10 lecteurs seulement sur Babelio, du coup aujourd'hui, j'ai envie de vous parler de ce livre !
Ouvrir ce livre, c'est d'abord une aventure, qui éveille la curiosité pour l'inconnu bien sûr, le Grand Nord, mais le fermer, c'est réaliser par un exemple très CONCRET que la terre et certains peuples sont bel et bien en danger ( modifications climatiques, exploitation de ressources énergétiques ) et que nos consciences alertées régulièrement sont fainéantes.
Astrid Wendlant, journaliste franco-canadienne, nous livre le récit de ses mois passés en compagnie des Nenets, dernier peuple nomade vivant dans le grand nord sibérien, elle tente de comprendre comment 43 000 individus ont réussi à survivre, aux conditions de vie extrêmes certes, mais surtout aux persécutions tsaristes, puis soviétiques,et aux tentations du monde moderne.
On partage ses découvertes, mais aussi ses émotions au contact de ce peuple et de cette nature hostile mais magnifique.
Comme elle nous le dit elle-même en introduction : " Peut-être ai-je abordé ici à l'une des dernières contrées, où la mystique tient encore son rang et où les hommes, la nature et les bêtes n'en ont pas fini de cette conversation commencée dans la nuit des temps. "
Avant tout, ce livre est un témoignage fort et sensible, pour faire sortir de l'ombre ce peuple singulier qui à réussi à préserver ses coutumes ancestrales sans perdre son âme comme les inuits, mais qui est aujourd'hui en danger du fait que son territoire se trouve sur le plus grand gisement de gaz au monde.
Vous aurez compris les enjeux liés à ce territoire sans plus de commentaires.
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Au bord du monde, c'est le récit d'un voyage initiatique en Sibérie, dans le pays des Nenets. Astrid, journaliste franco-canadienne, va parcourir la toundra en compagnie de représentants de ce peuple nomade et va partager leur vie quotidienne sous le tchoum (habitat nenet). Elle comprendra pourquoi la culture nenet n'a pas été engloutie par les tsars et plus tard par les tsars rouges..
On découvre tout un monde de croyances et notamment les mondes parallèles que connaissent les chamans.. Il en existe encore et la narratrice aura le privilège de les rencontrer plusieurs fois.. Enfin c'est l'enfer des camps de déportés qui apparaît, déportés dans les années 30, dont beaucoup après avoir été employés de force à des travaux gigantesques ne sont jamais revenus... Un très beau récit d'un écrivain voyageur qui n'a pas froid aux yeux!!! (par _ 50 degrés, il vaut mieux!) (astrid wendlandt robert laffont)
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Au bord du monde, c'est le récit d'un voyage initiatique en Sibérie, dans le pays des Nenets. Astrid, journaliste franco-canadienne, va parcourir la toundra en compagnie de représentants de ce peuple nomade et va partager leur vie quotidienne sous le tchoum (habitat nenet). Elle comprendra pourquoi la culture nenet n'a pas été engloutie par les tsars et plus tard par les tsars rouges..
On découvre tout un monde de croyances et notamment les mondes parallèles que connaissent les chamans.. Il en existe encore et la narratrice aura le privilège de les rencontrer plusieurs fois.. Enfin c'est l'enfer des camps de déportés qui apparaît, déportés dans les années 30, dont beaucoup après avoir été employés de force à des travaux gigantesques ne sont jamais revenus... Un très beau récit d'un écrivain voyageur qui n'a pas froid aux yeux!!! (par _ 50 degrés, il vaut mieux!) (astrid wendlandt robert laffont)
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Salekhard est la seule ville du monde située exactement sur le cercle polaire. Ici, on dîne au restaurant Le Nord, on fait ses courses à L’Ours Polaire et les visiteurs dorment à l’hôtel Arktika, construit par des Canadiens. Le réseau de téléphonie local s’appelle Yermak, du nom du héros des premières conquêtes sibériennes, à la fin du XVIème siècle.
Vladimir Ilitch Oulianov est toujours là, debout, sur la place, en costume, une page de discours à la main, une couronne de fleurs fraîchement déposée au bas de son piédestal. Lénine a toujours des fidèles.
