Les trois premiers chapitres sont, à mon sens, absolument fascinants.
Weyergans nous fait vivre tout à tour le Big Bang, un accouplement et une fécondation humaine de l'intérieur. Vraiment de l'intérieur. Cela donne le vertige. Rien que pour ces pages hallucinantes, le livre vaut le détour!
Le concept est tout aussi étonnant :le narrateur est un foetus. Il détient le savoir de toute l'humanité, voire même de tout ce qui fonde la vie. Il incarne le savoir dans son essence mais il perd ce savoir au fur et à mesure de son développement intra-utérin. C'est un érudit qui perd la mémoire, autrement dit un foetus condamné à devenir un bébé. le prix à payer est sa mémoire extraordinaire qu'il troque contre le bon développement de ses organes.
Il s'intéresse à sa mère, se sent dépendant de ce corps qu'il ne peut contrôler à sa guise. Il tente de la comprendre : « les rapports qu'un foetus entretient avec sa mère sont aussi incomparables que simples: chacun des deux tend à devenir l'autre. » A mesure de son développement, le foetus doit faire appel à l'Autre. Une relation ambigüe s'instaure avec celui qu'il nomme l' « écrivain », qu'il juge trop conventionnel à son goût, pas à la hauteur de son ressenti. Cette dépendance s'amplifie de page en page et marque l'impuissance de l'enfant à naître à contrôler en totalité son environnement dont il n'est pas maître. Comme s'il fallait renoncer pour grandir. Il fait part de ses peurs : craint de ne pas naître, de naître trisomique, etc. On sent que l'auteur y retranscrit ses propres angoisses et questionnements. Pour un auteur qui a écrit un compte-rendu « sarcastique » de sa psychanalyse (in
le pitre- que je n'ai pas encore lue) ce livre me paraît être un terreau éminemment intéressant pour tout psy!
Un sentiment mitigé m'envahit à la fin du livre: les premières pages m'ont paru tellement fulgurantes que le livre ne peut que décevoir quelque peu par la suite. L'émerveillement que j'ai réellement et rarement ressenti au départ s'altère peu à peu et se transforme finalement en un certain agacement face à ce petit être-je-sais-tout.
Les impressions que dégagent ce livre ne peuvent être que particulièrement subjectives -comme toute lecture me direz-vous!-puisque nous touchant intimement par un aspect particulier de notre histoire personnelle, celle de notre origine et de notre désir.
Je reste quant à moi indécise à me forger une impression définitive sur ce livre. le temps le « travaillera » dans ma mémoire et en ce sens, c'est un livre marquant.