H.G. Wells déjà se projette dans un monde qui verra éclater la seconde.
"
La destruction libératrice" est un ouvrage que jusqu'à cette réédition, on citait parfois mais que l'on ne lisait plus.
Que voulez-vous le web a repris les plus vilains défauts du mondain.
Il cite souvent sans avoir lu !
La préface, brillante et éclairée, est signée par
Tristan Garcia.
Elle est à ne pas manquer.
"
La destruction libératrice", parue en 1914 aux éditions Macmillan & Co de Londres sous le titre original de "the word set free", et pré-publiée dans English Revue de décembre 1913 à mai 1914, est à peine un roman.
Quelques personnages romanesques donnent le change.
Ils aident à la généralisation par le détail.
Mais l'essai est patent.
Il est plein de toute la pensée de Wells.
Il est sous tendu par cette persistante idée chez
Wells D attribuer à l'humain un caractère global de néoténie.
Autrement dit l'homme est inachevé.
Il n'est pas fini !
Car c'est cela le propos principal du livre, remonter le temps du grand drame de l'histoire de l'espèce humaine, et y faire la démonstration qu'il reste encore à l'homme de devenir humain.
Ce livre est étonnant et passionnant.
Il est social, politique et philosophique même.
Il est pacifiste, mondialiste et quelque peu subversif.
"Le monde fait le pitre avec l'attirail guerrier et les prétentions nationalistes" écrit ici
H.G. Wells.
Il est teinté aussi d'un certain pessimisme.
Wells s'y demande, et pose la question :
"l'homme n'est-il, en fin de compte, qu'un animal voué à l'échec et qui, jusqu'à la fin des temps, n'arriverait jamais à influencer son destin et à le plier à ses désirs ?"
Cependant la lecture de l'ouvrage est un peu exigeante et demande de l'attention.
Ce qui est pour le moins un minimum lorsque l'on va découvrir le monde futur d'hier ...