En 1933, Obdorsk devint Salekhard - « village du cap » en langue nenets. Les nomades y tenaient un lieu de culte. Le sang des rennes sacrifiés coulait sur les berges surélevées pour calmer les esprits. Puis, ce fut le sang des zeks, pour apaiser Staline. Aujourd’hui, ruisselle la sueur des ouvriers du gaz de Poutine. L’énergie du sous-sol a remplacé celle des cieux. Plus besoin de prier les esprits, Gazprom offre un avenir meilleur.
Vladimir continue d’insulter les passants. Il cherche le département des Affaires Agricoles. Une blague ? Ici, rien ne pousse. Non, ce département existe vraiment. Nous le trouvons après quatre heures de marche. Vladimir demande un certain Babin, vice-gouverneur de la région, responsable de l’élevage de rennes. Il connaît toutes les routes de migration des nomades par coeur. Babin, un petit homme aux yeux turquoise, nous reçoit dans son bureau. Vladimir a travaillé avec lui il y a une quinzaine d’années.
« Pourriez-vous me conseiller un bon moyen de voyager dans la toundra ?
-Bien sûr ! me répond Babin. Début juillet, vers le 2 ou 3, nos hélicoptères partent ramasser les bois de rennes dans la région de Panaïevsk. Nous pourrions vous déposer et vous reprendre une semaine plus tard. Cela vous irait ?
-Formidable ! Je vous remercie ! »
Nous avons donc une dizaine de jours pour gagner le gisement de gaz Bovanenkovo en train et revenir à Salekhard pour le rendez-vous de l’hélicoptère de Babin. Vladimir s’oppose à l’idée de cette incursion dans les territoires gaziers. Il pense que nous ne serons jamais rentrés à temps.
« Tu ne sais pas ce qui peut se passer dans la toundra ! On voit bien que tu n’as aucune expérience ! »
Je ne me laisse pas intimider. Vladimir grogne et me suit.
Avant de nous lancer dans la toundra, nous contactons le ministère des Situations d’urgence – l’autorité du dernier recours – au cas où il nous arriverait quelque chose. Le ministère s’occupe des opérations de sauvetage, des crises énergétiques et autres malédictions.
Le chef du bureau local, Vladimir Grégorievich, nous ouvre la porte, un homme bâti comme un boxeur mais sans nez cassé, en marinière et tenue de camouflage. A peine assis dans son bureau, à 9 heures du matin, il nous sert des verres d’eau-de-vie de racines dorées*. Rapicolant cordial. Il me demande qui prévenir en cas de dispariton et nous commande une voiture de milice pour nous mener aux premiers virages de la piste.
* Il s’agit de la Rhodiola Rosea, ou racine arctique, une plante qui aide à combattre le stress et le vieillissement. Sa racine est connue dans la médecine traditionnelle russe pour augmenter l’endurance. En Suède, on affirme que les Vikings lui devaient leur légendaire force physique et, aujourd’hui encore en Sibérie, on offre des racines de Rhodiola aux jeunes mariés. La plante fut « redécouverte » dans les années 1940 par le médecin russe Nicolaï Lazarev. Staline lui avait demandé de trouver les moyens d’accroître la résistance physique et intellectuelle de la population russe. La plante est dite « adaptogène, ce qui signifie qu’elle possède des propriétés régulatrices qui aident l’organisme à s’adapter à différents chocs.
Le point de terre le plus septentrional de notre hémisphère se trouve au bord d'un précipice que l'humanité n'approche pas. Il est bon de marcher le long des parapets. Le désenchantement du monde n'est pas une fatalité. La beauté, la magie et le sacré sont à portée de main.
Je ne suis ici qu'un être vivant parmi d'autres. Une pierre sous un arbrisseau, un roseau dans un marécage. Rien ne compte, rien n'est important. Je ferme les yeux. Je suis chez moi. La toundra n'appartient à personne et personne ne lui appartient. Tout est fluide et fugace comme les bêtes qui paissent et les hommes qui passent.
Les athées détruisent les miracles, les amis les illusions. Il est des mondes où il vaut mieux s'aventurer seule.
P51
Destin du renne : de la puissante toundra aux impuissants chinois. Je m’adresse au patriarche : est-ce que le bois de renne est vraiment un stimulant sexuel?
Non, mais l’essentiel c’est que certains en soient persuadés.
L'Oural en plein coeur - Astrid Wendlandt
Dans "L'Oural en plein coeur" se mêlent deux quêtes, l'une amoureuse, l'autre ethnographique. Passionnée par les peuples en sursis, Astrid Wendlandt se lance sur les traces des derniers...